suaire [ sɥɛr ] n. m.
• 1150; lat. sudarium « linge pour essuyer la sueur du visage »
1 ♦ Littér. Linceul. « La neige, sur la plaine où les morts sont couchés, Comme un suaire étend au loin ses nappes blanches » (Leconte de Lisle). Spécialt Linceul blanc avec lequel on se représente les revenants, les fantômes.
2 ♦ Loc. (1636) Saint suaire : relique sacrée, linceul dans lequel le Christ aurait été enseveli. Le saint suaire de Turin.
● suaire nom masculin (latin sudarium, mouchoir, linceul, de sudare, transpirer) Dans l'Antiquité, espèce de voile dont on couvrait la tête et le visage des morts. Littéraire. Linge dans lequel on ensevelit un mort ; linceul. ● suaire (expressions) nom masculin (latin sudarium, mouchoir, linceul, de sudare, transpirer) Saint suaire, linceul qui servit à ensevelir Jésus-Christ ; d'après une tradition tardive, linge qu'une femme, Véronique, aurait appliqué sur le visage de Jésus pour l'essuyer lorsqu'il marchait sur le chemin du Calvaire. ● suaire (homonymes) nom masculin (latin sudarium, mouchoir, linceul, de sudare, transpirer) suèrent forme conjuguée du verbe suer
suaire
n. m. Litt. Linceul.
|| Le saint suaire: le linge ayant servi à ensevelir le Christ et portant une empreinte dans laquelle la piété populaire catholique a reconnu l'empreinte de son corps. (La datation au carbone 14 a établi que le saint suaire conservé à Turin a été tissé au XIVe s.)
⇒SUAIRE, subst. masc.
A. — ANTIQ. LAT. Pièce d'étoffe (de la dimension d'un mouchoir) qui servait à éponger la sueur du visage; p. ext., voile dont on recouvrait la tête et le visage des morts. (Dict. XIXe et XXe s.).
B. — Littér. Pièce d'étoffe dans laquelle on ensevelit un mort. Synon. linceul. Plis d'un suaire; être enveloppé, recouvert d'un suaire. Les ensevelisseurs avaient pendant la nuit (...) cousu le corps (...) dans le suaire qui drape lugubrement les trépassés (...). Ce suaire n'était autre chose qu'une pièce de magnifique batiste (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 591). [Gide] me parle de deux portraits de ce poète [John Donne], l'un jeune, alors qu'il était très beau, l'autre mort et dans son suaire (...) le second a été fait du vivant de Donne qui, pour satisfaire sans doute à son étrange obsession de la mort, avait ordonné qu'on le représentât ainsi, les yeux fermés et le visage pris dans un suaire noué, à la mode du temps, au sommet du crâne (GREEN, Journal, 1950, p. 335).
♦ P. métaph. L'Angleterre était enveloppée d'un suaire de neige et de frimas (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 290). [Symb. de la mort, de la disparition] Ce qui paraît dès maintenant probable, c'est que la littérature sera le suaire de la bourgeoisie (AYMÉ, Confort, 1949, p. 186).
♦ Saint Suaire. Relique sacrée considérée comme le linceul dans lequel le Christ aurait été enseveli. Après plusieurs siècles passés dans l'ombre, le Saint-Suaire est conservé par les empereurs de Byzance jusqu'en 1204. Il séjourne en France où Besançon, Lirey (près Troyes), Chambéry sont ses principales étapes. Il franchit les Alpes en 1578 et de son dernier séjour dans cette ville, il a gardé le nom de Suaire de Turin (A. LEGRAND, Le Linceul de Jésus, Paris, Apostolat des Éditions, 1979, p. 2).
— En partic. Drap blanc dans lequel on représente traditionnellement les fantômes, les revenants. Apparitions en suaire. Munis de draps et de lampes, les pieds nus, nous descendons l'escalier (...). Minuit sonne. (...) j'allume une lampe et nous commencions à nous équiper et à draper nos suaires, lorsque je vois la poignée de la porte qui tourne lentement (COCTEAU, Théâtre poche, 1949, p. 151).
♦ P. compar. Les tiges blanches des bouleaux semblaient une rangée de fantômes dans leurs suaires (SAND, Mare au diable, 1846, p. 97).
— P. anal. Pièce d'étoffe qui enveloppe, recouvre quelque chose ou quelqu'un. Au milieu du plafond pend un lustre soigneusement enveloppé dans un suaire de percaline verte (BALZAC, Pierrette, 1840, p. 41). Monsieur de La Baudraye peut vivre cent ans, mais il peut aussi périr en neuf jours faute d'avoir mis le suaire de flanelle dont il s'enveloppe (BALZAC, Muse départ., 1844, p. 170).
Prononc. et Orth.:[]. Ac. 1694: le saint Suaire; 1718: (le) Saint Suaire, (un) saint Suaire; 1740, 1762: (le) Saint Suaire, (un) Saint Suaire; 1798: (le) saint Suaire, (un) saint Suaire; dep. 1835: (le) saint suaire, (un) saint suaire (id. ds LITTRÉ); ROB.: le saint suaire, mais Lar. Lang. fr.: le Saint Suaire et ROB. 1985: le Saint-Suaire. V. saint. Étymol. et Hist. 1. a) 1200 suaire « linge qui a servi à ensevelir le Christ » (Destruction de Rome, 1273 ds T.-L.); 1636 saint suaire (MONET); b) 1175 « linceul pour ensevelir les morts » (BENOÎT DE STE-MAURE, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 27254); 2. 1538 « linge propre à essuyer la sueur du visage ou du corps » (EST.); terme d'antiq. dep. BESCH. 1845; 3. 1836 « ce qui enveloppe quelque chose à la façon d'un linceul » (MUSSET, Confess. enf. s., p. 13). Francisation d'apr. suer du lat. eccl. sudarium « linge qui a servi à ensevelir le Christ » (d'où l'a. fr. sudarie, Pèlerinage Charlemagne, éd. G. Favati, 770), lat. class. « mouchoir, linge pour s'essuyer la figure », lui-même dér. de sudare, v. suer. Fréq. abs. littér.:222. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 229, b) 563; XXe s.: a) 388, b) 212.
suaire [sɥɛʀ] n. m.
ÉTYM. V. 1160; déb. XIIe en parlant du Christ; lat. sudarium « linge pour essuyer la sueur du visage », de sudare. → Suer.
❖
1 Littér. Linceul (→ Agonisant, cit. 2). — Spécialt. Linceul blanc avec lequel on se représente les revenants, les fantômes (cit. 4).
1 Les deux spectres qu'un feu dévore,
Traînant leur suaire en lambeaux,
Se cherchent pour s'unir encore,
En trébuchant sur des tombeaux (…)
Hugo, Odes et ballades, Ballade XIII.
2 Tous deux sont morts. — Seigneur votre droite est terrible (…)
Dix ans vous ont suffi pour filer le suaire
Du père et de l'enfant !
Hugo, les Chants du crépuscule, V, V.
3 La neige, sur la plaine où les morts sont couchés,
Comme un suaire étend au loin ses nappes blanches.
Leconte de Lisle, Poèmes barbares, « Vent froid de la nuit ».
2 Loc. (1636). || Saint-Suaire : relique sacrée, linceul dans lequel le Christ aurait été enseveli. || Le Saint-Suaire de Turin.
3 (XIXe). Littér. Ce qui enveloppe comme un linceul. || « Le suaire noir de la nuit » (Hugo, in G. L. L. F.).
Encyclopédie Universelle. 2012.