COCCIDIES
Les Coccidies sont des êtres unicellulaires de nature animale qui vivent en parasites dans les cellules des Mollusques, des Arthropodes et surtout des Vertébrés. Sans forme bien définie, ces corpuscules coccidiens contenus dans le cytoplasme d’une cellule hôte, ont un aspect plus ou moins amœboïde ou sphéroïde; leur taille varie le plus souvent entre 10 et 20 猪 bien que certaines espèces passent par des stades atteignant jusqu’à 50 ou même 80 猪. Leur reproduction fait intervenir des cellules mâles et femelles bien différentes: il y a anisogamie. Le zygote ou copula est le seul stade diploïde (2 n chromosomes), tous les autres stades du cycle de développement sont haploïdes (n chromosomes).
Les graves maladies qu’elles provoquent chez l’homme (paludisme) ou chez les animaux domestiques (coccidiose du lapin) leur donnent une place importante dans la parasitologie humaine et vétérinaire.
Aux Émeriidés qui constituent la famille la plus anciennement connue, on ajoute aujourd’hui des espèces dont la position systématique était autrefois incertaine: Sarcocystidés, Babesiidés, Toxoplasmatinés dont le rôle en parasitologie humaine et vétérinaire a été précisé.
Quant aux Hémosporidies (qui provoquent le paludisme), leur cycle évolutif est comparable à celui des Émeriidés de telle sorte qu’on peut les rapprocher de façon certaine de cette dernière famille. Les observations en microscopie électronique ont en outre montré que le germe infectieux ou zoïte (sporozoïte, mérozoïte, schizozoïte...) possède malgré sa très petite taille (une dizaine de microns) une unité de structure (fig. 1) jadis méconnue, qui met bien en évidence l’homogénéité du groupe.
Cycles évolutifs
Le cycle évolutif comporte toujours les trois phases caractéristiques des Sporozoaires: schizogonie, gamogonie, sporogonie. On les étudiera chez Eimeria .
Eimeria perforans et E. Stiedae sont deux espèces très voisines, parfois même confondues, qui provoquent chez le lapin la coccidiose intestinale ou hépatique. La première espèce vit, en effet, dans les cellules épithéliales de l’intestin grêle et du gros intestin, tandis que la seconde est localisée dans les cellules des canalicules biliaires. Elles provoquent une hypertrophie de l’intestin ou du foie qui se manifeste extérieurement par une obésité dénommée vulgairement le «mal du gros ventre».
Le germe initial est une cellule allongée, le sporozoïte (fig. 2 a); elle pénètre dans une cellule épithéliale, à l’intérieur de laquelle elle grossit et se divise pour libérer des schizozoïtes (fig. 2 d et 2 e) qui, en poursuivant un développement identique, constituent la phase de schizogonie . Puis, trois semaines environ après l’infestation survient la phase de gamogonie : apparition d’un gamétocyte femelle qui grossit sans se diviser (fig. 2 g 1), tandis que le gamétocyte mâle se fragmente pour donner de nombreux microgamètes biflagellés (fig. 2 g 2). L’union des deux gamètes (fig. 2 h 1 et 2 h 2) aboutit à la formation d’un zygote (i) qui sécrète une enveloppe épaisse et se transforme en ookyste (fig. 2 j). La sporogonie consiste en une série de divisions de ce zygote qui donnera naissance à quatre spores (fig. 2 k), lesquelles se diviseront pour libérer huit sporozoïtes (fig. 2 1). L’ookyste est souvent expulsé avant sa segmentation avec les excréments du lapin: la sporogonie se poursuit donc le plus souvent à l’extérieur et assure la propagation de la maladie.
Le cycle que l’on vient de décrire, ou cycle eimérien est caractérisé par l’évolution indépendante des gamétocytes des deux sexes: le gamétocyte femelle grossit sans se diviser et devient un macrogamète, tandis que le gamétocyte mâle donne, après division, de nombreux microgamètes.
Mais il existe un autre type de cycle, dont il est difficile de dire s’il est plus primitif que le précédent; c’est le cycle adéléen .
L’exemple le mieux connu, décrit par Yarwood en 1937, est celui d’Adelina cryptocerci , parasite du tissu adipeux d’une blatte américaine xylophage, Cryptocercus punctatus , où s’effectue la totalité du cycle (fig. 3). Le trait le plus saillant en est le rapprochement précoce des gamétocytes ou gamontes (fig. 3 g 1 et 3 g 2) qui réalisent une sizygie, à la manière des Grégarines (fig. 3 h). Sécrétant autour d’eux une fine membrane, ils constituent ensuite un gamétokyste (fig. 3 i). Chez Adelina (au contraire de ce qu’on observe chez les Grégarines), le gamonte femelle ne se divise pas mais grossit et le gamonte mâle ne se divise que deux fois produisant ainsi quatre microgamètes mobiles et biflagellés. L’un d’eux fécondera le gamète femelle (fig. 3 j); le zygote, résultant de l’union de ces deux gamètes, se transformera en ookyste (fig. 3 k). Le cycle d’Adelina semble donc intermédiaire entre le cycle des Grégarines et celui d’Eimeria .
Ces variations importantes du cycle évolutif ont amené les systématiciens à subdiviser les Coccidies en deux ordres: Adéléidés et Eimeridés. Lorsque le développement se fait sur un seul hôte, on dit qu’il est monoxène; mais s’il nécessite le passage sur deux hôtes différents, on le qualifie d’hétéroxène.
Les Sarcocystidés (ou Sarcosporidies)
Les observations en microscopie électronique de ces parasites (connus depuis près d’un siècle mais un peu oubliés) ont montré une grande ressemblance avec les Coccidies et ont relancé les études relatives à leur mode de transmission qui a été enfin complètement élucidé.
Le cycle évolutif est caractérisé par l’existence obligatoire de deux hôtes successifs: un prédateur, par exemple carnassier, (hôte définitif) et une proie, herbivore ou omnivore (hôte intermédiaire). La schizogonie s’effectue chez la proie tandis que la gamogonie et la sporogonie sont strictement localisées dans la paroi de l’intestin du prédateur. Exemple: Sarcocystis (= Isospora) suihominis (effectue son cycle entre le porc et l’homme; fig. 4; Melhorn 1979). Le porc, hôte intermédiaire, s’infecte par ingestion de sporocystes qui ont été rejetés dans les excréments de l’homme. Dès le 4e jour les schizontes sont observés dans les cellules andothéliales du foie (fig. 4 b) puis dans celles de divers autres organes. Les schizontes sont logés dans le cytoplasme même de la cellule-hôte; leur noyau devient géant puis se fragmente et donne un grand nombre de mérozoïtes (fig. 4 c) qui se multiplient à nouveau du 15e au 19e jour après l’infection. À ce stade de prolifération intense du parasite, l’hôte est souvent gravement malade et meurt parfois. C’est ainsi que les Sarcosporidies sont souvent la cause de lourdes pertes dans les élevages intensifs (Sarcosporidiose). Mais si l’animal survit les mérozoïtes essaiment vers le 20e jour par le système circulatoire vers le tissu musculaire où ils vont former, à l’intérieur des fibres, des kystes (fig. 4 d) bourrés de germes infectieux capables d’assurer l’infestation de l’hôte définitif, c’est-à-dire l’homme. Ce dernier s’infecte en ingérant des mérozoïtes (4e) apportés par la viande de porc crue ou mal cuite. L’homme souffre alors d’une diarrhée intense et sévère pouvant aller jusqu’au collapsus, après avoir seulement mangé 100 grammes de viande de porc infecté. Il faut d’ailleurs remarquer que l’homme ou les Primates peuvent également jouer le rôle d’hôte intermédiaire et héberger des kystes dans leurs tissus musculaires sans qu’on connaisse le mécanisme d’une telle évolution.
Les autres espèces de Sarcosporidies
Certaines espèces de Sarcosporidies sont très pathogènes pour leur hôte intermédiaire (porc, bœuf, mouton) et entraînent rapidement la mort. D’autres au contraire ne causent aucun trouble. Parmi les hôtes définitifs, c’est l’homme qui réagit le plus violemment à la présence des parasites; chien, chat, oiseaux de proie, serpents etc. ne présentent pas de troubles intestinaux. Mais l’identification de ces maladies n’est pas simple car un hôte donné (intermédiaire ou définitif) peut héberger plusieurs espèces de sarcosporidies. C’est ainsi que l’homme peut être parasité par deux espèces différentes qui poursuivent leur cycle évolutif respectivement chez le porc et chez le bœuf. Le chien en héberge trois, le chat, deux.
Aussi, pour plus de facilité, les nouveaux noms spécifiques combinent à la fois le nom de l’hôte intermédiaire et de l’hôte définitif.
Les Babesiidés
Ces parasites du bétail, connus depuis longtemps, sont aujourd’hui classés définitivement dans les Sporozoaires. Les espèces du genre Babesia (Piroplasma ) vivent dans le sang du bétail, bœuf, mouton, chez lesquels s’effectue la schizogonie. La maladie a reçu le nom de piroplasmose. L’hôte intermédiaire est la larve de la tique (Acariens) dans le corps de laquelle ont lieu la gamogonie et la sporogonie. La transmission d’un hôte à l’autre se fait à l’occasion d’une piqûre. Les Theileria sont également les agents d’importantes maladies connues sous le nom de Theilerioses qui frappent les bovins, les moutons et les chèvres. Elles causent des pertes importantes parmi les troupeaux d’Afrique, d’Europe du Sud et d’Asie. La phase de schizogonie a lieu dans les cellules sanguines du Mammifère; la gamogonie et la sporogonie s’effectuent dans le corps de la tique qui est l’hôte intermédiaire (fig. 5) [Heydorn et Melhorn 1975-1979]. Les Theileria comme les Babesia et les Hémosporidies sont dépourvus de «spore» typique, mais le germe infectieux possède bien la structure typique des zoïtes des sporozoaires (enveloppe trimembranaire et complexe apical ou rhoptries; Vivier, 1969).
Les piroplasmes sont des organismes qui ont subi au maximum la dégradation parasitaire au niveau cellulaire: extrême pauvreté en organites cellulaires, absence de vacuole phagocytaire... On les considère comme les plus dégradés des Sporozoaires et on les place au voisinage des Hémosporidies.
Les Toxoplasmatinés
Les Toxoplasma sont des parasites des Mammifères qui ont une certaine importance en parasitologie humaine. Mais leur cycle n’est connu dans le détail que depuis 1970 (Hutchinson, Frenkel). L’hôte principal est le chat. Le parasite se développe dans les cellules de l’épithélium intestinal où s’effectue d’abord la schizogonie puis la gamogonie. L’ookyste est rejeté dans l’intestin et expulsé avec les excréments. D’autres espèces que le chat peuvent absorber des ookystes: divers oiseaux ou Mammifères et principalement l’homme. Chez ces hôtes intermédiaires, le parasite peut se développer indéfiniment par schizogonie ou bien former un kyste [cf. TOXOPLASMOSE].
Les Hémosporidies
Les Hémosporidies sont des Eimeridés hétéroxènes. Leur importance est grande car ils parasitent les Vertébrés (Reptiles, Oiseaux, Mammifères), chez lesquels se produit la schizogonie; cette dernière a toujours lieu dans les globules rouges. Les phases de gamogonie et la sporogonie se déroulent le plus souvent chez un insecte piqueur.
Les espèces les plus importantes en parasitologie humaine appartiennent au genre Plasmodium . Elles provoquent la malaria ou paludisme , maladie qui cause le plus de victimes dans le monde. Si le paludisme est connu depuis la plus haute antiquité, les agents responsables n’ont été découverts qu’en 1878 par un médecin militaire français, Laveran, et le rôle des anophèles dans le cycle évolutif a été mis en évidence par Ross (1895) et Grassi (1898).
Cycle de Plasmodium vivax
C’est l’un des agents du paludisme. Il provoque la «fièvre tierce bénigne», ainsi appelée parce que les accès de fièvre se produisent les 1er et 3e jours, etc. Le parasite vit en effet dans les globules rouges du sang de l’homme, où a lieu la schizogonie: en se divisant, les parasites forment dans l’hématie des «corps en rosette» caractéristiques comprenant de huit à seize schizozoïtes qui seront mis en liberté par l’éclatement du globule. Chaque phase de schizogonie dure de 24 à 48 heures. C’est un processus à peu près synchrone pour les parasites d’un même hôte et ce synchronisme est la cause des accès de fièvre, caractéristiques du paludisme, qui accompagnent l’éclatement des hématies et la mise en liberté des schizozoïtes. Mais, au cours de leur évolution, certains parasites, au lieu de donner des corps en rosette, se différencient en gamétocytes qui ne pourront poursuivre leur évolution que dans le corps d’un moustique, l’anophèle, Diptère de la famille des Culicidés, qui les ingère en piquant un paludéen.
La différenciation des gamètes se poursuit dans l’intestin moyen du moustique et la fécondation aboutit à la formation d’un zygote mobile (oocinète) qui traverse la paroi épithéliale de l’intestin pour s’enkyster à sa face externe. Les ookystes ainsi formés poursuivent leur évolution si la température est supérieure à 16 0C. Leur division donne naissance à des sporozoïtes qui, libérés dans la cavité générale de l’insecte, émigrent vers les glandes salivaires. Ils s’accumulent dans les canaux salivaires et sont prêts à être inoculés à l’homme au moment de la piqûre, en même temps que la salive du moustique.
Inoculation à l’homme
Pendant longtemps, on a admis que les sporozoïtes parvenus dans le sang de l’homme pénétraient directement dans les hématies après une période dite d’incubation d’une dizaine de jours. Cependant, les travaux de James et Tate ainsi que ceux de Shortt et Garnham ont montré que le cycle était beaucoup plus compliqué. Les sporozoïtes inoculés par la piqûre de l’anophèle se développent en effet d’abord dans les cellules du parenchyme hépatique où s’effectue la première phase de multiplication asexuée du parasite; la schizogonie tissulaire , qui dure de sept à huit jours et qui constitue ce qu’on appelle la phase préérythrocytaire correspondant à la période d’incubation de la maladie. Les schizozoïtes produits pendant cette période ont reçu le nom de cryptozoïtes. Leur évolution ultérieure peut se faire selon deux modalités. Certains d’entre eux gagnent la circulation sanguine, pénètrent dans les hématies et y suivent le cycle schizogonique connu depuis longtemps: c’est la phase érythrocytaire qui s’accompagne des fièvres classiques du paludisme.
D’autres sont capables d’envahir de nouvelles cellules hépatiques et de maintenir la schizogonie tissulaire. Il se constitue ainsi de véritables dépôts parasitaires d’où peuvent partir à tous moments dans le sang des «vagues de schizozoïtes». C’est la phase exo-érythrocytaire , responsable des rechutes du paludisme, qui surviennent notamment dans la fièvre tierce bénigne dont l’agent est Plasmodium vivax .
Les différentes espèces de Plasmodium
Laveran avait décrit trois formes de Plasmodium qui correspondent bien à trois espèces distinctes non seulement par leur aspect morphologique mais aussi par leur répartition géographique, leur évolution, leur action pathogène et même leur sensibilité à l’égard des différents médicaments. À ces trois espèces: P. falciparum , P. vivax et P. malariae est venue s’ajouter un autre P. minutum (appelée également P. ovale ). Elles provoquent diverses formes de paludisme.
Les insectes vecteurs et la lutte contre le paludisme
Le paludisme est transmis par un moustique Culicidé, Anopheles maculipennis . Mais on avait constaté depuis longtemps que la distribution de l’anophèle ne correspondait pas obligatoirement à la carte d’extension de la maladie. Roubaud (1921), Wesenberg-Lund, James (1929) montrèrent que A. maculipennis pullulait dans des régions où le paludisme avait spontanément disparu. Il fut reconnu que, dans ces régions, ces moustiques (qui piquaient rarement l’homme mais plutôt les animaux domestiques) constituaient des races distinctes. Martini, Missicoli et Hackett (1931) démontrèrent qu’A. maculipennis n’est pas une espèce homogène, mais un complexe de formes représentant en réalité des espèces indépendantes malgré leur étroite ressemblance morphologique. Les différences portent sur leur biologie, leur adaptation au milieu et surtout leurs tropismes dans la recherche des animaux nourriciers. Ces différentes espèces peuvent être reconnues à la forme de leurs œufs et de leurs pontes; ce qui a permis leur classement géographique et l’étude de leurs aptitudes à transmettre le paludisme. On identifie ainsi sept espèces indépendantes réparties en Europe, en Asie occidentale, en Afrique du Nord et au Proche-Orient. Parmi elles, trois ou quatre seulement ont un rôle actif dans la transmission de la maladie: les espèces labranchiae et scharovi sont localisées dans les contrées chaudes de l’Afrique du Nord, de l’Italie et du Moyen-Orient, l’espèce atroparvus est répandue surtout en Europe du Nord, mais on la trouve aussi en Espagne.
La lutte contre le paludisme est avant tout une lutte contre les anophèles. Les méthodes employées contre ces moustiques consistent souvent à répandre des insecticides de contact (le D.D.T. par exemple) sur de larges surfaces et par tous les moyens, y compris l’avion. Mais il ne faut pas négliger pour autant l’utilisation des ennemis naturels des larves aquatiques des anophèles, au premier rang desquels on doit placer Gambusia affinis , poisson vivipare originaire des États-Unis, qui a été importé avec succès dans divers pays tropicaux et tempérés du monde entier.
Quant au traitement du paludisme chez l’homme, il a reposé longtemps sur l’emploi de la quinine, dont l’efficacité se limite aux périodes fébriles car, si elle est active pendant la phase schizogonique, elle n’agit pas sur les formes sexuées. C’est pourquoi on a eu recours plus récemment à divers composés synthétiques: nivaquine, paludrine, pyriméthamine, pracquine, rhodoquine, etc., que l’on utilise seuls ou en association.
Encyclopédie Universelle. 2012.