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bleu

bleu, bleue [ blø ] adj. et n. m.
bloi, blo, blefXIe; frq. °blao;cf. all. blau
I
1Qui est d'une couleur, entre l'indigo et le vert, dont la nature offre de nombreux exemples, comme un ciel dégagé au milieu du jour ( azur), certaines fleurs (le bleuet), le saphir. Des yeux bleus, gris-bleu. Les flots bleus. N. f. La grande bleue : la Méditerranée. — Loc. L'heure bleue, juste avant le lever du soleil. Le métal bleu : le cobalt. Fig. La houille bleue : l'énergie des vagues, des marées. — Fig. Fleur bleue.
Par ext. et fig. Menton bleu, qui porte la trace d'une barbe très sombre. — Fig. Sang bleu, noble. — Cordon bleu. Vieilli Conte bleu : récit fabuleux, discours en l'air.
Bifteck bleu, très saignant, à peine grillé. « Le gros mangeur qui désire un steak saignant le commande bleu, peut-être pour oublier sa vraie couleur de sang » (Prévert).
Anciennt Zone bleue, à stationnement limité, dans une ville. — Nuit bleue.
2D'une couleur livide, après une contusion, un épanchement de sang (cf. ci-dessous II, 3o). Œdème bleu. (1837) Maladie bleue : état morbide provoqué par une malformation congénitale du cœur et des gros vaisseaux avec coloration bleue des téguments. Par ext. Enfant bleu : enfant ayant la maladie bleue.
3 ♦ ⇒ livide. Être bleu de froid, de colère. Colère, peur bleue. Fig. En devenir, en être, en rester bleu : être figé par l'étonnement. ⇒ 1. interdit, stupéfait.
II N. m.
1Couleur bleue. Le bleu est l'une des sept couleurs fondamentales du spectre, entre le vert et l'indigo. Le bleu, le rouge et le jaune, couleurs primaires. Le bleu du ciel est dû à la diffusion de la lumière solaire par les molécules d'air (plus intense pour les radiations bleues).(Qualifié; aussi en appos.) Des rubans bleu clair, bleu ciel. Bleu horizon; bleu lavande; bleu Nattier; bleu pervenche ( mauve) ; bleu roi; bleu marine; bleu ardoise. Bleu-vert, bleu pétrole, turquoise. Bleu canard. Loc. fig N'y voir que du bleu : n'y rien voir, n'y rien comprendre (cf. N'y voir que du feu).
Matière colorante bleue. Bleus végétaux. indigo, 1. pastel, tournesol. Bleu de Prusse : cyanure de fer; bleu de smalt. Bleu de cobalt. Bleu d'outremer : silicate double d'aluminium, de sodium, etc.
Teinture bleue. Bleu de teinturier. guède. Bleu de lessive. Passer le linge au bleu, pour le blanchir. ⇒ azurer. Fig. Passer au bleu : éviter ou oublier de faire.
2(1840) Jeune recrue (les soldats d'autrefois arrivant souvent à la caserne en blouse bleue). conscrit, nouveau, novice; bleusaille.
(1898) Nouvel élève. Brimer les bleus. bizut. Loc. Tu me prends pour un bleu ! pour un naïf.
3Marque livide sur la peau résultant d'un coup. ecchymose, meurtrissure. Se faire un bleu. Il est couvert de bleus. Fig. Des bleus à l'âme.
4Gros bleu : vin rouge de mauvaise qualité (cf. Gros rouge).
5(1651) AU BLEU : façon de préparer certains poissons (truite, carpe) en les jetant vivants dans un court-bouillon vinaigré et aromatisé. Truite au bleu.
6Fromage de lait de vache, dont la pâte comporte des moisissures internes bleuâtres. fourme, gorgonzola. Bleu d'Auvergne, bleu de Bresse. Bleu des Causses. Bleu de Corse (brebis).
7Bleu de méthylène, employé comme antiseptique en pharmacie et comme colorant en biologie.
8Vieilli PETIT BLEU : télégramme, dépêche (sur papier bleu).
9(1945) Combinaison d'ouvrier, généralement en toile bleue. Un bleu de mécanicien. Des bleus de travail. Bleu de chauffe.

Bleu fascicule annexé au projet de loi de finances et présentant les crédits affectés à chaque ministère. (Leur couverture est bleue.)

bleu, bleue
adj.
d1./d Qui est couleur d'azur. Des yeux bleus. Un ciel bleu, sans nuages. Des chemises bleu ciel.
|| Fig. Sang bleu, noble.
|| CUIS Un steak bleu, à peine cuit.
|| Carte bleue.
d2./d D'une teinte livide. Avoir les mains bleues de froid.
|| Maladie bleue: état pathologique dû à des malformations du coeur et des gros vaisseaux, avec une coloration bleue des téguments. Enfant bleu, atteint de cette maladie.
|| (Québec) Glace bleue: V. glace.
|| Loc. fig. (Belgique) être bleu(e) de qqn, en être épris. Il est bleu de cette fille.
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bleu, bleue
n. m. et f., adj. et adv.
d1./d Couleur bleue. Le bleu du ciel.
|| Fig., Fam. N'y voir que du bleu: ne s'apercevoir de rien, n'y rien comprendre. Passer au bleu: escamoter.
|| n. f. Loc. La grande bleue: la mer, spécial. la Méditerranée.
d2./d Matière colorante bleue. Bleu de cobalt, d'outremer, de Prusse.
d3./d Fam. Recrue nouvellement incorporée. Par ici les bleus!
|| n. Arg. (des écoles) Bizut.
d4./d Meurtrissure ayant déterminé un épanchement sanguin sous-cutané. Se faire un bleu à la cuisse.
d5./d CUIS Cuire une truite au bleu, la cuire en la jetant vivante dans un court-bouillon.
d6./d Fromage à moisissure bleue. Bleu de Bresse.
d7./d Bleu de méthylène: antiseptique de couleur bleue.
d8./d Vêtement de travail, en grosse toile bleue. Bleu de chauffe.
d9./d (Suisse) Fam. Permis de conduire.10 (Québec) Fam. Membre ou partisan du parti conservateur fédéral ou provincial (par oppos. à rouge).
adj. Relatif à ce parti. Un gouvernement bleu.
adv. Voter bleu.
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bleu
(fleuve). V. Yangzijiang.

⇒BLEU, BLEUE, adj. et subst. masc.
I.— Emploi adj. Qui, parmi les sept couleurs fondamentales du spectre, se situe entre le vert et l'indigo, et rappelle notamment la couleur diurne du ciel sans nuage, celle de l'eau profonde et claire, etc. :
1. A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
...
O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges;
— O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux!
RIMBAUD, Poésies, Voyelles, 1871, p. 110.
2. Celle-là avait des yeux bleus, de ces yeux bleus qui semblent contenir toute la poésie, tout le rêve, toute l'espérance, tout le bonheur du monde!
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, Découverte, 1884, p. 958.
3. Il [le jardin] va s'effiler fibre à fibre,
Il ne restera que du bleu,
Air bleu, eau bleue, azur qui vibre,
De tout ce jardin fabuleux...
A. DE NOAILLES, Les Éblouissements, 1907, p. 257.
4. Il fait bleu il fait bon
Il fait aujourd'hui
Il fait bon il fait bleu
Et je suis née juste aujourd'hui
Si vous voulez savoir mon nom
Mon nom est iris bleu!
CLAUDEL, Poésies diverses, Dodoitzu, mon petit nom, 1952, p. 743.
A.— [En parlant d'éléments de la nature] Air, ciel, lac bleu, mer bleue.
SYNT. Les montagnes des Vosges toutes bleues (ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, t. 2, 1870, p. 136); une ombre bleue et fraîche (T. GAUTIER, Le Roman de la momie, 1858, p. 195); les étoiles bleues et jeunes (Hist. gén. des sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 539). Fig. Les forces de la houille bleue. La force des marées (cf. GIRAUDOUX, Bella, 1926, p. 132 et V. ROMANOVSKY, La Mer source d'én., 1950, p. 7). Synon. houille verte (Pt ROB.). Le fleuve bleu. Le Yang Tsé-Kiang. La grande bleue. La Méditerranée. Le pays bleu. Le midi et au fig. pays imaginaire et merveilleux.
Emplois spéc.
BOT. Une anémone bleue, le chardon bleu.
GÉOL. Pierres bleues. ,,Nom donné (...) dans les départements du Nord (...) à des calcaires compacts d'un gris bleuâtre ou violacé, qui appartiennent au terrain carbonifère et fournissent d'excellents matériaux de construction`` (Lar. 19e, Lar. 20e). Le calcaire bleu du lias inférieur (Ch. DURAND, Les Gdes industr. minérales en Lorraine, 1893, p. 18).
ZOOL. [Qualifiant des espèces] La baleine bleue, une grosse mouche bleue, l'oiseau bleu (conte de Maeterlinck), une perruche bleue, un persan bleu (variété de chats persans), le renard bleu, le requin bleu. La race bleue du Maine. ,,Race de moutons de plein air exploitée sur les herbages des départements de la Mayenne, de la Sarthe et du Maine-et-Loire`` (Lar. encyclop.). Race bleue du Nord. ,,Race bovine provenant du croisement entre animaux hollandais et durham`` (Lar. encyclop.). Les chiens bleus de Gascogne (PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1925, p. III).
Au fig. [P. réf. à la couleur du ciel évoquant le rêve, l'idéal] Les sentiments bleus (MALLARMÉ, Poésies, Marchande d'herbes aromatiques, 1898, p. 63); le songe bleu d'un paradis (P. BOURGET, Essais de psychol. contemp., 1883, p. 55); sourire à ses rêves bleus (R. MARTIN DU GARD, Devenir, 1909, p. 170). Vx. Faire des coups bleus. Faire des efforts inutiles, des tentatives qui ne réussissent pas (cf. BESCH. 1845, Lar. 19e) :
5. ... et la musique des orgues lui barbotait dans le ventre, et la bonne odeur de l'encens l'obligeait à renifler, comme si on lui avait poussé un bouquet dans la figure. Enfin, il voyait bleu, il était pincé au cœur.
ZOLA, L'Assommoir, 1877, p. 680.
La petite fleur bleue. La sentimentalité. Un mélange de cynisme et de « petite fleur bleue » (E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1867, p. 323); employé (...) sentimental, épris de petite fleur bleue (ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, p. 394).
B.— [En parlant de divers aspects de la pers.]
1. [De l'aspect physique] Les yeux bleu-foncé (MÉRIMÉE, Colomba, 1840, p. 33); son œil bleu-de-lotus (BARBEY D'AUREVILLY, 2e memorandum, 1839, p. 284) :
6. ... un gars d'Alsace, blond, poupard : des yeux bleu faïence, des yeux de « bonne nature ».
R. MARTIN DU GARD, Jean Barois, 1913, p. 323.
[En parlant des cheveux et de la barbe] D'un noir bleuté. Les cheveux d'un noir bleu (JOUVE, Paulina 1880, 1925, p. 19); la Barbe-bleue (conte de Perrault). Spéc. Un menton bleu. Un menton rasé laissant deviner une barbe très noire (cf. T'SERSTEVENS, L'Itinéraire espagnol, 1933, p. 79).
Au fig. Le sang bleu. Le sang noble. Les princesses de sang bleu (SAMAIN, Le Chariot d'or, Les Roses dans la coupe, 1900, p. 9) :
7. Ainsi lui Jacques l'Aumône se trouvait être de sang non seulement bleu mais royal. À sa majorité, il hérite du château d'Amboise et ne tarde pas à se marier avec la fille du roi d'Italie.
QUENEAU, Loin de Rueil, 1944, p. 35.
2. [En parlant de la couleur de la peau saisie par le froid, meurtrie par une contusion ou certains épanchements de sang, congestionnée par un sentiment vif de colère ou de peur] D'un ton livide tirant sur le bleu. Avoir le visage tout bleu de rage et de colère (BALZAC, Annette et le criminel, 1824, p. 205); les cernes bleus des yeux (DANIEL-ROPS, Mort, où est ta victoire? 1934, p. 527) :
8. ... tu sais, Poisson, elle est velue partout comme un ours, et elle a les cuisses bleues.
— Comment bleues?
— Oui, bleues, comme quand il gèle et qu'on a la peau bleue de froid.
COLETTE, Claudine à l'école, 1900, p. 141.
Fam. Être bleu de froid, de colère, d'émotion. En rester bleu, en être tout bleu. Être figé d'étonnement.
P. méton., fam. [S'appliquant aux émotions elles-mêmes] Faire une peur bleue à qqn (ZOLA, La Bête humaine, 1890, p. 14). Une colère bleue abs. en voir de bleues. Passer par de vives émotions.
MÉD. Œdème bleu (vx). ,,Tuméfaction bleue ou violacée qui se produit spontanément chez certains hystériques`` (Lar. 19e, Lar. 20e, ROB.). Maladie bleue. ,,Caractérisée par une cyanose (coloration bleue de la peau), en rapport avec le passage du sang veineux « bleu » (sang à réoxygéner) dans le sang artériel « rouge » (sang réoxygéné) et un rétrécissement sur la circulation du sang veineux`` (Méd. 1966). (Attesté déjà dans BESCH. 1845). Nom sc. tétralogie de Fallot. P. ext. Enfant bleu. Enfant qui est atteint de la maladie bleue.
3. [En parlant de ses vêtements] La blouse bleu-noir des fermiers (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 203); cachemires (...) bleus et bleu de ciel (MALLARMÉ, La Dernière mode, 1874, p. 781); une robe bleue; un paletot et un pantalon de drap bleu (ZOLA, La Conquête de Plassans, 1874, p. 940); soie bleu-marine (MALLARMÉ, La Dernière mode, 1874, p. 715). Le tablier bleu. Celui des servantes :
9. ... on sent combien un tablier bleu différencie une femme d'une autre; on apprécie que le rang est le rang, dans le monde.
FRAPIÉ, La Maternelle, 1904, p. 44.
Spéc. La dentelle bleue, ou subst. bleue. ,,Dentelle fabriquée à Coventry. (Elle se portait beaucoup en Angleterre)`` (Lar. 20e, ROB.). Le Cordon bleu. Ruban de tabis bleu, que portent les chevaliers de l'Ordre du Saint-Esprit. Porter le cordon bleu; le Roi a envoyé le cordon bleu à un tel Prince; être décoré du cordon bleu et de sa plaque (DELÉCLUZE, Journal, 1828, p. 245). P. méton. ,,Chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit`` (Ac. 1798, attesté en 1932 sous cordon) et ,,haut dignitaire`` (Lar. 19e). Cordon bleu (fam.). ,,Se dit figurément et par plaisanterie d'une cuisinière très-habile`` (Ac. 1835-1932); ,,plaisanterie qui porte sur l'éminence du grade de cordon bleu et sur l'ancien tablier bleu des servantes`` (LITTRÉ) :
10. Mon grand-oncle avait pour cuisinière un cordon bleu qui, n'ayant jamais affaire qu'à des palais d'une expérience et d'un discernement consommés, mettait un amour-propre immense à les contenter.
G. SAND, Histoire de ma vie, t. 2, 1855, p. 310.
4. P. méton. [En parlant de pers. habillées de bleu, en tout ou en partie]
Bas-bleu. Femme qui a des prétentions littéraires (cf. bas-bleu).
Parti bleu (vx). ,,Un parti de gens armés, soldats ou autres, qui sans aveux, font des courses pour piller amis ou ennemis. On pend les partis bleus quand on les attrape`` (Ac. 1798-1932).
ARM. Les diables bleus. Régiment de chasseurs (cf. BORDEAUX, Les Derniers jours du fort de Vaux, 1916, p. 93).
HIST. RELIG. Filles bleues. ,,Nom que l'on donnait aux filles de l'Annonciade`` (Ac. Compl. 1842); attesté dans l'ensemble des dict.
INSTIT. INTERNAT. Casque bleu. Soldat de l'O.N.U.
MAR. Officier bleu (vx). ,,Celui qu'un capitaine de vaisseau créait sur son bord [faute d'officier majeur]`` (Ac. Compl. 1842); attesté dans l'ensemble des dict.; expr. péj. d'apr. LE CLÈRE 1960. ,,Officier de commerce appelé pendant la guerre sur les bâtiments de l'État`` (WILL. 1831). Officiers auxiliaires dits bleus (J. DE LA VARENDE, Jean Bart pour de vrai, 1957, p. 133). Fam. Col bleu. Marin français (cf. ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, p. 394).
C.— [En parlant d'inanimés concr.] Un diamant bleu, la faïence bleue, l'encre et le papier bleus.
Les billets bleus. Billets de banque.
La bibliothèque bleue. Ensemble de petits livres à couverture bleue renfermant des romans de chevalerie ou des contes de fées. (Attesté dep. LITTRÉ). Les chefs-d'œuvre de la bibliothèque bleue (NODIER, Trésor des fèves et Fleur des pois, 1833, p. 54); montrer (...) un fond de stérilité, d'insipidité et de tendresse de la bibliothèque bleue (STENDHAL, De l'Amour, 1832, p. 149).
Au fig. [P. réf. à cette expr.] Contes bleus. ,,Récit fabuleux, conte de fées, ou discours en l'air, mensonge`` (Ac. 1835). C'est un des contes bleus de vos salons (LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, t. 2, 1823, p. 191) :
11. Mais ce n'est rien qu'un rêve, médiocre en lui-même et, par ses conséquences, fou. Personne n'a le droit d'exposer la patrie pour un conte bleu.
MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, p. CXVI.
Spécialement
FIN. Carte bleue. Carte accréditive et de paiement.
GASTR. Bifteck bleu. Servi saignant et peu grillé. Vin bleu. Vin de médiocre qualité. Un gros vin bleu pour charretier (ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, Verdun, 1938, p. 246).
MAR. Le ruban bleu. Symbole du record de vitesse transatlantique obtenu par un paquebot (cf. ROUSSEAU, Hist. des techniques et des inventions, 1967, p. 249).
PEINT. La période bleue ou l'époque bleue d'un peintre. Celle où la dominante de ses toiles est la couleur bleue. La période bleue de Picasso.
URBAN. Zone bleue. Rues d'une ville où le stationnement des véhicules est limité par un panneau primitivement bleu, d'une manière plus stricte en durée.
Rem. On relève une forme région. bleuse, adj. fém. Corruption de bleu, au fig., signifiant optimiste. Les bleuses-vues de vos adeptes (ADAM, L'Enfant d'Austerlitz, 1902, p. 70). Attestée dans ESN. 1966.
II.— Emploi subst.
A.— La couleur bleue. Le bleu du ciel, étoffe d'un beau bleu, aimer beaucoup le bleu :
12. Comme tous les Pasquier, j'ai donc les yeux bleu-véronique. Ce bleu, qui, chez mon père, était, même dans le sourire, incompréhensiblement froid, est chez moi... mettons « sensible, avec une nuance de naïveté ».
G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Notaire du Havre, 1933, p. 10.
13. ... toute surface biseautée, prismatique, nous fournit un spectre composé d'une multitude de nuances en dégradé dont on retient sept couleurs principales, par longueur d'onde croissante : violet, indigo, bleu, vert, orange, jaune et rouge.
A. et N. METTA, Les Pierres précieuses, 1960, p. 30.
SYNT. Les nuances du bleu sont précisées par un autre adj., un compl. a) Bleu + adj. Bleu ardent, céleste, clair, doux, dur, électrique, foncé, froid, intense, laiteux, limpide, marin, pâle, profond, sombre, tendre, vif; gros bleu (plus chargé de couleur), petit bleu. Bleu + adj. de couleur (avec trait d'union). Bleu-gris, bleu-indigo, bleu-noir, bleu-vert, bleu-violet. b) Bleu + nom en appos. Bleu horizon (couleur des uniformes des poilus en 1914-18), nuit, marine (couleur de l'uniforme des marins), roi; bleu barbeau, dahlia, lavande, lin, myosotis, pervenche, véronique; bleu canard (à reflets verts), éléphant (à reflets gris), paon; bleu Nattier (du nom du peintre), pastel; bleu acier, ardoise, faïence, pétrole, porcelaine. c) Bleu + de + compl. Bleu d'azur, de roi, de France, de lavande, d'ardoise, etc.
1. P. méton.
a) Vêtements de couleur bleue. Être habillé de bleu, vêtu de bleu, des jeunes filles en bleu.
Spéc. [En parlant d'un enfant] Être voué au bleu. Être habillé de bleu en vertu d'un vœu à la Vierge Marie.
b) Marque bleutée laissée sur la peau par un coup, un traumatisme. Se faire un bleu :
14. ... il pensait à sa mère, morte aussi, et qui lui avait tant distribué de marrons qu'il en sentait encore les bleus, croyait-il.
QUENEAU, Pierrot mon ami, 1942, p. 15.
2. Au fig.
a) [P. réf. à la couleur du ciel sans nuages] Il y a un peu de bleu dans l'horizon financier de ma vie (FLAUBERT, Correspondance, 1880, p. 252). Voir tout en bleu. Être optimiste.
b) Péj., fam. N'y voir que du bleu. Ne pas se rendre compte de quelque chose, ne pas comprendre (comme quelqu'un qui ne voit pas les nuages dans le ciel).
Être dans le bleu. Être dans le vague, ne pas avoir encore d'existence :
15. ... j'aurais presque envie de me recoucher et en tout cas de ne rien faire. Mais le moyen, quand j'ai une leçon dans un moment et que cette leçon est encore dans le bleu. (...) il faut absolument que ma leçon soit prête la veille, pour être convenable, ...
AMIEL, Journal intime, 1866, p. 271.
3. P. euphém., vieilli [Dans les jurons où bleu remplace Dieu] Tonnerre de bleu (COURTELINE, La Conversion d'Alceste, La Vache, 1892, p. 204).
Rem. Même phénomène en compos. : corbleu, palsambleu, sacrebleu, etc.
B.— Matière colorante bleue :
16. Le bleu minéral ou bleu d'Anvers, est un mélange à proportions variables de bleu de Prusse, d'alumine, de carbonate de magnésie et de sulfate de zinc.
Nouv. manuel complet du fabricant de couleurs, t. 1, 1884, p. 308 (encyclop. Roret).
17. Ce religieux pratiquait l'art de fabriquer du bleu d'outremer en broyant des pierres de lapis-lazuli calcinées. L'outre-mer valait alors son poids d'or; ...
A. FRANCE, Le Lys rouge, 1894, p. 139.
SYNT. (variétés de bleu). Bleu anglais, d'aniline ou de rosaniline (Méd. Biol. t. 1 1970), azoïque, d'azuline, de cobalt (Ch. COFFIGNIER, Couleurs et peint., 1924, p. 378; J. OVIO, La Vision des couleurs, 1932, p. 140); bleu de composition ou bleu en liqueur (,,dissolution d'indigo dans l'acide sulfurique fumant, employée en teinture`` [PRIVAT-FOC. 1870]); bleu de crésyl (R. HUSSON, F. GRAF, Manuel de biol. gén., 1965, p. 58), de cuve, d'émail, de houille, d'indigo, bleu de méthylène (,,matière colorante soluble dans l'eau, d'un bleu intense (...). Employé en teinture, sur coton mordancé au tanin, en pharmacie, et comme colorant en biologie`` [UV.-CHAPMAN 1956]), de nerprun, de prusse (Y. QUÉRET, Manuel de l'industr. du gaz, 1923, p. 158), de tournesol, de toluïdine (M. PRIVAT DE GARILHE, Les Acides nucléiques, 1963, p. 52), de quinoléïne (LITTRÉ, ROB.); bleu de Paris, de France, de Berlin, minéral (Ch.-E. GUIGNET, Les Couleurs, 1889, p. 177); bleu de montagne, de Péligot (ID., Ibid., p. 179).
BLANCHISSAGE Bleu de lessive ou absol. bleu. Utilisé dans le blanchissage du linge (cf. ex. 21). Blanchisseuse [qui] mettait trop de bleu (ZOLA, L'Assommoir, 1877, p. 538).
Passer au bleu. Dans le blanchissage, tremper le linge blanc lavé et rincé dans une eau contenant une substance bleue (par exemple bleu en liqueur) pour lui donner une teinte bleutée en effaçant les traces jaunâtres.
Au fig. Passer au bleu qqc. L'effacer, l'escamoter, la faire disparaître. Passer au bleu des pièces de dix francs (ZOLA, L'Assommoir, 1877, p. 684); passer l'histoire au bleu (L. DAUDET, Le Cœur brûlé, 1929, p. 167) :
18. Dois-je vous parler de la mort des hortensias, (...) transplantés dans le meilleur massif, pourtant composé d'excellent terreau et d'ardoise pilée, qui fait virer leur teinte au bleu? ... Au bleu, oui, qu'ils furent passés, je vous le garantis! Grâce à la solution d'eau de javel dont Frédie les arrosa consciencieusement.
H. BAZIN, Vipère au poing, 1948, p. 183.
Rem. Au Canada passer qqn au bleu signifie « le réprimander, le semoncer énergiquement » (cf. Canada 1930).
C.— P. méton. Personnes (généralement) habillées de bleu.
1. HIST. [P. oppos. aux Chouans, aux Vendéens] Soldat de la République :
19. Dans ces temps de discordes, les habitants de l'Ouest avaient appelé tous les soldats de la République, des Bleus. Ce surnom était dû à ces premiers uniformes bleus et rouges dont le souvenir est encore assez frais pour rendre leurs description superflue.
BALZAC, Les Chouans, 1829, p. 7.
Vx. À Constantinople et à Rome, une des factions du Cirque.
Les bleus et les rouges. Différents corps de la maison du roi. (Attesté dans l'ensemble des dict. gén.).
2. MILIT. Jeune recrue, par allusion à la blouse bleue des recrues venant de la campagne (cf. LARCH. 1880), ou des premiers uniformes de l'infanterie sous la République (cf. LARCH. Suppl. 1880). « Bleus » (...) fraîchement débarqués du patelin natal (COURTELINE, Le Train de 8 h 47, 1888, 1re part., 2, p. 21; cf. bleuet2 ex. 2).
P. ext., XXe s. Novice. Être encore un bleu dans le métier de bistrot (DABIT, L'Hôtel du Nord, 1929, p. 59)
Rem. On relève dans la docum. le subst. masc. bleu-bit(t)e. Soldat de deuxième classe, nouvelle recrue. Attesté dans ROB. Suppl. 1970.
D.— Sens spéc.
1. GASTRONOMIE
a) Vin rouge de qualité médiocre. Le petit bleu, le gros bleu; les libations du petit bleu (MURGER, Scènes de la vie de bohème, 1851, p. 33); les émanations du gros bleu (BARBUSSE, Le Feu, 1916, p. 153).
Rem. La bleue, subst. fém., pop. L'absinthe (cf. BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 124). Subst. masc. Tabac. Fumer du bleu (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 43).
b) Au bleu. Façon de cuire certains poissons au court-bouillon vinaigré bouillant, leur peau noire prenant ainsi une teinte bleutée. Truite au bleu :
20. LE CHEVALIER. — (...). Je n'aime la truite qu'au bleu. (...). Voyons! C'est bien au bleu qu'on les jette vivantes dans le court-bouillon?
AUGUSTE. — Justement, seigneur.
LE CHEVALIER. — Et qu'elles gardent leur saveur, leur chair, parce que l'eau bouillante les a surprises?
GIRAUDOUX, Ondine, 1939, I, 2, p. 19.
c) Fromage fermenté à moisissures bleues préparé à partir du lait de vache (par opposition au Roquefort). Bleu d'Auvergne, bleu de Bresse (MONT. 1967).
2. HABILL. Combinaison de travail. Déchargeurs en bleus de travail (MALRAUX, La Condition humaine, 1933, p. 292); un bleu d'ouvrier, un bleu de mécanicien. Être en bleu. Anton. être en col blanc (cf. GILB. 1970 s.v. col bleu).
MAR. Un bleu de chauffe (LE CLÈRE 1960).
3. JEUX. Craie qu'utilisent les joueurs de billard pour frotter le procédé de la queue :
21. [Au lavoir]. Il [Olivier] était fasciné par les savons glissants, les linges empilés, le « bleu » du rinçage qui coulait comme un morceau de ciel d'été hors de son paquet de toile, l'apparentant à cet autre « bleu » dont les joueurs de billard enduisent le bout des queues en bois de frêne.
R. SABATIER, Les Allumettes suédoises, Paris, Albin Michel, 1969, p. 142.
4. MICROBIOL. Maladie du lait due à un microbe; maladie des vins.
5. PHOTO. ,,On donne dans l'industrie le nom de bleus aux épreuves photographiques de plans, de documents, de dessins, obtenues sur papier au ferro-prussiate par simple insolation suivie d'un lavage à l'eau. Le papier au ferro-prussiate donne des dessins en traits blancs sur fond bleu`` (Lar. comm. 1930).
6. TÉLÉCOMM. Bleu, petit-bleu ou petit bleu (vieilli). Télégramme. Un « bleu » (PROUST, Du côté de chez Swann, 1913, p. 78) :
22. ... ses regards tombèrent sur un petit-bleu qui traînait à ses pieds. Il venait de recevoir lui-même un télégramme de ce modèle, il crut l'avoir laissé glisser de son portefeuille; ...
DE VOGÜÉ, Les Morts qui parlent, 1899, p. 388.
7. ZOOLOGIE
a) Bleu de Gascogne (BURN. 1970). Race de chiens. Bleu d'Auvergne. Race de chien braque d'Auvergne.
b) Requin (cf. bleuet1).
8. Arg., subst. fém. [Au poker] Carte rare, qui doit compléter une main. File-moi la bleue (J. GALTIER-BOISSIÈRE, P. DEVAUX, Dict. hist., étymol. et anecdotique d'arg., 1939, p. 32 dans ESN. 1966).
Prononc. ET ORTH. :[blø]. FÉR. 1768 signale : ,,Le masc. est monosyllabe``; il transcrit le fém. en 2 syll. : bleû-e (cf. aussi FÉR. Crit. t. 1 1787, GATTEL 1841 et LITTRÉ). Les FÉR. ainsi que GATTEL 1841 notent [ø:] long pour le fém. bleue. Au masc. les dict. notent cette syll. brève sauf LAND. 1834 qui la transcrit longue. Pour FÉR. Crit. t. 1 1787 elle est douteuse. Enq. :/blø/. FÉR. 1768 signale que le plur. est ,,bleus et non pas bleux, bleues et non pas bleuses``; (cf. aussi FÉR. Crit. t. 1 1787, LAND. 1834 et GATTEL 1841). À rapprocher de LITTRÉ qui signale en wallon les formes bleûf, bleus, au fém. bleuse, bleusse. Pour le fém. la forme bleuve en bourg., la forme bleusse en pic. Au sujet du plur., cf. encore CLÉDAT 1930, p. 48 et GREV. 1964, § 357. GREV. 1964, § 381 note : ,,si pour désigner la couleur, on emploie un adjectif qualifié par un autre adjectif ou complété par un nom, l'ensemble reste invariable, parce que le premier adjectif est pris substantivement, et suppose l'ellipse de « d'un » : Des yeux bleu clair (= d'un bleu clair). Des gants jaune paille. Des robes bleu de ciel. Des tissus vert pomme. Des tenues bleu horizon. On a coupé ses cheveux châtain clair``; (à ce sujet, cf. aussi Lar. 19e). ,,Les composés de bleu (ou d'une autre couleur) et d'un nom de chose s'écrivent sans trait d'union... Ils en prennent un si le composé est formé de deux noms de couleur : un beau bleu-vert. (On écrit au pluriel : des bleus d'azur, des bleus ciel, des bleus Nattier, etc. et invariable : des bleu-vert)`` (THOMAS 1956).
Étymol. ET HIST. — A.— Adj. 1. a) ca 1121 « de couleur pâle, blanchâtre, livide » rocheit blef « liais » (S. Brandan, éd. E. G. R. Waters, 264); 1226 face bleve (G. LE CLERC, Trois Mots, 196 dans T.-L.); b) 1718 (Ac. : Bleu. En parlant De certains espanchements de sang qui surviennent à la peau, se prend quelquefois pour livide, plombé), d'où subst. infra; 2. ca 1150 blef « qui est de la couleur du ciel quand il est pur » (Thèbes, 4061 dans GDF. Compl. : Li paisson qui tienent le tref Sont de color vermeil et blef); 1164 blöe (CHR. DE TROYES, Erec et Enide, éd. W. Foerster, 1601 dans T.-L.); XIIe-XIIIe s. bleu (Lapidaire de Modène, éd. P. Pannier, Paris, 1889, vers 106). B.— Subst. 1. 1180-1200 « couleur bleue » (Mort Aym. de Narb., 174 dans GDF. Compl. : Tote la char li revertist en blef); 1577 « matière colorante » (Privil. des .XXXII. bons mét. de Liège, II, 321, 35, ibid. : Bois de Provence, qu'on dist bois de bleu); d'où a) 1718 art culin. au bleu (Ac.); b) 1851 « vin rouge de mauvaise qualité », supra; c) 1928 « sorte de fromage » (Lar. 20e); 2. 1254 « tissu bleu » dans FEW t. 151, s.v. ; d'où 1791 « conscrit » (d'apr. BRUNOT t. 9, p. 994); 3. 1863 « marque livide sur la peau, consécutive à un coup » (LITTRÉ : Il lui fit des bleus en le pinçant fortement).
De l'a.b.frq. « id. » (BRÜCH, pp. 32-33; WALT., p. 80; REW3, n° 1153; BL.-W.5; DAUZAT 1968; FEW t. 15, 1, pp. 146-150; EWFS2), à rapprocher de l'a.h.all. , , a. sax. , a. nord. (KLUGE20, s.v. blau) cité au VIe s. sous la forme du b. lat. blavus par ISIDORE, Orig., 19, 28, 8 dans TLL s.v., 2052, 36. Les formes a. fr. blo(e), blou s'expliquent à partir de la forme primitive , la forme bleu provient du type bláwu par l'intermédiaire de . Blef est une forme masc. refaite sur le fém. a.fr. blève (de ).
STAT. — Fréq. abs. littér. :10 915. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 8 865, b) 22 291; XXe s. : a) 19 910, b) 14 936.
BBG. — BRÜCH 1913, p. 33. — DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 45. — GOUG. Mots t. 1 1962, p. 28, 279. — MONTGUYON (J.). Rhétorique de la mode Vie Lang. 1971, p. 431. — RIGAUD (A.). Poisses d'avril. Déf. Lang. fr. 1971, n° 57, p. 19. — ROMMEL (A.). Die Entstehung des klassischen französischen Gartens im Spiegel der Sprache. Berlin, 1954, p. 76. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 70, 243.

bleu, bleue [blø] adj. et n. m.
ÉTYM. V. 1121, bloe, blo, blef, probablt au sens de « pâle, blanchâtre »; en parlant du ciel pur (blef), v. 1150; bleu, XIIe-XIIIe; du francique blao (même sens). Cf. all. blau.
———
I Adj.
1 Qui est d'une couleur entre l'indigo et le vert, dont la nature offre de nombreux exemples, comme un ciel sans nuages ( Azur, azuré, azuréen, azurin, cérulé), certaines fleurs ( Bleuet, bluet, myosotis, pervenche), certains minéraux ( Lapis-lazuli, saphir).(Phys.). || La couleur bleue correspond aux radiations du spectre visible situées entre les raies F (bleu verdâtre) et le G (indigo) du spectre solaire.
tableau Désignations de couleurs.
Un ciel bleu, sans nuages. || Mer bleue. || Les flots bleus. || Le fleuve bleu : le Yang-Tsé-Kiang. || Le beau Danube bleu. || Montagnes bleues. || Brume bleue (→ Baigner, cit. 9).
1 Ô beau cristal murmurant
Que le ciel est azurant
D'une belle couleur blue (bleue)
Ronsard, Odes, V, 13, in Huguet.
2 La nature, la mer, le ciel bleu, les étoiles (…)
Hugo, les Chants du crépuscule, 13.
3 Les ombres bleues des peupliers barrent la route (…)
Fr. Jammes, Poèmes mesurés, IX.
Fig. || La houille bleue : l'énergie des marées.
Une pierre bleue.Loc. || Pierres bleues : calcaires du carbonifère de couleur bleue.Chim. || Cendres bleues (vx) : carbonate de cuivre artificiel. || Cuivre bleu : variété de carbonate de cuivre. || Mélange bleu de l'ammoniaque et du sulfate de cuivre. Céleste (eau céleste).
Des yeux bleus. Pers.
4 Si je vous le disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
A. de Musset, Choix de poésies, « À Ninon ».
Barbe, chevelure bleue, très noire. || Le conte de Barbe-Bleue. || Menton bleu, rasé mais laissant deviner une barbe noire.
5 Je reconnus ces cheveux noirs, noirs à reflets bleus qu'ils (les poètes arabes) comparent au pigeon dans l'ombre (…)
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, III.
(Qualifiant un animal). Dont l'apparence extérieure (peau, fourrure, etc.) présente une teinte, un reflet bleuté.Spécialt. (Qualifiant une espèce, une variété). || Baleine bleue. || Perruche bleue. || Renard bleu. || Requin bleu. || Mouche bleue.Persan bleu (chat).Race bleue du Maine (moutons). || Race bleue du Nord (bovins).
Sang bleu. Sang.Fig. Sang noble.
6 L'ancienne noblesse répugnait si bien à cette conformation absolue des organes qu'elle déclarait bleu le sang qui coulait dans ses veines.
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, t. II, XI, p. 46.
Vêtement, costume bleu. || Robe, veste bleue. || Pantalon de toile bleue. Blue-jeans. || Combinaison bleue. || Bas bleu.Fig. || Bas-bleu. 2. Bas. || Cordon bleu. Cordon-bleu. || Ruban bleu. Ruban. || Dentelle bleue : dentelle anglaise faite à Coventry.
Se dit de certaines personnes vêtues de bleu (→ ci-dessous, II., B., 1.). || Officier bleu (vx). || Les hommes bleus : les Touaregs. || Les filles bleues (vx) : les religieuses de l'Annonciade.
Cols bleus : marins français.Casques bleus (par métonymie) : troupes de l'O. N. U.
Ballets bleus. Ballet (supra cit. 5).
Encre bleue, crayon bleu.Spécialt. || Papier bleu : papier d'huissier.Bibliothèque bleue : ensemble de romans de chevalerie à couverture bleue.Guides bleus, nom (déposé) d'une série de guides publiés par un grand éditeur français.
6.1 Le Guide Bleu ne connaît guère le paysage que sous la forme du pittoresque (…) Pour le Guide Bleu les hommes n'existent que comme types.
R. Barthes, Mythologies, p. 121-122.
Loc. Conte bleu : récit fabuleux (probablt à cause des contes de la bibliothèque bleue). Discours en l'air, sornette.
7 Des vers, des contes bleus, de frivoles sornettes (…)
Boileau, Satires, XII.
(De la couleur du ciel évoquant l'idéal, la pureté, l'illusion).Loc. Songe bleu, rêve bleu.La fleur bleue, la petite fleur bleue. Fleur.
(En parlant d'une viande). Très saignant, à peine grillé. || Steak, bifteck (cit. 2) bleu.
7.1 Le gros mangeur qui désire un steak saignant le commande bleu, peut-être pour oublier sa vraie couleur de sang.
J. Prévert, Choses et autres, p. 260.
Spécialt. || Époque, période bleue d'un peintre (d'abord appliqué à Picasso), caractérisée par des tonalités à dominante bleue.
7.2 Elle passait au loin, très embellie (…) un peu comme dans ce qu'on a appelé, pour un peintre qui fut de vos tout premiers amis, l'époque bleue.
A. Breton, l'Amour fou, VII, p. 69.
(1957). || Zone bleue : zone à stationnement limité, dans une grande ville.
(En France). || Carte bleue, nom d'une carte de crédit.Compteur bleu : compteur électrique plus puissant qu'un compteur normal.
7.3 Le monsieur de l'électricité est là… et je ne trouve plus mon compteur bleu… ?
Benoîte et Flora Groult, Il était deux fois, p. 57 (1968).
2 a (En parlant de la peau). D'une couleur livide, après une contusion, un épanchement de sang (→ ci-dessous, II., B., 3. : un bleu). || Certaines affections rendent la peau bleue, livide ou noirâtre. Cyanose. || Œdème bleu.
b Loc. (1837, in D. D. L.). Maladie bleue : état morbide provoqué par les malformations congénitales du cœur et des gros vaisseaux, avec coloration bleue des téguments. Tétrade ou tétralogie (de Fallot).Par métonymie. || Enfant bleu : enfant ayant la maladie bleue.
7.4 Ce que l'on nomme la maladie bleue s'appelle de son nom technique la tétralogie de Fallot (…)
Le sang qui part de l'aorte est donc (dans cette maladie) un sang mélangé (…) insuffisamment chargé en oxygène, il est bleu, ce qui explique non seulement la couleur des téguments de l'enfant, mais aussi tous les troubles qu'il présente.
(…) beaucoup d'enfants atteints de cardiopathies congénitales, et beaucoup d'enfants bleus en particulier.
Cl. d'Allaines, la Chirurgie du cœur, p. 50.
c (Personnes). Livide. || Être bleu de froid, de colère, d'émotion ( Vert), de peur. || En devenir, en être, en rester bleu : être figé par l'étonnement. Interdit, stupéfait. || Il en est resté bleu.
d (1616, in D. D. L.). Qui rend bleu (en parlant d'un sentiment).Cour.Une peur bleue.
7.5 Des fonds roux, des colères bleues, des rages jaunes, et ce continu clignement d'yeux.
J. Renard, Journal, 18 juin 1900.
7.6 (…) j'aime ma névrose. Je ne veux pas guérir. C'est de là que me vient cette peur bleue, cette panique dès la nuit.
E. Ionesco, Journal en miettes, p. 126.
7.7 Et puis… où était le champ de mines ! François avait une peur bleue des mines, qui vous attaquent lâchement aux jambes, au ventre…
Armand Lanoux, le Commandant Watrin, p. 171-172.
3 (1982; orig. inconnue). || Nuit bleue : nuit où plusieurs attentats sont organisés simultanément.
———
II N. m.
A
1 (1180). Couleur bleue. || Le bleu est l'une des sept couleurs fondamentales du spectre. || Aimer le bleu. || Le bleu est une couleur apaisante. || Nuances de bleu. || Un bleu clair; bleu d'azur, barbeau, céruléen, céleste, ciel, électrique; bleu horizon; bleu lavande, bleu de lin, bleu Nattier (du nom du peintre); bleu pâle, pastel, bleu de porcelaine, pervenche (cit. 2), bleu de faïence (→ Blond, cit. 6). || Bleu vif, bleu outremer, bleu de roi ou de France : couleur de la maison de France. || Bleu de Prusse. || Bleu foncé, bleu marine, bleu hussard; bleu noir, turquin; bleu nuit; gros bleu (→ Brouillonner, cit. 1). || Bleu gris; bleu acier, ardoise (cit. 3.1), éléphant. || Bleu gendarme. || Bleu vert; bleu de jade; bleu paon, pétrole, turquoise. || Bleu canard.REM. Ces syntagmes peuvent s'employer adjectivement, mais bleu et l'adjectif qui l'accompagne éventuellement restent alors invariables : des yeux bleu vert, des manteaux bleu marine, des touches bleu de Prusse. || « Cachemires bleus et bleu de ciel » (Mallarmé, la Dernière Mode, Pl., p. 715).
8 Ce beau vert et ce bleu céleste (de l'arc-en-ciel) sont un beau signal d'un Dieu apaisé (…)
Bossuet, Élévation à Dieu…, 8e sem., 6.
9 Le ciel était d'un bleu de cobalt pur (…)
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, I.
9.1 Un soir fait de rose et de bleu mystique,
Baudelaire, les Fleurs du mal, « La Mort des amants ».
10 (…) le grand ciel, rien que du bleu, un infini de bleu.
Zola, la Faute de l'abbé Mouret, p. 207.
11 Cinq heures de l'après-midi est un moment instable, doré, qui nuit passagèrement au bleu universel, air et eau, où nous nous baignons.
Colette, la Naissance du jour, p. 97.
12 Le lac, vu de haut, a la densité du mercure, son éclat mort. Les vignes sulfatées, qui dévalent jusqu'au rivage, sont d'un bleu de poison.
Martin du Gard, les Thibault, t. VIII, p. 95.
(1254). Couleur bleue des vêtements. || Porter du bleu. || S'habiller de bleu. — ☑ Loc. Vouer un enfant au bleu : faire vœu d'habiller un enfant en bleu, en l'honneur de la Vierge.
12.1 Voilà la jeune rue et tu n'es encore qu'un petit enfant
Ta mère ne t'habille que de bleu et de blanc.
Apollinaire, Alcools, « Zone ».
Tirant sur le bleu. Bleuâtre, bleuté. || Bleu mêlé de rouge. Lilas, violet. || Combinaison de bleu et de jaune. Vert. || À la lumière, l'azurine est d'un bleu fluorescent.
En bleu. || « Le plafond peint en bleu… » (Baudelaire, Pl., p. 58). || S'habiller en bleu. || Teinter en bleu. Azurer; bleuir, bleuter.
(1718; le poisson prend une teinte bleue). || Au bleu, façon de préparer certains poissons d'eau douce (truite, carpe) en les jetant vivants dans un court-bouillon salé, vinaigré et aromatisé. || Truite au bleu (→ Meunier, cit. 4).
2 Loc. fig. (1877). En voir de bleues : subir des mésaventures (cf. En voir de toutes les couleurs, des vertes et des pas mûres…). — ☑ N'y voir que du bleu : n'y rien voir, n'y rien comprendre; se laisser tromper (→ N'y voir que du feu).
(1866, Amiel). Être dans le bleu : être dans le vague.
12.2 Chez lui, le corps n'existait guère, l'esprit habitait bien haut dans le bleu des légendes; le cœur seul vivait (…)
Louise Michel, la Misère, t. III, p. 575 (1881).
Loc. vieillie. Voir tout en bleu. Rose.
Par métaphore. Azur, milieu céleste.
3 (1577). Matière colorante bleue. || Variétés de bleus. || Bleus végétaux. Indigo, pastel, tournesol. || Bleus minéraux : bleu de Prusse, ou de Berlin (ferrocyanure de fer). || Bleu d'azur, de smalt. Azur (1.), smalt. || Bleu de cobalt. Cobalt. || Bleu d'outremer : silicate double d'aluminium, de sodium, etc. || Bleus cuivreux : bleu de montagne ( Azurite); bleu de cuivre; bleu égyptien; bleu de Brême, de Hambourg. || Bleus de houille. Aniline, induline, naphtaline, rosaniline; indophénol, phénol, résorcine. || Bleu sulfuré. || Bleu azoïque.
Teinture bleue. || Bleu de teinturier. Éméraldine, guède. || Bleu de lessive. || Bleu d'azur. Azur (cit. 1 et supra). || Passer le linge au bleu, pour le blanchir. Azurage, azurer. || Des boules de bleu (→ Savon, cit. 1).
Loc. fig. (1877). Passer au bleu : faire disparaître, subtiliser ( Escamoter, sauter); éviter ou oublier de faire (cf. Passer à l'as).
12.3 Absolument dépaysé, je passai au bleu la prière du matin — dans une cure, Seigneur ! — (…)
Hervé Bazin, Vipère au poing, p. 144.
Bleu de méthylène (substance antiseptique et analgésique).
12.4 À la crèche, j'allais le voir en douce : les carreaux étaient passés au bleu, mais j'avais raclé la peinture, dans un coin pour l'apercevoir.
Jean Ferniot, Pierrot et Aline, p. 156.
Décor bleu (dans l'émaillage, la porcelaine). || Du bleu de Sèvres. || Un beau bleu.
Blason. Azur.
B Par métonymie. (Choses ou personnes de couleur bleue).
1 Personne vêtue de bleu. a Hist. Nom donné aux soldats républicains par les royalistes vendéens.
13 Théoriquement l'uniforme des volontaires (pendant la Révolution) était bleu. La couleur s'en généralisa. Aussi « les habits bleus par la victoire usés » sont-ils restés dans l'imagination des hommes du temps. Ils caractérisaient l'armée révolutionnaire. Pour les chouans, l'ennemi, c'étaient les « bleus ». Les gendarmes aussi portèrent le nom.
Brunot, Hist. de la langue franç., t. IX, p. 951.
13.1 On voit encore au sommet du mont des Alouettes les moulins à vent qu'utilisaient les Vendéens pour signaler les mouvements des Bleus.
S. de Beauvoir, Tout compte fait, p. 255.
N. f. pl. (1679, in D. D. L.). Vx. || Les Bleues (ou filles bleues), religieuses en manteau bleu de l'un des ordres de l'Annonciade.
b (1791, in T. L. F.). Jeune recrue (les soldats d'autrefois arrivant souvent à la caserne en blouse bleue). Conscrit, nouveau, novice; bleu-bite; bleusaille (→ Pierrot, cit. 3). || Brimer les bleus.
14 (…) des paroles aimables et persuasives comme en ont au lycée les vétérans, au régiment les anciens pour un bleu qu'on veut amadouer (…)
Proust, À la recherche du temps perdu, t. X, p. 51 (→ Amadouer, cit. 5).
15 L'officier, déjà fort désobligé par ces propos impertinents, bondit de rage lorsqu'il apprit qu'ils étaient tenus par un simple engagé, un « bleu » !
A. Allais, Contes et chroniques, p. 55.
16 Je suis rentré en dépôt de mon régiment. Ce sont tous les jours des bleus à dresser, des détachements à habiller, à équiper. Je suis chef de section (…)
J.-R. Bloch, Deux hommes se rencontrent, p. 291.
(1898). Nouvel élève. Bizut. || Tu me prends pour un bleu ! || Les bleus et les anciens.
c (1867). Au Canada, Membre du Parti conservateur (opposé à rouge).
2 Combinaison de travail, généralement en toile bleue. || Un bleu de mécanicien. || Bleu de chauffe (cit. 1 et 2).Bleus, n. m. pl. || Mettre ses bleus. || Des bleus de travail.
17 Les pendules du pointage inscrivaient sur les cartons des compagnons en bleu la minute de leur passage.
Pierre Hamp, la Peine des hommes (Moteurs), p. 22.
3 (1863). Marque livide sur la peau résultant d'un coup. Ecchymose, meurtrissure. || Se faire un bleu. || Être couvert de bleus.
18 Mme Gavotte m'écoutait d'une oreille distraite, elle cherchait ses bleus sur ses jambes, sur ses bras : les suçons de Ferdinand. Il l'aime, il la mord.
Violette Leduc, la Folie en tête, p. 446.
4 (1851). || Gros bleu : gros vin rouge de mauvaise qualité. || Petit bleu : vin rouge léger.
19 (…) des lorettes sans ouvrage, prises de la tentation d'une journée de campagne et du petit bleu du cabaret.
Ed. et J. de Goncourt, Manette Salomon, p. 98.
20 Goûte à ce velours
Ce petit bleu lourd
De menaces (…)
Georges Brassens, le Bistro.
Bleue, n. f. (1903, Willy, in D. D. L.). Pop. Absinthe. Verte.
5 (1928). Fromage persillé, préparé à partir du lait de vache (à la différence du roquefort) et dont la pâte est parsemée de moisissures bleuâtres. || Bleu d'Auvergne, bleu de Bresse, bleu des Causses. || Un bleu très savoureux, onctueux.
6 (Noms d'animaux). || Bleu d'Auvergne : chien à poils ras, à plaques noires bleutées. Braque.Bleu de Gascogne : chien courant à pelage noir et blanc.
Régional. Squale appelé aussi bleuet ou cagnot. Chien (de mer), roussette.
7 Fam., vieilli. || Petit bleu, bleu : dépêche (sur papier bleu). Pneu, pneumatique (cit. 4 et supra), télégramme.
Photogr. Photographie d'un dessin obtenue par impression sur papier au ferroprussiate, les traits du dessin apparaissant en blanc sur fond bleu. || Tirage des bleus.
8 Altération du lait due à un microbe (bacillus cyanogenes).Maladie du vin.
9 Techn. Au billard, Craie pour frotter le procédé.
10 Plais. (pour blues). || Le Petit Bleu de la côte ouest (des États-Unis), titre d'un roman de J.-P. Manchette.
11 N. f.Loc. La grande bleue : la Méditerranée.
———
III Vieilli. Altération par euphémisme de Dieu, entrant dans la composition de nombreux jurons. Corbleu, morbleu, palsambleu, parbleu, sacrebleu. || « Tonnerre de bleu » (Courteline, in T. L. F.).
21 Il y a tant de bleus, bleu d'auvergne, de caserne ou jadis ersatz de Dieu dans les bons vieux jurons irrespectueux, jernibleu, morbleu, sacrebleu (…)
J. Prévert, Choses et autres, p. 260.
CONTR. (De II., B., 1., b.) Ancien, vétéran.
DÉR. Blavet, bleuâtre, bleuet, bleueur, bleuir, bleusaille, bleuité, bleuté, bleuter.
COMP. Bleu-bite. — V. aussi Cyan(o)-.

Encyclopédie Universelle. 2012.