juron [ ʒyrɔ̃ ] n. m. ♦ Terme plus ou moins familier ou grossier dont on se sert pour jurer. ⇒ jurement, région. 1. sacre. Juron grossier (cf. Gros mot). Pousser, lâcher un juron, une bordée de jurons. Juron servant d'imprécation, d'insulte, d'injure. Juron employant ou déformant le nom de Dieu. ⇒ blasphème.
♢ Exclamation, interjection familière ou grossière qui n'évoque pas une chose sacrée sur quoi on puisse jurer. « Ventre-saint-gris » était le juron d'Henri IV.
● juron nom masculin (de jurer 2) Expression grossière traduisant sous forme d'interjection une réaction vive de dégoût ou de colère. Dans la religion chrétienne, parole offensante pour Dieu ou pour quelque chose de sacré pris, mal à propos, à témoin. ● juron (homonymes) nom masculin (de jurer 2) jurons forme conjuguée du verbe jurer ● juron (synonymes) nom masculin (de jurer 2) Expression grossière traduisant sous forme d'interjection une réaction vive de...
Synonymes :
- blasphème
- jurement (vieux)
juron
n. m. Expression blasphématoire ou grossière, terme, imprécation utilisés pour jurer (sens II, 2).
⇒JURON, subst. masc.
A. — Exclamation offensante à l'égard de Dieu qui traduit une réaction vive de colère, dépit ou surprise. Il entend soudain un brutal « nom de Dieu », qui l'emplit d'effroi (...). C'est bien de lui qu'a jailli ce juron sonore, du fond de lui qui n'a jamais juré (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 967) :
• ... il entendit une voix forte et sonore articuler derrière lui une série formidable de jurons.
— Sang-dieu! Ventre-dieu! Bédieu! Corps de dieu! Nombril de Belzébuth! Nom d'un pape!
HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 327.
B. — P. ext., fam. Interjection ou exclamation grossière ou familière qui traduit une réaction vive de colère, dépit ou surprise. Synon. vieilli ou littér. jurement. Le colonel lança une bordée de jurons, s'en prenant à la compagnie, s'en prenant au conducteur (VERNE, Tour monde, 1873, p. 165). « Caramba! » cher à Victor Hugo, juron qui, pour le dire en passant, n'est qu'à l'usage des femmes et correspond à notre « sapristi! » (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 329).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1607 « serment » (MONTLYARD, Trad. Mythologie de Noël Le Comte, p. 179); 2. 1690 (FUR. : Juron. Façon particulière que des peuples ou des particuliers ont de jurer. Il a juré son grand juron. Dieu me damne, et Dieu me sauve, c'est le juron des Gascons. Ventre Saint Gris estoit le juron du Roy Henri IV. Le juron des infideles dans les romans est par Mahom. Les juifs disoient, Vive Dieu; les Espagnols valga me Dios; voto a Dios). Dér. de jurer; suff. -on. Fréq. abs. littér. : 294. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 264, b) 460; XXe s. : a) 678, b) 370.
juron [ʒyʀɔ̃] n. m.
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a Terme dont on se sert pour jurer. ⇒ Jurement, sacre. || Le juron consiste souvent en un euphémisme vidé de son sens. ⇒ Exclamation (cit. 2). || Gros juron, vilain, terrible juron (→ Empoigner, cit. 2). || Juron plaisant, drolatique (→ Gros, cit. 27). || Pousser, lâcher un juron. || Juron servant d'imprécation, d'insulte, d'injure (cit. 8). || Juron invoquant le diable, les morts, la vie (ex. [vx] : vertu de ma vie; sur ma vie…). || Juron employant ou déformant le nom de Dieu (supra cit. 55). ⇒ Parbleu, pardi, sacristi, sapristi (« sacrer Dieu »); et aussi, vx, cadediou (cap de Dious, juron gascon), corbleu (cordieu), jarnidieu (et, par euphém., jarnibleu, jarnicoton), morbleu (mordieu, mordienne, etc.), palsambleu (palsangué, palsanguienne), pâques-Dieu, pardieu (pardienne, pargué, parguenne), têtebleu (tétigué, tétiguenne), tudieu, ventrebleu (→ par euphém. ventre-saint-gris), vertubleu (vertudieu, vertigué, vertuchou). || Jurons modernes (ex. : bordel de Dieu, nom de Dieu, tonnerre de Dieu, vingt dieux…).
0.1 Les jurements, considérés comme des blasphèmes, avaient toujours été défendus (…) par l'autorité (…)
Les jurons où les noms sacrés étaient déformés, tronqués ou remplacés, n'avaient jamais eu la même gravité. Une commode hypocrisie faisait tolérer ventrebleu ou morbleu (…)
(…) les marquis (…) semaient leurs propos de ces jurons que la civilité interdisait aux gens du commun; toutefois la piété croissante rendit peu à peu suspect tout ce qui ressemblait à un jurement (…) Il y a des inventions bouffonnes (…) des préciosités (…) Mais, en dehors de ces fantaisies, nul doute que pas mal de formes n'aient été créées (…) pour permettre d'échapper aux soupçons d'impiété.
F. Brunot, Histoire de la langue française, t. IV, La langue classique (1660-1715), p. 384-387.
1 (…) et, dans le grand silence funèbre, il entend soudain un brutal « Nom de Dieu », qui l'emplit d'effroi, comme si quelqu'un d'autre (…) Il se tourne; mais non : il est seul. C'est bien de lui qu'a jailli ce juron sonore, du fond de lui qui n'a jamais juré.
André Gide, Romans, les Faux-Monnayeurs, in Rom., Pl., p. 967.
➪ tableau Principales interjections.
b Exclamation familière ou grossière, qui n'évoque pas une chose sacrée. || Jurons familiers (ex. : nom d'un petit bonhomme [vieilli], nom d'un chien, nom de nom, sac à papier [vieilli], tonnerre, bagasse, funérailles, punaise [régional : Sud]; fouchtra [régional : Auvergne]). || Jurons grossiers. → Gros mot (ex. : bordel, foutre, merde, putain… et leurs combinaisons).
1.1 — Deux heures ! nom d'un petit Mouzaia !
— Qu'est-ce que ç'est que ça ?
— C'est un juron industriel… que j'ai inventé un jour où j'ai perdu cinq mille francs sur les mines…
E. Labiche, la Chasse aux corbeaux, III, 5.
2 Il est à supposer que les jurons, qui sont des exclamations entièrement dépourvues de sens, ont été inventés comme instinctivement pour donner issue à la colère, sans rien dire de blessant ni d'irréparable. Et nos cochers, dans les encombrements, seraient donc philosophes sans le savoir.
Alain, Propos, 17 nov. 1913, Injures.
c (1690, Furetière). Spécialt. Façon de jurer habituelle à une personne. || Ventre-saint-gris était le juron d'Henri IV. || C'est son juron, son grand juron.
3 Mon grand-père employait son grand juron contre cette Mme Vignon : Le diable te crache au cul !
Stendhal, Vie de Henry Brulard, 17.
Encyclopédie Universelle. 2012.