1. aube [ ob ] n. f.
• 1080; lat. alba, fém. de albus « blanc »
1 ♦ Première lueur du soleil levant qui commence à blanchir l'horizon. Par ext. Moment de cette lueur. ⇒ 1. point (du jour); matin. C'est à l'aube qu'on exécutait les condamnés. L'aube précède l'aurore. Dès l'aube : de très bonne heure (cf. Au chant du coq, dès potron-minet). « L'aube était encore indécise, le ciel gardait une couleur métallique » (Martin du Gard).
2 ♦ Fig. et littér. ⇒ commencement, début; matin(fig.). L'aube de la vie. À l'aube de la Révolution.
⊗ CONTR. Crépuscule; brune.
aube 2. aube [ ob ] n. f.
♦ Vêtement ecclésiastique de lin blanc que les officiants portent par-dessus la soutane pour célébrer la messe. Le prêtre revêt la chasuble par-dessus l'aube et l'étole. — Longue robe blanche des premiers communiants.
aube 3. aube [ ob ] n. f.
• 1283 « planchette reliant les arçons de la selle »; alve 1080; probablt lat. alapa « gifle » et p.-ê. « palette »
♦ Palette d'une roue hydraulique. Les aubes d'une roue de moulin. Navire à aubes. — Partie d'une turbine servant à canaliser les fluides.
● aube nom féminin (latin populaire alba, féminin de albus, blanc) Clarté blanchâtre qui précède le jour naissant ; moment où le jour se lève : Travailler dès l'aube. Début, commencement : À l'aube d'une période, des Temps modernes. ● aube (citations) nom féminin (latin populaire alba, féminin de albus, blanc) Guillaume Apollinaire de Kostrowitzky, dit Guillaume Apollinaire Rome 1880-Paris 1918 Mon beau navire ô ma mémoire Avons-nous assez navigué Dans une onde mauvaise à boire Avons-nous assez divagué De la belle aube au triste soir. Alcools, la Chanson du Mal-Aimé Gallimard René Daumal Boulzicourt, Ardennes, 1908-Paris 1944 Chaque fois que l'aube paraît, le mystère est là tout entier. Poésie noire et poésie blanche Gallimard Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends. […] Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe, Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur. Les Contemplations, Demain à l'aube, IV, 14 Arthur Rimbaud Charleville 1854-Marseille 1891 Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes. Poésies, le Bateau ivre Octavio Paz Mexico 1914-Mexico 1998 Dès l'aube ce qui naît cherche son nom. Al alba busca su nombre lo naciente. Libertad bajo palabra, I, Condición de nube ● aube (synonymes) nom féminin (latin populaire alba, féminin de albus, blanc) Clarté blanchâtre qui précède le jour naissant ; moment où le...
Synonymes :
- aurore
- point du jour
Contraires :
- brune
- crépuscule
● aube
nom féminin
(latin ecclésiastique alba vestis)
Longue robe blanche retenue ou non par un cordon à la taille, utilisée dans les cérémonies catholiques.
● aube
nom féminin
(latin populaire alapa, palette)
Partie d'une roue hydraulique sur laquelle s'exerce l'action du fluide moteur.
Surface métallique, fixe ou mobile, servant à canaliser un fluide dans une turbomachine.
● aube (difficultés)
nom féminin
(latin populaire alapa, palette)
Orthographe
On écrit : bateau à aubes, roue à aubes (aubes au pluriel).
aube
riv. de France (248 km), affl. de la Seine (r. dr.).
— Dép.: 6 002 km²; 289 207 hab.; ch.-l. Troyes. V. Champagne-Ardenne (Rég.).
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aube
n. f.
d1./d Premières lueurs de l'aurore; moment où le ciel blanchit à l'est. à l'aube, dès l'aube.
d2./d Fig. Débuts, naissance. L'aube de l'humanité.
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aube
n. f. LITURG Ample tunique de toile blanche.
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aube
n. f. Palette solidaire d'une roue, qui reçoit la pression d'un fluide ou qui exerce une pression sur celui-ci. Turbine à aubes. Roue à aubes.
I.
⇒AUBE1, subst. fém.
A.— Moment qui précède l'aurore, où la lumière du soleil levant commence à blanchir l'horizon; point(e) du jour.
1. Fréq. dans la lang. littér. :
• 1. Quelques prisonniers qu'on ramenait, des uhlans sombres, drapés de leurs grands manteaux, refusèrent de parler. Et le petit jour, une aube livide de matinée pluvieuse se leva, dans l'attente qui continuait énervée d'impatience.
ZOLA, La Débâcle, 1892, p. 108.
• 2. Déjà la vie ardente incline vers le soir,
Respire ta jeunesse,
Le temps est court qui va de la vigne au pressoir,
De l'aube au jour qui baisse.
A. DE NOAILLES, Le Cœur innombrable, Le Temps de vivre, 1901, p. 185.
SYNT. a) Aube + adj. Aube blanche, bleue, grise, jaune, noire, rouge, rougeâtre, rougissante, verdâtre, vermeille, verte; aube argentée, blafarde, blême, claire, éblouissante, éclatante, flamboyante, incolore, lactée, laiteuse, livide, pâle, resplendissante; aube candide, cruelle, exaltante, languide, morose, plaintive, pure, romantique, sereine, sournoise; aube brutale, éternelle, fugitive, indécise, prochaine, tardive, vacillante; aube fraîche, frissonnante, froide, grelottante, tiède, torride. b) Aube + prép. + subst. Aube du jour, d'un lendemain; aube d'automne, d'avril, d'été, d'hiver; aube d'azur, de boue, de sang et de larmes. c) Aube + verbe. L'aube croît, émerge, s'éveille, fleurit, grandit, se lève, naît, paraît, pointe. — PARAD. Clarté, frange d'or, lumière, lueurs, rayon, reflet; l'argent de, l'azur, blancheur, le blême, blêmeurs, le bleu, demi-clarté, faux-jour, lividité, pâleurs; deuil, grisaille, gris de l'aube, éblouissement, éclat, gloire; annonce, approche, attente, chute, crépuscule, éclatement, éveil, jaillissements, montée, pointe; brouillard, froid (petit), gel, nuées, rosée, vapeurs; candeur, douceur, fraîcheur, inquiétude, paix et recueillement, tristesse.
— Par personnification poét. :
• 3. L'été, lorsque le jour a fui (...)
(...)
Un vague demi-jour teint le dôme éternel;
Et l'aube douce et pâle, en attendant son heure,
Semble toute la nuit errer au bas du ciel.
HUGO, Les Rayons et les ombres, Nuits de juin, 1840, p. 1117.
• 4. De la montagne il sort des ruisselets en foule,
Et partout c'est un bruit d'eau vive qui s'écoule
De l'aube au front d'argent jusqu'au soir aux yeux d'or.
SAMAIN, Le Chariot d'or, Les Roses dans la coupe, 1900, p. 28.
SYNT. Se lever à l'aube, avant l'aube, rentrer à l'aube.
2. Cour. À l'aube, dès l'aube :
• 5. Combien de fois ai-je été frappé de cette idée que les premières messes, dites à l'aube ou au lever du soleil, qui prennent le cœur si suavement, sont dites surtout pour les domestiques! Les maîtres ne se lèvent pas si tôt.
BLOY, Journal, 1892, p. 52.
SYNT. Se lever à l'aube, avant l'aube, rentrer à l'aube.
3. P. ext. et p. iron. Début du jour, de l'activité quotidienne :
• 6. Il est neuf heures du matin — l'aube des gens qui se couchent tard.
COLETTE, L'Envers du music-hall, 1913, p. 21.
4. LITT., MUS. Un des thèmes de la chanson du troubadour ou du trouvère, où le poète dit le regret qu'inspire aux amants l'approche de l'aube qui les séparera; une chanson traitant ce thème :
• 7. Et Raimbaud qui de Phanette
Rimas en Aubes et Dits :
(...)
Aimables provençaux par qui sut bien les sons,
Mignardement sonnés, des jeux et des tensons...
MORÉAS, Sylves, 1896, p. 178.
B.— P. méton.
1. Clarté blanchâtre qui est celle de la pointe du jour :
• 8. ... aucune aurore ne colora le ciel que blanchit, au matin seulement, une aube grelottante et navrée. C'était une clarté si noyée que nous attendions encore l'aube, quand le soleil déjà levé transparut derrière un nuage.
GIDE, Le Voyage d'Urien, 1893, p. 43.
• 9. L'aube pointa, un fil de clarté grise, au fond de l'orient, une demi-pâleur envahissante, sur cette immensité plate, venteuse et désolée. Cela rappelait un peu la montée de l'aube sur la mer.
VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, p. 80.
Rem. En ce sens, aube peut être suj. de verbes comme blanchir, briller, colorier, déteindre, dorer, éblouir, éclairer, luire, rougir et compl. de verbes comme refléter, regarder, scruter.
2. P. ext.
a) Lueur, rayonnement, rougeoiement, auréole :
• 10. La lune n'était point d'abord à l'horizon, mais son aube s'épanouit par degrés devant elle, de même que ces gloires argentées dont les peintres du XIVe siècle entouraient la tête de la Vierge...
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, p. 122.
• 11. Au loin, il voyait, lui, la nuit qu'on passe, recroquevillé, palpitant d'attention et tout noir, au fond du trou d'écoute dont se silhouette, tout autour, la mâchoire déchiquetée, chaque fois qu'un coup de canon jette son aube dans le ciel.
BARBUSSE, Le Feu, 1916, p. 141.
• 12. Un côté de la tente resté ouvert donne sur les lignes et, par delà les bois noirs, on aperçoit parfois l'aube fugitive des fusées.
DORGELÈS, Les Croix de bois, 1919, p. 189.
b) Poét. Clarté que perçoit l'œil :
• 13. ... et de nouveau l'enfant suivit des yeux l'étoile, dont l'éclat, pour la première fois, luisait dans l'aube trouble de sa vue.
ZOLA, Fécondité, 1899, p. 243.
C.— Emplois métaph. ou fig., littér.
1. Entre, au sens propre, dans de nombreuses comparaisons ou revêt une valeur symbolique.
a) P. compar. :
• 14. Chaque jour, pour eux seuls [les morts pour la patrie] se levant plus fidèle,
La gloire, aube toujours nouvelle,
Fait luire leur mémoire et redore leurs noms!
HUGO, Les Chants du crépuscule, 1835, p. 38.
• 15. L'espoir, c'est l'aube incertaine;
Sur notre but sérieux
C'est la dorure lointaine
D'un rayon mystérieux.
HUGO, Les Rayons et les ombres, 1840, p. 1089.
• 16. Ilsée la plaignait, car elle paraissait triste et cruelle. Son sourire matinal était une aube blême encore teinte de l'horreur nocturne.
SCHWOB, Le Livre de Monelle, 1894, p. 75.
• 17. L'enfance est une aube. Cependant, cherchant à faire revivre l'image de la mienne, j'ai peine à ne pas l'imaginer semblable à un soir d'avril. Les rougeurs du couchant, qui incendient les nuages, en avril, ont des douceurs d'aurore...
ESTAUNIÉ, L'Empreinte, 1896, p. 255.
b) Symbole de pureté, d'immatérialité, de promesse, de vie, d'espoir, etc. :
• 18. Tout ce qui commence a une vertu qui ne se retrouve jamais plus.
Une force, une nouveauté, une fraîcheur comme l'aube.
Une jeunesse, une ardeur.
Un élan.
Une naïveté.
Une naissance qui ne se trouve jamais plus.
PÉGUY, Le Porche du mystère de la 2e vertu, 1911, p. 188.
— Plus rarement. Symbole des incertitudes de l'avenir, ou au contraire de sérénité :
• 19. Plus Rancé s'était avancé vers le terme, plus il était devenu serein; son âme répandait sa clarté sur son visage : l'aube s'échappait de la nuit.
CHATEAUBRIAND, Vie de Rancé, 1844, p. 274.
• 20. Vous scrutez l'aube et l'avenir
Vous scrutez la brume au lointain
Prêts à payer d'un prix sans mesure le simple égarement
D'une patrouille de SS avec ses chiens
Par les forêts les cimes les gorges
ARAGON, Le Roman inachevé, 1956, p. 213.
2. Emplois fig.
a) [Correspond au sens A] Surtout dans aube de + subst. Début, commencement, naissance, etc.
— Rare. [Le compl. déterminatif est un compl. de temps] :
• 21. L'enfant ne connaît guère que l'aube de la nuit, qui est le crépuscule.
JAMMES, Les Nuits qui me chantent, 1928, p. 16.
— Plus cour. [Le compl. déterminatif désigne un art, une sc., une pratique, une réalité importante] :
• 22. C'était comme une fenêtre brusquement ouverte dans la vieille cuisine au bitume, dans les jus recuits de la tradition, et le soleil entrait, et les murs riaient de cette matinée de printemps! La note claire de son tableau, ce bleuissement dont on se moquait, éclatait parmi les autres. N'était-ce pas l'aube attendue, un jour nouveau qui se levait pour l'art? Il aperçut un critique qui s'arrêtait sans rire, des peintres célèbres, surpris, la mine grave, le père Malgras, très sale, allant de tableau en tableau avec sa moue de fin dégustateur, tombant en arrêt devant le sien, immobile, absorbé.
ZOLA, L'Œuvre, 1886, p. 140.
• 23. — Elles me conteront le rustique mystère
Des noces de la lune avec le beau berger,
La jeunesse du temps à l'aube de la terre,
L'ivresse du vin grec et de l'amour léger.
A. DE NOAILLES, Le Cœur innombrable, Les Nymphes, 1901, p. 116.
— Avec une idée de faiblesse, de balbutiement, etc. :
• 24. ... une clarté un peu plus vive venait de jaillir dans ma tête, où l'aube des idées était encore si pâle. Et c'est sans doute à cet éveil intérieur que ce moment fugitif de ma vie doit ses dessous insondables...
LOTI, Le Roman d'un enfant, 1890, p. 7.
• 25. Des signes nombreux attestent aujourd'hui la renaissance d'une philosophie vigoureuse (...). Ce n'est encore qu'une aube, à l'heure où j'écris.
L. DAUDET, Le Stupide XIXe s., 1922, p. 163.
— Avec une idée de promesse, d'annonce de ce qui va suivre :
• 26. Ce qu'il y avait dans sa nature de féminin, d'un peu alangui et blasé, le rendait [Élie] merveilleusement propre à jouir de ces demi-teintes qui sont l'aube de l'amour partagé...
P. BOURGET, 2e amour, 1884, p. 186.
— En partic. Début de la vie :
• 27. Ô temps! jours radieux! aube trop tôt ravie!
Pourquoi Dieu met-il donc le meilleur de la vie
Tout au commencement?
HUGO, Les Voix intérieures, 1837, p. 345.
• 28. Dès l'aube, je sais ma vocation; seul mon couchant connaîtra mon destin.
BARRÈS, Les Amitiés françaises, 1903, p. 188.
b) [Correspond au sens B] Clarté, illumination intérieure, lueur :
• 29. Et la vérité non seulement met en eux une aube d'espoir, mais aussi y bâtit un recommencement de force et de courage.
BARBUSSE, Le Feu, 1916, p. 378.
• 30. Elle regardait dans le vide : sur ce trottoir, au bord d'un fleuve de boue et de corps pressés, au moment de s'y jeter, de s'y débattre, ou de consentir à l'enlisement, elle percevait une lueur, une aube : elle imaginait un retour au pays secret et triste, — toute une vie de méditation, de perfectionnement, dans le silence d'Argelouse : l'aventure intérieure, la recherche de Dieu...
MAURIAC, Thérèse Desqueyroux, 1927, p. 278.
Rem. On rencontre dans la docum. le néol. aubéen, enne, adj. 1837, (BARBEY D'AUREVILLY, 1er Memorandum, p. 106; suff. -éen). Propre à l'aube. ,,(...) Dante, au milieu des rayons aubéens du Paradis et des brasiers de l'Enfer, a des côtés opaques, de majestueuses ténèbres, et Alfieri tord l'Italien dans les tenailles d'un système``.
PRONONC. ET ORTH. :[o:b]. Enq. :/ob, D/. FÉR. Crit. t. 1 1787 écrit aûbe.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. Ca 1100 albe « point du jour » (Roland, éd. J. Bédier, 737 : Tresvait la noit e apert la clere albe); ca 1170 aube « id. » (CHR. DE TROYES, Chevalier lion, éd. .W Foerster, 5869 ds T.-L.); 2. 1575-1615 fig. (D'AUBIGNÉ, Tragiques ds GDF. Compl. : Point ne luit aux enfers l'aube de l'esperance).
Empr. au lat. vulg. alba « id. », fém. substantivé de l'adj. albus « blanc, clair », à partir d'expr. telles que alba lux (LUCAIN, De bello civili, 2, 720 ds TLL s.v., 1506, 44) ou alba dies (SILIUS ITALICUS, Punica, 15, 53, ibid., 45).
STAT. — Aubéen. Fréq. abs. littér. :1.
BBG. — BURN. 1970. — CHASS. 1970. — DARM. Vie 1932, p. 56. — DELC. t. 1 1926. — DLF M. Â. — GOUG. Mots t. 1 1962, p. 279. — GUYOT 1953. — Métrol. 1969. — ROG. 1965, p. 66. — TIMM. 1892. — UV.-CHAPMAN 1956. — WILL. 1831.
II.
⇒AUBE2, subst. fém.
A.— ANTIQ. Robe de lin blanche, d'un usage fréquent parmi les personnes de haut rang (d'apr. GAY t. 1 1887).
B.— LITURG. Tunique blanche en toile de lin, serrée à la taille par un cordon, munie de manches étroites, que l'officiant (prêtre, diacre ou sous-diacre) porte par-dessus la soutane pour célébrer la messe ou dans quelques autres cérémonies :
• 1. Jamais il n'avait senti si profondément le désir d'être prêtre et de célébrer à son tour le saint sacrifice. Ayant baisé et plié soigneusement l'aube et la chasuble, il s'inclina devant M. l'abbé Lantaigne avant de se retirer.
A. FRANCE, L'Orme du mail, 1897, p. 20.
• 2. Durtal fut tiré de ses réflexions par un flux et reflux de moines dans le chœur. L'on habillait le père Abbé. Le cérémoniaire, debout, devant l'autel, enlevait les vêtements qui y étaient posés, l'aube, le cordon, l'étole, la chape et les distribuait à des novices qui, à la queue-leu-leu, les présentaient, après s'être agenouillés devant le trône, aux habilleurs.
HUYSMANS, L'Oblat, t. 1, 1903, p. 258.
SYNT. S'affubler de l'aube; passer, vêtir, revêtir, enlever l'aube; religieux, prêtre en aube.
— Longue tunique blanche que revêtent les premiers communiants.
— [Dans l'Église primitive] Vêtement blanc que revêtaient les nouveaux baptisés, en signe de purification :
• 3. — Viens, mon âme! (...)! viens revêtir les aubes du baptême.
A. FRANCE, Thaïs, 1890, p. 101.
ÉTYMOL. ET HIST. — Ca 1040 liturg. albe « vêtement ecclésiastique » (Alexis, éd. G. Paris et L. Pannier, 117, b ds T.-L. : Clerc revestut en albes et en chapes); 1174 aube « id. » (G. DE PONT-STE-MAXENCE, St Rhomas, éd. E. Walberg, 1614).
Empr. au lat. chrét. alba « id. » (GRÉGOIRE DE TOURS, Historia Francorum, 4, 43 ds TLL s.v., 1509, 62), sens tiré de alba « robe blanche des Élus »; (TERTULLIEN, Scorpiace, 12, ibid., 60) tiré p. ell. de alba vestis; OVIDE, Amores, 3, 2, 41 ds TLL s.v., 1506, 12).
BBG. — Archéol. chrét. 1924. — BACH.-DEZ. 1882. — BOUILLET 1859. — Cost. 1899. — GAY t. 1 1967 [1887]. — GOUG. Mots t. 1 1962, p. 279. — LELOIR 1961. — LERCH (E.). Der des Christentums auf den französischen Wortschatz. Neuphilologische Monatsschrift. 1933, t. 4, pp. 65-80, 108-121. — MARCEL 1938.
III.
⇒AUBE3, subst. fém.
TECHNOL. ,,Planches fixées à la circonférence de la roue d'un moulin à eau, et sur lesquelles vient s'exercer immédiatement l'impulsion du fluide qui les chasse l'une après l'autre, ce qui produit la rotation de cette roue`` (CHESN. 1857). Roues à aubes. Cf. aubage :
• Comme un torrent gonflé qui pèse sur une aube,
La grâce allait peser sur le monde romain.
Et l'enfant endormi dans son jour et son aube,
Comme un prêtre vêtu de l'étole et de l'aube,
Allait appareiller pour quel nouveau chemin.
La grâce allait peser sur l'appareil humain.
Et l'enfant qui dormait aux prémisses de l'aube,
Comme un prêtre vêtu de l'étole et de l'aube,
Allait inaugurer quel appareil romain.
PÉGUY, Ève, 1913, p. 833.
Rem. 1. Dans l'ex. cité, les sens des mots aube1, aube2 et aube3 se trouvent empl. conjointement, par un rapprochement qui tient du jeu. 2. Lar. 19e enregistre un subst. masc. aube au sens de ,,peuplier blanc (populus alba), dans le midi de la France``.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. Ca 1100 alve « chacune des deux planchettes qui relient les arçons d'une selle » (Roland, éd. Bédier, 3881 : Les alves turnent, les seles cheent a tere); apr. 1190 auve « id. » (BEROUL, Tristan, éd. E. Muret, 3804 ds T.-L.) — 1611 (COTGR., aube); 2. 1283 aube « planche fixée à la circonférence d'une roue de moulin à eau » (PH. DE BEAUMANOIR, Coutumes de Beauvaisis, XXXVIII, 16 ds GDF. Compl. : Cil qui le tient a louage le moulin, doit livrer quevilles, fusiax, aubes et teles cozes menues).
Prob. empr. au lat. pop. alapa « gifle » (dep. Ier s., PHÈDRE, Fabulae Aesopiae, 5, 3, 2 ds TLL s.v., 1479, 60-63) qui dut avoir primitivement le sens de « paume de la main », d'où le sens « palette » qu'on trouve dans les lang. romanes (Schuchardt ds Z. rom. Philol., t. 31, pp. 721-725; cf. à l'appui de cette évolution sém. le lat. médiév. IXe s. alapa « couverture de livre » : AGNELLUS, Liber pontificalis ecclesiae Ravennatis, 27 ds Mittellat. W. s.v., 422, 4, 5). Alapa est d'orig. obsc. (ERN.-MEILLET, WALDE.-HOFM.). À l'hyp. d'un déverbal de alapare « lever la main » (REW3 s.v. alapa, EWFS2) s'oppose le fait que, tandis qu'alapa est bien attesté, alapare l'est seulement dans les gloses tardives (DU CANGE, t. 1, p. 158 c) et le déponent alapari l'est une seule fois dans Plaute, très rarement en b. lat. (TLL s.v.); alapari (alapare) est plus vraisemblablement dér. de alapa. L'hyp. d'une orig. étrusque (Schuchardt, loc. cit.) n'est ratifiée ni par WALDE.-HOFM., ni par ERN.-MEILLET. Bien qu'alapa n'explique pas la forme de l'esp. álabe, on ne peut voir à l'orig. des mots romans le lat. alipes « ailé », qui par une sorte de méton. aurait pris le sens d'« aile » (COR. t. 1, s.v. álabe), car c'est un mot poétique très rare. Quant à l'étymon lat. adeps « graisse » auquel remonteraient les formes romanes par l'intermédiaire du lat. vulg. aleps, -ipis attesté dans l'Appendix Probi (H. Sperber ds Z. rom. Philol., t. 38, pp. 537-543), il présente des difficultés sém. insurmontables.
STAT. — Fréq. abs. littér. :2 634. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 1 260, b) 4 270; XXe s. : a) 4 671, b) 5 028.
BBG. — BAIST (G.). Aube. Rom. Forsch. 1900, t. 12, p. 652. — BOUILLET 1859. — CHABAT 1881. — CHESN. 1857. — ERNAULT (É.). Étymol. bret. Mém. de la Sté de ling. de Paris. 1898, t. 10, p. 325. — GRUSS 1952. — JOSSIER 1881. — LE CLÈRE 1960. — MEYER-LÜBKE (W.). Zur romanischen Sprachgeschichte. Z. rom. Philol. 1907, t. 31, pp. 582-586. — POIGNON 1967. — PRIVAT-FOC. 1870. — ROMMEL (A.). Die Entstehung des klassischen französischen Gartens im Spiegel der Sprache. Berlin, 1954, p. 168.
1. aube [ob] n. f.
ÉTYM. V. 1170; albe, v. 1100; du lat. pop. alba, fém. de albus « blanc ».
❖
1 Première lueur du soleil levant qui commence à blanchir l'horizon.
♦ Par ext. Moment de cette lueur. ⇒ Point (du jour); jour (le jour point…; jour naissant; première clarté, premières lueurs du jour), matin. || L'aube se lève, paraît. || L'aube précède l'aurore. ⇒ Aurore, crépuscule (du matin). || Dès l'aube : de très bonne heure. ⇒ Chant (au chant de l'alouette, au chant du coq); potron-jaquet, potron-minet (dès).
1 Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose (…)
Quand l'aube de ses pleurs au point du jour l'arrose.
Ronsard, les Amours de Marie, II, 4.
2 L'aube du jour arrive, et d'amis point du tout.
La Fontaine, Fables, IV, 22.
3 Et du temple déjà l'aube blanchit le faîte.
Racine, Athalie, I, 1.
4 L'aube pâle a blanchi les arches colossales.
Hugo, Ballades, 14.
5 L'aube paraissait à peine; tout était encore baigné du sombre de la nuit.
Hugo, Quatre-vingt-treize, IV, 1, 2.
6 L'aube sur les grands monts se leva frémissante.
Hugo, la Légende des siècles, X, « Le jour des Rois », 1.
7 Après la froide nuit, vous verrez l'aube éclore.
Hugo, la Légende des siècles, IX, « L'Islam ».
8 L'aube était encore indécise, le ciel gardait une couleur métallique (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. I, p. 63.
8.1 L'aube se passe autour du cou
Un collier de fenêtres.
Éluard, l'Amour la Poésie, Pl., t. I, p. 232.
8.2 Mais déjà, en ces quelques instants, l'aube tropicale, qui est d'une brièveté saisissante, avait fait place à l'aurore.
J. Kessel, le Lion, p. 13.
8.3 Au ras de l'horizon, une longue lueur grise commençait à s'étendre : l'aube, avec son reflet lunaire sur les nuages très élevés du zénith, comme si elle allait apparaître au milieu du ciel.
Malraux, Antimémoires, Folio, p. 371.
REM. Les exemples suivants explicitent la source des valeurs métaphoriques.
9 Jeunes amours, si vite épanouies,
Vous êtes l'aube et le matin du cœur.
Hugo, les Contemplations, I, 11.
10 Je n'aime rien tant que ce qui va se produire : et jusque dans l'amour, je ne trouve rien qui l'emporte en volupté sur les premiers sentiments. De toutes les heures du jour, l'aube est ma préférée. C'est pourquoi je veux voir avec une tendre émotion, poindre sur cette vivante, le mouvement sacré.
Valéry, l'Âme et la Danse, p. 35.
10.1 (…) le pommeau de sa canne remonte à l'aube du siècle (…)
Alain Bosquet, les Bonnes Intentions, p. 62.
2 Littér. Lueur, rayonnement (comparable à l'aube). || « L'aube fugitive des fusées » (Dorgelès).
3 (1575-1615). Par métaphore, fig. (Littér.). ⇒ Commencement, début, matin (fig.). || L'aube de la vie. || L'aube d'une civilisation. || À l'aube de la révolution.
♦ Fait d'apparaître, de commencer à se manifester (idées, sentiments, etc.). || Une aube d'espoir. ⇒ Lueur (fig.).
4 ☑ Loc. L'Aube des mouches : l'heure où le soleil est dans toute sa force et où les taons piquent avec le plus d'âpreté (Sainéan).
11 Au tiers jour, à l'aube des mouches, nous apparaît une île (…)
Rabelais, le Quart Livre, 9.
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CONTR. Brune, crépuscule (du soir).
HOM. 2. Aube, 3. aube.
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2. aube [ob] n. f.
ÉTYM. 1174; albe, v. 1040; du lat. alba.
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♦ Vêtement ecclésiastique de lin blanc que les officiants portent par-dessus la soutane pour célébrer la messe. ⇒ Robe. || Le prêtre revêt la chasuble par-dessus l'aube et l'étole.
1 L'aube, dont le nom latin rappelle et le lever du jour et la blancheur virginale, offre de douces consonances avec les idées religieuses (…)
Chateaubriand, le Génie du christianisme, IV, I, 2.
2 (…) elle avait fini par être une assez habile ouvrière, brodant finement des aubes, des devants d'autel.
Zola, Lourdes, p. 274.
3 (…) il regardait aussi sans comprendre la sueur ruisseler sur ses mains. Le sacristain qui, la messe dite, repliait l'aube avant de la glisser dans un tiroir, s'étonnait de la trouver trempée de sueur.
Bernanos, l'Imposture, in Œ. roman., Pl., p. 448.
♦ Longue robe blanche des premiers communiants.
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HOM. 1. Aube, 3. aube.
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3. aube [ob] n. f.
ÉTYM. 1283, « planchette reliant les deux arçons de la selle »; auve, après 1190; alve, v. 1100; probablt du lat. pop. alapa « gifle », primitivement « paume de la main », d'où « palette ».
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♦ Techn. et cour. (dans bateau… à aubes). Palette d'une roue hydraulique. || Les aubes d'une roue de moulin. || Navire à aubes. || Aubes de turbine. ⇒ Aubage.
1 Chaque aube, suspendue entre deux tiges étroites, semblait prête à faire tourner une courroie de transmission qui, enserrant à gauche une portion libre du mince moyeu, dressait verticalement ses deux rubans parallèles.
Raymond Roussel, Impressions d'Afrique, p. 126.
2 (…) une longue gravure encadrée montre un bateau à aubes aquarellé taché de brun et dessiné d'un trait filiforme sur des flots en filasse.
Tony Duvert, Paysage de fantaisie, p. 114.
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DÉR. Aubage.
HOM. 1. Aube, 2. aube.
Encyclopédie Universelle. 2012.