Akademik

absence

absence [ apsɑ̃s ] n. f.
XIIIe; lat. absentia
1Le fait de n'être pas dans un lieu où l'on pourrait, où l'on devrait être. On a remarqué l'absence de Monsieur X dans, (à) cette réunion. Nous avons regretté votre absence. Loc. Briller par son absence, se dit ironiquement d'une absence remarquée.
Dr. Situation légale d'une personne qui a cessé de paraître au lieu de son domicile et dont on n'a pas de nouvelles depuis au moins quatre ans.
2Le fait d'avoir quitté la compagnie de qqn. éloignement, séparation. L'absence d'une personne aimée. « Et l'absence de ce qu'on aime a toujours trop duré » (Molière). Absolt « L'absence diminue les médiocres passions et augmente les grandes » (La Rochefoucauld).
3Le fait de s'absenter, de partir; le temps que dure cette situation. Ils ont fini le plat pendant votre absence.
♢ EN L'ABSENCE DE : lorsque (qqn) est absent. Il est plus expansif en l'absence de ses parents. À défaut de (qqn qui est absent). En l'absence du directeur, voyez son adjoint.
4Le fait de manquer à une séance, un cours. absentéisme. Les absences de cet élève sont trop nombreuses.
5Le fait pour une chose de ne pas se trouver (là où on s'attend à la trouver). 2. manque. L'absence de feuilles aux arbres, de rideaux aux fenêtres.
6Le fait de ne pas exister. défaut, 2. manque; et aussi 2. a-, ana-, dé-, 1. in-; non, sans . L'absence de père est néfaste à un enfant. Absence de loi (cf. Vide juridique). « Le protestant ne voyait dans le mal que l'absence du bien » (A. Gide).
7Une absence : défaillance de mémoire ou moment de distraction. Avoir une absence, des absences.
8Méd. Absence (épileptique) : arrêt soudain, de courte durée, de la conscience, sans défaillance des fonctions végétatives, caractéristique de la forme mineure de l'épilepsie.
⊗ CONTR. Présence.

absence nom féminin (latin absentia) Fait pour quelqu'un, quelque chose de ne pas se trouver à l'endroit où l'on s'attend à ce qu'il soit ; temps pendant lequel quelqu'un est absent de ce lieu : On a constaté son absence. Cela s'est passé pendant mon absence. Fait pour quelqu'un de ne pas se rendre là où il est censé se rendre, et, en particulier, de ne pas aller à son travail, de ne pas assister à un cours, de ne pas participer à toute activité à laquelle il est tenu d'assister ; temps (fois, demi-journée, journée) où il est absent : Ses absences se répètent trop souvent. Fait pour quelqu'un ou quelque chose de ne pas exister ou de manquer : L'absence de témoin rend l'enquête difficile. Perte momentanée de la mémoire, moment d'inattention : Depuis son accident, il a souvent des absences. Droit État de celui dont l'existence est incertaine, du fait de sa disparition et du manque de nouvelles pendant un temps déterminé par la loi. Psychiatrie Interruption passagère de la conscience. ● absence (citations) nom féminin (latin absentia) Claude Aveline Paris 1901-Paris 1992 L'absence de l'être aimé laisse derrière soi un lent poison qui s'appelle l'oubli. Et tout le reste n'est rien Mercure de France Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 L'absence est aussi bien un remède à la haine Qu'un appareil contre l'amour. Fables, les Deux Perroquets, le Roi et son Fils Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 L'absence est le plus grand des maux. Fables, les Deux Pigeons Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ! Premières Méditations poétiques, l'Isolement François, duc de La Rochefoucauld Paris 1613-Paris 1680 L'absence diminue les médiocres passions et augmente les grandes, comme le vent éteint les bougies et allume le feu. Maximes Antoine de Rambouillet, sieur de La Sablière 1624-1679 Et je connais bien que l'absence Est un prétexte à l'inconstance, Plutôt qu'un remède à l'amour. Madrigaux Gabriel Marcel Paris 1889-Paris 1973 La fidélité ne s'affirme vraiment que là où elle défie l'absence. Du refus à l'invocation Gallimard Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière Paris 1622-Paris 1673 Et l'absence de ce qu'on aime, Quelque peu qu'elle dure, a toujours trop duré. Amphitryon, II, 2, Amphitryon Paul Raynal Narbonne 1885-Paris 1971 L'absence est plus que le malheur. Le Tombeau sous l'Arc de triomphe Stock Jean Rostand Paris 1894-Ville-d'Avray 1977 Académie française, 1959 Qu'il faut donc aimer quelqu'un pour le préférer à son absence ! Pensées d'un biologiste Stock Jean-Paul Sartre Paris 1905-Paris 1980 L'absence c'est Dieu. Dieu, c'est la solitude des hommes. Le Diable et le Bon Dieu Gallimard Victor Segalen Brest 1878-Huelgoat 1919 Je règne par l'étonnant pouvoir de l'absence. Stèles Plon Abd al-Rahman Djami Khardjird, près de Djam, Khorasan, 1414-Harat 1492 Le tourment de la présence est pis que celui de l'absence. Félix Lope de Vega Carpio Madrid 1562-Madrid 1635 Le début de l'absence est comme la fin de la vie. El principio de la ausencia es como el fin de la vida. El servir con mala estrella, I, 5absence (expressions) nom féminin (latin absentia) En l'absence de quelqu'un, alors que quelqu'un est absent. En l'absence de quelque chose, de quelqu'un, faute de cela, de cette personne. Absence illégale, faute commise par le militaire qui s'absente de son corps sans droit et qui n'a pas encore dépassé les délais à l'issue desquels il serait déclaré déserteur. ● absence (synonymes) nom féminin (latin absentia) Fait pour quelqu'un, quelque chose de ne pas se trouver à...
Contraires :
- présence
Fait pour quelqu'un ou quelque chose de ne pas exister ou...
Synonymes :
- carence
- défaut
- manque
Contraires :
- abondance
- foisonnement
- présence
- profusion
Perte momentanée de la mémoire, moment d'inattention
Synonymes :
- défaillance
- distraction
- inattention
Contraires :
- attention

absence
n. f.
d1./d Défaut de présence, fait de ne pas être là où on pourrait ou devrait être. Nous avons regretté votre absence à cette séance de travail.
d2./d DR Situation d'une personne dont la disparition prolongée a rendu l'existence incertaine.
d3./d Fait d'être éloigné (d'une autre personne). L'absence de sa femme lui pèse.
|| (S. comp.) L'absence diminue les passions.
d4./d Inexistence, manque. Absence de goût.
d5./d Une absence: une défaillance de la mémoire, de l'attention.
d6./d Loc. Prép. En l'absence de: à défaut de. Cette décision a été prise en l'absence de l'intéressé. En l'absence de preuve.

⇒ABSENCE, subst. fém.
I.— Sens propre. Le fait d'être absent.
A.— [Constr. absolue; ce qui est absent est toujours une personne]
1. Au sing. et au plur.  :
1. C'est apparemment dans la nature de l'amitié d'aimer l'absence :tu as ce symptôme-là, par exemple. Je vais demain respirer un air de liberté chez mon oncle où je passerai quatre jours.
G. de STAËL, Lettres de jeunesse, t. I, 1791, p. 460.
2. Une traduction est seulement à l'original ce qu'est le portrait à la nature vivante. Et quel homme pouvant regarder sa maîtresse daignerait jeter les yeux sur son image? Mais, dans l'absence ou la mort, l'image satisfait.
A. DE VIGNY, Lettre à Lord ... sur la soirée du 24 octobre et sur son nouveau système dramatique, 1829, p. 278.
3. À quel mécanisme de l'âme doit-on attribuer cet écart entre l'écriture et la parole, ou plus exactement entre l'absence et la présence? Il semble pourtant que dans la séparation il devrait être plus facile de se déguiser. C'est juste le contraire. Mme d'Orgel ne soupçonnait certainement pas le ton de ses lettres. Souvent elles rendaient François plus heureux que si Mahaut eût été là.
R. RADIGUET, Le Bal du Comte d'Orgel, 1923, p. 141.
4. Ce culte de l'absence se leurre d'ailleurs lui-même; car l'absence est encore une affirmation et ce qu'il devrait embrasser, pour vraiment satisfaire sa haine de l'affirmation, c'est l'absence de l'absence. Mais c'est cette haine qui fait notre sujet, non sa satisfaction.
J. BENDA, La France byzantine ou le Triomphe de la littérature pure, 1945, p. 21.
ADMIN. (SCOL. ET UNIVERSITAIRE). Absence (justifiée ou non) d'un élève. (Elle est relevée sur un registre avec mention du nom de l'absent et de la durée de l'absence) :
5. En vain la sagesse m'avait représenté la gravité de ma faute et les dangers auxquels je m'exposais si elle était connue, ce qui ne pouvait guère manquer, puisque les absences, au collège, étaient relevées et signalées.
A. FRANCE, La Vie en fleur, 1922, p. 320.
DR. CIVIL (cf. absent I A et I B) :
6. De la déclaration d'absence. 115. Lorsqu'une personne aura cessé de paraître au lieu de son domicile, ou de sa résidence, et que depuis quatre ans on n'en aura point eu de nouvelles, les parties intéressées pourront se pourvoir devant le tribunal de première instance, afin que l'absence soit déclarée.
Code civil des Français, 1804, p. 24.
7. Des effets de l'absence, relativement aux biens que l'absent possédait au jour de sa disparition. 120. Dans les cas où l'absent n'aurait point laissé de procuration pour l'administration de ses biens, ses héritiers présomptifs au jour de sa disparition ou de ses dernières nouvelles, pourront, en vertu du jugement définitif qui aura déclaré l'absence, se faire envoyer en possession provisoire des biens qui appartenaient à l'absent au jour de son départ ou de ses dernières nouvelles, à la charge de donner caution pour la sûreté de leur administration.
Code civil des Français, 1804, p. 24
Rem. ,,On distingue dans l'absence trois périodes ou degrés : la présomption d'absence; la déclaration d'absence (ex. 6); l'envoi en possession définitif``. On parle également des effets de l'absence (ex. 7) et encore d'absence des personnes disparues par suite d'événements de guerre (d'apr. Lar. encyclop.).
JUST. MILIT. Absence illégale, ,, infraction commise par le militaire qui s'absente de son corps sans droit et qui n'a pas encore dépassé les délais de grâce, à l'expiration desquels il sera déclaré déserteur.`` (Lar. encyclop.)  :
8. Les délais exigés par l'article 231 doivent être francs, c'est-à-dire qu'il faut six jours pleins d'absence illégale, non compris celui du départ et celui de la rentrée. Ainsi, un militaire abandonne ses drapeaux le 10; il ne sera déserteur que le 17.
V. NICOLAS, Commentaire complet du code de justice militaire pour les armées de terre et de mer, 1898, p. 113.
2. Faire des absences. Faire des fugues :
9. Le sacristain avait été vu dans l'église tout le temps de l'office. La sacristine, au contraire, avait fait des absences; elle avait été à l'âtre du presbytère chercher des charbons pour les encensoirs; ...
E. RENAN, Souvenirs d'enfance et de jeunesse, 1883, p. 46.
B.— Absence de [+ nom de pers. ou de chose]
1. [+ nom de pers. (idée de non-présence)] :
10. C'est même à son retour de là que cette autre prison moins honorable le saisit; ses ennemis profitèrent contre lui de l'absence du prince.
Ch.-A. SAINTE-BEUVE, Tableau historique et critique de la poésie et du théâtre français au XVIe s., 1828, p. 23.
11. ... Jules était obligé de passer devant le palais Campireali; Hélène remarqua bientôt l'absence de ce jeune homme singulier, ...
STENDHAL, L'Abbesse de Castro, 1839, p. 152.
12. Il n'osait lui dire qu'elle aurait dû pousser plus loin. Maintenant, c'était l'absence de son fils qui le tourmentait surtout.
É. ZOLA, La Joie de vivre, 1884, p. 810.
13. Ne profitez pas de l'absence de votre mère pour vous tenir comme des singes.
H. BAZIN, Vipère au poing, 1948, p. 103.
2. [+ nom de chose autre qu'un nom de lieu ou de temps (idée de non-existence)] :
14. C'est sans doute pour que l'homme pût suppléer à l'absence du soleil, et habiter toutes les latitudes de la terre, qu'elle n'a donné qu'à lui seul la puissance de disposer du feu.
J.-H. BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature, 1814, p. 374.
15. Tout se lie et s'enchaîne tellement dans les sociétés humaines comme dans l'univers, que l'on ne sauroit traiter une question de quelque importance, sans en remuer un grand nombre d'autres, surtout lorsque l'absence de maximes établies et généralement reconnues oblige d'éclaircir et de prouver jusqu'aux vérités les plus simples.
LAMENNAIS, De la religion, t. 1, 1825, p. 93.
16. C'est surtout l'absence de style qui me choque. Ce sont d'excellents matériaux, rassemblés avec soin pour un grand ouvrage, mais la pierre est appareillée sans soin, les jointures ne se rapportent pas; et puis, il faudrait essayer de mettre toutes les pierres les unes sur les autres.
E.J. DELÉCLUZE, Journal, 1825, p. 142.
17. C'était la fierté et la sincérité mêmes, une belle nature en vérité, une force physique tout à fait virile, un courage plus que viril, une intelligence rare, une complète absence de coquetterie, une activité exubérante, un profond mépris pour tout ce qui est faux et lâche dans la société.
G. SAND, Histoire de ma vie, t. 3, 1855, p. 97.
18. Ah mon Dieu, mon Dieu! Vide, étrange vide, absence de pensée et vide du cœur. Paulina n'entendait plus les phrases vulgaires qu'on lui disait, mais nul ne remarquait son éloignement.
P.-J. JOUVE, Paulina 1880, 1925, p. 126.
19. Jamais un dieu ne m'avait paru tant possédé ni asservi, toute ma vie jours et nuits lui était vouée, et la douleur et l'absence de douleur, n'était-ce pas la joie, lui étaient dues et même, oui, le désir, à force d'assister, presque chaque jour, à cet acte impersonnel et méchant que j'entendais sans le voir, puisque je devais maintenant regarder le mur sous peine d'être battu.
A. CAMUS, L'Exil et le royaume, 1957, p. 1585.
Rem. Cf. en outre l'ex. 4.
Absence de mémoire  :
20. Il y a des absences de mémoire qui font peur : vous ouvrez les oreilles, vous vous frottez les yeux, ne sachant qui vous trompe de la veille ou du sommeil.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, p. 559.
3. En l'absence de (Var. : dans l'absence de, ex. 21) + nom de pers. ou de chose (autre que de lieu ou de temps) :
21. Dans l'absence momentanée d'un gouvernement, d'un chef visible, apparut l'invisible souverain du monde, le droit et la loi.
J. MICHELET, Introduction à l'histoire universelle, 1831, p. 463.
22. En l'absence de la religion, le gouvernement fut forcé d'inventer la terreur pour rendre ses lois exécutoires; mais c'était une terreur humaine, elle a passé.
H. DE BALZAC, Le Médecin de campagne, 1833, p. 60.
23. Mais, comme je l'ai déjà dit aussi, en l'absence de l'idée de la perfectibilité, qu'il n'était pas possible à l'antiquité de concevoir, comment une pareille hypothèse, une hypothèse aussi simple, aurait-elle pu satisfaire Platon?
P. LEROUX, De l'humanité, de son principe et de son avenir, t. 2, 1840, p. 361.
24. Mais, monsieur, dit Louise, il n'est pas convenable que je vous reçoive en l'absence de mon mari...
J. CHAMPFLEURY, Le Bourgeois de Molinchart, 1855, p. 82.
25. En revanche, le colonel Picquart a commis le crime de faire faire une perquisition chez Esterhazy, sans mandat légal, en son absence.
G. CLEMENCEAU, L'Iniquité, 1899, p. 123.
26. Les esprits avaient été trop émus, la France trop secouée et l'on devine ce qu'un demi-siècle de guerre civile avait laissé d'anarchie. En l'absence d'autorité publique, une sorte de féodalité s'était reconstituée.
J. BAINVILLE, Histoire de France, t. 1, 1924, p. 194.
27. Mais en l'absence d'un véritable désarmement nucléaire l'objectif de la politique française est d'obtenir le statut d'allié atomique des États-Unis dont la communication des connaissances acquises lui permettrait alors, comme elle le permet aujourd'hui à la Grande-Bretagne, de disposer des armes nucléaires les plus perfectionnées sans avoir à faire l'épuisant effort de leur mise au point et de leur fabrication.
B. GOLDSCHMIDT, L'Aventure atomique, ses aspects politiques et techniques, 1962, p. 253.
Rem. Dans cette loc., en peut exprimer une relation purement temporelle (ex. 24, 25), une relation temporelle-causale (ex. 21, 22), une relation de cause (ex. 23, 26, 27).
C.— Absence de [+ nom de lieu ou de temps. L'absence est toujours celle d'une pers.]
[+ nom de lieu d'où qqn est éloigné] :
28. Vous saurez que j'allais mourir si vous n'arriviez pas, et peut-être cette idée vous consolera-t-elle d'une absence momentanée d'Angleterre, d'un voyage long, d'un sacrifice qui, je le vois trop, est bien pénible!
G. DE STAËL, Lettres inédites à Louis de Narbonne, 1793, p. 193.
29. Je n'étais venu à Venise que pour m'assurer de son infidélité : j'en ai assez vu. Mon absence de Ferrare ne peut se prolonger plus long-temps.
V. HUGO, Lucrèce Borgia, 1833, I, 2, p. 30.
[+ nom de temps indiquant la durée de l'éloignement] :
30. Mais que m'importe l'opinion des autres? Le plus indulgent de tous vos juges, c'est mon cœur; mais vous connaissiez mon caractère, vous saviez qu'il aurait tout pardonné excepté une absence d'une année, excepté d'avoir imploré en vain.
G. DE STAËL, Lettres inédites à Louis de Narbonne, 1794, p. 242.
Rem. 1. Les compl. de lieu ou de temps ne sont pas cumulables avec les compl. de pers. (B 1) ou de chose (B 2). La pers. absente peut cependant être indiquée par un adj. pronom. (ex. 29 : mon absence de Ferrare). 2. Les compl. de lieu et de temps ne sont pas cumulables entre eux. Une durée vague peut cependant s'ajouter à l'expr. du lieu à l'aide d'un adj. qualificatif (ex. 28 : une absence momentanée d'Angleterre).
II.— Au fig. PSYCHOL., PATHOL., lang. commun
[Au sing] ,,Forte distraction momentanée rendue sensible par un manque d'adaptation aux circonstances.`` (LAL. 1968).
[Au plur.] (Avoir des) absences. (Être fréquemment dans un état de) rêverie plus ou moins pathologique :
31. Le duc de Guermantes, tout en se félicitant du « bon vent » qui l'avait poussé vers son neveu, resta si étonné de l'accueil, pourtant si naturel, de ma mère, qu'il déclara plus tard qu'elle était aussi désagréable que mon père était poli, qu'elle avait des « absences » pendant lesquelles elle semblait même ne pas entendre les choses qu'on lui disait et qu'à son avis elle n'était pas dans son assiette et peut-être même n'avait pas toute sa tête à elle.
M. PROUST, À la recherche du temps perdu, Le côté de Guermantes, 2, 1921, p. 339.
32. Ah! Qu'elle devait donc être détraquée, désorganisée sans le savoir, malgré les triomphes de son corps, puisque le moindre événement inaccoutumé l'échouait de la sorte, bouche amère, n'ayant pas faim, disposée au mal au cœur! Les mille obstacles contre lesquels on l'avait mise en garde, l'appréhension de ces absences où elle se laissait aller lorsqu'elle était en compagnie, le dégoût et la détestation qu'elle se sentait par avance pour les autres infirmières, la perspective de se trouver au milieu de jeunes hommes, les questions qu'on lui ferait, la nécessité de s'imposer dans un sens qui n'était pas celui de sa nature, de se forcer pour rire, de s'intéresser, de « savoir les prendre », tout lui constituait un avenir hérissé vers lequel elle s'avançait en tremblant.
H. DE MONTHERLANT, Le Songe, 1922, p. 58.
Rem. gén. L'absence est principalement ressentie quand elle est celle d'être proches : femme, fils, mari, parents, père, ou celle de personnes dont on attend les directives : maître, prince, roi, ministre, etc. On voit que l'absence dont on souffre est de deux ordres : affectif (absence de bonheur, douleur, désir, sentiment, foi, générosité); de l'ordre du jugement (absence d'autorité, commandement, direction, méthode, ordre, système, pensée). L'absence a pour caractère d'être temporelle : elle peut être momentanée, courte, fréquente, longue, éternelle; et aussi absolue, totale, complète. L'absence est l'objet d'un constat : il y a des cas, effets, motifs, causes, faits d'absence; le constat est temporel : l'absence dure des heures, des jours, des mois, des années. L'absence dure et se prolonge; on la remarque, on l'aperçoit, on la constate; on la regrette, on la souffre, on la supporte, ou, inversement, on profite de l'absence d'autrui.
Prononc. :[]. Enq. ://.
Étymol. — Corresp. rom. : a. prov. absensa, absencia; n. prov. absènci, assènci, aussènci; ital. assenza; a. esp., cat., port. absencia; esp. ausencia.
1. Début XIIIe s. « non présence d'une personne » (Les Septs Sages, 31, S.A.T.F., Delb. ds QUEM. s.v. :Quelque chose que la dame feist en l'absence de son seigneur la pie lui disoit quant il estoit retourné); 2. 1307 « non présence en justice », terme jur. (cité ds l'Hist. des Chatelains de Tournai, 2, 266 (D'Herbomey), Delb. ibid. :En l'absence de l'une des parties); 3. 1322 « manque (d'une chose) » (A.N. JJ 61, f° 18 v° ds GDF. Compl. :il n'a pas de tristesse de l'absence des choses delectables).
Empr. au lat. absentia « non présence (d'une pers.) » dep. Cicéron (In L. Pisonem oratio, § 37 ds TLL s.v., 169, 62 : confer si audes absentiam tuam cum mea; cf. lat. médiév. « id. », 1157-1158, OTTO episc. Frisingensis, Gesta Friderici I imp., 2, 43, p. 151, 24 ds Mittellat. W. s.v., 47, 12 : imperium seditionibus motum... absentiam sui sensit presulis), d'où 1; emploi jur., 742-842, Concilia aevi Karolini app. 9 A p. 839, 41 ds Mittellat. W. 47, 17 : de sua absentia vel contumacia iam convictum atqui dampnatum, d'où 2; « manque (d'une chose) », dep. QUINTILIEN, Institutio oratoria, 1. 5, chap. 7, § 1 ds TLL s.v., 170, 21 : pro diffidentia premitur absentia testimoniorum; cf. lat. médiév., apr. 1002, THEODORICUS mon. Amorbacensis et Floriacensis, Vita Martini papae, 25 ds Mittellat. W. s.v., 47, 24 : expertus est... soliti honoris effugacissimam absentiam, d'où 3. Forme fr. aucence (1318 ds GDF. Compl. s.v. absence) cf. absent-ausent (absent).
HIST. — Grande stab. sém. du mot dans ses princ. sens et emplois. A.— En parlant d'animés « non présence d'une pers. » début du XIIIe s. (cf. étymol. 1) jusqu'à nos jours. S'emploie avec différentes constr. : éloignement d'un lieu : Son absence de la cour a fait son malheur. RICH. 1680. Encore empl. auj; constr. absolue : Je seray bien ayse que vostre curé absente, car il est de ceux la desquelz la residence est plus nuysible aux brebis que l'absence. ST FRANÇOIS DE SALES, Lettres, 986 (Hug. s.v. absenter). Sens fig. : XVIIe s. 1re attest. 1680 « égarement d'esprit qui vient faute d'application, manière de distraction sensible ». Avoir des absences d'esprit (RICH.). B.— En parlant d'inanimés « manque ». Attesté dans l'anc. lang. en parlant d'inanimés concr., il manque dans la lexicogr. pendant plusieurs s. et réapparaît au XVIIIe s. empl. avec des inanimés abstr., usage le plus cour. auj. : 1re attest. 1322 avec inanimé concr. (cf. étymol. 3). 1798 avec inanimé abstr. : Il y a dans cet ouvrage une absence totale d'esprit, de goût, de logique. Ac. 1798. C.— Emplois techn. 1. Droit (cf. étymol. 2) empl. jusqu'à nos jours (cf. sém.). 2. 1752, philos. scolast. : Absence de suppôt et absence de vertu. L'absence de suppôt est quand deux substances ne se touchent point physiquement, et sont éloignées l'une de l'autre. L'absence de vertu, est quand l'une n'agit pas sur l'autre par quelque vertu qu'elle ait, et qui sorte d'elle pour aller affecter l'autre... Trév. 1752. 3. Neurologie. XXe s. « Courte perte de connaissance, sans chute, mais ne laissant aucune trace dans le souvenir » (Lar. 20e).
STAT. — Fréq. abs. litt. :5 268. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 8 053, b) 7 359; XXe s. : a) 5 145, b) 8 495.
BBG. — BARR. 1967. — BLANCHE 1857. — BOUILLET 1859. — FOULQ-ST-JEAN 1962. — GARNIER-DEL. 1961 [1958]. — GOBLOT 1920. — GUILB. Astronaut. 1967. — LAFON 1963. — LAL. 1968. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — MOOR 1966. — NYSTEN 1814-20. — PIÉRON 1963. — POROT 1960. — RÉAU-ROND. 1951. — SPR. 1967. — ST-EDME t. 1 1824.

absence [apsɑ̃s] n. f.
ÉTYM. Déb. XIIIe; du lat. absentia « non présence (d'une personne) ».
———
I Non présence.
1 Le fait de ne pas être dans un lieu où l'on est habituellement, où l'on pourrait ou devrait être normalement. || L'absence de qqn à…, dans…, chez… || Son absence cause un grand vide. || On a remarqué l'absence de son fils à la cérémonie.
Loc. En l'absence de (qqn) : quelqu'un étant absent. → ci-dessous, III.
1 (…) La fortune jalouse N'a pas en votre absence épargné votre épouse.
Racine, Phèdre, III, 4.
Loc. Briller par son absence : se faire remarquer par le fait même d'être absent.REM. La loc., neutre dans la langue classique, est devenue ironique au XIXe s.
2 Brutus et Cassius brillaient par leur absence.
M.-J. de Chénier, Tibère, I, 1.
2 Le fait d'avoir quitté la compagnie de qqn, de ne plus être avec qqn. Éloignement, séparation. || L'absence d'une personne aimée.Absolt. || L'absence : celle des personnes aimées.
3 L'absence est le plus grand des maux.
La Fontaine, Fables, IX, 2, 7.
4 L'absence est aussi bien un remède à la haine
Qu'un appareil contre l'amour.
La Fontaine, Fables, X, 11.
5 On parle fort diversement Des effets que produit l'absence :
L'un dit qu'elle est contraire à la persévérance;
Et l'autre, qu'elle fait aimer plus longuement;
Pour moi, voici ce que je pense :
L'absence est à l'amour ce qu'est au feu le vent.
Il éteint le petit, il allume le grand.
Bussy-Rabutin, in P. Larousse, (1866) art. Absence.
6 L'absence diminue les médiocres passions, et augmente les grandes, comme le vent éteint les bougies, et allume le feu.
La Rochefoucauld, Maximes, 276.
7 Quand on aime fortement, c'est toujours une nouveauté de voir la personne aimée; après un moment d'absence, on la trouve de manque dans son cœur. Quelle joie de la retrouver !
Pascal, Disc. sur les Passions de l'amour, p. 140.
8 Et l'absence de ce qu'on aime,
Quelque peu qu'elle dure, a toujours trop duré.
Molière, Amphitryon, II, 2.
9 L'absence ni le temps ne sont rien quand on aime.
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Rappelle-toi ».
10 L'absence unit et désunit, elle rapproche aussi bien qu'elle divise, elle fait se souvenir, elle fait oublier; elle relâche certains liens très solides, elle les tend et les éprouve au point de les briser (…)
E. Fromentin, Dominique, p. 18.
11 L'absence n'est-elle pas, pour qui aime, la plus certaine, la plus efficace, la plus vivace, la plus indestructible, la plus fidèle des présences ?
Proust, les Plaisirs et les Jours, p. 142.
11.1 Historiquement, le discours de l'absence est tenu par la Femme : la Femme est sédentaire, l'Homme est chasseur, voyageur; la Femme est fidèle (elle attend), l'Homme est coureur (il navigue, il drague). C'est la Femme qui donne forme à l'absence, en élabore la fiction, car elle en a le temps; elle tisse et elle chante (…)
R. Barthes, Fragments d'un discours amoureux, p. 20.
REM. L'absence est conçue, soit comme une situation caractérisée par le manque psychologique (que crée la non-présence d'un être), soit comme une force abstraite dont les effets sont analogues à ceux du temps (cit. 9, 10, ci-dessus). Ses effets sont toujours relatifs à l'être qui subit l'absence de l'autre.
En emploi absolu (littéraire) :
11.2 L'absence au col tranché que dévore le sang.
Yves Bonnefoy, Poèmes, « Hier régnant désert », p. 101.
3 (Recouvrant les valeurs 1. et 2.). Le fait de s'absenter, de partir, de ne pas être là; temps que dure cette situation. || Pendant l'absence du directeur, pendant son absence. || Une absence prolongée. || Faire une absence (longue, brève).
11.3 (…) la servante fit une absence de quatre jours, sous prétexte d'aller ranger quelque chose à Froidfond
Balzac, Eugénie Grandet, éd. 1838, p. 338.
Loc. En cas d'absence.
11.4 En cas d'absence ou empêchement des procureurs de la République et de leurs substituts, ils seront remplacés par l'un des juges ou suppléants.
Code de Procédure civile, art. 84.
Par métaphore :
11.5 Ce qui vient s'enfuit Le jour est la nuit
Les sommeils sont des absences.
Aragon, le Voyage de Hollande et autres poèmes, p. 22.
4 Dr. Situation légale d'une personne qui a cessé de paraître au lieu de son domicile et dont on n'a pas de nouvelles depuis au moins quatre ans. || Jugement déclarant l'absence.
12 L'absence, c'est la rupture du lien qui attache l'individu à un lieu déterminé, l'état de choses anormal qui empêche de situerl'individu même transitoirement, à ce point que son existence même devient problématique.
A. Colin et H. Capitant, Cours élémentaire de droit civil, t. I, p. 434.
13 Lorsqu'une personne aura cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence, et que depuis quatre ans on n'en aura point eu de nouvelles, les parties intéressées pourront se pourvoir devant le tribunal de première instance, afin que l'absence soit déclarée.
Code civil, art. 115, p. 72.
5 Le fait de ne pas aller (là où on le devrait), de manquer à une séance, à un cours ( Absentéisme). || Des absences trop nombreuses. || Signaler les absences d'un élève. Fugue; → École buissonnière, fam. sécher (la classe, les cours). Vieilli. || Faire des absences : faire des fugues.
6 Le fait (pour une chose) de ne pas se trouver (là où l'on s'attend à la trouver). Manque. || L'absence de feuilles aux arbres.
7 Par ext. Le fait de ne pas exister. Défaut, manque; préf. a-, ana-, dés-, in-; non, sans. || « L'absence de peur (cit. 4) n'est qu'une absence d'imagination ».
14 (…) il (le protestant) ne voyait dans le mal que l'absence du bien, tout comme dans l'ombre l'absence de lumière.
Gide, Dostoïevsky, p. 228.
14.1 Il a fait de nouveau très froid cette nuit; mais, par absence de vent, froid supportable.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 838.
———
II (Une, des absences). Oubli.
1 Absence ou absence de mémoire ( Trou) : oubli, défaillance de la mémoire ou de l'attention due à la fatigue, à l'égarement ou à la distraction, à l'étourderie, à l'inattention. || Il a souvent des absences, il est dans la lune. Amnésie.
15 Ce sont là des surprises et des absences d'un moment.
Massillon, Pentecôte, in Littré.
2 (XXe). Méd. || Absence (épileptique) : arrêt soudain, de courte durée, de la conscience, sans défaillance des fonctions végétatives, caractéristique de la forme mineure de l'épilepsie (petit mal).
———
III Loc. prép. En l'absence de : lorsque (qqn) est absent; à défaut de (qqn qui est absent). || En l'absence de mon mari, je ne reçois personne.
Par métaphore :
16 Lorsque la volonté se tait, l'instinct parle; en l'absence de l'âme, le corps va son chemin.
R. Rolland, Jean-Christophe, p. 189.
Fig. || En l'absence de preuves, d'indices, on ne peut pas l'accuser.
CONTR. Présence. — Abondance, profusion.

Encyclopédie Universelle. 2012.