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transmuer

transmuer [ trɑ̃smɥe ] v. tr. <conjug. : 1>
• v. 1265; du lat. transmutare
1Transformer (une substance) en altérant profondément sa nature. changer, convertir. La pierre philosophale passait pour transmuer les métaux vils en métaux nobles. Cette liqueur « tournera au rouge et acquerra la vertu de transmuer l'argent en or » (France).
2(Abstrait) Changer en une autre chose. Le poète « domine, transmue son déchirement » (Leiris). Pronom. « Il n'est rien en nous, même le pire (surtout le pire), qui ne doive se transmuer en richesse » (F. Mauriac). — On dit parfois transmuter <conjug. : 1> , av. 1869 .

transmuer ou transmuter verbe transitif (latin transmutare, de mutare, changer) Effectuer une transmutation. ● transmuer ou transmuter (difficultés) verbe transitif (latin transmutare, de mutare, changer) Emploi Ces deux formes verbales équivalentes (du latin transmutare, faire changer de place) ont donné les adjectifs transmuable et transmutable, auxquels correspondent les substantifs transmutation et transmutabilité. ● transmuer ou transmuter (synonymes) verbe transitif (latin transmutare, de mutare, changer) Effectuer une transmutation.
Synonymes :
- convertir
- métamorphoser

transmuer ou transmuter
v. tr. Didac. Transformer (un corps) en un autre de nature entièrement différente.
|| PHYS NUCL Effectuer une transmutation.

⇒TRANSMUER, TRANSMUTER, verbe trans.
A. — 1. PHYS. Transmuer, transmuter qqc. en qqc. Transformer une substance en changeant sa nature. Les rayons cosmiques transmutent l'azote atmosphérique en carbone-14 dont la combinaison avec l'oxygène forme une faible portion du gaz carbonique de l'air absorbé par les organismes (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 501).
Empl. pronom. passif. L'uranium 238 peut se transmuter, sous l'action des neutrons, en un élément nouveau, le plutonium 239 (GOLDSCHMIDT, Avent. atom., 1962, p. 33).
P. anal.
[En parlant de couleurs] Une lumière (...) si éclatante (...) qu'elle transmuait à chaque instant des vert-tendre en ocre clair, des gris en rose (GIONO, Chron., Noé, 1947, p. 242).
Empl. pronom. passif. L'ombre même est de la lumière, elle est transparente, elle est aérienne, et les couleurs du prisme, selon les mille tons voisins, l'incidence de l'éclairage, s'y décomposent et s'y transmuent en gammes de plus en plus nuancées et subtiles que nul n'avait jamais observées auparavant (FAURE, Hist. art, 1921, p. 196).
♦ [En parlant d'un bien] J'avais dix mille livres de rente en terres: je commençai par transmuter mon patrimoine en billets de banque, ce qui doubla mon revenu; puis je plaçai tout à fonds perdu, ce qui le tripla (FEUILLET, Scènes et com., 1854, p. 16).
2. ALCHIM. Transformer un métal en un autre plus précieux (en particulier en or). Transmuer les métaux les uns dans les autres (FULCANELLI, Demeures philosophales, t. 1, 1929, p. 120). La recherche d'une « pierre philosophale » offrant la possibilité de transmuer les métaux les plus ordinaires en argent et en or, passionna de nombreux seigneurs, rois et reines (CARON, HUTIN, Alchimistes, 1959, p. 53).
Empl. abs. Certains monarques allemands favorisèrent généreusement « souffleurs » et « adeptes ». Ferdinand III transmuait lui-même, à leurs côtés, selon les indications secrètes qu'il disait avoir reçues de Richtausen (CARON, HUTIN, Alchimistes, 1959, p. 58).
B. — Au fig. Changer complètement, profondément quelque chose. Mais alors la Russie soviétique aura accompli une révolution nouvelle, et, pour sauver la première, transmué ses valeurs (MARITAIN, Human. intégr., 1936, p. 75). Telle est précisément la fonction des rites. Les uns, de caractère positif, servent à transmuer la nature du profane ou du sacré, selon les besoins de la société (Philos., Relig., 1957, p. 32-6).
— [Souvent avec l'idée (sous l'infl. du sens alchim.) de transformation en une autre chose considérée comme plus noble] Odeur du désir loin encore de l'assouvissement mais déjà transmué en joie (MAURIAC, Genitrix, 1923, p. 374). Alors où mettre le mal? Il faut le transférer de la partie impure dans la partie pure de soi-même, le transmuant ainsi en souffrance pure (S. WEIL, Pesanteur, 1943, p. 79).
Empl. pronom. passif. De toutes façons, c'est l'artiste de génie qui, seul, par l'intuition ou même par le rêve et la magie, entre en contact avec la réalité véritable et, en lui, cette expérience mystérieuse se transmue en œuvre d'art (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p. 630).
REM. Transmutant, -ante, adj. a) Propre à opérer une transmutation. ) Alchim. Ébloui, il acheta toute la poudre transmutante que possédait l'adroit personnage et se prépara, avec 300 000 grains reçus, à obtenir 300 000 onces d'or (CARON, HUTIN, Alchimistes, 1959, p. 49). ) Phys. Cockroft reprenant ce problème au laboratoire Cavendish dirigé par Rutherford mit en évidence l'intérêt des protons comme particules transmutantes (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 344). b) Phys. nucl. ,,Se dit d'un atome qui peut être changé en un autre`` (DUVAL 1959).
Prononc. et Orth.:[], [-myte], (il) transmue, -ute [-my], [-myt]. MARTINET-WALTER 1973 [-], [-mye] (11, 6). Ac. dep. 1694: transmuer. Étymol. et Hist. A. Transmuer 1. 1269-78 « changer, transformer » (JEAN DE MEUN, Roman de la Rose, éd. F. Lecoy, 6039); spéc. 1591 « transformer un métal en un autre plus précieux » (LANOUE, 460 ds LITTRÉ); 2. 1790 « changer en une autre chose » (SAINT-MARTIN, Homme désir, p. 208: ne pourrois-tu pas transmuer la mort?). B. Transmuter 1. 1521 « transformer » (GUILLAUME BRIÇONNET, MARGUERITE D'ANGOULÊME, Corresp., éd. C. Martineau et M. Veissière, t. 1, p. 114); 1834 (BALZAC, E. Grandet, p. 223); 1854 se transmuter (FLAUB., Corresp., p. 64); 2. 1922 « changer en une autre chose » (PROUST, Prisonn., p. 183). Empr. au lat. transmutare « faire changer de place; transporter ailleurs », de trans- « au-delà, par-delà » et mutare « déplacer, changer » (la forme transmuter en B a été refaite d'apr. le lat.).
STAT. Fréq. abs. littér. Transmuer: 72. Transmuter: 27.
DÉR. Transmutateur, -trice, subst. masc. et adj. a) Subst. masc. Alchimiste qui cherche à transmuter les métaux. Il appela les transmutateurs les plus célèbres du Midi et les fit amener, à grands frais, à Tiffauges. D'après les documents que nous possédons, nous le voyons faire construire le fourneau des alchimistes, l'athanor, acheter des pélicans, des creusets et des cornues (HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 128). P. métaph. Albeniz et Granados, pour ne citer que ces deux-là, sont aussi les transmutateurs sonores d'un poudroiement d'étincelles de leur race, au creux d'une brisure mélancolique (L. DAUDET, Idées esthét., 1939, p. 295). b) Adj., fig. Cet esprit sans préjugés, dévorateur, destructeur, universel, sceptique, vulgarisateur, irrespectueux, érudit et philosophique, dissociateur d'idées, transmutateur des valeurs qui lâchait de si belles fusées (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 316). [], fém. [-]. 1res attest. a) 1768 « alchimiste qui cherchait à transmuter les métaux » (VOLTAIRE, Singul. nat., 16 ds LITTRÉ), 1910 adj. formule transmutatrice (CLAUDEL, Gdes odes, p. 225), b) p. métaph. 1939 (L. DAUDET, loc. cit.); de transmuter, suff. -ateur, v. -eur2.
BBG. — BALDINGER (K.). Les Enseign. de Jean de Vignay (ca 1335), source de Godefroy. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1985, t. 23, n° 1, p. 47. — GOHIN 1903, p. 263 (s.v. transmutateur).

transmuer [tʀɑ̃smɥe] ou transmuter [tʀɑ̃smyte] v. tr.
ÉTYM. V. 1265, transmuer; transmuter, XIXe (Sainte-Beuve, in Encycl. du XXe s.; Goncourt, Journal, 2 nov. 1886), sous l'infl. probable de transmutation; du lat. transmutare.
1 Transformer (une substance) en altérant profondément sa nature. Changer, convertir. || La pierre philosophale passait pour transmuer les métaux (cit. 3) vils en métaux nobles ( Alchimie).
1 Et (…) deviendrai-je, alors, pareil à ces magiciens des veillées, dont les génies, en secouant des torches sous terre, éclairent de confuses pierreries ? Pourrai-je transmuer les métaux, comme Hermès ? disposer les aimants, comme Paracelse ? (…)
Villiers de L'Isle-Adam, Axël, III, I, 1.
2 (…) par mon art et industrie, elle (cette liqueur) tournera au rouge et acquerra la vertu de transmuer l'argent en or.
France, la Rôtisserie de la reine Pédauque, in Œ., t. VIII, p. 187.
3 Ces quatre éléments (de l'univers sublunaire) peuvent se transmuter les uns dans les autres (…)
D. Dubarle, Théologie du cosmos, in Initiat. théologique, t. II, p. 306.
2 Fig. Changer (en une autre chose, considérée comme plus noble).Pron. || Ses engouements (cit. 2), ses malédictions et ses bénédictions se transmuent sans raison apparente.
4 Il n'est rien en nous, même le pire (surtout le pire), qui ne doive se transmuer en richesse.
F. Mauriac, le Jeune Homme, XIV.
5 (Une esthétique érudite) n'est qu'une connaissance stérile si elle ne se met pas au service d'une esthétique spirituelle qui, suivant l'expression que Ruskin nous a donnée de l'art, transforme, transmute nos perceptions en émotions, change ce qui s'offre à notre vision en nuances exquises de notre sensibilité.
R. Le Senne, Traité de morale générale, p. 292.
6 (…) je m'enchantais en néophyte de la sorcellerie qui transmute les signes imprimés en récit (…)
S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée, p. 54.
7 Le poète est, essentiellement, quelqu'un qui sent, prend conscience et domine — qui domine, transmue son déchirement.
Michel Leiris, Frêle bruit, p. 304.
3 (Surtout pron.). Modifier (un corps simple) par transmutation. || « Le noyau (…) est bombardé et se transmute en émettant un p [proton] » (Th. Kahan, Radioactivité et Transmutation des atomes, p. 150 [1940]). REM. Dans ce sens, transmuer semble plus rare.
DÉR. Transmuable, transmutant, transmutateur.

Encyclopédie Universelle. 2012.