Akademik

APTITUDE
APTITUDE

L’expérience sociale la plus commune suffit à mettre en évidence la diversité des individus: des différences existent entre eux, des différences présentant un certain degré de stabilité qui permet de prévoir (avec des risques d’erreur qui sont importants) que tel individu sera capable ou non d’accomplir telle tâche, qu’il réagira de telle ou telle façon dans telle situation. Cette diversité individuelle, qui a une importance considérable dans la vie courante, constitue le domaine d’une branche de la psychologie moderne, la psychologie différentielle. La notion d’aptitude recouvre certains aspects de cette différenciation des individus. Mais le mot «aptitude» a été employé, en psychologie et en pédagogie, avec des sens différents, ce qui a contribué à rendre confus des débats qui, peut-être à cause de leurs incidences sociales, n’ont pas toujours respecté les règles des discussions scientifiques.

1. L’aptitude comme dimension des différences individuelles

Une première définition peut se situer au niveau formel, descriptif. On peut, en ce sens, concevoir l’aptitude comme une dimension selon laquelle se diversifient les individus dont on décrit la conduite: des enfants peuvent ainsi être différenciés par leurs notes scolaires en mathématiques, soit par les résultats qu’ils obtiennent dans un test d’intelligence, etc.

On est en droit d’exiger d’abord qu’une description de ce genre soit objective, c’est-à-dire que deux observateurs différents, utilisant de façon compétente la même technique, obtiennent le même résultat. Cette condition est beaucoup plus difficile à satisfaire qu’on ne pourrait le croire. De très nombreuses expériences, réalisées à tous les niveaux de la scolarité, ont notamment montré que plusieurs professeurs expérimentés, ayant tous à juger une même série de travaux scolaires (dissertations ou réponses orales enregistrées), accordaient à chacun de ces travaux des notes pouvant être largement différentes: la moyenne des notes attribuées varie d’un professeur à l’autre, ainsi que la façon dont les travaux sont classés les uns par rapport aux autres. L’étude de ce problème constitue l’objet de la docimologie. Les tests des psychologues et des pédagogues s’appuient en général sur des techniques descriptives rigoureusement normalisées, plaçant le sujet dans une situation bien définie et permettant de décrire son comportement suivant des conventions précises pouvant être alors adoptées par des observateurs différents.

Il est fréquent que des questions soient posées sur la signification des différenciations établies entre individus : on conteste que tel sujet d’examen ait suffisamment mis en jeu l’intelligence des candidats, on s’interroge sur ce que mesure tel test, etc. Ces questions témoignent d’une insatisfaction à l’égard d’une définition purement descriptive et formelle du mot «aptitude». Elles prendraient un sens précis s’il était possible de définir des critères objectifs permettant de constater que tel «contenu» (l’intelligence par exemple) est présent ou absent dans les observations recueillies. Mais il n’existe aucun critère de ce genre qui n’ait besoin d’être validé par un «super-critère», et ainsi indéfiniment. Cette façon de poser le problème de la «nature» de l’aptitude correspondant à une méthode d’observation définie formellement n’est donc guère satisfaisante.

Une façon plus satisfaisante d’éclairer la signification d’une aptitude définie formellement consiste à étudier expérimentalement les liaisons (corrélations) qui sont constatées entre plusieurs observations. Si plusieurs tests classent à peu près dans le même ordre des sujets qui les ont tous subis, ce fait pourra s’expliquer en invoquant un «contenu» commun, une «signification» commune à ces différentes épreuves. Il sera alors possible de comparer les tâches proposées dans les différents tests et de rechercher quels sont les caractères communs à toutes ces tâches. Si, par exemple, elles diffèrent à tous égards, sauf en ceci qu’elles font toutes appel au maniement de la langue, on pourra parler d’épreuves verbales mettant en jeu une aptitude verbale. Ce type de recherche utilise souvent une technique d’analyse statistique appelée «analyse factorielle». Un «facteur» n’est pas autre chose qu’une variable hypothétique invoquée pour rendre compte de la cohérence observée entre plusieurs séries d’observations réalisées sur les mêmes sujets. Dans l’exemple précédent, le groupement des épreuves suggérait ainsi l’existence d’un facteur verbal. On a pu, dans le même sens, mettre en évidence des facteurs numérique, spatial, un facteur général, etc. Au moins dans le domaine des conduites cognitives, ces différents facteurs paraissent pouvoir commodément être présentés sous la forme d’une «hiérarchie»: les individus se différencient d’abord sous l’angle d’un facteur général; des individus égaux quant à ce facteur général se différencient sous l’angle de facteurs communs à de larges groupes de variables, et ainsi de suite. On voit que l’assimilation de ces facteurs à des aptitudes correspond toujours en fait à une façon seulement formelle et descriptive de définir celles-ci : si ce n’est plus la description formelle d’une épreuve donnée qui est utilisée, c’est la description de la forme (on pourrait dire de la structure) de liaisons statistiques entre plusieurs épreuves. La «nature» de l’aptitude dépend entièrement de la «nature» des variables observées sur lesquelles l’analyse porte. Des analyses factorielles ou de simples déterminations de corrélations entre des variables choisies de façon convenable permettent cependant d’émettre des hypothèses sur les causes des liaisons empiriques, et d’établir progressivement le degré de vraisemblance de ces hypothèses. Des travaux de ce genre ont utilisé non seulement des tests et des notes scolaires, mais encore des observations concernant la biographie du sujet, son milieu familial, ses conditions de vie, etc.

Mais deux autres définitions du mot «aptitude» concernent plus directement le contenu même de la notion.

2. L’aptitude comme capacité acquise

Le contenu de la notion

On dira de quelqu’un qu’il est apte à une certaine tâche, à un certain emploi dans la mesure où il paraîtra capable d’accomplir cette tâche, d’occuper avec succès cet emploi: un élève est déclaré apte ou non aux études longues; il existe des certificats d’aptitude professionnelle ou d’aptitude pédagogique, il est nécessaire d’être inscrit sur une liste d’aptitude avant de pouvoir poser sa candidature à certains emplois, etc.

On apercevra dans cette deuxième définition des éléments qui n’apparaissaient pas dans la première : elle évoque un pronostic; elle utilise, de façon au moins implicite, une définition de la réussite, du succès. Le contrôle de pronostics de ce genre, c’est-à-dire d’examens d’aptitude ainsi compris, peut paraître relativement aisé. Ne suffit-il pas de rechercher si les sujets ayant reçu un certificat d’aptitude ou inscrits sur une liste d’aptitude parviennent bien en fait, ultérieurement, à assumer avec succès les tâches qui leur sont confiées? Une partie importante des travaux de recherche appliquée, en psychologie, concerne bien des contrôles de ce type, relatifs notamment au pouvoir prédicteur pratique («validité») des tests psychologiques employés en orientation ou en sélection. Ces travaux de validation des tests, et à plus forte raison d’éventuelles vérifications de ce genre portant sur les techniques de pronostic traditionnelles (vérifications qui, dans la plupart des cas, ne sont même pas tentées), se heurtent cependant à deux types au moins de difficultés. Tout d’abord, il est difficile de définir un critère de réussite professionnelle dont le contenu paraisse bien correspondre au contenu de la notion de réussite dans la langue commune et qui soit susceptible d’être observé de façon objective sur une population suffisamment étendue. En second lieu, il arrive souvent que les personnes qui sont appelées à exercer effectivement les fonctions dont il s’agit se recrutent exclusivement parmi celles qui ont satisfait aux épreuves d’aptitude, alors qu’un contrôle satisfaisant de celles-ci exigerait que des personnes qui ont échoué à ces épreuves reçoivent, elles aussi, la possibilité de faire ultérieurement la preuve de leur aptitude éventuelle.

Bien que la notion d’aptitude, en ce second sens, puisse recouvrir aussi bien les qualités foncières de l’individu que la nature et le niveau des connaissances qu’il lui a été donné d’acquérir, les critères d’aptitude habituellement utilisés consistent essentiellement à contrôler l’état des connaissances par un examen approprié. Cette pratique serait justifiée si les qualités foncières permettant l’acquisition des connaissances requises par l’examen étaient les mêmes que celles qui sont exigées par l’exercice des fonctions auxquelles donne accès la réussite à cet examen. On ne saurait être assuré qu’il en est toujours ainsi.

Dans certains cas cependant, on peut penser que la possession de connaissances précises constitue du moins une condition nécessaire de l’aptitude ainsi comprise. Il est clair, par exemple, que l’on ne peut être déclaré apte à suivre un certain enseignement si l’on ne dispose pas effectivement des connaissances qui seront supposées acquises par cet enseignement et en constitueront les bases. On peut se demander si la nature et l’étendue de ces connaissances nécessaires sont définies de façon cohérente dans notre système éducatif. L’enquête qui va être citée tend à suggérer une réponse négative à cette question.

La définition des aptitudes requises

Une enquête a été réalisée en France, en 1964, et a porté sur 280 professeurs enseignant soit en classe de troisième, soit en classe de seconde. Elle avait pour objet de définir la nature et le niveau des connaissances dont devait disposer un élève de troisième pour suivre normalement l’enseignement donné en seconde. On soumettait aux professeurs interrogés deux questionnaires de connaissances scolaires destinés à des élèves de troisième et portant l’un sur le français, l’autre sur les mathématiques. Pour chacune des questions, on priait le professeur d’indiquer quel devrait être, d’après lui, le pourcentage des élèves entrant en seconde qui seraient capables de répondre correctement à la question posée. On précisait qu’il s’agissait, pour le professeur, non pas nécessairement de décrire l’état actuel et effectif des connaissances des élèves (connaissances qui faisaient l’objet d’un examen direct dans une autre partie de l’enquête), mais bien d’exprimer son opinion sur ce que devraient être ces connaissances à l’entrée dans une classe de seconde qu’il jugerait d’un niveau normal.

Une question de français consistait à demander à l’élève de compléter une phrase de façon telle qu’elle prenne un sens aussi voisin que possible de celui d’une phrase témoin. La phrase témoin était : «Je n’ai pas fait de version meilleure que celle-ci.» La phrase à compléter était présentée ainsi: «Cette version est la meilleure que...». Sur 277 professeurs interrogés, 44 par exemple pensent que 100 p. 100 des élèves entrant en seconde doivent répondre correctement à la question posée, mais 43 autres pensent que 50 p. 100 de ces élèves au plus doivent répondre à cette question.

Ces divergences considérables d’opinion se retrouvent à propos de la plupart des questions. Elles se retrouvent en mathématiques, comme le montre ce second exemple, constitué par une question tirée de l’épreuve de mathématiques : Un cercle a 7 cm de rayon. Par un point A, situé à 9 cm du centre, on mène une sécante dont la partie extérieure AB est égale à la partie intérieure BC. Quelle est la longueur de AB? (La figure était donnée.)

Sur 259 professeurs interrogés, citons 39 d’entre eux pensant que 80 p. 100 des élèves au moins doivent répondre correctement aux questions posées, 47 qui estiment qu’il en suffit de 50 p. 100, 47 autres qu’il suffit de 30 p. 100 des élèves, ou même moins...

Des divergences aussi importantes dans la façon de définir l’aptitude comprise en ce sens posent, de toute évidence, des problèmes fondamentaux dans le domaine pédagogique et dans celui de l’organisation de l’enseignement. Il est peu probable que des progrès importants puissent être réalisés en matière de recherche et de pratique pédagogique aussi longtemps que les exigences et les buts de l’éducation à chacun de ses niveaux ne seront pas définis de façon plus explicite. Cette définition exige, bien entendu, que soient pris en considération les étapes du développement psychologique de l’enfant et le rôle assigné à l’éducation dans notre société. L’ampleur des questions ainsi posées est considérable. On ne peut éviter ces questions qu’en se cantonnant dans l’usage d’un vocabulaire pédagogique suffisamment vague : «Ce qui est important pour un élève entrant en seconde, c’est d’avoir acquis le sens de la langue, c’est d’avoir appris à raisonner...»

3. L’aptitude comme caractère constitutionnel

Le contenu de la notion

Une troisième définition de l’aptitude consiste à considérer celle-ci comme un caractère constitutionnel, inné, non modifiable. C’est ainsi que la définit H. Piéron : «Substrat constitutionnel d’une capacité, préexistant à celle-ci, qui dépendra du développement naturel de l’aptitude, de la formation éducative, éventuellement, et de l’exercice; la capacité seule peut être objet d’évaluation directe, l’aptitude étant une virtualité.» Piéron définit par ailleurs la capacité comme «la possibilité de réussite dans l’exécution d’une tâche, ou l’exercice d’une profession», c’est-à-dire comme nous avons, dans une seconde acception qui est celle du sens commun, défini l’aptitude.

La notion d’aptitude ainsi comprise a fait l’objet de débats qui ont largement débordé le domaine scientifique. L’existence d’inégalités foncières, non modifiables, entre les hommes a été violemment contestée à cause des incidences sociales et politiques qu’elle paraissait avoir. Il faut remarquer que ces incidences peuvent être comprises en deux sens opposés. Si les différences observables entre les hommes sont en partie constitutionnelles, il devient plus difficile d’attribuer uniquement à l’injustice sociale le fait que certains citoyens occupent dans la société des emplois plus modestes. Mais il devient plus difficile aussi d’accorder à l’État le pouvoir d’assigner à chaque citoyen n’importe quel emploi. On voit quelle portée générale peut être attribuée aux recherches sur les aptitudes ainsi comprises et, plus largement, aux recherches sur la génétique. On sait que de telles recherches ont pu se heurter à des obstacles extra-scientifiques, ou faire l’objet de pressions extrêmement puissantes. Ces obstacles, ces pressions ont contribué à rendre plus difficile l’étude objective des faits, dans un domaine où cette étude présente déjà en elle-même des difficultés considérables.

Le débat sur l’origine des différences individuelles

L’observation commune paraît mettre en évidence de façon claire l’existence de différences peu modifiables entre des individus qui se sont développés dans des milieux à peu près identiques et ont bénéficié de la même éducation. De telles constatations peuvent être faites par les enseignants et par les parents. Chacun sait que des différences notables existent notamment entre des frères et sœurs. Il est vrai que l’on peut toujours affirmer que les enfants élevés dans une même famille ne connaissent pas les mêmes conditions de milieu, du fait de l’évolution de la famille et même, pour des jumeaux, du fait des interrelations variées qui s’établissent entre les différents membres de la famille et qui font que chacun connaît un microclimat affectif qui lui est propre. Un tel argument est à peu près irréfutable par sa nature même, en dehors de toute espèce d’observation empirique, et c’est dans cette très grande facilité d’emploi que réside sa faiblesse scientifique. Le problème de l’influence du milieu sur les aptitudes ne peut être posé que si l’on convient à l’avance de définir opérationnellement le milieu par une certaine échelle d’observation, étant bien entendu que ce problème peut recevoir des réponses différentes à des échelles d’observation différentes.

Ce genre de difficulté subsiste si l’on passe, de l’observation commune, aux premières tentatives qui ont été faites pour rassembler des observations systématiques sur cette question. Elles ont porté sur les manifestations du «génie» ou de talents particuliers au cours de plusieurs générations successives d’une même famille. Galton fut le premier à utiliser cette méthode, et d’autres enquêteurs ont notamment étudié les cas de familles de musiciens. Mais on peut considérer à juste titre que des facteurs complexes de milieu accordent plus de chances aux enfants issus de familles culturellement et socialement privilégiées, sans que l’on soit en mesure de séparer l’effet de ces facteurs de ceux qui pourraient éventuellement être attribués à l’hérédité.

En outre, les théories mendéliennes de l’hérédité n’ont pas d’abord paru compatibles avec les constatations faites à propos des corrélations entre caractéristiques mentales observées sur des parents et sur leurs enfants, ou entre des frères ou sœurs. Les défenseurs de l’hypothèse favorable à l’hérédité des aptitudes (et notamment K. Pearson, élève et successeur de F. Galton) invoquèrent de préférence, à l’appui de leur thèse, la ressemblance entre les corrélations ainsi obtenues sur des caractères mentaux et celles que l’on observait sur des caractères physiques. R. Fisher devait montrer, en 1918, que l’hypothèse d’une transmission génétique de ces caractères était compatible avec les faits observés, à condition d’admettre un mode de transmission faisant appel simultanément à plusieurs gènes. Cette hypothèse paraît constituer toujours la plus vraisemblable des hypothèses génétiques dans ce domaine. Mais cette amélioration du schéma théorique n’atténuait évidemment en rien les difficultés éprouvées pour recueillir des observations de façon telle que les effets éventuels de l’hérédité puissent être distingués des effets du milieu.

C’est l’étude des jumeaux qui a fourni à cet égard les données les plus satisfaisantes. On sait qu’il existe deux catégories de jumeaux. Certains, les «faux jumeaux», ou jumeaux dizygotes, sont issus de deux œufs fécondés de façon distincte, et leur communauté génétique n’est pas plus grande que celle qui peut exister entre des frères ou sœurs nés à des dates différentes: leur constitution génétique résulte de deux tirages indépendants effectués au hasard dans le stock offert par les parents. D’autres jumeaux, les «vrais jumeaux», ou jumeaux monozygotes, sont issus d’un même œuf et constituent «deux exemplaires d’un même individu»: leur patrimoine héréditaire est rigoureusement identique. On comprend aisément l’intérêt exceptionnel que présentent de tels sujets pour l’étude de l’hérédité des aptitudes.

Les premiers travaux utilisant les jumeaux, celui de Galton puis ceux de Thorndike, ne faisaient pas appel à la théorie génétique. Il semble que ce soit Merriman qui ait le premier, en 1924, fait usage de cette théorie dans ce domaine, en montrant que la corrélation entre caractéristiques mentales mesurées sur des jumeaux de sexes différents (donc nécessairement de faux jumeaux) était nettement inférieure à celle que l’on observait sur un groupe de jumeaux de même sexe (pouvant comporter de vrais jumeaux et de faux jumeaux). Mais l’étude la plus systématique reste celle que publièrent en 1937 un généticien, Newman, un psychologue, Freeman, et un statisticien, Holzinger. Elle a utilisé notamment 19 paires de vrais jumeaux qui avaient été élevés séparément, groupe dans lequel les influences de milieu étaient assez largement différentes, alors que l’hérédité restait identique. Les études de ce type n’ont pas cessé et, à l’heure actuelle, on peut notamment mentionner celles du psychologue suédois T. Husen, qui travaille sur de larges populations d’élèves des écoles ou de jeunes gens examinés à l’occasion de leur incorporation dans l’armée. En France, R. Zazzo a également étudié un groupe étendu de jumeaux, dans une perspective différente: il a recherché comment pouvait s’opérer l’«individuation» au sein de couples de vrais jumeaux élevés ensemble et il a bien mis en évidence, à l’échelle d’observation qui convenait à son problème, l’importance du rôle des interactions sociales.

Il est impossible d’exposer ici de façon précise les résultats de toutes ces études et des discussions qu’elles ont suscitées. Le fait essentiel peut cependant être dégagé aisément. Chaque fois qu’ont été comparées les corrélations observées entre les résultats obtenus dans des épreuves intellectuelles, on a constaté que ces corrélations étaient plus élevées entre vrais jumeaux – même lorsqu’ils avaient été élevés séparément – qu’entre faux jumeaux ou frères et sœurs – même lorsqu’ils avaient été élevés ensemble. On ne voit pas comment cette donnée de fait pourrait être interprétée autrement qu’en reconnaissant à l’hérédité un rôle dans les différences individuelles en matière d’aptitudes intellectuelles, ce qui conduit à admettre que les différences observées dans les réussites à des tâches mettant en jeu ces aptitudes sont en partie non modifiables. La portée à la fois théorique et pratique des conséquences pouvant être tirées de ce résultat essentiel est cependant limitée par des difficultés fortement soulignées par les psychologues qui, pour des raisons scientifiques ou extra-scientifiques, souhaitent infirmer l’hypothèse d’une transmission héréditaire de différences individuelles.

La première difficulté, qui est grande en ce qui concerne la recherche fondamentale dans ce domaine, consiste dans l’impossibilité où l’on se trouve, en fait, de mesurer l’influence respective de l’hérédité et du milieu sur les différences individuelles. Plusieurs chercheurs ont cru pouvoir affronter ce problème, qui ne paraît pas être soluble, au moins de façon générale. La source de la difficulté réside dans le fait que l’on ne peut guère concevoir de moyen de mesurer de façon générale ce que l’on entend par «facteurs de milieu». Les caractères qui différencient deux milieux sont multiples, qualitativement différents, et agissent en constante interaction au sein de chaque milieu. Il est même difficile de définir dans tous les cas ce que l’on entend lorsqu’on dit que deux milieux diffèrent plus ou moins que deux autres milieux. L’impossibilité d’établir une loi quantitative générale, qui définirait la proportion de variance interindividuelle explicable par le milieu au sein d’une population, découle de cette impossibilité de quantifier le facteur «milieu». Chaque enquête peut seulement apporter des données quantitatives dont la portée est limitée aux sujets qu’elle utilise. Cette difficulté est réelle. Mais il ne faut pas oublier – ce que l’on a fait, parfois, dans le feu des polémiques – qu’elle ne permet pas de rejeter le fait essentiel signalé plus haut: la supériorité des corrélations observées entre jumeaux monozygotes. Le fait que l’on soit incapable de mesurer une distance entre deux objets n’entraîne pas que l’on soit incapable d’établir entre eux une relation d’ordre.

La seconde difficulté concerne surtout les applications pratiques de la psychologie différentielle. Dans l’état actuel de la psychologie et de la génétique, il n’est pas possible d’obtenir une mesure directe et «pure» des aptitudes d’un individu particulier, dans le sens où nous prenons maintenant le mot.

L’estimation des connaissances scolaires ne fournit pas cette mesure. Il est évident que ces connaissances dépendent pour une part de facteurs extérieurs aux aptitudes individuelles. On constate une corrélation entre ces résultats scolaires et la plupart des facteurs socioprofessionnels. On peut remarquer en passant que cette évidence et ces observations ont été largement ignorées des psychologues qui, s’opposant à l’hérédité des aptitudes (et, pendant un temps, à la génétique mendélienne), condamnaient l’usage des tests parce que ceux-ci reflètent en partie les différences socioculturelles des milieux dans lesquels les enfants ont été élevés.

Cette remarque n’en reste pas moins fondée. Bien que la plupart des tests psychologiques soient construits de façon telle que les connaissances spécifiquement acquises, de type scolaire, n’interviennent pas dans les questions posées, il est de fait que les groupes socioculturels favorisés obtiennent, dans la plupart des tests, des résultats moyens qui sont supérieurs aux résultats moyens observés sur des groupes défavorisés. Cette liaison entre les caractères socioculturels du milieu (par exemple, la profession du père) et les résultats observés dans les tests est plus ou moins étroite, selon la nature du test considéré. C’est pour les tests verbaux, dont les épreuves portent sur le maniement du langage, que cette liaison est la plus forte. Elle est beaucoup plus faible pour les épreuves sur données numériques et pour celles qui font appel à un raisonnement sur données non verbales, spécialement sur des séries de dessins ne représentant pas des objets mais seulement des combinaisons de points et de lignes. Ces combinaisons obéissent à des lois qu’il s’agit de découvrir sur le matériel présenté et d’utiliser. Certains tests de ce type ont été présentés comme «indépendants de la culture» (culture-free). En fait, on peut dire seulement qu’ils sont moins liés que les autres aux facteurs culturels.

Deux façons d’interpréter ces faits peuvent être opposées.

Pour les uns, la supériorité moyenne observée dans les résultats aux tests (et dans la réussite scolaire) des enfants favorisés au point de vue socioculturel représenterait une supériorité (moyenne) réelle des aptitudes de ces enfants. D’une part, dit-on, il y aurait dans nos sociétés une mobilité sociale suffisante pour que, statistiquement, les individus les plus doués accèdent aux classes sociales favorisées plus souvent que ne le font les individus les moins doués. D’autre part, il y aurait une tendance statistique qui ferait que les conjoints appartiennent plus souvent au même niveau socio-économique qu’à des niveaux socio-économiques différents. Le jeu simultané de ces deux tendances équivaudrait à une sélection biologique du genre de celles qui sont pratiquées par les éleveurs et pourrait conduire à l’installation de différences innées et stables en faveur des classes sociales favorisées. En restant sur le plan scientifique, on peut dire au moins que les mécanismes de la mobilité sociale sont trop mal connus pour que la première proposition sur laquelle cette thèse repose paraisse incontestable. On peut dire aussi que les mécanismes génétiques de transmission des caractéristiques mentales sont eux-mêmes trop mal connus et qu’ils sont certainement trop complexes pour qu’un parallèle simple puisse être établi entre les méthodes de sélection pratiquées sur les animaux et la sélection sociale.

Une autre façon d’interpréter les mêmes faits consiste à attribuer entièrement aux influences du milieu la différence constatée, dans les tests, entre les moyennes de groupes sociaux différents. Cette seconde interprétation laisse dans l’ombre le fait que, au sein de chacun des groupes déterminés, par exemple, par le niveau socioprofessionnel, il existe une très large dispersion des individus autour de la moyenne de leur groupe. Cette dispersion n’est pas entièrement aléatoire: si les sujets d’un groupe subissent plusieurs tests différents, on constate en général que les individus supérieurs dans l’un des tests ont plus de chances que les autres individus d’être supérieurs dans les autres. Quels peuvent être les facteurs responsables de cette dispersion non aléatoire et indépendante du facteur de milieu considéré (puisqu’elle se manifeste à l’intérieur de chacun des groupes déterminés par le milieu)? Il est bien difficile, de nouveau, d’échapper à l’hypothèse de facteurs innés.

Il est donc vraisemblable de considérer que les tests sont affectés à la fois par des facteurs innés de différenciation inter-individuelle («aptitudes», au sens où nous prenons maintenant le mot) et par des facteurs de milieu, le poids respectif de ces deux groupes de facteurs variant avec la nature de l’épreuve.

Le point de vue pratique

Pratiquement, il est important de recommander des méthodes éducatives qui puissent atténuer les différences constatées entre les aptitudes moyennes de groupes sociaux différents. On a des raisons de penser qu’une telle action éducative a d’autant plus de chances d’être efficace qu’elle intervient plus tôt dans le développement. Des auteurs comme Piéron considèrent même que les virtualités innées qui n’ont pas trouvé l’occasion de s’exercer dans les six ou sept premières années de la vie ont peu de chances d’être en état de s’actualiser plus tard. On voit, à cet égard, quelle est l’importance des mesures psycho-pédagogiques prises en faveur de la toute première enfance.

Mais il est également important, dans la pratique, de tenir compte des très larges recouvrements qui s’observent dans les aptitudes (ou au moins dans les résultats de tests) de groupes différant quant à leur résultat moyen. Voici un exemple illustrant ce fait, et il sera pris de façon à être aussi défavorable que possible à la thèse présentée. On choisira des observations faites, à l’aide d’un test verbal (c’est-à-dire un test différenciant au maximum les groupes socio-économiques), sur un échantillon large et représentatif d’élèves de la classe de troisième. Dans cet échantillon, on comparera deux groupes extrêmes quant à leur niveau socioprofessionnel: les enfants dont les parents exercent une profession libérale, et ceux dont les parents sont salariés agricoles. Le résultat moyen des premiers est largement supérieur au résultat moyen des seconds. Cependant, 18 p. 100 des enfants du groupe défavorisé dépassent le résultat moyen du groupe favorisé. Ce fait traduit les possibilités actuelles d’une orientation s’effectuant dans le sens d’une démocratisation de l’enseignement. Un autre exemple de même type peut être donné en ce qui concerne la répartition des élèves en sections dans le premier cycle secondaire. Dans un test d’intelligence comportant des questions verbales et non verbales, les élèves des sections latin-grec obtiennent le résultat moyen le plus élevé. Mais ce résultat moyen est dépassé par 34 p. 100 des élèves des sections modernes, dont on pense parfois qu’elles reçoivent des enfants qui, en aucun cas, ne sauraient être comparés, quant à leurs aptitudes, à ceux des sections latin-grec. On voit que cette opinion est erronée et que de larges possibilités de réorientation existent entre les sections à l’issue du premier cycle secondaire, sous l’angle des aptitudes.

aptitude [ aptityd ] n. f.
• 1361; bas lat. aptitudo, de aptus apte
1Dr. Capacité légale, juridique. Aptitude à exercer ses droits.
2(XVIe) Cour. Disposition naturelle. disposition, 1. don, faculté, goût, penchant, prédisposition, propension, talent, tendance. Avoir une grande aptitude à (ou pour) faire qqch. 2. adresse, capacité, facilité, habileté. Avoir des aptitudes pour les mathématiques. Aptitudes requises pour exercer une activité. « Le génie n'est qu'une plus grande aptitude à la patience » (Buffon). « Toutes les âmes n'ont pas une égale aptitude au bonheur » (Chateaubriand). Absolt Aptitudes intellectuelles.
Psychol. Substrat constitutionnel d'une capacité. Test d'aptitude.
3Capacité acquise et reconnue. Exercer un métier en rapport avec ses aptitudes. qualification. Certificat d'aptitude professionnelle. C. A. P.; et aussi C. A. P. A., C. A. P. E. S.
⊗ CONTR. Inaptitude, incapacité.

aptitude nom féminin (bas latin aptitudo) Disposition naturelle ou acquise de quelqu'un à faire quelque chose : Avoir une étonnante aptitude aux mathématiques. État de quelqu'un que la loi considère comme qualifié pour jouer un rôle ou exécuter un acte. Disposition organique et fonctionnelle d'un animal d'élevage qui le rend plus propre à tel emploi, à telle nature de services ou de produit qu'à telle autre. ● aptitude (citations) nom féminin (bas latin aptitudo) Honoré de Balzac Tours 1799-Paris 1850 L'homme n'est ni bon ni méchant, il naît avec des instincts et des aptitudes. La Comédie humaine, Avant-propos Confucius, en chinois Kongzi ou Kongfuzi [maître Kong] 551-479 avant J.-C. L'homme sage n'est pas comme un vase ou un instrument qui n'a qu'un usage ; il est apte à tout. Entretiens, I, 2 (traduction S. Couvreur) aptitude (difficultés) nom féminin (bas latin aptitudo) Construction Aptitude à / aptitude pour. Les deux constructions sont correctes : son aptitude à la négociation en fait un allié précieux ; il a une grande aptitude pour les travaux manuels. ● aptitude (expressions) nom féminin (bas latin aptitudo) Aptitude au service, ensemble des normes et conditions particulières requises des jeunes gens appelés à effectuer le service national, des candidat(e)s à l'engagement et des personnels militaires de carrière ou sous contrat. ● aptitude (synonymes) nom féminin (bas latin aptitudo) Disposition naturelle ou acquise de quelqu'un à faire quelque chose
Synonymes :
- capacité
- faculté
- penchant
- prédisposition
- propension
Contraires :
- inaptitude
- incapacité

aptitude
n. f.
d1./d Don naturel. Des aptitudes pour le dessin.
d2./d Faculté, compétence acquise. Aptitude professionnelle.
d3./d DR Capacité légale. Aptitude à succéder.

⇒APTITUDE, subst. fém.
Qualité rendant possibles certaines performances.
I.— [En parlant de pers.]
A.— [L'accent est sur les performances]
1. Littér., rare. [La performance est de l'ordre du sentiment éprouvé, de la souffrance subie] :
1. J'atteignis seize ans. Une timidité excessive m'était venue de cette aptitude à souffrir de tout.
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, Après, 1893, p. 103.
2. « ... l'aptitude au bonheur n'est pas égale pour tous les hommes. Elle est plus forte, autant qu'il me semble, chez les médiocres que chez les hommes supérieurs et chez les imbéciles. Il faut souhaiter aux êtres qu'on aime la médiocrité de l'esprit et du cœur, la médiocrité de la condition, toutes les médiocrités. »
A. FRANCE, La Vie en fleur, 1922, p. 542.
3. La richesse est une aptitude, la pauvreté de même. Un pauvre qui devient riche étalera une pauvreté luxueuse.
COCTEAU, Les Enfants terribles, 1929, p. 97.
MÉD. Aptitude morbide (ou pathologique). Prédisposition naturelle de l'organisme à contracter certaines maladies plutôt que d'autres. (Attesté ds LITTRÉ-ROBIN 1865, GUÉRIN 1892, s.v. aptitude pathologique et Lar. méd. 1970) :
4. L'aptitude morbide varie considérablement suivant les races.
G.-H. ROGER ds (G.-H. Roger, P.-J. Teissier, F. Widal, Nouv. traité de méd., 1926, p. 29).
Rem. On peut à propos de ces emplois parler de performance parce que même la not. d'aptitude à la souffrance suggère souvent un effort personnel comparable à un travail.
2. Usuel. [La performance est de l'ordre de l'action sous toutes ses formes]
a) [Gén. au plur., avec souvent un adj. donnant des précisions sur les qualités] Les aptitudes physiques, morales; de grandes aptitudes :
5. ... je n'ai pas les aptitudes physiques et encore moins les prédispositions spirituelles pour m'interner à jamais dans un cloître; ...
HUYSMANS, En route, t. 1, 1895, p. 171.
b) [Avec souvent un compl. prép. à ou pour précisant la nature de la performance] Aptitude aux arts, au travail, pour les mathématiques :
6. L'article continuait par des réflexions sur les aptitudes au travail scientifique et sur la discipline nécessaire dans les laboratoires.
G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Combat contre les ombres, 1939, p. 129.
Littér. Aptitude à + inf. :
7. Encore aujourd'hui le grand don musical, l'aptitude à chanter en parties se rencontre jusque dans les gens du peuple [dans les Pays-Bas] ...
TAINE, Philosophie de l'art, t. 1, 1865, p. 261.
c) PSYCHOLOGIE :
8. Il y a d'abord les aptitudes sensorielles (vue, ouïe, etc.), ensuite les aptitudes sensorimotrices, qui font appel à l'action simultanée d'un sens et d'un geste (habileté manuelle, aptitude à conduire les véhicules, etc.), enfin les aptitudes purement mentales (mémoire, attention, observation, jugement).
Psychol. 1969.
Test d'aptitude. Test permettant de situer le niveau intellectuel d'un sujet, d'établir son « profil individuel » en le classant, d'après ses performances, dans la catégorie inférieure, égale ou supérieure au niveau de base établi pour le groupe d'âge ou de culture auquel il appartient :
9. Vers 1930, les tests d'aptitude ou d'intelligence furent complétés par des épreuves de caractère utilisant des questionnaires (Woodworth-Mathews) ou des tests (Decroly, Wauthier, Pressey, etc.).
Hist. de la science, 1957, p. 1687.
P. ext. [Appliqué dans l'admin. et la gestion des entr.] Méthode des aptitudes de base. ,,Méthode utilisée pour l'évaluation des emplois (ou classification des fonctions)`` (TEZ. 1968) :
10. Cette méthode est basée sur l'appréciation des aptitudes (ou capacités) et des connaissances de base nécessaires pour exécuter correctement le travail inhérent au poste considéré.
TEZ. 1968.
B.— [L'accent est sur les qualités]
1. DR. [Les qualités sont des conditions jur. que la pers. doit remplir] Capacité légale à posséder un emploi, à recevoir un don, un legs, etc. (cf. apte I A).
2. [Les qualités sont constatées par un acte admin.]
a) ARMÉE
Aptitude au service militaire. Certificat délivré après examen de recrutement et attestant qu'un soldat est capable de servir sous les drapeaux.
Brevet d'aptitude militaire :
11. ... il avait été passer son brevet d'aptitude militaire pour la cavalerie à Tours où il voulait être cuirassier.
DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, p. 306.
b) ENSEIGN. Compétence acquise et reconnue après un apprentissage, une période de formation professionnelle ou universitaire. Aptitude professionnelle.
Examen d'aptitude. Examen sanctionnant des études spécialisées soit dans la branche technique (certificat d'aptitude professionnelle [C.A.P.], brevet d'aptitude) soit universitaire (C.A.P.E.S., C.A.P.E.T., etc.) :
12. Dans la fabrication en continu des plaques d'accumulateurs que nous avons décrite, le chef d'équipe avait été recruté avec un certificat d'aptitude professionnelle de fraiseur, preuve d'« instruction ». Dans un atelier voisin, on avait pris un bachelier, pour des raisons somme toute analogues.
Traité de sociol., t. 1, 1967, p. 451.
Liste d'aptitude. Liste inscrivant les candidats à un poste supérieur suivant un ordre correspondant à leurs diplômes ou leur compétence :
13. Le stage préparatoire effectué, le diplôme technique de bibliothécaire obtenu, les titres scientifiques de culture générale produits, le candidat doit, en outre, aux termes des décrets des 29 avril et 29 novembre 1933, être inscrit sur une liste d'aptitude dressée annuellement par la section permanente de la Commission supérieure des bibliothèques.
La Civilisation écrite, 1939, p. 5211.
c) LÉGISL. DU TRAVAIL. Certificat d'aptitude physique :
14. Les enfants de douze à treize ans peuvent être admis au travail dans les manufactures s'ils sont munis : a) du certificat d'études primaires (...); b) d'un certificat d'aptitude physique délivré par un médecin chargé d'un service public, et désigné par le préfet; ...
J. BARADAT, L'Organ. d'une préfecture, 1907, p. 322.
II.— P. ext.
A.— [En parlant d'animaux] Faculté d'adaptation à un milieu, à une fonction particulière :
15. ... on ne peut non plus se tromper en concluant l'aptitude au vol de la structure des ailes.
H. COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 4.
ZOOTECHNIQUE. Disposition organique par laquelle un animal est apte à accomplir une fonction déterminée pour un usage précis :
16. La double aptitude des vaches à la lactation et à l'engraissement est généralement réputée incompatible...
A.-F. POURIAU, La Laiterie, 1895.
Aptitude beurrière (A.-F. POURIAU, La Laiterie, 1895).
Rem. Attesté ds la plupart des dict. généraux.
B.— [En parlant d'une chose] Propriété permettant l'utilisation de cette chose :
17. Les locomotives à trolley présentent (...) une (...) aptitude à circuler dans les deux sens, par un simple renversement du trolley, ...
J.-N. HATON DE LA GOUPILLIÈRE, Cours d'exploitation des mines, 1905, p. 770.
PRONONC. :[aptityd]. PASSY 1914 note une durée mi-longue pour la 3e syllabe du mot.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1373 « disposition naturelle à qqc. » (ORESME, Polit. I, 6 ds GDF. Compl. : Aptitude et habileté); 1701 jurispr. (FUR. : Aptitude [...] signifie la capacité à exercer un emploi, ou à recevoir un don); 1865 (LITTRÉ-ROBIN : Aptitude. Disposition naturelle d'un animal ou d'une race à l'exécution d'actes déterminés, et aussi à subir l'influence des causes morbides).
Empr. au b. lat. aptitudo « id. », BOÈCE (VIe s.) Anal. post., 64, 752 D ds TLL s.v., 323, 73.
STAT. — Fréq. abs. littér. :746. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 568, b) 1 309; XXe s. : a) 1 123, b) 1 310.
BBG. — COMTE-PERN. 1963. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — FROMH.-KING 1968. — LACR. 1963. — LAFON 1969. — LAL. 1968. — Lar. méd. 1970. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — Méd. Biol. t. 1 1970. — MIQ. 1967. — MUCCH. Psychol. 1969. — NOTER-LÉC. 1912. — PIÉRON 1963. — PIGUET 1960. — Psychol. 1969. — SILL. 1965. — TEZ. 1968

aptitude [aptityd] n. f.
ÉTYM. 1361; bas lat. aptitudo, de aptus. → Apte.
1 Cour. Disposition naturelle (d'un être vivant, spécialt d'un être humain). || Les aptitudes particulières de qqn. Disposition, faculté, goût, penchant, prédisposition, propension, qualité, tendance. || Aptitude à qqch., à faire qqch. || Aptitude à comprendre, à réussir. || Avoir une grande aptitude à (ou pour) une activité. Adresse, bosse, capacité, facilité, habileté, instinct (avoir l'instinct de…). || Aptitude bien exercée, entraînant la compétence, le talent.Aptitude au travail, à l'action, à la musique, aux arts, aux mathématiques. || Il, elle n'a aucune aptitude pour les sciences…(Le compl. désigne un état plus ou moins passif). || Aptitude au bonheur, à la souffrance. || Aptitude à tout supporter ( Patience), à souffrir, à être malheureux.
(Sans compl.). || Avoir de nombreuses aptitudes. || Aptitudes physiques, intellectuelles. || Certificat d'aptitude physique.
1 Une singulière aptitude pour apprendre en peu de temps à chanter un air (…)
Buffon, Hist. nat. des oiseaux, l'Alouette huppée.
2 Le génie n'est qu'une plus grande aptitude à la patience.
Buffon, cité par Hérault de Séchelles, Voyage à Montbard.
3 Le goût est une aptitude à bien juger des choses de sentiment.
Vauvenargues, Introd. à la connaissance de l'esprit humain, XII.
4 La présence d'esprit se pourrait définir une aptitude à profiter des occasions pour parler ou pour agir.
Vauvenargues, De la présence d'esprit.
5 Toutes les âmes n'ont pas une égale aptitude au bonheur, comme toutes les terres ne portent pas également des moissons.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, I, 6.
6 Jamais notre vanité ne reconnaîtra à un homme, même de génie, deux aptitudes, et la faculté de faire aussi bien qu'un esprit commun des choses communes
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. V, L, 13.
7 Ses puissances intimes, ses aptitudes foncières, ses instincts primitifs et héréditaires, sollicités et fortifiés par l'épreuve, continuent d'agir après l'épreuve, et après avoir fait une nation, font un art.
Taine, Philosophie de l'art, II, III, 4.
8 (…) la singulière aptitude qu'avait cet étrange garçon à répandre des averses de larmes allait chaque jour en augmentant.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, p. 8.
9 Rien ne m'a plus frappé que l'aptitude des vivants à s'accommoder et à se donner les formes qui conviennent aux circonstances.
Valéry, Variété IV, p. 104.
10 En raison même de la complexité de ses aptitudes, l'enfant fut assez long à trouver sa voie.
Henri Lichtenberger, Wagner, p. 3.
(Mil. XIXe). Sc. nat. Disposition naturelle (d'un être vivant, d'une espèce). || On développe les aptitudes des animaux domestiques par la sélection des reproducteurs et le croisement des races. || Aptitude à la marche, au vol.
Philos., psychol. Substrat congénital d'une capacité. || Test d'aptitude. || Aptitudes sensorielles, sensorimotrices, mentales.Appréciation des aptitudes. || Méthode des aptitudes de base (évaluation des emplois).
11 On parle quelquefois d'« aptitude acquise »; mais en réalité, dans ce cas, on sous-entend l'existence d'une disposition naturelle à acquérir une habitude, un tour de main, à profiter de l'expérience. Si tous les hommes présentaient exactement les mêmes capacités et la même disposition à profiter d'un apprentissage, la notion d'aptitude serait superflue.
Éd. Claparède, in Lalande, Voc. de la philosophie.
Par ext. Compétence acquise et reconnue après une formation. || Aptitude professionnelle. || Certificat d'aptitude professionnelle (C. A. P.), examens ou concours sanctionnant des études à finalités professionnelles.
Un brevet d'aptitude de technicien. || Le Certificat d'aptitude à l'enseignement technique (C. A. P. E. T.). || Certificat d'aptitude professionnelle à l'enseignement secondaire (C. A. P. E. S. → Capétien).Liste d'aptitude (de candidats).
2 (1701). Dr. || Aptitude légale : qualité reconnue légalement à exercer un droit, à recevoir un legs, etc. Capacité, habilité.
12 La capacité juridique peut être définie : l'aptitude à acquérir des droits et à les exercer.
A. Colin et H. Capitant, Cours de droit civil, t. I, p. 76.
Admin. || Aptitude militaire : capacité à servir dans l'armée.
3 Capacité (d'une chose). || L'aptitude d'un appareil à effectuer une fonction.
CONTR. Impéritie, inaptitude, incapacité.

Encyclopédie Universelle. 2012.