justesse [ ʒystɛs ] n. f.
• 1611; de juste
1 ♦ Qualité qui rend une chose parfaitement adaptée ou appropriée à sa destination. Justesse d'un instrument de mesure. Justesse et précision d'une balance.
♢ (Abstrait) ⇒ convenance, correction, exactitude. La justesse d'un raisonnement. Comparaison qui manque de justesse. « La justesse du sentiment général, la vérité de la couleur » (Renan). ⇒ authenticité, vérité.
2 ♦ Qualité qui permet d'exécuter très exactement une chose, et par ext. la manière même dont on l'exécute sans la moindre erreur. ⇒ précision. Justesse du tir. Chanter avec justesse.
♢ Spécialt Qualité qui permet d'apprécier très exactement. Justesse de l'oreille, du coup d'œil. — Justesse d'esprit. ⇒ raison, rectitude. Juger, apprécier avec justesse. « Les enfants apprécient avec une parfaite justesse la valeur morale de leurs maîtres » (France).
3 ♦ Loc. adv. (fin XIXe) DE JUSTESSE : de peu, sans rien de trop. Gagner de justesse. La collision fut évitée de justesse. Il a eu son train de justesse. « Je m'échappai de justesse » (Céline).
⊗ CONTR. Approximation, erreur, faute.
● justesse nom féminin (de juste) Qualité d'un instrument de mesure dont la moyenne des indications qu'il donne pour une grandeur mesurée est très voisine de la valeur vraie de cette grandeur. Qualité d'un mécanisme qui est bien réglé, exact, juste et qui peut ainsi bien remplir sa fonction : Justesse d'une montre. Qualité de quelque chose, en particulier d'une expression, qui convient exactement à son objet : Justesse de ton dans un discours. Qualité d'un organe sensoriel, d'une faculté permettant d'apprécier les choses avec exactitude : Justesse de l'oreille. Manière d'agir, de penser permettant d'atteindre un résultat qui ne présente ni erreur ni écart ; qualité du résultat obtenu : S'exprimer avec justesse. Tir d'une grande justesse. ● justesse (citations) nom féminin (de juste) Théodore de Banville Moulins 1823-Paris 1891 Sans la justesse de l'expression, pas de poésie. Petit Traité de poésie française ● justesse (expressions) nom féminin (de juste) De justesse, de fort peu : Gagner de justesse. ● justesse (synonymes) nom féminin (de juste) Qualité d'un mécanisme qui est bien réglé, exact, juste et...
Synonymes :
- précision
Contraires :
- fausseté
- imprécision
Qualité de quelque chose, en particulier d'une expression, qui convient exactement...
Synonymes :
- propriété
Contraires :
- impropriété
Qualité d'un organe sensoriel, d'une faculté permettant d'apprécier les choses...
Synonymes :
- acuité
- finesse
- sûreté
Contraires :
Manière d'agir, de penser permettant d'atteindre un résultat qui ne...
Synonymes :
- bon sens
- impartialité
- logique
Contraires :
- incohérence
- partialité
justesse
n. f.
d1./d Qualité d'une chose juste, exacte. Justesse d'une balance, d'un appareil de mesure. Justesse d'un raisonnement.
|| Qualité de ce qui est tel qu'il doit être, parfaitement approprié, adéquat. La justesse d'une expression.
d2./d Qualité de ce qui permet de faire une chose avec précision, exactitude. Justesse du coup d'oeil.
d3./d Loc. adv. De justesse: de très peu. On a évité la catastrophe de justesse.
⇒JUSTESSE, subst. fém.
Fait d'être juste; qualité de ce qui est juste.
A. — [Correspond à juste I A 2 b] Rare. Qualité de ce qui est justement fondé. Elle était trop loyale pour ne pas reconnaître la justesse de ce reproche (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 321).
B. — [Correspond à juste I B 1] Conformité d'une réalisation à son objet, sans excès ni défaut.
1. [En parlant des manifestations de l'activité intellectuelle] Ce raisonnement (...) ne manquait pas de justesse! (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 3, 1859, p. 470). M. Benjamin Crémieux a publié (...) sur le roman psychologique français (...) quelques pages qui sont une merveille de clarté, de justesse (LÉAUTAUD, Théâtre M. Boissard, 1943, p. 354) :
• 1. L'étonnant est de ressentir parfois l'impression de justesse et de consistance dans les constructions humaines — faites de l'agglomération d'objets apparemment irréductibles — comme si celui qui les a disposés leur eût connu de secrètes affinités.
VALÉRY, Variété [I], 1924, p. 248.
SYNT. Justesse d'un adage, d'un argument, d'un axiome, d'une comparaison, d'une critique, d'un diagnostic, d'une définition, d'une doctrine, d'une explication, d'une hypothèse, d'une idée, d'un jugement, d'une objection, d'une observation, d'un principe, d'un pronostic, d'une remarque; justesse d'une expression, d'un mot, d'un terme; justesse de notation, de style, de ton, de touche; absence, manque de justesse.
a) Justesse + adj.
— [L'adj. exprime une qualité] Grande, incontestable, profonde justesse; justesse absolue, aiguë, exquise, extrême, frappante, parfaite, relative, rigoureuse :
• 2. ... il y a chez Keats ce miracle que, surpassant toujours la justesse stricte — tel par exemple que le canon du grand art verbal français le pose, (...) toujours il rencontre ce que l'on pourrait appeler la justesse idéale. (...) chez lui le plus ne devient (...) jamais un trop...
DU BOS, Journal, 1923, p. 236.
— [L'adj. exprime une relation] Justesse intellectuelle, psychologique. [Carrière] fait sortir la poésie de la vérité, l'éloquence de la justesse expressive (SÉAILLES, E. Carrière, 1911, p. 77).
b) Verbe + justesse. Contester, nier, prouver, reconnaître la justesse de qqc; convenir, être convaincu de la justesse de qqc. Cf. aussi infra D 1 :
• 3. ... si la philosophie hégélienne de l'histoire refuse de garantir la vérité (...) du dogme de la providence, elle s'engage à en démontrer la justesse...
GILSON, Espr. philos. médiév., 1932, p. 192.
2. [En parlant des manifestations de l'affectivité, du comportement dans la vie ou sur la scène] Justesse de déclamation, de diction; justesse d'une inflexion de la voix. La vivacité, la force et la justesse des élans vers le but indiqué, sont les éléments qui (...) forment (...) le taux intrinsèque de l'homme, et déterminent sa valeur (JOUBERT, Pensées, t. 1, 1824, p. 161). Elle ne leur concédait qu'une amabilité fournie par un sens mondain d'une justesse ancestrale et parfaitement fondue à sa substance (MALÈGUE, Augustin, t. 2, 1933, p. 64) :
• 4. On aurait cru vraiment que la justice couchait avec moi tous les soirs. Je suis sûr que vous auriez admiré l'exactitude de mon ton, la justesse de mon émotion, la persuasion et la chaleur, l'indignation maîtrisée de mes plaidoiries.
CAMUS, Chute, 1956, p. 1482.
3. BEAUX-ARTS. Conformité à la nature, à une norme esthétique, à un modèle. Justesse du trait, de l'effet, de la perspective, des plans, des valeurs. Un coloriste proprement dit est un peintre qui sait conserver aux couleurs de sa gamme (...) leur principe, leur propriété, leur résonnance et leur justesse (FROMENTIN, Maîtres autrefois, 1876, p. 310). Barye l'emporte sur Delacroix par la science anatomique et la justesse des attitudes (L. RÉAU, Art romant., 1930, p. 138) :
• 5. ... une longue façade plate, sans autres ornements que l'ordonnance des lignes, la justesse des proportions, et le fronton central, dont le triangle clair se découpe sur le haut toit d'ardoises.
MARTIN DU G., Notes Gide, 1951, p. 1384.
C. — [Correspond à juste I B 2; avec une idée de rigueur excluant l'approximation] Exactitude, précision. M. Bonneau recommença ses calculs (...), pour vérifier la justesse de ses mesures (CHAMPFL., Bourgeois Molinch., 1855, p. 134). — Au seizième siècle, observa Bossuet, on rayait les canons. — Oui, répondit Combeferre, cela augmente la puissance balistique, mais diminue la justesse de tir (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 439) :
• 6. Il avait cinquante-deux ans (...). Sa force et la justesse de son coup de cognée étaient celles d'autrefois. Il bêchait comme un jeune.
R. BAZIN, Blé, 1907, p. 92.
— MUS. Conformité aux règles de l'harmonie musicale. Justesse harmonique; justesse d'un accord, d'une cadence, d'une intonation, d'un son, d'une voix; justesse des consonances, des intervalles; justesse d'exécution. La justesse d'une note ne se critique pas, on ouvre l'oreille et l'on en a de suite conscience (FLAUB., 1re Éduc. sent., 1845, p. 252). Pour les tierces, nous débuterons (...) par le mouvement d'une voix sur deux; cela pour découvrir les « sensibles » ou « sons attractifs d'autres sons » et nous méfier plus que jamais de la justesse tempérée (ALEXANIAN, Violoncelle, 1914, p. 197) :
• 7. De tout temps, Beethoven aurait eu des raisons d'envier cette justesse d'écriture, précise et ferme [de l'art ancien], lui dont le génie avait, nous le savons, tant de peine à forger son expression...
ROLLAND, Beethoven, t. 1, 1937, p. 286.
D. — [Correspond à juste I B 3]
1. [En parlant d'une pers. ou des facultés humaines] Qualité qui permet d'appréhender la réalité, d'exécuter un geste, une tâche, selon la logique, selon la norme. Justesse du coup d'œil, de l'œil, de l'oreille; justesse d'esprit, d'intuition, d'observation; chanter, peindre avec justesse; déterminer, dire, discerner, observer, percevoir, raisonner, reconnaître, répondre avec justesse. Dans ses jugemens sur notre France du dix-neuvième siècle, M. Théry fait preuve d'une bienveillance tempérée de justesse (MUSSET ds Revue des Deux Mondes, 1832, p. 609). Par sa dignité naturelle, sa justesse de sens et la pureté de son goût, il [Louis XIV] exerça, sans y prétendre, une véritable action sur elle [la littérature] (THIERRY, Tiers État, 1853, p. 274). On ne saura jamais jusqu'où allait la décence et la justesse d'âme de ce peuple; une telle finesse, une telle culture profonde ne se retrouvera plus (PÉGUY, Argent, 1913, p. 1103). V. fausseté A 1 b mus., ex. de Arnoux :
• 8. Il pouvait bien, ce garçon, n'être qu'un mécanicien en ce moment, mais déjà elle ne doutait pas plus de sa réussite dans l'avenir (...) que de la justesse de l'instinct lui conseillant de s'en faire un allié.
ROY, Bonheur occas., 1945, p. 23.
2. [En parlant d'un mécanisme] Qualité qui lui permet de fonctionner avec précision, conformément à sa destination. Une balance d'une justesse mathématique (VERNE, Île myst., 1874, p. 6). La justesse d'une arme (...) est d'autant plus grande que le point moyen est plus rapproché du point visé (PALOQUE, Artill., 1909, p. 225).
— Loc. adv. De justesse, d'extrême justesse. De très peu. Éviter de justesse une catastrophe; réussir de justesse; être sauvé, repêché de justesse. Un camion au grand trot frôla de justesse sa pèlerine longue, la souilla de boue (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 275). C'est Frédéric, présente Rodrigue. Il est arrivé ce matin de Toulouse où il a échappé de justesse à la Gestapo (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 8). M. Paul Reynaud l'emporta, quoique d'extrême justesse. Le ministère obtint la confiance à une voix de majorité (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 25).
♦ [Dans une compétition sportive] Avec une courte avance, d'une courte longueur. Nous avons fait une course de bicyclettes où je me suis laissé battre de justesse (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 454).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1611 « qualité avec laquelle une chose est exactement adaptée ou appropriée à ce à quoi elle est destinée » (COTGR.); 2. 1650 « qualité de ce qui est exact dans ses rapports, ses proportions; qui est conforme à une norme idéale ou un modèle » la justesse de l'architecture (CORNEILLE, Andromède, IV, Décoration du quatrième acte ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. V, p. 365); 3. 1657-62 « qualité de l'esprit permettant de juger avec exactitude » (PASCAL, Pensées, éd. L. Lafuma, Papiers non classés, 511, p. 576); 4. 1665 « qualité avec laquelle on exécute une action avec précision » (RETZ, Mémoires, V, 573 ds IGLF : Il faut une grande justesse pour accorder l'heure des attaques et bien du bonheur pour qu'elles réussissent); 5. 1683, 5 mars « conformité au goût » (SÉVIGNÉ, Corresp., éd. R. Duchène, t. 3, p. 104); 6. 1778 « qualité d'un organe sensoriel permettant d'apprécier très exactement les choses » justesse de l'oreille (BUFFON, Oiseaux, V, p. 97). Dér. de juste adj.; suff. -esse. Fréq. abs. littér. : 738. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 1 579, b) 865; XXe s. : a) 706, b) 901.
justesse [ʒystɛs] n. f.
ÉTYM. 1611; de juste, et suff. -esse.
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1 Qualité qui rend une chose parfaitement adaptée ou appropriée à sa destination. || Cette balance est d'une extrême justesse (Académie). || Justesse d'une vis qui entre exactement dans son écrou (Hatzfeld).
♦ La justesse de l'expression au XVIIe siècle (→ Admirablement, cit. 1). || Le français dit les choses avec plus de justesse (→ Éclaircir, cit. 6). || Justesse des intonations (→ Harmonie, cit. 15). || Justesse d'un mot, d'une réflexion (→ Bataille, cit. 11). || Comparaison qui manque de justesse (→ 2. Instant, cit. 5). || Justesse d'un récit, d'une évocation. ⇒ Authenticité, vérité.
1 Une justesse grammaticale qui va jusqu'à l'affectation.
Racine, Port-Royal.
2 La précision et la justesse du langage dépendent de la propriété des termes qu'on emploie.
Vauvenargues, De l'esprit humain, XIII, p. 189.
3 (…) ce qu'il faut rechercher, ce n'est pas la petite certitude des minuties, c'est la justesse du sentiment général, la vérité de la couleur.
Renan, Vie de Jésus, Introd., Œuvres, t. IV, p. 81.
2 (1665, Retz). Qualité qui permet d'exécuter très exactement une chose; manière dont on exécute qqch. sans la moindre erreur. ⇒ Précision. || La justesse du tir. — Tirer avec beaucoup de justesse. ⇒ Juste (II., 1.). || Chanter avec justesse.
4 Tout nous peut être mortel, même les choses faites pour nous servir; comme dans la nature, les murailles peuvent nous tuer, et les degrés nous tuer, si nous n'allons avec justesse.
Pascal, Pensées, VII, 505.
5 Si vous aviez vu la violente contorsion que cet éclat de bombe fit à son épée (…) vous admireriez l'adresse et la justesse de la main qui a mesuré le coup.
Mme de Sévigné, 1108, 19 déc. 1688.
3 (V. 1660, Pascal). Spécialt. Qualité qui permet d'apprécier très exactement les choses. || Justesse de l'oreille, du coup d'œil (→ Hors, cit. 18). — Fig. || Justesse d'esprit. ⇒ Raison, rectitude (→ Appréhender, cit. 7; brillant, cit. 15; esprit, cit. 125). || La justesse d'appréciation (de qqn). — Valeur logique et adaptation à la réalité (d'un contenu intellectuel). || La justesse de ses idées, d'une remarque. || Remarques d'une grande justesse.
6 Ses idées sur le théâtre sont d'une singularité et d'une justesse remarquables, et prouvent une grande habitude de la matière (…)
Th. Gautier, Souvenirs de théâtre…, Contes d'Hoffmann.
7 Car les enfants apprécient avec une parfaite justesse la valeur morale de leurs maîtres.
France, le Livre de mon ami, Livre de Pierre, II, X.
4 ☑ Loc. adv. De justesse… a (1878). || Gagner de justesse, se dit d'un cheval qui franchit le poteau d'arrivée avec une très faible avance sur son principal concurrent. — Par anal. Avec une très faible avance. || Gagner, l'emporter, réussir de justesse. — D'extrême justesse (même sens).
b Avec un peu de marge. ⇒ Peu (de). || Éviter (cit. 5) de justesse une collision. || Il a pu atteindre son train, mais de justesse. ⇒ Juste (II., 3.).
8 On me coinça entre deux cabines, au revers d'une courtine. Je méchappai de justesse (…)
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 111.
9 Comme il poursuivait son chemin, une voiture corna derrière lui. Il était si plein de l'image de Jacqueline qu'il ne se déplaça pas. La petite auto fit un crochet de justesse (…)
Aragon, les Beaux Quartiers, I, XXIII.
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CONTR. Approximation, discordance, erreur, fausseté, faute, impertinence.
Encyclopédie Universelle. 2012.