crise [ kriz ] n. f.
• 1478; crisin h. XIVe; lat. méd. crisis, gr. krisis « décision »
1 ♦ Méd. Moment d'une maladie caractérisé par un changement subit et généralement décisif, en bien ou en mal. ⇒ phase (critique).
♢ Cour. Accident qui atteint une personne en bonne santé apparente, ou aggravation brusque d'un état chronique. ⇒ accès, attaque, atteinte, poussée. Être pris d'une crise. Crise d'appendicite, d'asthme. Crise cardiaque. Crise d'épilepsie. Crise de foie. « Suivre, jour à jour, crise par crise, le rythme régulier et continu de l'aggravation » (Martin du Gard).
2 ♦ Par ext. Manifestation émotive soudaine et violente. Crise de nerfs. Crise de fou rire. Piquer une crise de colère, de rage. Ellipt et fam. Piquer une crise, sa crise : se mettre en colère. ⇒ criser cf. Faire un caca nerveux. Ma mère « affligea mon enfance par des accès de mélancolie et des crises de larmes » (France). « Au sortir de ces aberrations, il tombait dans des crises de dégoût » (R. Rolland). — Crise morale, religieuse. Crise d'identité, de conscience (⇒ dilemme) . Traverser une crise.
3 ♦ (1690; par anal.) Phase grave dans l'évolution des choses, des événements, des idées. ⇒ perturbation, rupture (d'équilibre). Période de crise. ⇒ phase (critique). Crises économiques (⇒ contraction, dépression, marasme, récession) . La crise américaine de 1929. ⇒ dépression. Crise génératrice de chômage. — Crise politique. Crise du pouvoir. Crise ministérielle : période pendant laquelle le ministère démissionnaire n'est pas remplacé par un nouveau. — Crise diplomatique, internationale. ⇒ tension; conflit. — La crise du logement. ⇒ pénurie. — Crise sociale. « La Crise de la conscience européenne », de Hazard. ⇒ ébranlement, malaise, 2. trouble. — Pays en crise. Économie en crise. Réunir un cabinet de crise. La crise est ouverte, s'est installée. Gérer la crise. Sortir de la crise (⇒ reprise) .
⊗ CONTR. Latence, rémission. Accalmie, 1. calme, équilibre. Prospérité. Abondance, épanouissement.
● Crise état d'agitation bref et soudain, ensemble de manifestations paroxystiques désordonnées (cris, larmes, rires, etc.).
crise
n. f.
d1./d MED Changement rapide, généralement décisif, en bien ou en mal, survenant dans l'état d'un malade.
|| Survenue brutale d'un état pathologique aigu ou accentuation subite d'une maladie chronique. Crise d'asthme. Crise d'appendicite. Crise cardiaque.
d2./d Paroxysme d'un sentiment, d'un état psychologique. Traverser une crise de conscience. Avoir une crise de larmes, de désespoir.
— Loc. Crise de nerfs: V. nerf.
|| être en crise: traverser une période difficile, où l'on est amené à résoudre de nombreuses contradictions.
|| Loc. Fam. Prendre, piquer une crise, faire sa crise: être en proie à une violente colère.
d3./d Moment difficile et généralement décisif dans l'évolution d'une société, d'une institution. La crise de l'église.
|| Crise ministérielle: période entre la chute d'un ministère et la formation d'un nouveau cabinet.
|| La crise: la période où les difficultés économiques, politiques et idéologiques sont ressenties comme paroxystiques.
⇒CRISE, subst. fém.
I.— [L'accent est mis sur l'idée de manifestation brusque et intense de certains phénomènes, marquant une rupture]
A.— MÉD. Ensemble des phénomènes pathologiques se manifestant de façon brusque et intense, mais pendant une période limitée, et laissant prévoir un changement généralement décisif, en bien ou en mal, dans l'évolution d'une maladie. Il semble que cette paralysie soit la crise de cette maladie (GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p. 185). Dans le choléra, la température, qui était au-dessous de la normale, se relève au moment de la crise (Lar. méd. 1970) :
• 1. Il est dans les révolutions des mouvements contraires et des mouvements favorables à la liberté, comme il est dans les maladies des crises salutaires et des crises mortelles.
ROBESPIERRE, Discours, Sur la guerre, t. 8, 1792, p. 86.
— P. ext. Crise thermale. ,,Ensemble des réactions générales et locales résultant de l'action d'eaux minérales au cours d'une cure thermale`` (KAMEN. 1972). Synon. choc thermal.
— P. anal., DRAMAT. Nœud de l'action dramatique, caractérisé par un conflit intense entre les passions, qui doit conduire au dénouement. On imagine mal une pièce sans crise. Notre travail de dramaturge consiste à nouer une crise et à la dénouer (COCTEAU, Foyer artistes, 1947, p. 158).
B.— [Souvent avec un déterm. désignant un état, un comportement, un organe, etc.] Manifestation brusque et intense, de durée limitée (d'un état ou d'un comportement), pouvant entraîner des conséquences néfastes. Synon. (partiels) accès, attaque, poussée.
1. MÉD. et usuel. [En parlant d'un état morbide] Crise aiguë, crise cardiaque; crise d'appendicite, de foie; l'intervalle entre deux crises, sortir d'une crise. Une crise de sa maladie le retint pourtant une nuit à Épernay (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p. 182). L'hyperpression dans les voies biliaires qui en résulte [d'un calcul] déclenche immédiatement une crise de colique hépatique (QUILLET Méd. 1965, p. 146) :
• 2. ... le malade se mit à tousser. Ce ne fut rien d'abord, une petite crise; mais elle grandit, devint une quinte ininterrompue, puis une sorte de hoquet, un râle.
MAUPASSANT, Bel-Ami, 1885, p. 183.
SYNT. Crise douloureuse, violente; crise appendiculaire, convulsive, dentaire, gastrique, hépatique, nerveuse; crise d'adhérences, d'angine de poitrine, de délire, de démence, de dépression, de douleur, d'étouffement(s), de goutte, de rhumatisme(s), d'urémie; crise d'estomac, de vésicule; apparition, fréquence des crises; au plus fort de la crise; avoir, subir une (des) crise(s); causer, déterminer une crise; la crise se calme, se déclenche, éclate, est passée.
— Spéc. Crise de nerfs. ,,Expression populaire pour désigner des manifestations paroxystiques à caractères neuro-psychiatriques et comportant plus particulièrement des manifestations psychomotrices, et des troubles de la conscience et du comportement`` (LAFON 1969). Une terrible crise de nerfs; avoir, faire, piquer (fam.) une crise de nerfs. Le Chinois (...) secoué par la crise de nerfs (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 407).
♦ P. métaph. Les tourmentes sont les crises de nerfs et les accès de délire de la mer (HUGO, Homme qui rit, t. 1, 1869, p. 71).
Rem. La docum. atteste le dimin. crisette, subst. fém. J'avais cru que la crise de foie d'avant-hier était une crisette (GONCOURT, Journal, 1895, p. 834).
2. P. ext.
a) [En parlant d'une réaction émotionnelle, d'un sentiment] Crise de colère, de larmes; subir une crise d'abattement; piquer une crise de jalousie (fam.). Au milieu de cette crise de remords (CHATEAUBR., Natchez, 1826, p. 409). Le grand chameau et la petite rosse [les deux bonnes] se tordaient, pliées sur le bord de leur fenêtre, dans une crise de fou rire (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 385). Je vois venir une dure crise de noir (COLETTE, Vagab., 1910, p. 24) :
• 3. ... je cesse, peu à peu, de croire en l'humanité. Elle m'en a imposé fort longtemps avec ses discours, ses lois, ses livres, mais je commence à la voir sous son vrai jour, qui est triste, car c'est une vieille folle dont les crises de férocité alternent avec des sourires.
GREEN, Journal, 1943, p. 33.
SYNT. Crise d'attendrissement, de découragement, de dégoût de soi, de désespoir, de désolation, de fureur, de neurasthénie, de pessimisme, de rage, de sanglots, de timidité, de tristesse.
♦ Fam. Piquer une/sa crise. Se mettre en colère. Elle piquait une crise chaque fois qu'elle lisait un écho sur Robert (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 163).
b) Enthousiasme subit, passion brusque, généralement temporaire, pour (une idée, une conception, un type d'action, un comportement). Crise d'ascétisme, d'ivrognerie, de patriotisme, de travail; travailler par crises. Ses accès de sentiment et ses crises de chauvinisme (HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 31). Il [Maurice] était en train de faire une crise aiguë d'antimilitarisme (AYMÉ, Bœuf cland., 1939, p. 127). Tu dois être en train de traverser une jolie crise de snobisme (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 740) :
• 4. Notre dreyfusisme était une religion... une poussée religieuse, une crise religieuse...
PÉGUY, Notre jeunesse, 1910, p. 113.
II.— [L'accent est mis sur l'idée de trouble, de difficulté] Situation de trouble, due à une rupture d'équilibre et dont l'issue est déterminante pour l'individu ou la société et, p. méton., période ainsi caractérisée. Synon. (partiels) bouleversement, ébranlement, malaise, perturbation.
A.— [Dans la vie de l'individu] Situation de trouble (et, p. méton., période ainsi caractérisée) lorsque l'individu est confronté à des problèmes d'ordre physiologique et/ou psychologique. Crise affective, intellectuelle, mystique; crise de la trentaine; heures, jours, moments de crise; traverser une crise. Cette grande crise morale changea la nature du sentiment qui unissait Julien à sa maîtresse (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p. 117). Dans les diverses crises de ma vie (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 393). Dans un âge de crise, physique et morale, autour de la cinquantaine (ROLLAND, Beeth., t. 2, 1928, p. 413) :
• 5. ... dans un organisme comme le nôtre, des crises telles que la puberté ou la ménopause, qui entraînent la transformation complète de l'individu, sont tout à fait comparables aux changements qui s'accomplissent au cours de la vie larvaire ou embryonnaire; ...
BERGSON, L'Évolution créatrice, 1907, p. 18.
— Spéc., PSYCHOL. (de l'enfant). Moment critique, à répercussions physiologiques et psychologiques importantes dans le développement d'un enfant. Crise de 3 ans. La phase prépubertaire suscite une nouvelle crise d'opposition (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 540) :
• 6. Quand Maurice Debesse étudie la « structure de la crise [d'originalité juvénile] », (...) et la rapporte à la formation de la personnalité, il met en avant les facteurs de « discordance organique » et de « désadaptation sociale » à la source de l'affirmation exaltée du moi qui caractérise la crise. Il distingue cette crise des constitutions pathologiques par son pouvoir, entre autres traits, de préparer un nouvel ajustement au réel et au milieu social.
RICŒUR, Philos. de la volonté, 1949, p. 403.
B.— [Dans la vie de la société]
1. En gén. Situation de trouble profond dans laquelle se trouve la société ou un groupe social et laissant craindre ou espérer un changement profond; p. méton., période ainsi caractérisée. Crise morale, des mœurs; crise de la civilisation, des sociétés modernes; issue d'une crise; pressentir une crise; entrer dans une période de crise. Marquer les grandes crises du développement de la société moderne (GUIZOT, Hist. civilisation, 1828, p. 42). Aux jours de crises et de révolutions (MUSSET, Lettres Dupuis Cotonet, 1836, p. 599). Il a bien servi la patrie dans la plus grande crise de son histoire (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 536) :
• 7. Pour M. Ferrero, la grande crise du troisième siècle consiste dans une tentative désespérée des empereurs vers un principe d'autorité.
BLOCH, Destin du Siècle, 1931, p. 209.
♦ Crise universitaire. Les événements de mai 1968 en France ont donné à la crise universitaire qui est générale dans les sociétés industrielles, un aspect spectaculaire grâce à quoi désormais elle peut prétendre à une place dans les journaux et à la préoccupation des « personnes responsables » (Pédag. 1972).
2. En partic.
a) Domaine écon. et fin. Dans un cycle économique, dysfonctionnement, souvent caractérisé par la surproduction ou la dépression, le chômage et, en économie capitaliste, un effondrement des cours boursiers. Crise agricole, commerciale, économique, financière; de mévente, de surproduction. Depuis quelques années, l'industrie était prospère. Une crise éclata (MAUROIS, Disraëli, 1927, p. 310). C'est dans un climat d'euphorie qu'éclate le 24 octobre par un effondrement boursier à Wall-Street la crise de 1929 (SOURNIA 1973) :
• 8. La Compagnie, sous le prétexte du dérangement causé par la paie, avait encore, ce jour-là, suspendu l'extraction, dans toutes ses fosses. Saisie de panique devant la crise industrielle qui s'aggravait, ne voulant pas augmenter son stock déjà lourd, elle profitait des moindres prétextes pour forcer ses dix mille ouvriers au chômage.
ZOLA, Germinal, 1885, p. 1282.
— Spéc. Difficultés économiques dans un secteur particulier consistant en une sous-production ou une diminution importante d'activité. Crise du papier, du tourisme; résoudre la crise des autoroutes. Non sans avoir trouvé, auparavant, en pleine crise du logement un appartement de trois pièces (CAMUS, Exil et Roy., 1957, p. 1630). Cf. débâcle ex. 6.
b) Domaine pol. Situation troublée caractérisée par des transformations plus ou moins violentes (des régimes, de l'équilibre du pouvoir, des États). Crise diplomatique, gouvernementale, intérieure, internationale, russo-polonaise. La seconde crise des monarchies européennes (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 14). L'affaire de la banque de Chine ayant encore failli provoquer une crise de régime (BLANCHE, Modèles, 1928, p. 75). Nous sommes assez inquiets quant au sort du cabinet, (...). Psychose de crise (DRUON, Gdes fam., t. 1, 1948, pp. 182-183) :
• 9. Nous avons des amis à la Chambre ... Ils n'ont pas pu nous donner seulement une bonne petite crise ministérielle compliquée d'une bonne petite crise présidentielle.
A. FRANCE, M. Bergeret à Paris, 1901, p. 348.
c) Domaine de la vie culturelle, intellectuelle. Situation où les principes sur lesquels repose une activité sont remis en cause. Crise de la physique, de la poésie, des fondements des mathématiques, du roman. La crise du théâtre d'aujourd'hui n'est pas mortelle puisque toutes les élites s'empressent à faire plus rayonnant le théâtre de demain (Arts et litt., 1936, p. 8807) :
• 10. La liberté que l'auteur concède (...) de lire à haute voix le coup de dés ne doit pas être mal entendue : elle ne vaut que pour un lecteur déjà familiarisé avec le texte, et qui, les yeux sur le bel album d'imagerie abstraite, peut enfin de sa propre voix, animer ce spectacle idéographique d'une crise ou aventure intellectuelle.
VALÉRY, Variété II, 1929, p. 182.
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. XIVe s. [éd. 1495] crisim méd. (B. DE GORDON, Pratique, II, 25 ds GDF.); 1478 méd. (N. PANIS, trad. de la Grande Chirurgie de G. de Chauliac, f. 34 ds SIGURS, p. 336); 2. p. ext. av. 1685 « accès psychologique à manifestations violentes » crises de passions (Guilleragues à Racine, Lettres de Racine, 6e recueil ds LITTRÉ); 1825 crise de nerfs (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, p. 303); 3. p. anal. 1690 (FUR. : Crise, se dit figurément en choses morales. Cette intrigue est dans sa crise [...] ce procès est dans sa crise); 1762 « phase grave dans l'évolution des choses » (J.-J. ROUSSEAU, Émile, III ds LITTRÉ : Nous approchons de l'état de crise et du siècle des révolutions); 1814 crise politique (JOUY, Hermite, t. 5, p. 182); 1823 crise financière (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, p. 186); 1837 crises commerciales (BALZAC, C. Birotteau, p. 257). Empr. au lat. impérial crisis [acc. crisin d'où fr. crisin] « phase grave d'une maladie » (gr. de même sens). Fréq. abs. littér. :3 741. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 2 636, b) 3 492; XXe s. : a) 7 619, b) 7 206.
crise [kʀiz] n. f.
ÉTYM. 1478; crisim, XIVe; lat. médiéval crisis, grec krisis « décision; phase aiguë d'une maladie ».
❖
1 Méd. Moment d'une maladie caractérisé par un changement subit et généralement décisif en bien ou en mal. ⇒ Phase (critique). || La crise se manifeste par des phénomènes particuliers : chute brusque de la température, diurèse et sueurs abondantes. || La crise se déclenche. ⇒ Déclenchement. || Crise favorable, salutaire, annonciatrice de la guérison. || Cette crise l'a sauvé. || Crise aiguë. || Crise funeste, fatale. || Au plus fort de la crise.
♦ Cour. Accident qui atteint une personne en bonne santé apparente, ou aggravation brusque d'un état chronique. ⇒ Accès, attaque, atteinte, poussée. || Être pris d'une crise. Fam. || Piquer une crise. || Crise violente et soudaine. || Déclenchement d'une, de la crise. || Crise de dépression. || Crise de folie, de démence, crise d'épilepsie. || Crise d'appendicite, d'asthme, de foie. || Crise cardiaque, gastrique, intestinale, rhumatismale. || Crises successives (→ Aggravation, cit.).
1 Ces crises revinrent plusieurs fois, et toujours plus fortes; la dernière même fut si violente, que j'en fus entièrement découragé, et craignis un moment d'avoir remporté une victoire inutile.
Laclos, les Liaisons dangereuses, IV, CXXV.
2 (…) il découvre les zones hystérogènes, peut, en maniant adroitement les ovaires, enrayer ou accélérer les crises, mais quant à les prévenir, quant à en connaître les sources et les motifs, quant à les guérir, c'est autre chose !
Huysmans, Là-bas, IX, p. 147.
3 (…) les notes quotidiennes que je prends depuis le début, et qui permettent de suivre, jour à jour, crise par crise, le rythme régulier et continu de l'aggravation.
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 145.
2 Manifestation émotive soudaine et violente. — ☑ Loc. (1825). Crise de nerfs (→ Accès, cit. 12, bénéfice, cit. 4). || Avoir, piquer une crise de nerfs. || Faire prendre, piquer à qqn une crise de nerfs, l'agacer, l'énerver. — Piquer une crise de colère, de rage. — (Sans compl.). || Piquer une crise, sa crise : se mettre en colère; fam., faire un caprice. || Il lui a fait prendre une crise. — Crise de larmes, de sanglots (→ Amener, cit. 16).
4 Elle (ma mère) affligea mon enfance par des accès de mélancolie et des crises de larmes.
France, le Petit Pierre, I, p. 11.
♦ Crise d'enthousiasme, de désespoir, d'abattement. || Piquer une crise de jalousie. || Crise de fou rire.
♦ Fig. (Qualifié). Période d'enthousiasme, de passion brusque et passagère (pour qqch.) ⇒ Accès, élan. || Crise de travail, de fainéantise. || Crise de chauvinisme, de poésie. — Crise religieuse. || Il passe par des crises de doute, de mysticisme, de désespoir (→ Alternativement, cit. 2).
5 Cette perpétuelle critique exercée sur moi-même, cet œil impitoyable, tantôt ami, tantôt ennemi (…) tout cela me jeta dans une série de malaises, de troubles, de stupeurs ou d'excitations qui me conduisaient tout droit à une crise.
E. Fromentin, Dominique, V, p. 74.
6 Au sortir de ces aberrations, il tombait dans des crises de dégoût.
Romain Rolland, la Vie de Tolstoï, p. 49.
3 (1690). Phase grave dans l'évolution des choses, des événements, des idées. ⇒ Perturbation, rupture (d'équilibre). || Période de crise. ⇒ Phase (critique).
a (Individuel et psychologique). Malaise profond causé par des transformations psychologiques ou physiologiques, affectant momentanément un individu et pouvant avoir sur lui des conséquences déterminantes. || Vivre, traverser une période de crise. || L'année de son divorce fut pour lui une grave crise. — Psychol. Phase critique du développement psycho-physiologique de l'individu. || La crise de trois ans. || La crise de l'adolescence, de la ménopause.
b (V. 1820). Collectif, économique, social. || Crises économiques (⇒ Difficulté, faillite, impasse, krach; marasme, récession). || Son affaire est en pleine crise. ⇒ Déconfiture, difficulté, faillite, marasme. || Crises de production. || Crise du papier, du pétrole; il y a une crise dans la sidérurgie. || Crise agricole, industrielle, financière, commerciale, monétaire. || Crise générale, généralisée. || Crises périodiques, cycliques. || Mesures de lutte contre les crises économiques (⇒ Anticrise, et aussi anticyclique). || La crise américaine de 1929. ⇒ Dépression. || La crise de Wall Street. || Crise génératrice de chômage (cit. 1 à 3).
7 La crise, comme le mot le dit assez clairement, c'est une perturbation brusque dans l'équilibre économique. Mais elle peut être étudiée sous deux aspects très différents et même opposés.
Les crises peuvent apparaître comme des espèces de maladies de l'organisme économique : elles présentent des caractères tout pareils à ceux des innombrables maux qui affligent les hommes. Les unes ont un caractère périodique, les autres sont au contraire irrégulières. Les unes sont courtes et violentes comme des accès de fièvre; elles se manifestent de même par une forte élévation de température suivie d'une brusque dépression, les autres sont lentes comme des anémies, dit M. de Laveleye. Les unes sont localisées à un pays déterminé, les autres sont épidémiques et font le tour du monde, comme le choléra.
Charles Gide, Cours d'économie politique, t. I, p. 219.
8 La crise qui a commencé en 1929 en Amérique (…) s'est transformée en une crise mondiale de crédit et de déséquilibre des prix sur les divers marchés (…)
Dans le domaine économique et financier, ce fut un bouleversement général, la désorganisation du marché des placements, des régimes monétaires, des échanges internationaux, tandis que s'accroissaient les déficits budgétaires.
Reboud et Guitton, Précis d'économie politique, no 548.
9 (…) les germes de la crise étaient là. On eût pu en discerner la présence dans les effets, déjà sensibles, du machinisme et de la concentration industrielle (…)
André Siegfried, l'Âme des peuples, I, I, p. 9.
9.1 Puis la crise (économique) avait fini par les atteindre directement. L'un perdait son emploi, son commerce, ses créances, un autre gagnait moins d'argent, un autre claquait des dents et touchait du bois.
M. Aymé, Maison basse, p. 169.
♦ Crise de… : crise (sociale, etc.) dans un domaine, causée par une insuffisance. || Crise de la natalité. || Crise de la main-d'œuvre. || Crise de l'emploi. || Crise du logement.
9.2 À cette époque de la crise du logement, Jardin avait eu la chance de recueillir plusieurs adresses qui méritaient de retenir son attention.
M. Aymé, Maison basse, p. 57.
♦ (1814). || Crise politique. || La, une crise du pouvoir. — Spécialt. || Crise ministérielle : période pendant laquelle le ministère démissionnaire n'est pas remplacé par un nouveau. Absolt. || La crise est ouverte. || La crise menace de durer. || Tenter de résoudre la crise. || Dénouer la crise.
10 Le rêve, caressé par Bonaparte, d'une paix féconde, s'était évanoui, et la grande crise se rouvrait, cette formidable lutte qui ne trouverait sa fin qu'aux champs de Waterloo.
Louis Madelin, l'Avènement de l'Empire, I, p. 6.
c (Abstrait). || Crise de la moralité, des valeurs. ⇒ Chute. || Crise de l'esprit, des mœurs, des mentalités… ⇒ Désarroi, désordre, ébranlement, faillite, incertitude, maladie, malaise, trouble. || La Crise de la conscience européenne, ouvrage de P. Hazard (1935). || Crise de la civilisation. || Le mois de mai 1968 fut regardé en France comme une crise de civilisation après avoir débuté par une crise de l'Université.
11 Le malaise actuel me paraît donc être une crise de l'esprit, une crise des esprits et des choses de l'esprit.
Valéry, Variété IV, p. 200.
12 Il y a manifestement une crise de l'Europe : après une longue période de prédominance, qui semblait aux contemporains devoir durer toujours, le Vieux Monde voit, pour la première fois, son hégémonie contestée. Mais ce qui risque d'être mis en cause de ce fait, c'est, avec la destinée d'un continent, celle de toute une forme de civilisation. Sous son aspect le plus grave, la crise est là.
André Siegfried, la Crise de l'Europe, p. 1.
13 La crise de civilisation que je viens d'évoquer d'un mot se manifeste par des troubles politiques, sociaux, économiques, certes, et tous les observateurs s'efforcent de comprendre ces troubles, de les expliquer, d'envisager leurs conséquences.
G. Duhamel, Manuel du protestataire, III, p. 98.
14 Mais il peut en sortir aussi bien, pour une longue période, des crises de contre-révolution, de réaction furieuse, de nationalisme exaspéré, de dictature étouffante, de militarisme monstrueux; une longue chaîne de violences rétrogrades, et de haines basses, de représailles et de servitudes.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, XXIII, p. 256.
4 Littér. Au théâtre, Point culminant, nœud de l'action psychologique. || Dans Phèdre, de Racine, la crise se noue lorsque l'héroïne apprend qu'Hippolyte aime Aricie.
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CONTR. Latent (état latent, latence), rémission. — Accalmie, calme, équilibre. — Prospérité. — Abondance, épanouissement.
DÉR. (Du sens 3, b) Crisette.
COMP. Anticrise.
Encyclopédie Universelle. 2012.