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enchanter

enchanter [ ɑ̃ʃɑ̃te ] v. tr. <conjug. : 1>
• déb. XIIe; lat. incantare
1Soumettre à une action surnaturelle par l'effet d'une opération magique. charmer, ensorceler. Enchanter qqn au moyen de sortilèges, de formules magiques, d'un philtre. « Elle ne pouvait pas s'échapper. Il l'avait enchantée comme une bête » (Bosco).
Fig. Soumettre à un charme irrésistible et inexplicable. envoûter, subjuguer. « Enchanté, tourmenté et comme possédé par le démon de mon cœur » (Chateaubriand).
2Par ext. Remplir d'un vif plaisir, satisfaire au plus haut point. ravir. « un aspect insolite qui m'enchantait » (A. Gide). Vos propositions ne m'enchantent guère.
⊗ CONTR. Désenchanter.

enchanter verbe transitif (bas latin incantare, prononcer des formules magiques) Littéraire. Soumettre quelqu'un, quelque chose à un charme, à un enchantement ; ensorceler : La fée avait enchanté les deux amants. Procurer à quelqu'un un vif plaisir ; ravir : Il enchantait son auditoire par son histoire.enchanter (expressions) verbe transitif (bas latin incantare, prononcer des formules magiques) Ne pas enchanter quelqu'un, ne pas lui plaire du tout. ● enchanter (synonymes) verbe transitif (bas latin incantare, prononcer des formules magiques) Littéraire. Soumettre quelqu'un, quelque chose à un charme, à un enchantement ; ensorceler
Synonymes :
- captiver
- ensorceler
- envoûter
- subjuguer
Procurer à quelqu'un un vif plaisir ; ravir
Synonymes :
- charmer
- fasciner
- séduire
Ne pas enchanter quelqu'un
Synonymes :
- ravir

enchanter
v. tr.
d1./d Ensorceler par des opérations magiques.
d2./d Fig. Séduire comme par un charme magique. Une voix qui enchantait tous ceux qui l'entendaient.
|| Par ext. Causer un vif plaisir à, ravir. Cette nouvelle m'enchante.

⇒ENCHANTER, verbe trans.
I.— Emploi trans.
A.— Soumettre une personne ou une chose à l'action de charmes. Synon. charmer, ensorceler.
1. [Le compl. désigne un être vivant]
a) Agir sur une personne au moyen d'opérations magiques de telle sorte qu'elle perde le sens de sa personnalité ou le contrôle de sa volonté. La fée Viviane enchanta l'enchanteur et le retint charmé dans un buisson d'aubépine (FRANCE, J. d'Arc, t. 1, 1908, p. 201) :
1. Comme la voix des sirènes enchantait les compagnons d'Ulysse, de même je me sentis enchanté : Valérie me semblait être sur le rivage...
KRÜDENER, Valérie, 1803, p. 152.
b) [Le compl. désigne des animaux] Fasciner. Ses regards [du serpent] enchantent les oiseaux dans les airs (CHATEAUBR., Génie, t. 1, 1803, p. 114). Linus fut déchiré par des chiens enragés, mais Orphée enchantait les bêtes féroces (BARRÈS, Barbares, 1888, p. 158).
2. [Le compl. désigne une chose]
a) Douer de pouvoirs surnaturels. Interprétant ses propres œuvres il [Debussy] ne touchait pas l'étrange instrument aux doubles palettes d'ébène et d'ivoire : il l'enchantait (SUARÈS, Debussy, 1936, p. 174).
b) Exercer sur un objet une action surnaturelle de telle sorte qu'il perde ses vertus propres. On le voulait pendre [Jehosoua — Jésus] à du bois, mais tous les bois se rompirent, parce qu'il les avoit enchantés (CHATEAUBR., Ét. ou Discours hist., t. 2, 1831, p. 340). En deux années le fossé fut achevé. Mais l'eau des lacs, enchantée par les Dragons, refusa d'y couler (THARAUD, Dingley, 1906, p. 49).
En partic. [L'obj. désigne une douleur, un mal] Calmer comme par des formules magiques. Il est bien vrai que lorsqu'un homme est malade, il faut tâcher d'enchanter doucement le mal par des paroles puissantes, sans négliger néanmoins aucun moyen de la médecine matérielle (J. DE MAISTRE, Éclairciss. sur sacrif., 1821, p. 310). Si j'avais une atteinte semblable, je vous demanderais hospitalité au val pour enchanter ma souffrance (M. DE GUÉRIN, Corresp., 1834, p. 178) :
2. Et pour que vous le [A. Daudet] connaissiez mieux, pour que vous l'aimiez davantage, vous tous, petits ou grands dont il enchanta la misère (...) je vais laisser parler ces voix dont l'hérédité et l'affection paternelle ont empli mon âme respectueuse.
L. DAUDET, A. Daudet, 1898, p. X.
B.— Au fig.
1. [Le compl. désigne une pers. ou une collectivité]
a) P. anal. Séduire quelqu'un, exercer sur ses sens, son cœur, son esprit comme une emprise magique. Synon. envoûter, fasciner.
[Le suj. désigne une pers.] Il est vrai que si Rousseau enchanta son siècle, il lui fut en même temps insupportable (MAURIAC, Gds hommes, 1949, p. 75) :
3. Vous ne vous connaissez pas, mon cher. Avec un peu de tenue, en six mois, vous enchanteriez une Anglaise de cent mille livres...
BALZAC, Ursule Mirouët, 1841, p. 120.
[Le suj. désigne une chose] Ses lettres l'enchantaient. L'enchantement tombait quand elle le voyait, chaque dimanche soir (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1460) :
4. ... voilà pourquoi cette langue, quand elle est bien parlée, foudroie l'homme comme la foudre (...) ou l'enchante comme un philtre, et le berce immobile et charmé...
LAMARTINE, Des Destinées de la poésie, 1834, p. 387.
Emploi abs. Comme Térence, avec qui il a plus d'une ressemblance pour le fond des sujets, il [l'abbé Prévost] a de ces grâces de diction et de ces finesses rapides qui enchantent (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 9, 1851-62, p. 131). Tout ce mystère enchante, déçoit, ravit, excède tour à tour (THARAUD, Fête arabe, 1912, p. 30).
b) P. ext., usuel. Causer un vif plaisir à quelqu'un. (Quasi-)synon. ravir, réjouir, satisfaire; anton. décevoir. La raison est arrivée à Philippe un peu tard, mais elle est venue (...) sa conduite ici enchante monsieur Hochon, et il y jouit de la considération générale (BALZAC, Rabouilleuse, 1842, p. 546). L'œuvre des autres me dégoûte, la mienne ne m'enchante pas. Voilà ma force et ma faiblesse (RENARD, Journal, 1900, p. 603). Le mot bistro m'enchante. Je lui trouve un air guilleret (PONCHON, Muse cabaret, 1920, p. 17) :
5. Tout l'enchante, la neige et le printemps, le bruit de la fontaine, les cloisons de sapins, et ce grand pays vert qu'on voit de la fenêtre, sous l'arc d'une branche de noyer.
CHARDONNE, Éva, 1930, p. 69.
2. [Le compl. désigne une chose] Embellir comme par l'effet d'une opération magique (un lieu, un moment). Le rossignol encore enchantera nos bois (DELILLE, Homme des champs, 1800, p. 133). Notre maison enchantée par la magie de sa présence (BOURGET, Actes suivent, 1926, p. 31). Toute la légèreté, le printemps intérieur qui avait enchanté sa matinée, avait fait place à une torpeur maussade (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 36) :
6. Eh bien! ce monde ainsi métamorphosé par la puissance de l'homme, cette nature qu'il a refaite à son image, cette société qu'il a ordonnée sur la règle du juste, ces merveilles de l'art dont il a enchanté sa vie, ne suffisent point à l'homme.
COUSIN, Cours d'hist. de la philos. mod., t. 1, 1847, p. 11.
Emploi pronom. à sens passif. Devenir enchanté, tirer comme un enchantement de quelque chose. Chopin avait enfin reçu son piano, et les voûtes de la cellule s'enchantaient de ses mélodies (SAND, Corresp., t. 2, 1812-76, p. 131) :
7. ... toutes ces petites choses rattachées à quelques souvenirs, s'enchanteront des mystères de mon bonheur ou de la tristesse de mes regrets.
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, p. 127.
II.— Emploi pronom. (gén. au fig.).
A.— Réciproque. Se communiquer réciproquement une profonde et vive satisfaction. Est-ce qu'on peut trop s'enchanter, trop se cajoler, trop se charmer? (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 643).
B.— Réfl. Exercer sur soi comme un enchantement au moyen de quelque chose. Il [Beyle] est d'ailleurs très-fin et sagace quand il observe que l'ennui chez les Français, au lieu de chercher à se consoler et à s'enchanter par les beaux-arts, aime mieux se distraire et se dissiper par la conversation (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 9, 1851-62, p. 311).
C.— À valeur subjective. Tirer une rare satisfaction, une sorte de plaisir enivrant de quelqu'un ou de quelque chose.
1. [Le compl. est introd. par la prép. de]
a) [De + subst.]
[Le compl. désigne une pers.] C'est qu'ici il [Rousseau] ne pense pas à nous convaincre, il écoute son cœur, s'enivre de souvenirs, s'enchante de lui-même (MAURIAC, Gds hommes, 1949, p. 70).
[Le compl. désigne une chose] Avant que Bergson l'eût introduit [Péguy] dans une philosophie qui est faite, si l'on peut dire de beaucoup de silence et d'oreille penchée sur soi-même il s'était enchanté des grandes constructions hégéliennes (THARAUD, Péguy, 1926, p. 3) :
8. ... elle [Françoise] connaissait bien cette tendre tyrannie. Xavière ne cherchait pas le plaisir d'autrui, elle s'enchantait égoïstement du plaisir de faire plaisir.
BEAUVOIR, L'Invitée, 1943, p. 140.
b) [de + inf.] Tous s'enchantaient de pouvoir paisiblement dormir près de l'aire (KAHN, Conte or et sil., 1898, p. 141).
2. [Le compl. est introd. par la prép. à] Rare.
a) [à + subst.] Pour moi, c'est lire sans comprendre que de s'enchanter aux cadences et aux sonorités d'un texte sans égard à la signification des mots (AYMÉ, Confort, 1949, p. 37).
b) [à + inf.] M. de Charlus s'enchantait à raconter des mots involontairement typiques (PROUST, Temps retr., 1922, p. 766).
Rem. La docum. atteste chez A. de Noailles l'emploi adj. du part. prés. enchantant, ante. Qui a la vertu d'un enchantement. Synon. rare de enchanté II B 1. — Mon désir, mon soupir, ont la forme aujourd'hui De l'absente, lointaine, enchantante colline (Ombre jours, 1902, p. 163).
Prononc. et Orth. :[], (j')enchante []. Enq. : // (il) enchante. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1121-34 « soumettre à un pouvoir magique » (PH. DE THAON, Bestiaire, éd. E. Walberg, 1621); 1228 part. passé « sous le charme » (ici de la joie et du bonheur) (J. RENART, Guillaume de Dole, éd. F. Lecoy, 3439). Empr. au lat. imp. incantare « chanter des formules magiques; consacrer par des charmes; ensorceler ». Fréq. abs. littér. :791. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 060, b) 721; XXe s. : a) 996, b) 1 471. Bbg. DUCH. Beauté 1960, pp. 81-84.

enchanter [ɑ̃ʃɑ̃te] v. tr.
ÉTYM. Déb. XIIe; du lat. incantare « prononcer des formules magiques », de in- marquant l'effet, le résultat, et cantare. → Chanter.
1 Soumettre à une action surnaturelle, par l'effet d'une opération magique. Charmer, ensorceler. || Enchanter qqn au moyen d'un philtre, d'une formule, d'un rite, d'un sortilège. || Enchanter les yeux de fantasmagories.Enchanter un objet.Au p. p. → ci-dessous, cit. 1, 3, et supra cit. 12.1.
1 Je faux (me trompe) : l'amour qu'on charme est de peu de séjour.
Être beau, jeune, riche, éloquent, agréable,
Non les vers enchantés, sont les sorciers d'Amour.
Ronsard, Sonnets pour Hélène, XXIV.
2 Quelque divinité ennemie avait enchanté mes yeux; je croyais voir Ithaque.
Fénelon, Télémaque, IX.
3 Tristan, dit la reine, les gens de mer n'assurent-ils pas que ce château de Tintagel est enchanté et que, par sortilège, deux fois l'an, en hiver et en été, il se perd et disparaît aux yeux ?
J. Bédier, Tristan et Iseult, VI, p. 65.
4 Je compris tout à coup qu'elle ne pouvait pas s'échapper. Il l'avait enchantée comme une bête.
H. Bosco, l'Âne Culotte, p. 166.
(V. 1190). Soumettre à un charme irrésistible et inexplicable. || Enchanter les cœurs. Captiver, conquérir, envoûter, subjuguer. Par ext. || Il a perdu la femme qui enchantait sa vie. || La musique qui enchante nos soirées.
5 S'il faut des coups de surprise à nos cœurs enchantés de l'amour du monde (…)
Bossuet, Oraison funèbre de la duchesse d'Orléans.
6 (…) les traîtres appas dont je fus enchanté.
Molière, Don Garcie, II, 5.
7 (…) ce peintre est à peu près en peinture ce que l'Arioste est en poésie. Celui qui est enchanté de l'un est inconséquent s'il n'est pas fou de l'autre.
Diderot, Salons, Boucher.
8 Enchanté, tourmenté et comme possédé par le démon de mon cœur.
Chateaubriand, René (→ Démon, cit. 11).
2 (Av. 1648). Par ext. Remplir (qqn) d'un vif plaisir, satisfaire au plus haut point. || Cette solution m'enchante, me satisfait au plus haut point. || Il ne s'y attendait pas, cela l'enchante. Ravir.(Passif et p. p.). || Il a été enchanté de cette soirée, il en est revenu enchanté (→ ci-dessous, cit. 9, et Enchanté).
9 Une conversation ingénieuse avec un homme est un unisson; avec une femme, c'est une harmonie, un concert. Vous sortez satisfait de l'une; vous sortez de l'autre enchanté.
Joseph Joubert, Pensées, VIII, LXVIII.
10 J'aimais sortir avec mon père; et, comme il s'occupait de moi rarement, le peu que je faisais avec lui gardait un aspect insolite, grave et quelque peu mystérieux qui m'enchantait.
Gide, Si le grain ne meurt, I, I, p. 17.
11 La sagesse serait de dormir jusqu'à cette gare terminus (la mort). Mais, hélas, le trajet nous enchante, et nous prenons un intérêt si démesuré à ce qui ne devrait nous servir que de passe-temps qu'il est dur, le dernier jour, de boucler nos valises.
Cocteau, le Grand Écart, IX, p. 172.
——————
s'enchanter v. pron.
1 Se parer d'un charme poétique.
12 (…) toutes ces petites choses, rattachées à quelques souvenirs, s'enchanteront des mystères de mon bonheur ou de la tristesse de mes regrets.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. V, p. 394.
2 Littér. Se plaire, se délecter à une idée. || S'enchanter d'une idée (→ Arbitre, cit. 15), de fictions (→ Arracher, cit. 47).
——————
enchanté, ée p. p. adj.
1 (1661). Soumis à un enchantement, frappé par un sortilège. || La princesse enchantée de la Belle au bois dormant. || Château enchanté. → ci-dessus, cit. 3. || Cercle enchanté.Par anal. || L'Âme enchantée, roman de Romain Rolland.
12.1 Cependant, la nuit étant fort avancée, le sultan prit quelque repos. Pour le jeune prince, il la passa à son ordinaire dans une insommie continuelle (il ne pouvait dormir depuis qu'il était enchanté) mais avec quelque espérance néanmoins d'être bientôt délivré de ses souffrances.
A. Galland, les Mille et Une Nuits, t. I, p. 85.
(Av. 1648). Qui détient un pouvoir d'enchantement (après l'avoir reçu). Magique. || Le cor enchanté des légendes allemandes. || La Flûte enchantée, titre français d'un opéra de Mozart.Des vers enchantés. → ci-dessus, cit. 1. — N. (Rare). || Un, une enchantée.
2 (1669). Vieilli. Qui produit, transmet un effet irrésistible, inexplicable. || Un séjour enchanté. Enchanteur. || Des lieux enchantés.
13 Ô terre, ô mer, ô nuit, que vous avez de charmes !
Miroir éblouissant d'éternelle beauté,
Pourquoi, pourquoi mes yeux se voilent-ils de larmes
Devant ce spectacle enchanté ?
Lamartine, Harmonies, I, 10.
3 (Déb. XIIIe). Personnes. Qui ressent un grand plaisir, une intense satisfaction (→ ci-dessus, cit. 9). || Ils étaient, ils paraissaient tous enchantés, enchantés de cette soirée. || Je suis enchanté que vous veniez, de votre venue, de vous recevoir.
(Avec une valeur conventionnelle). || Je suis enchanté de faire votre connaissance. Ellipt. || Enchanté !
14 Quand on le présentait, il s'inclinait à la fois avec un sourire de scepticisme et un respect exagéré, et si c'était à un homme, disait : « Enchanté, Monsieur », d'une voix qui se moquait des mots qu'elle prononçait, mais avait conscience d'appartenir à quelqu'un qui n'était pas un mufle.
Proust, À la recherche du temps perdu, Pl., t. I, p. 881.
Par ext. || Un air enchanté.
CONTR. et COMP. Désenchanter.
DÉR. Enchantement, enchanteur.

Encyclopédie Universelle. 2012.