MARIE
Marie, la mère de Jésus de Nazareth, n’est mentionnée que de façon très discrète et épisodique dans l’ensemble de la littérature néo-testamentaire. En revanche, en tant que personne faisant l’objet de culte et de vénération, elle occupe progressivement une place singulière et éminente dans la foi et la spiritualité chrétiennes, tant orientale qu’occidentale. On a pu dire que «la place de Marie est certainement un cas typique, un cas limite même, du développement du dogme et de la piété dans la tradition catholique» (P. Zobel). Cette double constatation soulève une foule de questions qui relèvent à la fois de l’exégèse biblique et de la théologie, de l’histoire comparée des religions et de l’histoire des dogmes, voire de la psychologie et de la sociologie religieuses. Il est donc difficile, sinon impossible, de faire le départ entre les éléments qui permettent de situer Marie en tant que personnage historique (au sens rigoureux du terme) et ceux qui proviennent de la légende (accréditée par la prolifération des évangiles apocryphes), ou encore ceux qui sont le fruit de la spéculation religieuse de la période postapostolique. Les textes évangéliques eux-mêmes témoignent de l’existence, dès la fin du Ier siècle, d’une tradition mariale assez fermement établie dans les premières communautés chrétiennes. On sait, d’autre part, que le développement de la piété mariale populaire a de loin précédé celui de la doctrine ecclésiastique. Celle-ci s’est lentement élaborée, non sans tensions ni sans controverses, d’abord à travers les grands débats relatifs aux dogmes trinitaire et christologique, puis, plus tardivement et jusqu’aux temps modernes, de façon plus ou moins autonome. Cette élaboration fait d’ailleurs apparaître entre l’Orient et l’Occident des divergences non négligeables. Tandis que les Églises orthodoxes, restant fixées aux grands énoncés dogmatiques antérieurs au schisme, développent surtout une sorte d’«omniprésence» de la Vierge mère de Dieu (Theotokos ) dans la liturgie, l’hymnologie et l’iconographie, supports de la spiritualité, l’Église latine poursuivra de son côté un développement doctrinal faisant apparaître la «mariologie» comme une branche spécialisée de la théologie catholique romaine et aboutissant aux grandes définitions dogmatiques des XIXe et XXe siècles (Immaculée Conception et Assomption). Si, au départ, la Réforme du XVIe siècle n’a contesté que les excès de la dévotion mariale portant atteinte à l’unique médiation du Christ, l’opposition grandissante au dogme romain et à la mariologie a rapidement abouti à ce qu’on peut appeler le «vide marial» de la spiritualité et de la théologie protestantes.
La personne de Marie, le rôle à lui attribuer dans l’œuvre du salut et dans la vie de l’Église soulèvent donc entre les diverses confessions chrétiennes de nombreux problèmes. Ils se posent du point de vue de la foi, au niveau des présupposés théologiques qui commandent l’exégèse et l’interprétation des textes bibliques, mais également dans le domaine de la théologie systématique et de l’ecclésiologie. De ce fait, ils constituent un «lieu» non négligeable du débat théologique auquel le dialogue œcuménique actuel ne peut manquer d’apporter un éclairage et peut-être aussi des perspectives nouvelles.
Marie dans le Nouveau Testament
Si l’on adopte, avec André Feuillet («La Vierge Marie dans le Nouveau Testament», in Maria, t. VI), l’ordre chronologique, généralement admis, de la rédaction des textes, on constate tout d’abord que les grandes épîtres pauliniennes (à l’exception d’une allusion indirecte, Gal., IV, 4) ignorent Marie. L’Évangile de Marc, passant sous silence les récits de la Nativité, ne mentionne la mère de Jésus et «ses frères» qu’à propos de deux incidents du ministère galiléen de Jésus, où celui-ci est contesté (Marc, III, 31-35 et VI, 3). Quelle que soit l’interprétation donnée par la suite à la mention des «frères» de Jésus, il ne s’agit dans les deux cas que d’une relation de parenté tout humaine entre Jésus et sa mère. Il faut rapprocher de ces textes (et de leurs parallèles dans Matthieu et Luc) le logion de Luc, XI, 28, où, en réponse à une allusion de quelqu’un dans la foule à la maternité physique de Marie, Jésus répond: «Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et la gardent.» Matthieu d’abord, Luc ensuite sont les seuls à faire place aux récits de la naissance et de l’enfance du Christ. Par rapport à Marie, ils présentent entre eux de notables différences. Dans Matthieu, la généalogie destinée à établir la filiation davidique et abrahamique de Jésus aboutit d’abord à Joseph, «l’époux de Marie de laquelle est né Jésus, appelé Christ» (Matthieu, I, 16). C’est Joseph qui reçoit l’annonce de la conception et de la naissance miraculeuses (versets 18-25). L’événement est présenté moins comme une grâce et un privilège accordés à Marie que comme l’accomplissement des prophéties messianiques en la personne de l’enfant, «conçu du Saint-Esprit», le Sauveur, «Emmanuel, Dieu avec nous». Le chapitre II, qui relate l’adoration des mages, la fuite en Égypte et le massacre des innocents de Bethléem, est tout entier centré sur le thème de la royauté davidique de l’enfant. C’est lui qui est l’enjeu du drame qui se joue. Il est cinq fois mentionné «avec sa mère» dont le sort est naturellement lié au sien; mais on ne trouve encore ici aucun élément directement mariologique, sinon l’affirmation de la naissance virginale. L’essentiel du donné marial néotestamentaire apparaît donc chez Luc (chap. I et II) et secondairement chez Jean, dans le récit de deux épisodes significatifs: le premier miracle, à Cana (Jean, II, 1-12) et la crucifixion (Jean, XIX, 25-27).
Contrairement à Matthieu, Luc donne à Marie la première place dans les récits de l’enfance. Elle entre en quelque sorte en scène de façon directe et personnelle. C’est elle qui reçoit la salutation angélique («Réjouis-toi, pleine de grâce»), l’annonce de la conception virginale et de l’enfantement par la puissance du Très-Haut. Elle y répond personnellement dans la foi et l’obéissance de la servante du Seigneur à sa parole (I, 26-38). Suivent la visite et le séjour chez Élisabeth, mère de Jean-Baptiste, qui l’accueille comme «la mère de son Seigneur» et la déclare «bénie entre les femmes» et «bienheureuse parce qu’elle a cru» (I, 39-45). Marie répond par le cantique célèbre, le «Magnificat», qui exprime la béatitude et l’action de grâces au Dieu d’Israël dont la miséricorde envers son peuple s’accomplit en vertu de ses promesses (I, 46-55). À ces textes majeurs, il faut ajouter le récit de la Nativité (ch. II), qui mentionne toujours le couple Marie et Joseph, mais souligne deux fois (versets 19 et 51) que «Marie gardait ces choses dans son cœur»; et surtout la prophétie de Siméon (II, 35) lors de la présentation au Temple: «À toi-même une épée te transpercera l’âme.» En dehors des passages déjà cités (parallèles de Marc), on ne trouve plus chez Luc que la mention de Marie priant avec les Apôtres avant la Pentecôte (Act., I, 14).
Les deux textes johanniques n’ajoutent rien à ces éléments, sinon qu’ils situent Marie comme toute proche de son fils à deux moments décisifs de son ministère, lors de sa première manifestation messianique et lors du sacrifice suprême de la croix. Il faut reconnaître d’ailleurs que, dans les deux cas, cette proximité s’accompagne de façon assez ambiguë d’une certaine distance marquée chaque fois par l’appellation de «femme». À Cana, Jésus dit (littéralement): «Qu’y a-t-il de toi à moi»; et Marie se borne à se soumettre à la décision de son fils. À la croix, une sorte de détachement déchirant se produit: Jésus meurt seul, et Marie reçoit demeure terrestre et protection filiale auprès du disciple bien-aimé. La littérature johannique fournit encore dans l’Apocalypse (chap. XII) l’allégorie de la femme couronnée de douze étoiles apparaissant dans le ciel, en proie aux douleurs de l’enfantement, et que la tradition ultérieure interprétera dans un sens mariologique.
Ce bilan sommaire permet de situer les principaux points d’appui que la tradition chrétienne primitive fournit aux développements ultérieurs de la piété et des dogmes mariaux. Il ne suffit pas à lui seul à en expliquer le contenu qui s’enrichira, au cours des siècles, des multiples titres et privilèges reconnus à Marie, ni surtout les raisons dogmatiques qui par une sorte de logique interne conduiront, à travers le foisonnement de la dévotion mariale, l’Église catholique à faire de la Vierge Marie l’objet d’un culte spécial («hyperdulie») et à lui attribuer un rôle actif dans le mystère de la foi par une coopération de plus en plus précise à l’œuvre rédemptrice du Christ.
La tradition ecclésiastique
Il est impossible de suivre autrement qu’à grands traits le cheminement de Marie à travers des siècles de tradition. Les travaux de René Laurentin, par exemple, montrent assez que l’extraordinaire relief qu’a pris la Vierge Marie dans la piété vivante et la doctrine officielle de l’Église catholique jusqu’à nos jours pose d’innombrables problèmes, au sein même du catholicisme, tant au plan de l’exégèse et de l’histoire qu’à celui de la théologie, de l’ecclésiologie et de l’expérience religieuse elle-même.
Historiquement, on peut grosso modo caractériser trois périodes. La première, à partir du IIe siècle, s’achève au Ve avec les deux grands conciles christologiques d’Éphèse (431) et de Chalcédoine (451). Dans la ligne des symboles trinitaires (symboles des Apôtres, de Nicée-Constantinople), le rôle de Marie se limite à l’Incarnation et n’est envisagé essentiellement que par rapport au Christ «conçu du Saint-Esprit, né de la Vierge Marie». À Éphèse, Marie sera proclamée «mère de Dieu» (Theotokos ) dans le contexte du dogme des deux natures dans le Christ (Jésus-Christ, vrai homme et vrai Dieu) qu’explicitera le concile de Chalcédoine (451). La maternité divine de Marie sert en quelque sorte d’argument théologique. Mais déjà dans la tradition patristique se développe, d’Irénée à Augustin, un processus apologétique qui, prenant Marie elle-même comme objet de sa méditation, utilise largement l’interprétation allégorique de l’Écriture. Le thème essentiel en est le parallèle entre Ève et Marie. Celle-ci apparaît comme la «nouvelle Ève», génératrice de la nouvelle création, réparatrice de la faute originelle de l’humanité et jouant par conséquent dans l’économie du salut un rôle actif, à la fois par son obéissance de foi accueillante au Verbe divin et par sa sainteté concrètement exprimée par sa virginité (dans et après l’enfantement).
En une deuxième période qui va du Ve siècle au XVIe, les grandes doctrines trinitaires et christologiques étant fixées, l’intérêt se concentre toujours plus sur la personne, les mérites et les privilèges de Marie. La virginité perpétuelle donne lieu à maintes polémiques à travers lesquelles se formera lentement la croyance à l’Immaculée, préservée dès sa naissance du péché originel et de ses souillures, préservée aussi, par voie de conséquence, de la corruption corporelle et de la mort. Tandis que les théologiens disputent, c’est surtout à travers la liturgie et la célébration des fêtes mariales que se développe, en Orient d’abord, puis en Occident, la vénération de Marie. Au VIe siècle, on compte six fêtes mariales en Orient. Le témoignage liturgique le plus célèbre et le plus cher aux orthodoxes est l’hymne akhatiste à la Vierge, encore en usage. Au VIIe siècle, quatre fêtes mariales apparaissent dans le canon romain, dont celle de l’Assomption (15 août). Mais c’est en Occident aux XIIe et XIIIe siècles que la piété mariale connaît sa plus large extension sous l’influence de maîtres spirituels tels que Bernard de Clairvaux, le pseudo-Albert, Bonaventure, en dépit des réserves parfois exprimées par la grande théologie classique (Thomas d’Aquin, par exemple, refusait à Marie le privilège de l’immaculée conception). L’usage de l’«ave Maria», à côté du «pater», encourage et justifie la croyance en l’efficacité de l’intercession de Marie. Chez saint Bernard apparaît l’idée de la médiation maternelle qui conduira à considérer Marie comme mère de l’Église; et Bonaventure développe le thème de Marie coopérante (adjutorium ) à l’œuvre rédemptrice du Christ par sa participation au sacrifice de la croix. Mais cette période s’achève dans les élans de la dévotion populaire et monastique qui connaîtra bien des excès et des déviations favorisés par l’effondrement de la pensée chrétienne de la fin du Moyen Âge.
À partir du XVIe siècle, les conflits puis les ruptures de la Réforme protestante ont pour effet de déséquilibrer la spiritualité et la théologie mariales, sur lesquelles d’ailleurs le concile de Trente (1545-1563) ne se prononcera guère. De nombreux courants de théologie mystique tendent de plus en plus à faire de la mariologie un «traité séparé», sans lien direct avec le reste de la doctrine chrétienne, la christologie en particulier, et devenant par elle-même source d’inspiration, de vie intérieure personnelle dans l’intimité avec la «médiatrice de toutes les grâces», la mère spirituelle de tous les croyants. Les noms de Bérulle, Jean Eudes, Grignon de Montfort, Alphonse de Liguori illustrent la spiritualité des XVIIe et XVIIIe siècles. Mais dès le XVIe, à partir et au-delà des grandes synthèses doctrinales de Suarez et de Bellarmin, se poursuit et s’achève une entreprise laborieuse et systématique (par exemple, la «mariologie scientifique» de M. J. Scheeben au XIXe siècle) pour réduire et lever les objections persistantes à l’Immaculée Conception. Le dogme en sera finalement proclamé par Pie IX (1854) et les apparitions (La Salette, Lourdes, Bauraing) en populariseront la dévotion spectaculaire. La promulgation en 1950 par Pie XII du dogme de l’Assomption et l’institution des «années mariales» ne feront que consacrer officiellement la glorification de Marie, reine du ciel et digne à cet égard de recevoir le titre de «co-rédemptrice» et de «mère de tous les hommes».
La perspective œcuménique
Le problème de Marie n’occupe évidemment pas une place centrale dans le dialogue œcuménique à l’heure actuelle. Cependant le IIe concile du Vatican, en refusant un traité séparé de mariologie et en incorporant un chapitre sur Marie dans la constitution sur l’Église, a ouvert une perspective nouvelle en montrant un évident souci de ne pas dissocier le thème marial de l’ensemble de la réflexion œcuménique sur l’Église, et donc d’éviter des risques de malentendus avec les frères séparés (cf. constitution Lumen gentium, no 67). La question mariale n’est donc pas secondaire; mais elle est seconde par rapport à d’autres points plus fondamentaux du débat œcuménique. Avec les Églises orthodoxes, l’amplitude prise par le culte marial – et même la doctrine – ne fait pas en soi difficulté; il en va différemment du rôle que s’attribue le magistère dans l’élaboration et la définition du dogme. C’est la question du pouvoir dans l’Église qui est en cause, non celle de Marie. Du côté des Églises protestantes, les choses sont moins simples. L’absence de mariologie a des causes plus profondes qu’une simple réaction négative aux excès du «maximalisme» marial catholique. La contestation porte essentiellement sur deux points: d’une part, sur l’interprétation des textes bibliques dans un sens qui majore la gloire de Marie, et cela pose le problème des rapports de l’Écriture et de la Tradition; d’autre part, et plus profondément, sur la participation et la coopération active attribuée à Marie dans la Rédemption. Certes, Marie ne joue pas un rôle passif; elle donne à la grâce une réponse active, celle de la foi; comme telle, elle est bien, dans son humilité de servante, figure de l’Église, premier témoin du peuple de Dieu et en un sens type de la maternité de l’Église. Mais la réponse de la foi n’ajoute rien à l’œuvre unique et universelle du Christ. Dans cette double perspective, on peut penser et espérer que le renouveau biblique amorcé avec le IIe concile du Vatican, joint à un effort rigoureux vers un christocentrisme re-situant Marie dans l’Église par rapport à Jésus-Christ, unique médiateur et rédempteur, ouvre la voie à une recherche commune en convergence. On pourrait alors envisager, selon le vœu d’un théologien protestant, «un retour salutaire à la simplicité évangélique ramenant la considération envers Marie aux proportions qui peuvent lui être légitimement accordées dans une Église chrétienne et que nul esprit sensible aux valeurs humaines ne saurait lui
marié, iée [ marje ] adj. et n.
1 ♦ Qui est uni à un autre; qui sont unis par le mariage. Homme marié, femme mariée. — N. Jeune marié(e) : personne mariée depuis peu. Lune de miel des jeunes mariés.
2 ♦ N. Personne dont on célèbre le mariage. Les témoins des mariés. « Deux mariées pompeusement habillées de blanc » (Balzac). Robe, voile, couronne de mariée. La jarretière de la mariée. ⇒ épousée. Vive la mariée ! Poème en l'honneur des mariés. ⇒ épithalame. — Loc. prov. Se plaindre que la mariée est trop belle : se plaindre d'une chose dont on devrait se féliciter, se réjouir.
⊗ CONTR. Célibataire, divorcé, veuf.
● marié, mariée nom Personne qui vient de se marier : La toilette de la mariée. ● marié, mariée (expressions) nom Jeune marié(e), personne dont le mariage est récent. Se plaindre (trouver) que la mariée est trop belle, se plaindre de quelque chose dont on devrait se louer. ● marié, mariée (homonymes) nom marriez forme conjuguée du verbe se marrer ● marié, mariée (synonymes) nom Personne qui vient de se marier
Synonymes :
- épouse
- épousée (vieux)
- époux
Marie
(sainte) dite la Vierge Marie ou la Sainte Vierge, mère de Jésus-Christ, fille d'Anne et de Joachim. Dans l'évangile de Luc, l'ange Gabriel vient lui annoncer sa conception virginale de Jésus. Luc ne reparle de Marie qu'après la Résurrection. Jean évoque deux fois sa présence: aux noces de Cana et pendant la Crucifixion. Les dogmes cathol. de l'Immaculée Conception (1854) et de l'Assomption (1950) ont renforcé le culte de Marie, à qui les protestants dénient toute participation à l'oeuvre du Christ. ANGLETERRE Marie Ire Tudor (1516 - 1558) reine d'Angleterre et d'Irlande (1553-1558); fille d'Henri VIII et de Catherine d'Aragon. En 1554, elle épousa Philippe II d'Espagne. Catholique, Marie la Sanglante persécuta les protestants.
⇒MARIÉ, -ÉE, part. passé, adj. et subst.
I. — Part. passé de marier et emploi adj.
A. — [Correspond à marier I] Qui vit dans les liens du mariage. Couple marié; gens mariés; clergé, prêtre marié. La femme mariée ne pourra accepter une donation sans le consentement de son mari (Code civil, 1804, art. 934, p. 169). Je vous ai laissé garçon en quittant Paris; j'y reviens et vous retrouve marié (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 4, 1859, p. 433). D'où vient cette femme? Où va-t-elle? Est-elle mariée, veuve ou libre? (DUMAS fils, Ami femmes, 1864, II, 3, p. 117). Mes parents n'approuvaient pas que je sorte avec un homme marié (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 333). V. émanciper ex. 1.
— [P. méton.] [Maxime] avait son air le plus marié, mais c'est un air qu'il a, si j'ose dire, de naissance. Sa femme et son enfant, il les affichait comme des denrées neuves qu'il eût achetées place Masséna (COLETTE, Entrave, 1913, p. 4).
— [Avec déterm.] (Personne) bien, mal, nouvellement marié(e); (personne) marié(e) au dessus, au dessous de sa condition. Il est marié depuis huit ans: il n'a pas eu d'enfans (SENANCOUR, Obermann, t. 2, 1840, p. 152). N'y reviendrez-vous jamais [au pays]? (...) — C'est trop tard à présent. Il y aurait ma punition à faire à l'État, et je suis marié en Californie, j'ai deux enfants à Sacramento (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p.348). V. amour ex. 195.
♦Marié à/avec. La mère de Danton, mariée en secondes noces avec le citoyen Recordain (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t.2, 1870, p. 322). Ah fillette, malheur à la femme mariée à un imbécile! (CAMUS, Chev. Olmedo, 1957, 1re journ., 17, p.750).
B. — [Correspond à marier II] Accordé, associé, uni intimement. [Renoir] s'amuse à assembler le rose turc, la fraise écrasée, le citron, le vert acide; il les noue et les dénoue en longs filaments, en écheveaux mariés et dissociés (MAUCLAIR, Maîtres impressionn., 1923, pp. 112-113). Tant qu'on est seulement marié avec une politique, ça n'a pas d'importance, dit Sembrano; mais quand on a des enfants avec elle... (MALRAUX, Espoir, 1937, p.501). Le Rhin marié au Rhône par le lac de Neuchâtel, les cargaisons de fers d'Allemagne et d'Helvétie, les résines, les toiles mousselines entrent en abondance (ARNOUX, Rhône, 1944, p.60):
• 1. Veuf et inconsolable, il tâchait, à la manière anglaise, de noyer ses soucis dans le vin; mais quand il ne pensa plus à sa chère défunte, il se trouva marié, (...) avec la Boisson.
BALZAC, Paysans, 1844, p. 47.
— En partic. Rimes mariées.
II. — Subst. Celui, celle, ceux qui va/qui vont se marier, qui vient/qui viennent de se marier. Jeune(s) marié(e)(s); couple de mariés; appartement, lit des mariés; chemise, costume, habit, toilette de/du marié. À voir la joie qui paraissait sur son visage, on l'aurait pris pour un nouveau marié (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 373). Les mariés, devant l'autel, très embarrassés, ne sachant pas quand il fallait s'agenouiller, se lever, s'asseoir, attendaient un geste du clerc (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 496). Le jeune marié prenait sa femme dans ses bras et lui faisait franchir ainsi son seuil (MONTHERL., Démon bien, 1937, p. 1337). V. ganté ex. 1:
• 2. Tout le village était sur les portes, pour voir ces deux mariés, les plus beaux de l'année, et le cortège qui s'allongeait sur les bosses du chemin montant.
R. BAZIN, Blé, 1907, p. 62.
— Synon. de époux (cf. ce mot II). Elle avait le sans-gêne des vieux mariés, qui se savent par coeur, et ne rougissent plus de rien (RESTIF DE LA BRET., M. Nicolas, 1796, p. 92).
— Au fém. La cérémonie fut fort belle; beaucoup de monde, quelques amis, la mariée charmante de grâce, de modestie (E. DE GUÉRIN, Lettres, 1838, p. 228). Vous êtes, pour une mariée de trois mois, d'une philosophie un peu bien surprenante! (GYP, Pas jalouse, 1893, p. 172).
SYNT. Mariée en blanc; bouquet, coiffure, corbeille, couronne, parure, robe, trousseau de (la) mariée; jarretière de la mariée; être timide, radieuse comme une (nouvelle) mariée; conduire la mariée à l'église.
♦Loc. fig. (Se plaindre de ce que) la mariée est trop belle. (Se plaindre à tort de ce qu') une chose apporte plus que ce que l'on en attendait:
• 3. Le R.P.F. s'abstenant, M. Edgar Faure n'avait plus finalement contre lui que l'extrême gauche. La majorité constitutionnelle était dépassée de 88 voix. «Ce vote ne signifie rien», dirent aussitôt les grincheux. Mais en est-il parmi eux un seul qui ne se contenterait, ne fût-ce que pour quelques jours, de cette trop belle mariée?
Le Monde, 19 janv. 1952, p. 5, col. 4.
— P. anal. Jeu de cartes dans lequel le mariage du roi et de la dame de coeur est la combinaison la plus avantageuse. (Dict. XIXe et XXe s.). Synon. guimbarde (cf. ce mot étymol. 1 a).
Prononc.:[]. Étymol. et Hist. 1. Ca 1145 adj. «lié par le mariage» (WACE, Conception N. D., éd. W. R. Ashford, 653); XIVe s. subst. «celui, celle qui a contracté un mariage, en particulier, qui a été marié(e) le jour même» (Appolonius, 87, 10. 11 ds T.-L.); 2. 1650 rimes ... mariées (CORNEILLE, Andromède, Examen ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 5, p. 310); 3. 1670 «se dit de choses assorties, en harmonie» (MOLIÈRE, Bourgeois gentilhomme, IV, 1); 4. 1752 subst. fém. jeux (Trév.). Part. passé adj. et subst. de marier. Fréq. abs. littér.:3637. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 4574, b) 7001; XXe s.: a) 6368, b) 3982.
marié, ée [maʀje] adj. et n.
ÉTYM. V. 1155; → Marier.
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1 a Adj. Qui est uni à une personne du sexe opposé; (plur.) qui sont unis par le mariage. || Êtes-vous célibataire ou marié ? || Je suis marié (→ Indiscrétion, cit. 13). || Homme marié, femme mariée. || Être bien marié, mal marié (→ Entreprenant, cit. 5).
REM. Les cit. 1 à 7 se trouvent au verbe Marier.
8 Vous devriez vous marier, ça vous irait très bien. Vous avez l'air déjà marié. Vous promenez votre célibat dans des vêtements de jeune père de famille, vous êtes épris du coin du feu, tendre, jaloux, têtu, paresseux comme un époux gâté, et despote, au fond, et monogame de naissance !
Colette, la Vagabonde, p. 119.
9 — Un Padre ne devrait pas être marié, dit le docteur. Vous savez ce qu'a dit saint Paul : « Un homme marié cherche à plaire à sa femme et non à Dieu. »
A. Maurois, les Silences du colonel Bramble, IX.
b N. (XIIe). || Jeune marié(e) : celui, celle qui est marié(e) depuis peu. || De jeunes mariés (→ Couple, cit. 7). || Deux mariés de longue date, deux vieux mariés (→ Flamme, cit. 19). — Mémoires de deux jeunes mariées, roman de H. de Balzac.
10 Et ce qui leur sied bien dans ces commencements,
En nous, vieux mariés, aurait mauvaise grâce.
Molière, Amphitryon, I, 4.
11 (…) elle s'abandonna avec une gentillesse de jeune mariée amoureuse.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVI, p. 260.
2 N. (1690). Personne dont on célèbre le mariage. ⇒ Épousé (vx). || La mariée et le marié. || On attendait les mariés devant la mairie. || Robe, voile, couronne, bouquet (cit. 7) de mariée. || Cadeaux faits à la mariée (→ Habiller, cit. 4). || Trousseau de mariée. || « Vive la mariée ! » — Le coucher de la mariée. || Nuit de noces des nouveaux mariés. — ☑ Loc. prov. Se plaindre que la mariée est trop belle : se plaindre d'une chose dont on devrait se féliciter, se réjouir, mais que l'on juge excessive.
12 Deux mariées pompeusement habillées de blanc, chargées de rubans, de dentelles, de perles, et couronnées de bouquets de fleurs d'oranger dont les boutons satinés tremblaient sous leur voile (…)
Balzac, la Vendetta, Pl., t. I, p. 909.
3 N. f. (1752). Jeu de cartes dans lequel le mariage du roi et de la dame de cœur constitue le plus gros avantage. (Ce jeu est aussi nommé guimbarde).
Encyclopédie Universelle. 2012.