emboucher [ ɑ̃buʃe ] v. tr. <conjug. : 1>
1 ♦ Mettre à sa bouche (un instrument à vent). Il « emboucha son clairon, et sonna aux champs » (Loti). — Vieilli Emboucher la trompette.
2 ♦ Munir (un animal) de qqch. qu'on introduit dans la bouche. Emboucher un cheval, lui mettre le mors.
♢ Fig. Vx Endoctriner (qqn), lui faire la leçon. — P. p. adj. Mod. MAL EMBOUCHÉ(E) : mal élevé(e), qui n'a que des grossièretés à la bouche (en parlant d'une personne). Une gamine particulièrement mal embouchée.
● emboucher verbe transitif (de bouche) Porter à ses lèvres l'embouchure d'un instrument à vent. Mettre à un cheval le mors (embouchure) approprié à sa bouche. ● emboucher (expressions) verbe transitif (de bouche) Littéraire. Emboucher la trompette, prendre un ton élevé, sublime ; annoncer quelque chose à grand bruit. ● emboucher verbe transitif (de embaucher, mot dialectal, avec l'influence de bouche) Placer un animal d'élevage sur une embouche, pour l'engraisser.
emboucher
v. tr.
d1./d MUS Mettre à la bouche (un instrument à vent). Emboucher un clairon.
d2./d Emboucher un cheval, lui mettre le mors dans la bouche.
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emboucher
v. tr. Mettre (un animal) au pré pour l'engraisser.
I.
⇒EMBOUCHER1, verbe trans.
I.— Emploi trans.
A.— [Le compl. d'obj. désigne qqc. que l'on met contre ou dans la bouche]
1. MUS. [Le compl. d'obj. désigne un instrument à vent] Porter à sa bouche l'extrémité de cet instrument pour produire des sons. Emboucher une clarinette, sa trompette. Il empoigna son clairon, l'emboucha, sonna au ralliement (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 375). Il a embouché le cor de chasse. Il a soufflé dedans un grand coup et puis des rauques crevaisons... encore des couacs et des petits râles!... (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 667) :
• 1. Leur cri [des pingouins] est celui d'une trompette mal embouchée, il ressemble aussi au cri du paon, mais est moins aigu, plus creux.
CENDRARS, Les Confessions de Dan Yack, 1929, p. 220.
— P. métaph. Il [le vent] embouche le tuyau de la pompe et corne dedans (COLETTE, Pays. et portr., 1954, p. 100).
— Loc. fig., vieilli. Emboucher la trompette [Dans un récit] Adopter un ton trop élevé ou solennel, grandiloquent. Pourquoi tant d'emphase pour cette science prosaïque, pourquoi emboucher si fort la trompette à propos de l'art de lever le pied? (BALZAC, Théor. démarche, 1833, p. 615).
♦ P. méton du suj. Trente journaux d'Europe embouchèrent la trompette pour célébrer ses vertus (FOURIER, Nouv. monde industr., 1830, p. 9).
♦ P. ext., souvent péj., vieilli. Annoncer, divulguer quelque chose à grand bruit; proclamer avec grandiloquence (cf. claironner). Emboucher la trompette épique, emboucher la trompette du pacifisme, emboucher la trompette républicaine, emboucher la trompette en l'honneur de qqn. La critique (...) emboucha sa trompette retentissante des grands jours (FABRE, Le Roman d'un peintre, 1878, p. 2) :
• 2. Il suffit qu'une pseudo-élite s'empare de Paris, et embouche la trompette de la publicité, pour que la voix du reste de la France soit étouffée.
ROLLAND, Jean-Christophe, Dans la maison, 1909, p. 948.
Emboucher la trompette de la Renommée. Personnages pour lesquels la Renommée embouche l'une ou l'autre de ses trompettes (BALZAC, Comédiens, 1846, p. 304) :
• 3. À la grille du jardin, la Renommée, sur son cheval ailé, embouchait sa trompette éternelle. Les porteurs de journaux criaient la grande victoire de Fleurus.
FRANCE, Les Dieux ont soif, 1912, p. 277.
Rem. On trouve, dans le même sens : Dans mes jours maussades, je me voyais mourir sur un lit de fer, haï de tous, désespéré, à l'heure même où la gloire embouchait sa trompette (SARTRE, Mots, 1964, p. 156).
2. [Le compl. d'obj. désigne l'orifice d'un tuyau, l'embouchure d'un récipient, ou ce tuyau ou ce récipient lui-même] Le porter à (contre ou dans) sa bouche. Emboucher une bouteille. Gondran a embouché le canon de la fontaine. Le tuyau de fer emplit sa bouche; il tette de toutes ses forces pour faire venir l'eau (GIONO, Colline, 1929, p. 76).
Rem. Lar. Lang. fr. donne le syntagme emboucher une pipe.
B.— [Le compl. d'obj. désigne un être animé dans la bouche duquel on met qqc.]
1. MAN. Emboucher un cheval. Lui mettre dans la bouche le mors qui lui convient. Cet éperonnier s'entend bien à emboucher un cheval (Ac. 1835, 1878).
2. Au fig., fam. Emboucher qqn. Lui dicter ce qu'il doit dire. Il l'a bien embouché. On l'a mal embouché (Ac. 1835, 1878).
— P. ext. Emboucher qqn de qqc. Est-ce qu'il [ton mari] m'a dit un seul mot d'excuse pour les grossièretés dont il m'a embouchée comme une cuisinière (ESTAUNIÉ, Bonne Dame, 1891, p. 152).
II.— Emploi pronom. réfl. S'engager dans quelque chose qui est assimilé à une bouche (cf. supra I B).
A.— Vieilli. [Le suj. désigne un cours d'eau] Se déverser dans un autre cours d'eau ou dans la mer. Cette rivière, après avoir passé le long des murailles de la ville, va s'emboucher dans la mer. La Marne s'embouche dans la Seine, à deux lieues au-dessus de Paris (Ac. 1835, 1878) :
• 4. ... son extrémité occidentale [de l'île] est défendue par le fort Degli Alberoni où s'embouche le chenal des grands navires.
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, p. 396.
B.— MAR. [Le suj. désigne un bâtiment] S'engager dans une bouque. Synon. plus usité embouquer.
Rem. Attesté ds Ac. 1932, ROB. (Bateau qui s'embouche) et Lar. Lang. fr.
Prononc. et Orth. :[], (j') embouche []. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Ca 1330 enbouchier « introduire dans une ouverture » (G. DE DIGULLEVILLE, Pèlerinage vie hum., 10244 ds T.-L.); B. 1. 1415 mar. emboucher « pénétrer dans une bouche, une embouchure » (Fév., Réglem. gén. pour la jurid. du prév. des march., § 469, Isambert, Rec., VIII, 571 ds GDF. Compl.); 2. 1680 mar. s'emboucher « se jeter dans (d'un fleuve) » (RICH.); p. anal. 1699 méd. s'emboucher « se déverser dans » (Du Vernay ds Mém. de l'Acad. des sc., p. 229 d'apr. Trév. 1752); C. 1. a) ca 1350 mal enboukiet « endurci, rétif » (G. LE MUISIT, Poésies, I, 367 ds T.-L.); 4e quart XIVe s. mal enbouquié » (d'un cheval) qui ne cède pas à l'impression du mors » (FROISS., Chron., II, 39, Kerv. ds GDF.); 1525 emboucher « mettre le mors dans la bouche du cheval » (CRETIN, Chants roy., a une dame de Lion, f° 174 r°, éd. 1527 ds GDF. Compl.); b) 1461-67 « mettre dans la bouche de quelqu'un; entretenir bouche à bouche » (J. DE BEUIL, Le Jouvencel, f° 238 v° ms. Université ds GDF.) — XVIe s. ds GDF. Compl.; XVe-XVIe s. fig. mal embouché « qui parle grossièrement » (Le vray disant Advoc. des dames, p. 13 ds GDF. Compl.); 1573 (DUPUYS); 2. av. 1570 mus. « mettre dans sa bouche un instrument à vent » (J. GREVIN, Pastorale, éd. L. Pinvert, p. 223); 1771 (Trév. : Emboucher, en style figuré et Poëtique, faire des vers. Emboucher la trompette d'Homère); 1864 id. « dire qqc. à tout le monde » (LITTRÉ). Dér. de bouche; préf. em-(en-); dés. -er; l'a. fr. embouchié « de mauvaise qualité mais dont on met le meilleur sur le dessus » (Cart. de Ponthieu, Richel, 1. 10112, f° 159 v° ds GDF.) — XVe s. ibid. est peut-être un mot différent, v. FEW t. 1, p. 584b). Fréq. abs. littér. :48. Bbg. GOTTSCH. Redens. 1930, p. 338.
II.
⇒2, verbe trans.
,,Mettre un animal à l'herbage pour l'engraisser`` (ST-RIQUIER-DELP. 1975).
Rem. Attesté ds Nouv. Lar. ill.-Lar. Lang. fr.; apparaît sous la forme embaucher dans certains dialectes (cf. étymol.).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1890 (DG). Altération sous l'infl. de bouche du terme dial. embaucher Centre (JAUBERT et JOSSIER Yonne), dér. avec préf. em-(en-), dés. -er, de l'a. fr. bauc, bauch (bau), prob. parce que les animaux destinés à l'abattoir étaient installés d'une façon particulière (FEW t. 15, 1, pp. 38-39).
1. emboucher [ɑ̃buʃe] v. tr.
ÉTYM. 1273; de en-, bouche, et suff. verbal.
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1 (XVIe). Mus. Mettre à sa bouche (un instrument à vent) afin de produire des sons. || Emboucher un cor (cit. 2), une flûte, une clarinette, une trompette.
1 Alors un vieil homme, tout couturé, tout basané, qui attendait ce signal, emboucha son clairon, — son ancien clairon des zouaves d'Afrique, — et sonna « aux champs ».
Loti, Ramuntcho, I, XVII, p. 149.
♦ Par métaphore :
2 Il y a du feu dans l'âtre, mais le vent a embouché la cheminé et il souffle sa musique avec de la fumée, des cendres volantes et en aplatissant la flamme.
J. Giono, Regain, p. 47.
♦ ☑ Loc. Vieilli. Emboucher la trompette : prendre un ton élevé, épique. — (1864). Vieilli et fam. Clamer à grand bruit, divulguer. ⇒ Claironner, trompeter. || Emboucher la trompette en l'honneur de qqn.
3 Les gens de lettres, bien ou mal accueillis chez la gouvernante des enfants du duc d'Orléans (Mme de Genlis), embouchaient la trompette de la renommée, pour exalter ou déprécier cette femme auteur.
Rivarol, Rivaroliana, in Œ., p. 364.
2 Munir (un animal) de qqch. qu'on introduit dans la bouche. — (1525). || Emboucher un cheval, lui mettre le mors.
♦ Fig., vieilli. || Emboucher qqn, lui faire la leçon, lui dicter ce qu'il a à dire. || On l'a bien mal embouché. ⇒ 1. Embouché.
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II (1415). Mar. En parlant d'un bateau, Entrer dans l'embouchure de… || Emboucher une rivière, un canal, un détroit. ⇒ Embouquer.
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s'emboucher v. pron.
1 Mar. S'engager dans une passe resserrée. || Bateau qui s'embouche.
2 (1680). Vieilli. Se déverser, en parlant d'un cours d'eau qui se jette dans un autre ou dans la mer. || La Seine va s'emboucher dans la Manche. ⇒ 2. Déboucher, jeter (se).
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embouché, ée p. p. adj.
♦ Mar. || Bateau embouché, qui s'est engagé dans une passe.
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DÉR. Embouchoir, embouchure.
HOM. 1. Embouché, 2. embouché, 2. emboucher.
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2. emboucher [ɑ̃buʃe] v. tr.
ÉTYM. XIXe; altér., sous l'infl. de bouche, de embaucher dans le sens dial. de « mettre à l'engrais ».
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♦ Placer (un animal) sur une embouche pour l'engraisser.
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DÉR. Embouche, emboucheur.
HOM. 1. Embouché, 2. embouché, 1. emboucher.
Encyclopédie Universelle. 2012.