juge [ ʒyʒ ] n.
• XIIe; lat. judicem, accus. de judex
1 ♦ Magistrat chargé d'appliquer les lois et de rendre la justice. Charge de juge. ⇒ judicature. Robe, toque du juge. Juges des tribunaux judiciaires (⇒ magistrature) . Juges administratifs. ⇒ 2. conseiller. Les juges titulaires de la Cour internationale de justice. La compétence, la juridiction d'un juge.
♢ Absolt Juge de l'ordre judiciaire (opposé à conseiller). Impartialité, partialité, sévérité d'un juge. Récuser un juge. Les juges siègent, délibèrent, se prononcent. ⇒ audience, délibération, délibéré, jugement, prononcé, rôle. Elle est juge. Madame la juge. Sa prose « exaspère la juge, qui la trouve déplorable » (M. del Castillo). — Nous irons devant le juge, les juges, devant la justice, le tribunal. — Juges ordinaires, qui ont la plénitude de juridiction, dans leur domaine de compétence. Juges extraordinaires, dont la compétence est limitée. — Spécialt Dr. Magistrat statuant à un tribunal civil, pénal, commercial (opposé à conseiller). Juges titulaires, suppléants, consulaires. Juge départiteur. Juge-commissaire, commis aux fins d'enquête par un tribunal. Juge de la mise en état, chargé de l'information et du suivi de la procédure dans les instances civiles. Juge aux affaires familiales, chargé des affaires de divorce et de séparation. Juge des enfants, chargé d'instruire et de juger les affaires concernant les mineurs délinquants ou en danger moral. Juge de l'application des peines, chargé de surveiller l'exécution des décisions pénales, et de déterminer les modalités du traitement pénitentiaire des condamnés. — Cour. Juge d'instruction : magistrat spécialement chargé d'informer en matière criminelle ou correctionnelle. Juge des référés, statuant en matière de référé. Juge de paix (anciennt), juge d'instance : magistrat qui statue comme juge unique, tantôt en premier, tantôt en dernier ressort, sur des affaires généralement peu importantes en matière civile et de simple police.
♢ Juge au tribunal de l'Inquisition. ⇒ inquisiteur. Juges de l'Ancien Régime. ⇒ prévôt, viguier. Juge arabe (⇒ cadi) , espagnol (⇒ alcade) .
♢ Antiq. juive Titre des magistrats suprêmes qui gouvernèrent le peuple juif avant l'établissement de la royauté. Le livre des Juges, septième livre de la Bible.
2 ♦ Personne appelée à faire partie d'un jury, à se prononcer comme arbitre. Les juges d'un concours, chargés de se prononcer sur la valeur des concurrents. — Sport Juge des courses. Juge-arbitre (d'un tournoi de tennis). Juge de ligne, juge de touche.
3 ♦ N. m. Personne qui juge, qui a le droit et le pouvoir de juger. Dieu est le souverain juge, le juge suprême. Au théâtre, le public est le juge absolu. « On n'est pas juge de la peine d'autrui » (Chateaubriand). — Être juge et partie.
4 ♦ N. m. Personne qui est appelée à donner une opinion, à porter un jugement. Je vous en fais juge. « Je demeure mon juge le plus sévère » (Colette). Être son propre juge.
♢ Être bon, mauvais juge, plus ou moins capable de porter un jugement. ⇒ expert. Je suis mauvais juge en la matière.
● juge nom masculin (latin judex, -icis, de jus, le droit, et dicere, dire) Magistrat chargé de rendre la justice en appliquant les lois. Personne qui a le pouvoir de juger, d'apprécier ou de décider quelque chose, qui est appelée à servir d'arbitre dans une contestation ou à donner son avis dans tel ou tel cas : Je vous fais juge de la situation. Personne que sa compétence ou son expérience rend plus ou moins apte à apprécier les choses dans un certain domaine : Être bon juge en matière de gastronomie. Droit Magistrat du siège exerçant ses fonctions au tribunal d'instance, de grande instance ou de commerce. Synonyme de juridiction. Tout individu, corps ou personne morale chargés par des États de régler leurs différends sur la base du respect du droit. Membre d'un organe permanent constitué en vue de trancher les conflits juridiques auxquels sont parties un ou plusieurs sujets du droit international (par exemple, les membres de la Cour internationale de justice). Histoire À Rome, personne privée choisie selon la loi des Douze Tables pour juger une certaine matière. Chez les Hébreux, chacun des chefs temporaires et héros locaux qui, après l'installation en Canaan, exercèrent leur autorité sur un groupe de tribus. (Cette période dite « des juges » [de 1200 à 1030 environ] aboutit à l'institution de la monarchie.) Sports Commissaire chargé, dans une course, de constater l'ordre des arrivées ou de réprimer les irrégularités qui pourraient se produire au cours de l'épreuve. Dans certains sports (patinage, gymnastique notamment), personne chargée de noter les concurrents. Turf Spécialiste des courses à qui incombe le contrôle du départ (juge au départ, ou starter) et de l'arrivée (juge à l'arrivée) des épreuves et, pour le trot, de la régularité des allures (juge aux allures). ● juge (citations) nom masculin (latin judex, -icis, de jus, le droit, et dicere, dire) François Andrieux Strasbourg 1759-Paris 1833 […] si nous n'avions pas des juges à Berlin. Le Meunier sans souci Commentaire Ces mots sont cités pour opposer le bon droit à la force : un meunier résistait au roi de Prusse (Frédéric II) qui voulait agrandir son parc au détriment des biens du meunier : « Je suis le maître (dit le roi). — Vous ? de prendre mon moulin ? — Oui, si nous n'avions pas des juges à Berlin. » François Coppée Paris 1842-Paris 1908 Académie française, 1884 Mon histoire, messieurs les juges, sera brève. Voilà. Les forgerons s'étaient tous mis en grève. Poésies Lemerre Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Grattez le juge, vous trouverez le bourreau. Littérature et philosophie mêlées Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Les lois font les bagnes, les mœurs font les lupanars. La lumière crée le peuple, la nuit enfante la plèbe. La veste rouge du forçat est taillée dans la robe rouge du juge. Quatrevingt-Treize, Reliquat Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 Le devoir des juges est de rendre la justice ; leur métier est de la différer, quelques-uns savent leur devoir et font leur métier. Les Caractères, De quelques usages Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 On fait tant, à la fin, que l'huître est pour le juge, Les écailles pour les plaideurs. Fables, le Frelon et les Mouches Julien Offray de La Mettrie Saint-Malo 1709-Berlin 1751 Je sens tout ce que demande l'intérêt de la société ; mais il serait sans doute à souhaiter qu'il n'y eût pour juges que d'excellents médecins. L'Homme machine Talmud Malheur à la génération dont les juges méritent d'être jugés ! Talmud, Midrash Rabba sur Ruth, 1 Fedor Mikhaïlovitch Dostoïevski Moscou 1821-Saint-Pétersbourg 1881 Si le juge était juste, peut-être le criminel ne serait-il pas coupable. Les Frères Karamazov Francisco Gómez de Quevedo y Villegas Madrid 1580-Villanueva de los Infantes 1645 Les délinquants font moins de mal qu'un mauvais juge. Menos mal hacen los delincuentes, que un mal juez. Política de Dios y Gobierno de Cristo, I, 9 ● juge (expressions) nom masculin (latin judex, -icis, de jus, le droit, et dicere, dire) Être (à la fois) juge et partie, être amené à se prononcer sur un différend dans lequel on est soi-même impliqué et manquer d'impartialité. Juge aux affaires familiales (J.A.F.), juge compétent pour connaître des litiges concernant le droit de la famille (exemple divorce, pension alimentaire, séparation de corps, garde d'enfants). Juge de l'application des peines (J.A.P.), juge du tribunal de grande instance chargé de suivre l'exécution des décisions pénales. (Il préside le comité de probation et d'assistance aux libérés.) Juge des enfants, juge du tribunal de grande instance chargé en matière civile de tout ce qui concerne l'assistance éducative, et, en matière pénale, de juger les contraventions de 5e classe et les délits commis par des mineurs. Juge de l'exécution (J.EX.), juge du tribunal de grande instance compétent pour connaître notamment de toutes les difficultés d'exécution forcée d'une décision judiciaire (exemple saisie). Juge de l'expropriation, juge désigné au sein de chaque département pour connaître des litiges relatifs aux expropriations, chargé de fixer le montant des indemnités d'expropriation. Juge d'instance, juge du tribunal d'instance. Juge d'instruction, juge du tribunal de grande instance chargé de l'instruction préparatoire du premier degré en matière pénale. Juge des loyers, juridiction compétente en matière de baux commerciaux. Juge de la mise en état, magistrat chargé d'instruire une affaire civile. Juge de paix, magistrat qui formait à lui seul la juridiction appelée « justice de paix », à laquelle a succédé le tribunal d'instance. Juge rapporteur, juge chargé par le tribunal d'établir un rapport sur une affaire. Juge des référés, juge qui, sans être saisi au principal, a le pouvoir d'ordonner des mesures urgentes qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. Juge des tutelles, juge du tribunal d'instance chargé principalement de surveiller la gestion des biens des personnes incapables majeures ou mineures. Juge unique, juge qui rend des décisions seul. Juges des Enfers, chez les Grecs, Minos, Éaque et Rhadamante, qui jugeaient les âmes des morts. Juge de ligne, au tennis, adjoint de l'arbitre placé sur le prolongement d'une ligne et chargé de signaler que la balle a dépassé les limites du court. Juge de touche, personne chargée principalement d'indiquer, dans certains sports d'équipe, l'endroit où le ballon a franchi la ligne de touche et les hors-jeu. (Au football, on dit aujourd'hui arbitre auxiliaire.) ● juge (synonymes) nom masculin (latin judex, -icis, de jus, le droit, et dicere, dire) Personne qui a le pouvoir de juger, d'apprécier ou de...
Synonymes :
- arbitre
Personne que sa compétence ou son expérience rend plus ou...
Synonymes :
- appréciateur
- critique
- expert
juge
n. m.
d1./d Magistrat ayant pour fonction de rendre la justice.
|| DR Magistrat appartenant à une juridiction du premier degré (par oppos. aux conseillers des cours d'appel et de la Cour de cassation).
— Juge d'instance, du tribunal d'instance.
— Juge consulaire: juge au tribunal de commerce.
— Juge d'instruction, chargé d'instruire une affaire pénale.
— Juge de la mise en état, chargé d'établir l'information et de surveiller la marche de la procédure dans les procès au civil.
— Juge des référés, chargé de prendre les décisions en référé.
— Juge de l'application des peines, chargé de veiller à l'application des peines prononcées contre les condamnés, de surveiller les modalités du traitement pénitentiaire (libération anticipée, etc.).
d2./d DR Juridiction.
d3./d Personne appelée à se prononcer en tant qu'examinateur, en tant qu'arbitre. Les juges d'un concours.
|| SPORT Juge de touche: personne chargée d'assister l'arbitre d'un match de football, de rugby ou de tennis, en signalant les hors-jeu, les sorties en touche, etc.
— (Québec) Juge de ligne: au hockey, juge chargé de surveiller les hors-jeu.
d4./d Personne à qui l'on demande son opinion. Je vous fais juge.
— être bon, mauvais juge en qqch, capable, incapable de porter un jugement sur qqch.
— Loc. être juge et partie: être à la fois arbitre et directement concerné dans une affaire.
⇒JUGE, subst. masc.
A. — Celui qui a autorité reconnue pour trancher un différend, qui est désigné pour juger. Comparaître devant le juge; décision des juges; juge compétent.
1. Celui qui est investi officiellement de l'autorité de rendre la justice, un jugement, de dire le droit. Juge administratif; juge à/de la Cour; juge militaire. Un juge amovible ou révocable est plus dangereux qu'un juge qui a acheté son emploi. Avoir acheté sa place est une chose moins corruptrice qu'avoir toujours à redouter de la perdre (CONSTANT, Princ. pol., 1815, p. 155) :
• 1. DON PELAGE : Ne savez-vous pas que je suis un juge, obligé de donner à tout litige qu'on lui adresse une solution?
CLAUDEL, Soulier, 1944, 1re part., 2e journée, 2, p. 1002.
— Expressions
♦ Nul ne peut être juge en sa propre cause
P. métaph. Il fut un temps où la ligue civique faisait afficher sur tous les murs une sorte de maxime juridique. « On ne discute pas avec des bandits; on les juge. » J'ai pensé plus d'une fois à compléter cette affiche par une autre, qui aurait rappelé que « nul n'est juge en sa propre cause » (ALAIN, Propos, 1921, p. 194).
♦ Être juge et partie
Au fig. Être intéressé directement dans une affaire que l'on devrait considérer, apprécier avec impartialité et sérénité :
• 2. N'est-ce pas un crime que de donner le jour à de pauvres créatures condamnées par avance à de perpétuelles douleurs? Cependant ma conduite soulève de si graves questions que je ne puis les décider seule; je suis juge et partie.
BALZAC, Lys, 1836, p. 199.
— Collectivement. Synon. de tribunal. Renvoyer devant le juge, par-devant le juge (Ac. 1798-1935).
— Vx. Juge botté. ,,Se disait anciennement d'Un juge qui n'était pas gradué. On ne le dit plus que figurément et par dénigrement d'Un juge sans lumières et sans capacité; encore cette acception est-elle peu usitée`` (Ac. 1835, 1878).
— Juges naturels. ,,Ceux que la loi assigne aux accusés, aux parties, suivant leur qualité et l'espèce de la cause`` (Ac. 1835-1935). Nul ne peut être distrait à ses juges naturels (Ac. 1935) :
• 3. Je crois que la liberté d'un seul citoyen intéresse assez le corps social, pour que la cause de toute rigueur exercée contre lui doive être connue par ses juges naturels.
CONSTANT, Princ. pol., 1815, p. 72.
— Juges ordinaires. ,,Juges de droit commun, à la différence des juges établis par des lois spéciales`` (Ac. 1935) :
• 4. ... il suffit d'un civil impliqué dans l'affaire pour entraîner tout soldat devant la justice civile, et la fille Pays livrée aux juges ordinaires implique la comparution d'Esterhazy et de du Paty au même tribunal.
CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p. 54.
— Juges de rigueur
♦ ,,Les juges qui doivent prononcer selon la rigueur de la loi; à la différence des arbitres, qui peuvent se décider d'après l'équité naturelle`` (Ac. 1835, 1878).
♦ Vx. ,,Juges subalternes; à la différence des juges qui prononçaient en dernier ressort, et qui se permettaient quelquefois d'adoucir la rigueur de la loi`` (Ac. 1835, 1878).
a) DROIT
— Absol. Magistrat chargé par l'autorité publique de rendre la justice dans les tribunaux de première ou grande instance (p. oppos. aux Conseillers des Cours). Juge au/du tribunal; juge suppléant. Monsieur le président, j'ai été nommé (...) juge de première instance par Bonaparte auquel j'ai prêté serment (STENDHAL, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 145).
— Juge(-)commissaire. ,,Juge chargé de surveiller la gestion des syndics et, d'une façon générale, toutes les opérations de la liquidation des biens`` (LEMEUNIER 1969). À mesure que la série de ces accusations se déroulait, je voyais la figure du juge-commissaire se rembrunir (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 449) :
• 5. Après que les meubles et immeubles ont été estimés et vendus, s'il y a lieu, le juge commissaire renvoie les parties devant un notaire dont elles conviennent, ou nommé d'office, si les parties ne s'accordent pas sur le choix.
Code civil, 1804, art. 828, p. 151.
— Juge consulaire. Magistrat des tribunaux de commerce, élu, et dont les fonctions sont gratuites. Synon. juges au tribunal de commerce. Un juge consulaire des plus estimés, un adjoint, un honorable commerçant ne descendrait pas à ces petitesses (BALZAC, C. Birotteau, 1837, p. 116).
— Juge d'instruction. Juge du tribunal de première ou grande instance, chargé de l'instruction préparatoire des affaires pénales. Il est probable qu'à ma sortie d'ici j'irai faire un tour en prison et dans le cabinet du juge d'instruction (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 3, 1859, p. 307). Maigret, je vous présente mon vieil ami Alain de Folletier, juge d'instruction à la Roche-sur-Yon... (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 114).
— Juge de paix. Magistrat dont la juridiction s'étendait, avant la création des tribunaux d'instance, sur un canton et qui avait des fonctions diverses, notamment de conciliateur, de juge unique dans les affaires peu importantes :
• 6. ... en province, pour violer le domicile du débiteur lui-même, l'huissier doit se faire assister du juge de paix. Or, le juge de paix, qui tient sous sa puissance les huissiers, est à peu près le maître d'accorder ou de refuser son concours.
BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 623.
b) HISTOIRE
— Franc-Juge.
— Grand-Juge. Synon. de Ministre de la Justice sous le premier Empire :
• 7. Signé Bonaparte, Premier Consul. Contre-signé, le Secrétaire d'État, Hugues B. Maret. Et scellé du sceau de l'État.
Vu, le Grand-Juge [it. ds le texte], Ministre de la Justice, signé Regnier.
Certifié : Le Grand-Juge [it. ds le texte], Ministre de la Justice, Regnier.
Code civil, 1804, p. 416.
— Juge mage/maje. ,,Magistrat chargé de la justice de la ville, au Moyen-Âge, dans certaines régions : en Provence par exemple et dans les villes de consulat`` (LEP. 1948; ds Ac. 1835, 1878).
— Juges ordinaires
♦ ,,Juges à qui appartenait naturellement la connaissance des affaires civiles ou criminelles; à la différence Des juges de privilège et de ceux qui étaient établis par commission. Il demanda son renvoi par-devant les juges ordinaires`` (Ac. 1835, 1878).
♦ ,,Ceux qui servaient toute l'année, à la différence de Ceux qui ne servaient que par semestre`` (Ac. 1835, 1878).
— Juges royaux. Ceux qui rendaient la justice au nom du roi par opposition aux juges des seigneurs. Voir MARAT, Pamphlets, Appel à la Nation, 1790, p. 135.
c) HIST. RELIG.
— Les Juges. Chefs ayant reçu mission de gouverner Israël, de le conduire à la guerre, et de le sauver du péril, dans la période qui suivit la mort de Josué jusqu'à l'établissement de la royauté; p. méton. la période considérée. Les tribus d'Israël avaient pour chef un juge (HUGO, Légende, t. 1, 1859, p. 34). Le contraste entre les horreurs des Juges ou l'ancien Mosaïsme (...) et l'Évangile est prodigieux (AMIEL, Journal, 1866, p. 237) :
• 8. ... le législateur envoyé de Dieu, n'avait et ne réclamait d'autorité que sur les enfants d'Israël (...) il en était ainsi des juges, des pontifes, des rois et des conseils qui lui succédèrent...
LAMENNAIS, Indifférence, t. 2, 1817-23, p. 300.
♦ Le livre des Juges ou les Juges. Livre de la Bible, dit historique, relatant les rapports d'Israël et de Yahvé, de Josué à Samuel inclus, et plus particulièrement les récits épiques des actions héroïques accomplies par les Juges :
• 9. ... on relève des traces d'additions qui semblent témoigner que le livre des Juges n'atteignit pas du premier coup sa forme définitive...
Théol. cath. t. 8, 2 1925, p. 1833.
2. Personne à la décision de laquelle on s'en remet à l'avance pour trancher un différend, arbitrer un conflit, départager des concurrents, décider de quelque chose, émettre un jugement sur quelque chose ou quelqu'un. L'attitude énigmatique de son juge de thèse l'intriguait (MALÈGUE, Augustin, t. 2, 1933, p. 443). Art. 8. — Chacune des deux chambres est juge de l'éligibilité de ses membres et de la régularité de leur élection; elle peut seule recevoir leur démission (Doc. hist. contemp., 1946, p. 184).
— Juge du concours. Personne chargée de prononcer dans un concours la valeur des concurrents (d'apr. Ac. 1878, 1935).
— HIST. Juge de/du camp. Officier chargé de vérifier que les tournois, les combats judiciaires se déroulent selon les règles prévues et avec loyauté. Le sire de Harpedenne pour les Français, et le comte de Rutland pour les Anglais, étaient juges du camp (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 2, 1821-24, p. 282) :
• 10. ... le bruit des fanfares, qui annoncent que le temps désigné pour attendre Malek Adhel, vient d'expirer, et que les juges du camp ont levé les barrières : la gloire brille, les guerriers volent, et en ce jour de réunion, les Musulmans se mêlent aux Chrétiens, et le combat devient plus vif et plus acharné que la veille...
COTTIN, Mathilde, t. 2, 1805, p. 172.
♦ P. métaph. L'archiviste, ce monsieur en lunettes, est, en définitive, le juge de camp, l'arbitre en dernier ressort (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 10, 1866, p. 355).
— SPORTS
♦ Arbitre choisi dans certains sports, ou commissaire adjoint à l'arbitre, chargé de vérifier certains coups, de contrôler les obstacles, de constater les fautes, les irrégularités, de faire appliquer la règle du jeu, le règlement. L'arbitre de chaise s'enquiert auprès du juge-arbitre de la décision à prendre (L'Auto, 3 juin 1934, p. 4 ds GRUBB, Fr. sp. neol., 1937, p. 46). Il était resté inconscient devant le compte de l'arbitre espagnol, qui a prononcé le « out » sans avoir consulté les autres juges (Le Matin, 30 nov. 1981, p. 23) :
• 11. Le juge à l'arrivée est la personne chargée de déclarer l'ordre d'arrivée des coureurs [cyclistes] au poteau et leurs distances respectives (...). Les décisions du juge à l'arrivée sont souveraines et sans appel.
BAUDRY DE SAUNIER, Cycl., 1892, pp. 399-400.
♦ Juge de touche. Celui qui est chargé de vérifier les hors-jeu, le franchissement de la ligne de touche, dans certains sports d'équipe :
• 12. Deux juges de touche seront désignés. Ils auront pour mission de signaler, sous réserve de décision par l'arbitre, que le ballon est sorti du jeu et d'indiquer l'équipe à laquelle revient le coup de pied de coin, le coup de pied de but ou la rentrée de touche. Ils aideront l'arbitre à contrôler le jeu en application des lois (...). Les juges de touche seront munis de drapeaux fournis par le club sur le terrain duquel a lieu le match.
J. MERCIER, Football, 1966, p. 21.
♦ Juge de ligne (tennis). Celui qui est chargé de dire si, par rapport à la ligne qu'il observe spécialement, la balle est bonne ou mauvaise.
SYNT. Juge impartial, intègre; juges iniques; juges auditeurs; juges titulaires; élection des juges; conscience des juges; les juges décident, condamnent.
B. — P. anal.
1. Être surnaturel qui, après la mort, pèse les actions du défunt évaluées selon des principes supérieurs, les préceptes de la religion, et lui accorde la récompense suprême ou la punition éternelle. Juge des Enfers. Comme si la terre se fût ouverte pour laisser passer le grand juge des enfers (ABOUT, Roi mont., 1857, p. 275). Socrate : Salut à toi, Minos. Ceux qui ont été injustement condamnés par les vivants se présentent avec confiance devant ton tribunal, juge des morts (MÉNARD, Rêv. païen, 1876, p. 52) :
• 13. Je parle pour ceux qui ne croient pas à l'existence d'un Juge unique, tout-puissant et infaillible qui (...) maintient la justice en ce monde et la complète ailleurs.
MAETERL., Temple ensev., 1902, p. 1.
— RELIG. CHRÉT. Juge suprême, Souverain Juge. Synon. de Dieu. Au décès des prêtres; on les enterroit le visage découvert : le peuple croyoit lire sur les traits de son pasteur l'arrêt du Souverain Juge (CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 323). Vous avez oublié que Dieu est votre père avant d'être votre juge; et vous faites à votre père cette injure de méconnaître sa miséricorde! (MARTIN DU G., Thib., Mort père, 1929, p. 1262) :
• 14. Dieu qui habite au plus haut des cieux, et qui n'en est pas moins présent partout, même au plus intime de notre être (...). Souverainement sage, saint, véridique. Juge suprême, qui récompense les bons et punit les méchants, sans acception de personnes.
Théol. cath. t. 4, 1 1920, p. 1027.
2. [En parlant d'un être humain]
a) Personne qui détient une autorité sur une autre personne par supériorité hiérarchique, morale, par prestige ou qui possède ou s'attribue une compétence. Seule l'Église enseignante est le juge qualifié du rapport des choses temporelles avec la fin dernière surnaturelle à laquelle elle doit nous conduire (R.P. Humbert CLÉRISSAC, Le Mystère de l'Église, 3e éd., Saint-Maximin, 1925 ds MARITAIN, Primauté spirit., 1927, p. 44) :
• 15. ... chez les Gaulois, et dans quelques cantons de l'Orient, les Romains avaient trouvé des religions d'un autre genre. Là, les prêtres étaient les juges de la morale : la vertu consistait dans l'obéissance à la volonté d'un dieu, dont ils se disaient les seuls interprètes.
CONDORCET, Esq. tabl. hist., 1794, p. 81.
b) [Sans article] Personne capable d'apprécier sainement et impartialement les personnes, les faits, ou que l'on considère comme telle et au sentiment de laquelle on s'en remet. Laisser (qqn) juge; faire (qqn) juge de; être bon, mauvais juge. Je lui répondis que je le laissais absolument juge du moment où il conviendrait de commencer son mouvement offensif (JOFFRE, Mém., t. 1, 1931, p. 289). Janine à Hubert : Mon cher oncle, je viens vous demander d'être juge entre maman et moi. Elle refuse de me confier le « journal » de grand-père (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 307) :
• 16. — Ces mélodies étrangères vous plaisent-elles? demanda obligeamment la baronne à Marie. — Je suis trop ignorante pour les apprécier, madame, je ne connais un peu que notre vieille musique française. — Oh! fit inconsidérément Jacques, ma cousine est très bon juge; musicienne elle-même, j'ose dire qu'elle a des doigts de fée sur le piano.
VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 409.
— Proverbe. De fou juge, briève sentence. ,,Les ignorants décident sans examiner`` (Ac. 1798-1878).
3. [Le mot juge désigne un inanimé, les sens, la conscience] Ce qui sert à apprécier, à juger. L'oreille est un juge difficile (Ac. 1835-1935). Le zèle du croyant est seul juge de l'à-propos (PROUDHON, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 358). Le beau est le juge du vrai (ALAIN, Beaux-arts, 1920, p. 309) :
• 17. La conscience des pairs est juge compétent, et cette conscience doit pouvoir prononcer en liberté sur le châtiment comme sur le crime.
CONSTANT, Princ. pol., 1815, p. 79.
REM. 1. Judicaillon, subst. masc., rare, péj. Petit juge obscur et peu capable, jugeant des affaires mineures. Les juges, qui avaient condamné Colomban étaient des juges mais de petits juges, vêtus d'une souquenille noire comme des balayeurs de sacristie, des pauvres diables de juges, des judicaillons faméliques. Au-dessus d'eux siégeaient de grands juges qui portaient sur leur robe rouge la simarre d'hermine. Ceux-là, renommés pour leur science et leur doctrine, composaient une cour dont le nom terrible exprimait la puissance (FRANCE, Île ping., 1908, p. 316). 2. Judicateur, -trice, adj. et subst. a) Emploi adj., rare. Qui juge; qui porte des jugements sur les œuvres littéraires. J'avoue qu'il y a dans cette nécessité de critique à laquelle je me livre toujours à mon corps défendant et qui finit par devenir mon métier, une attitude sévère et judicatrice qui ne va pas de moi à vous (SAINTE-BEUVE, Corresp., t. 1, 1834, p. 424). b) Emploi subst., rare. Celui qui juge les œuvres littéraires. (Ds LITTRÉ Suppl. 1877).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1170 « celui auquel on attribue le soin d'arbitrer un différend, de résoudre une question » (Rois, éd. E. R. Curtius, p. 85, 4); ca 1510 « arbitre d'un combat » (J. D'AUTON, Chroniques, éd. R. De Maulde La Clavière, t. 3, p. 39); b) ca 1170 « chef politique et religieux des Hébreux » (Rois, ibid., p. 15, 15); c) 1356 vray juge (en parlant de Dieu) (Miracles ND par personnages, éd. G. Paris et U. Robert, t. 3, 17, 1015); 2. 1174 « celui qui est chargé d'appliquer les lois civiles et pénales » (G. DE PONT-STE-MAXENCE, St Thomas, éd. E. Walberg, 2879); spéc. 1688 juge de paix (MIEGE, s.v. justice); 3. a) 1269-78 « celui qui est appelé à porter un jugement, à donner une opinion » (J. DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 6170); b) 1564 juge de « capable d'apprécier, qualifié pour évaluer quelque chose » (Indice et recueil universel de tous les mots principaux de la Bible). Du lat. judicem, acc. de judex, -dicis « juge, arbitre ». Le développement phonét. de juge a suivi de celui de juger, cf. FEW t. 5, p. 55 et 56 a. Fréq. abs. littér. : 5 547. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 9 762, b) 6 573; XXe s. : a) 9 414, b) 6 079. Bbg. BOS (A.). Juge. Romania. 1890, t. 19, p. 300. - BOULAN 1934, p. 111. - QUEM. DDL t. 5, 9.
juge [ʒyʒ] n.
ÉTYM. V. 1170, « personne chargée d'arbitrer un différend »; au sens mod., 1174; lat. judicem, accusatif de judex, de jus, juris « droit », et dicere « dire ».
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1 Dr. et cour. Magistrat chargé d'appliquer les lois et de rendre la justice. || Charge de juge. ⇒ Judicature. || Robe, toque de juge. || Le juge, homme de robe. || Juges des tribunaux judiciaires. ⇒ Magistrature (assise ou du siège). || Juges administratifs, des tribunaux administratifs. ⇒ Juridiction, tribunal. || Les juges titulaires de la Cour internationale de justice. || La compétence, la juridiction d'un juge. REM. Au féminin, on dit la juge, une juge (en concurrence avec Madame le juge). Une juge d'instruction. — À la différence des magistrats du ministère public (→ Parquet), les juges sont inamovibles. D'autre part, juge employé absolument ne désigne que les juges de l'ordre judiciaire, par opposition aux juges administratifs qui portent le titre de conseiller. — Obligation pour le juge de juger. || Juge poursuivi pour déni de justice. ⇒ Déni (cit. 3 et 4), prise (à partie).
1 Les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives. Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions.
Loi des 16-24 août 1790, art. 13.
1.1 Le juge était une juge aux cheveux gris, à la fois calme et tendue, calme car croyant avoir l'habitude d'être juge, et tendue car sachant ne jamais l'avoir prise.
Jean Echenoz, Je m'en vais, p. 217.
♦ Juge équitable (cit. 7), intègre, incorruptible. || Circonvenir, corrompre un juge. || Les épices (cit. 3) des anciens juges. || Impartialité, partialité, sévérité d'un juge. || Récuser un juge. ⇒ Récusation. || Les juges siègent, délibèrent, se prononcent. ⇒ Audience, délibération, délibéré, jugement, prononcé, rôle. || Le juge siège comme arbitre (→ Plaideur, cit. 2).
♦ Juges ordinaires, qui ont la plénitude de juridiction et qui statuent dans les tribunaux civils et dans les cours d'appel. || Pouvoir discrétionnaire, pouvoir souverain d'appréciation des juges ordinaires, juges du fond. || Juges extraordinaires, dont la compétence est limitée à certaines matières (tribunal d'instance, tribunaux de commerce, conseils de prud'hommes, Cour de cassation). — Juge au tribunal de grande instance. || Les juges du tribunal de commerce. ⇒ Consulaire (→ Commerçant, cit. 3). || Renvoi à l'audience du tribunal, décidé par le juge des référés, qui est chargé de rendre des décisions en matière de référé.
2 Les tribunaux de première instance et les cours d'appel se composent d'un certain nombre de juges qui, dans les cours d'appel, prennent le nom de conseillers. Ils sont nommés par décret.
Dalloz, Nouveau répertoire, art. Tribunaux, no 51.
3 (…) quand l'affaire à juger était une pure question de fait, ne donnant lieu à aucune difficulté de droit, la Cour suprême (la Cour de cassation) n'a rien à examiner dans la décision rendue. On dit alors qu'il y a eu appréciation souveraine des juges du fond.
A. Colin et H. Capitant, Cours élém. de droit civil franç., t. I, no 29.
♦ Spécialt. Dr. Magistrat statuant dans un tribunal civil ou un tribunal de commerce (par oppos. à conseiller, désignant les juges des cours d'appel et de la Cour de cassation). — (1806). || Juge-commissaire, commis aux fins d'enquête (cit. 1) par un tribunal (→ Affirmer, cit. 5; concordat, cit. 1). || Juge rapporteur. — Juge de la mise en état, chargé de l'information et du suivi de la procédure dans les instances civiles. || Juge aux affaires familiales, chargé des affaires de divorce et de séparation. || Juge de l'application des peines, chargé de la surveillance de l'exécution des décisions pénales, et de la détermination des modalités du traitement pénitentiaire des condamnés. — Juge des tutelles, chargé d'administrer les biens des incapables.
♦ Juge consulaire : juge au tribunal de commerce.
♦ Cour. || Juge d'instruction (cit. 15) et, absolt, juge : magistrat spécialement chargé d'informer (cit. 10) en matière criminelle ou correctionnelle. ⇒ argot Curieux (cit. 10). || Juge d'instruction qui procède à l'interrogatoire d'une personne mise en examen, décerne un mandat de dépôt ou d'arrêt (cit. 6; → aussi Arrêter, cit. 36). || Juge d'instruction qui ordonne une perquisition. || Des juges d'instruction, titre du chapitre VI du livre I du Code d'instruction criminelle. — ☑ Loc. (cour). Un petit juge : un juge d'instruction. || « L'image du “petit juge” pourrait très vite appartenir au passé (…) les magistrats iront désormais par trois, souhaite le ministre de la justice » (le Monde, 7 sept. 1985).
♦ Juge des enfants : magistrat chargé d'instruire et de juger les affaires concernant les mineurs délinquants ou en danger moral.
♦ (1688, Miege). || Juge de paix (anciennt), Juge d'instance : magistrat d'un cadre spécial, qui statue comme juge unique, tantôt en premier, tantôt en dernier ressort, sur des affaires généralement peu importantes en matière civile et en matière de simple police. Anciennt. || Sommation à comparaître devant le juge de paix. ⇒ Citation (→ Comparoir, cit. 1). || Juge de paix qui donne audience, qui appose (cit. 3) les scellés. — Juge (même sens). || Conciliation des parties par l'entremise du juge. — → aussi ci-dessous, 5., fig.
♦ Absolt. Tribunal, juridiction. || Porter une affaire, devant le juge, devant les juges, en justice. || Nous irons devant le juge.
♦ Dr. canon. || Juge ecclésiastique. ⇒ Official.
♦ Hist. || Juge athénien (cit. 2). ⇒ Héliaste. — Juge mage ou maje (majeur) : en Provence et dans les villes de consulat, au moyen âge, Magistrat chargé de la justice dans une ville. — Juge au tribunal de l'Inquisition. ⇒ Inquisiteur. || Juges de l'ancien régime. ⇒ Prévôt, viguier. || Juge pédane. — Juge arabe (⇒ Cadi), espagnol (⇒ Alcade). — Franc juge. — Grand juge : ministre de la Justice, sous le premier Empire. — Juges ordinaires et juges de privilège (sous l'ancien régime). || Juges royaux.
♦ (V.1170). Antiq. juive. Titre des magistrats suprêmes qui gouvernèrent le peuple juif avant l'établissement de la royauté. || Le livre des Juges, septième livre de la Bible.
4 Moins qu'une histoire suivie, le Livre des Juges est une suite d'apologues historiques bâtis tous sur le même modèle… Ces sauveurs providentiels sont les Juges.
Daniel-Rops, le Peuple de la Bible, II, III.
2 (V. 1170). Personne appelée à faire partie d'un jury où à se prononcer comme arbitre. || Les jurés sont juges du fait. || Les juges d'un concours, chargés de se prononcer sur la valeur des concurrents.
♦ Hist. || Juge de camp, le juge du Camp : officier qui présidait aux combats judiciaires.
♦ (1872, in Petiot; attestation isolée, 1858). Sports. || Juge des courses. || Les juges d'un match de boxe. || Juge-arbitre d'un tournoi de tennis. ⇒ Arbitre. || Juge de ligne (tennis). || Juge de touche.
5 Les cinq juges, choisis parmi des connaisseurs de villages différents, pour intervenir dans le cas de litige, et quelques autres portant des espadrilles et des pelotes de rechange.
Loti, Ramuntcho, I, IV.
3 (1356, vray juge). Autorité suprême qui juge, qui a le droit et le pouvoir de juger. || Dieu est le souverain juge, le juge suprême. || Le « juge naturel » (Bonald). || L'Église est juge des choses de la foi.
♦ Dans les choses de théâtre, le public est le juge absolu (→ Démentir, cit. 1). — ☑ Loc. Être (à la fois) juge et partie (cit. 23).
6 La Syrie à vos lois est-elle assujettie,
Pour souffrir qu'une femme y soit juge et partie ?
Corneille, Théodore, V, 7.
6.1 (…) personne parmi nous ne peut s'ériger en juge absolu, et prononcer l'élimination définitive du pire des coupables, puisque nul d'entre nous ne peut prétendre à l'innocence absolue.
Camus, Réflexions sur la guillotine, in Essais, Pl., p. 1055.
4 (V. 1270-78, Roman de la Rose; juge de qqch., 1564). Personne appelée à donner une opinion, à porter un jugement sur une question (surtout dans des expressions). || Prendre qqn pour juge. || Soyez-en juge. || Je vous en fais juge (→ aussi Imprimer, cit. 29). || Être son propre juge (→ Employeur, cit. 13).
7 Je vous fais juge vous-même des réparations qu'elle (l'offense) demande.
Molière, Dom Juan, III, 4.
8 « Ceci est trop, et trop beau ! » Car la lucidité ne m'a pas été refusée, et je demeure mon juge le plus sévère.
Colette, Belles saisons, Disc. de réception à l'Académie.
♦ (1564). Personne capable de porter un jugement sur telle ou telle chose. ⇒ Estimateur, expert. ☑ Être bon, mauvais juge en la matière. || Les femmes sont des juges très éclairés en matière de mérite masculin (→ Galanterie, cit. 6, Montesquieu). || Un juge compétent en littérature (→ Idiome, cit. 3). — S'établir (cit. 32), se faire, se constituer juge de ses propres actes (→ Avancement, cit. 5). — ☑ S'ériger (cit. 11) en juge : prétendre avoir le droit ou la compétence de juger dans un domaine quelconque. — Fig. (Choses). || La conscience (cit. 14, 15), juge infaillible du bien et du mal (→ Espèce, cit. 32).
9 Un versificateur ne connaît point de juge compétent de ses écrits; si on ne fait pas de vers, on ne s'y connaît pas; si on en fait, on est son rival.
Vauvenargues, Réflexions et Maximes, 499.
10 On n'est pas juge de la peine d'autrui : ce qui afflige l'un fait la joie de l'autre; les cœurs ont des secrets divers, incompréhensibles à d'autres cœurs.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. II, p. 345.
11 (…) il n'y a que les malheureux qui puissent être juges de la misère (…)
Balzac, l'Initié, Pl., t. VII, p. 374.
REM. Le fém. la juge est attesté (→ ci-dessous, cit. 12, au fig.); et, au sens propre, || « une juge qui refusait (…) de céder aux pressions hiérarchiques » (F Magazine, mars 1980, p. 51). En parlant d'une femme, on dit aussi un juge, une femme juge, et (en attribut) elle est juge.
12 À ce théâtre (les Folies-Nouvelles), la fille se sent dans son salon. Elle a les poses penchées de l'orgueil du chez soi et de la calèche. Elle est la juge et la faiseuse des succès littéraires avec ses souteneurs du monde.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 5 nov. 1855.
Encyclopédie Universelle. 2012.