éblouir [ ebluir ] v. tr. <conjug. : 2>
• v. 1165; lat. pop. °exblaudire, du rad. germ. blauth- « faible »; cf. all. blöde
1 ♦ Troubler (la vue, ou une personne dans sa vision) par un éclat insoutenable. ⇒ aveugler. Ses phares nous éblouissent. Absolt « les murs de la mosquée éblouissaient avec leur réverbération blanche » (Loti).
♢ Technol. Saturer (un récepteur) par un rayonnement intense. Éblouir un radar pour nuire à son fonctionnement.
2 ♦ Fig. Vieilli Surprendre par un éclat trompeur, par qqch. de spécieux. ⇒ 2. fasciner, séduire, tromper. « Ce superbe appareil par lequel tu éblouis le vulgaire » (Bossuet).
♢ (XIXe) Mod. Frapper d'admiration (la vue ou l'esprit), émerveiller. « Nous fûmes éblouis [...] de la propreté hollandaise des planchers » (Gautier). « Nous éblouirons nos compatriotes des récits de nos aventures merveilleuses » (Jarry)(cf. Fam. En mettre plein la vue). « Ceux qui, pour vous éblouir, tentent de s'exprimer avec élégance » (Romains). ⇒ impressionner; fam. épater.
● éblouir verbe transitif (latin populaire exblaudire, du radical germanique blaup, faible) Projeter sur quelqu'un une lumière trop vive qui lui trouble la vue ou, en parlant de la lumière elle-même, troubler la vue par un trop grand éclat ; aveugler : La voiture m'a ébloui avec ses phares. Frapper quelqu'un par sa beauté, son éclat, ses qualités, être la source d'une très grande admiration ; fasciner : Femme qui éblouit tout le monde. Séduire quelqu'un ou l'impressionner en l'aveuglant par une apparence brillante : Sa fortune ne nous éblouit pas. ● éblouir (difficultés) verbe transitif (latin populaire exblaudire, du radical germanique blaup, faible) Emploi Éblouir = frapper les yeux d'un éclat trop vif. Recommandation Éviter le pléonasme éblouir les yeux. Mais dans une construction passive ou réfléchie, on peut dire les yeux sont éblouis par la lumière ou les yeux s'éblouissent. ● éblouir (synonymes) verbe transitif (latin populaire exblaudire, du radical germanique blaup, faible) Projeter sur quelqu'un une lumière trop vive qui lui trouble...
Synonymes :
- aveugler
Frapper quelqu'un par sa beauté, son éclat, ses qualités, être...
Synonymes :
- émerveiller
- fasciner
Séduire quelqu'un ou l'impressionner en l'aveuglant par une apparence brillante
Synonymes :
- épater (familier)
éblouir
v. tr.
d1./d Troubler par une lumière trop vive la vue de. Le soleil l'éblouissait.
d2./d Fig. Surprendre, séduire par une apparence brillante mais trompeuse. Se laisser éblouir par l'éloquence de qqn.
|| émerveiller. Sa virtuosité nous a éblouis.
⇒ÉBLOUIR, verbe trans.
A.— Troubler la vue par un éclat, une luminosité insupportables. La lampe du billard les éblouit et ils clignèrent des yeux (MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p. 64). Il sourit à Josette qui lui sourit d'un air dolent et un éclair de magnésium les éblouit (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 363).
— Absol. Les échos des bois pouvoient à peine répéter les éclats du tonnerre; les éclairs éblouissoient (CRÈVECŒUR, Voyage, t. 2, 1801, p. 10). Le soleil éblouissait. Anna, d'un seul coup ouvrit son ombrelle (REIDER, Mlle Vallantin, 1862, p. 171).
B.— Au fig.
1. Frapper la vue, l'esprit d'admiration. Synon. pop. en mettre plein la vue. Quand les économistes se voient trop pressés sur les principes, (...) ils nous éblouissent de citations (PROUDHON, Syst. contrad. écon., t. 2, 1846, p. 56). Il ne cherchait pas à briller, celui-là, à éblouir les sots (FLAUB., Corresp., 1853, p. 354) :
• 1. Il y a des médecins qui éblouissent leurs clients en leur ordonnant mille choses compliquées. Gibout les éblouissait en ne leur ordonnant rien.
MONTHERLANT, Les Célibataires, 1934, p. 892.
♦ Emploi pronom. réfl. :
• 2. On dit que le procureur général Delangle récite déjà aux intimes son morceau d'effet... Le Delangle est d'avance émerveillé de la chose et s'éblouit de lui-même.
HUGO, Choses vues, 1885, p. 171.
— Altérer le jugement. [Bonaparte] sa double adresse consistait dans l'art d'éblouir les masses et de corrompre les individus (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 2). Ces noms de Phèdre, de Consuelo qu'on nous jetait vite aux yeux pour nous éblouir et aveugler dès qu'il s'agissait d'amour (GIRAUDOUX, Suzanne, 1921, p. 131).
2. P. ext., péj. Séduire volontairement ou involontairement jusqu'à tromper ou se laisser tromper :
• 3. Cette jolie antithèse peut éblouir, sans doute, un esprit étranger à ces sortes de discussions; mais pour tout homme instruit ou averti, il est évident que Condillac prend ici le résultat ou le signe extérieur de la liberté, qui est l'action physique, pour la liberté même, qui est toute morale.
J. DE MAISTRE, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, t. 1, 1821, p. 470.
— Emploi pronom. réfl. Se laisser aveugler, fasciner :
• 4. Le lyrisme de l'auteur [M. Gantillon] semble découvrir le cinéma, nous dénonce ses pompes et ses maléfices, s'éblouit de ses miracles (dans Notre-Dame du cinéma).
COLETTE, La Jumelle noire, 1938, p. 108.
Rem. Le part. passé adj. ébloui est fréq. ds l'expr. avoir l'air ébloui. Après le stage dans les ténèbres, il avait l'air ébloui d'un dormeur que l'on vient d'arracher à ses rêves (DUHAMEL, Passion J. Pasquier, 1945, p. 18).
Prononc. et Orth. :[], (j') éblouis [eblui]. Ds Ac. dep. 1694. Il n'existe pas la même propension à poser un son de transition intervocalique après [u] qu'après , p. ex. dans [] [i]patriote; personne n'écrit []. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1165 s'esbleuir « être ébloui » ([CHRÉTIEN DE TROYES], Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 81) — 1555, Ch. Fontaine ds GDF. Compl.; b) 1181-90 esbloïr trans. (CHRÉTIEN DE TROYES, Perceval, éd. F. Lecoy, 4153); 1470 [éd. 1537] esblouyssant « qui trouble la vue par un éclat trop vif » (Le Livre de la discipline d'amour divine f. 100a ds R. Ét. rab. t. 9, p. 306); c) 1690 intrans. (FUR.); 2. 1552 « impressionner vivement (de la beauté) » (P. RONSARD, Amours ds Œuvres complètes, éd. P. Laumonier, t. 4, p. 28); 1663 éblouissant « qui impressionne vivement le regard par sa beauté » (MOLIÈRE, Impromptu de Versailles, 4); 3. 1559 « tromper, séduire (par l'éloquence, etc.) » (AMYOT, Mar., 81 ds LITTRÉ). Du b. lat. exblaudire, lui-même d'un verbe b. frq. dér. du rad. germ. blaup, cf. a. h. all. blôdi « faible (au physique et au moral) » (KARG-FRINGS), all. blöde « id. ». Fréq. abs. littér. Éblouir : 675. Ébloui : 996. Fréq. rel. littér. Éblouir : XIXe s. : a) 956, b) 1 270; XXe s. : a) 841, b) 867. Ébloui : XIXe s. : a) 1 270, b) 2 064; XXe s. : a) 1 378, b) 1 216. Bbg. WALT. 1885, p. 80.
éblouir [ebluiʀ] v. tr.
ÉTYM. V. 1165, esbleuir, du lat. exblaudire, formé avec le francique blaudi « faible »; cf. all. blöde « faible des yeux ».
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1 Troubler (la vue ou une personne dans sa vision) par un éclat insoutenable. ⇒ Aveugler, blesser (les yeux, la vue). || Le soleil éblouit les yeux, la vue (→ Colza, cit.). || Ses phares nous éblouissaient.
♦ Absolt. || La blancheur de la neige éblouit (→ Blanc, cit. 15).
1 Nos sens n'aperçoivent rien d'extrême, trop de bruit nous assourdit, trop de lumière éblouit (…)
Pascal, Pensées, II, 72.
2 En face, les murs de la mosquée éblouissaient avec leur réverbération blanche.
Loti, les Désenchantées, IV, XXIII, p. 150.
2.1 (…) mais ce qui éblouissait le regard, c'étaient ces icebergs mobiles, semblables à des blocs d'argent en prison, dont l'œil ne pouvait soutenir la réverbération.
J. Verne, le Pays des fourrures, t. I, p. 103.
♦ Littér. (Le compl. désignant une chose, un lieu…) :
3 Je vois se dérouler des rivages heureux
Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone (…)
Baudelaire, les Fleurs du mal, « Spleen et idéal », XXII.
♦ Par ext. Troubler (qqn) dans ses perceptions.
4 (…) une sorte de vertige l'éblouit.
Flaubert, l'Éducation sentimentale, III, I.
2 (1552). Frapper d'admiration (la vue ou l'esprit), émerveiller, briller (cit. 14), éclater, étinceler. || Sa beauté nous éblouissait.
5 Ce n'est pas sans sujet que je mets votre illustre nom à la tête de cet ouvrage. Et de quel autre nom pourrais-je éblouir les yeux de mes lecteurs, que de celui dont mes spectateurs ont été si heureusement éblouis ?
Racine, Andromaque, À Madame.
6 Quand on nous mena dans nos chambres, nous fûmes éblouis de la blancheur des rideaux du lit et des fenêtres, de la propreté hollandaise des planchers et du soin parfait de tous les détails.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 11.
♦ Vieilli (langue class.). Tromper, surprendre par un éclat trompeur, spécieux. — REM. Dans cet emploi, l'idée d'éclat qui trouble l'emporte encore sur celle de tromperie (→ ci-dessous 3.).
7 Cette nouveauté éblouit les yeux du peuple.
Bossuet, Hist., II, 5, in Littré.
♦ Mod. Frapper vivement, produire un sentiment d'étonnement admiratif. ⇒ Aveugler (→ cit. 4), émerveiller, épater (fam.), étonner, étourdir, fasciner, hypnotiser, séduire, surprendre, troubler (→ Donner dans l'œil de quelqu'un; jeter de la poudre aux yeux; fam., en mettre plein la vue). || Éblouir quelqu'un de ses richesses, par ses richesses. || Se laisser éblouir par les apparences (→ Appareil, cit. 6). || Éblouir quelqu'un par sa faconde. ⇒ aussi Impressionner (→ Action, cit. 14; captif, cit. 1).
8 Je m'en allais au hasard, ivre de joie, me répétant un mot qui m'éblouissait comme un soleil levant.
E. Fromentin, Dominique, XV.
9 Oui, et nous éblouirons nos compatriotes des récits de nos aventures merveilleuses.
A. Jarry, Ubu Roi, V, 4.
10 Le « bon sens » consiste à ne se laisser point éblouir par un sentiment ou une idée, si excellents puissent-ils être, jusqu'à perdre de vue tout le reste.
Gide, Journal, 16 oct. 1927.
11 Il y a bien ceux qui, soudain, pour vous éblouir, tentent de s'exprimer avec élégance. Mais quelle gaucherie !
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, XIX, p. 212.
♦ Absolt. || Chercher à éblouir.
12 Mais elle cherchait si peu à éblouir, et son instinct naturel de parure était si exempt de tout orgueil et de toute coquetterie, qu'aussitôt après les saintes cérémonies, elle se hâtait de se dépouiller de ses riches parures et de revêtir la simple veste de gros drap vert, la robe d'indienne rayée de rouge et de noir (…)
Lamartine, Graziella, III, XV.
13 Rien n'éblouit comme l'étonnement de voir tout réussir.
Hugo, Quatre-vingt-treize, III, II, V.
3 (1559). Vieilli. Séduire en trompant. ⇒ Abuser, tromper. || Éblouir quelqu'un par des promesses trompeuses, des artifices (→ Avec, cit. 61).
14 Mais n'espère non plus m'éblouir de parjures.
Corneille, Cinna, IV, 6.
15 J'ai de meilleurs yeux qu'on ne pense, et votre galimatias ne m'a point tantôt ébloui.
Molière, George Dandin, II, 2.
16 Inventez des raisons qui puissent l'éblouir.
Racine, Mithridate, II, 6.
♦ Vx (langue class.). Rendre fier, orgueilleux. ⇒ Enorgueillir. || Son succès l'a ébloui.
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s'éblouir v. pron. (Réfl.).
♦ Se laisser aveugler, fasciner. ⇒ Enorgueillir, illusionner (s'). || Il s'éblouit de son propre succès. || S'éblouir de ses titres, de son intelligence.
17 Vous vous éblouissiez du titre et de l'emploi (…)
Corneille, Sertorius, V, 4.
18 Je ne m'éblouis point de cette illusion (…)
Corneille, Sertorius, III, 1.
19 De leur éclat trompeur je ne m'éblouis pas (…)
Molière, Tartuffe, IV, 1.
20 Il (Saint-Just) s'éblouissait parfois lui-même de fausses clartés (…)
Jaurès, Hist. socialiste… VI, p. 163.
——————
ébloui, ie p. p. et adj.
1 Dont la vision est troublée par un éclat insoutenable. || Ébloui par le soleil. || Yeux éblouis (→ Brasier, cit. 2; cligner, cit. 3).
21 On voyait (…) dans la vaste campagne, briller au soleil les casques, les cuirasses et les boucliers des ennemis; les yeux en étaient éblouis.
Fénelon, Télémaque, IX.
22 La lampe s'éteignit. Il restait ébloui, avec des ronds violets qui lui tournaient dans les yeux.
Sartre, le Sursis, p. 192.
2 Fig. || Ébloui par une telle splendeur, un tel prestige. || Ébloui de ses richesses… (→ Brillant, cit. 10; cordon, cit. 6).
23 Heureux celui qui tombe aussitôt qu'il commence !
Heureux celui qui meurt et qui ferme les yeux
Tout éblouis encor de rêves glorieux !
A. de Vigny, Poésies, « Sur la mort de Byron ».
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CONTR. Assombrir, obscurcir, ternir.
DÉR. Éblouissant, éblouissement.
Encyclopédie Universelle. 2012.