incriminer [ ɛ̃krimine ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1558, rare av. 1791; lat. incriminare
1 ♦ Vx Déclarer criminel, accuser d'un crime. ⇒ inculper.
2 ♦ Mod. Mettre (qqn) en cause; s'en prendre à (qqn). Vous l'incriminez à tort en lui imputant une erreur dont il n'est pas responsable. ⇒ accuser, attaquer, blâmer, suspecter. — Par ext. Considérer (qqch.) comme responsable. Incriminer les circonstances, les événements.
⊗ CONTR. Disculper, justifier.
● incriminer verbe transitif (du latin criminare, accuser, de crimen, -inis, accusation) Mettre quelqu'un, quelque chose en cause, les dénoncer comme responsables d'une action ou d'une situation blâmable ou dommageable : Se plaindre d'une malfaçon et incriminer l'architecte. ● incriminer (synonymes) verbe transitif (du latin criminare, accuser, de crimen, -inis, accusation) Mettre quelqu'un, quelque chose en cause, les dénoncer comme responsables d'une...
Synonymes :
- accuser
- attaquer
- blâmer
incriminer
v. tr. Mettre en cause, accuser (qqn). Incriminer qqn pour les propos qu'il a tenus.
⇒INCRIMINER, verbe trans.
A. — DR. Incriminer qqn. Accuser (d'un crime, d'un acte repréhensible). Anton. disculper, justifier. Maintenant dites-moi si les pièces que vous avez reçues du procureur du roi (...) incriminent fortement M. de Durandal? — Monsieur, il ne m'est plus permis de vous confier les secrets du tribunal (BALZAC, Annette, t. 3, 1824, p. 174). Les dernières poursuites contre le colonel Picquart (qu'il ne veut ni innocenter ni incriminer) (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p. 542).
♦ Au part. passé. Dans la grande salle (...) une douzaine de personnes causaient, incriminées pour défaut de balayage, chiens errants, manque de lanternes à des carrioles, ou avoir tenu, pendant la messe, un cabaret ouvert (FLAUB., Bouvard, t. 2, 1880, p. 180). Comment se fait-il que l'officier incriminé n'ose pas mettre ses accusateurs en demeure de prouver? (CLEMENCEAU, Iniquité, 1899, p. 425).
♦ Emploi pronom. réfl. Il s'incriminait, il s'accusait, il se traitait comme s'il eût été le directeur de la police métropolitaine, admonestant un agent pris en flagrant délit de naïveté (VERNE, Tour monde, 1873, p. 179).
— Incriminer de + subst. ou inf. Accuser de. Le clerc de Paris nie que la Pucelle ait fait cette preuve (...) il l'incrimine d'avoir entraîné les hommes à se rendre homicides (FRANCE, J. d'Arc, t. 2, 1908, p. 111).
B. — P. ext. Incriminer qqn, qqc. Mettre en cause, s'en prendre à. Synon. accuser, attaquer, blâmer, critiquer. Ce n'est pas tel ou tel acte qu'on veut atteindre et incriminer, c'est la tendance janséniste elle-même qu'on veut anéantir (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 4, 1859, p. 8). Ce n'est pas votre bonne foi que j'incrimine : c'est votre négligence (LEROUX, Parfum, 1908, p. 99). Vous réfléchirez, non pas à vos torts, car je ne vous incrimine en rien, mais au scandale qui est évident (FLERS, CAILLAVET, M. Brotonneau, 1923, III, 5, p. 22).
♦ Emploi abs. :
• « Ne jugez pas, afin de n'être pas jugés ». On suspecte, incrimine, noircit les actes et les intentions avec une mauvaise joie que pour ma part je trouve hideuse. L'acrimonie vigilante, les insinuations perfides, les commentaires fâcheux (...) toutes les variantes de ce Protée qu'on appelle la méchanceté abondent, pullulent à tous les étages et dans tous les cercles de cette ville acide.
AMIEL, Journal, 1866, p. 129.
♦ Emploi pronom. réciproque. Ils commencèrent à s'incriminer sur la bataille des îles Aegates. Hannon l'accusait de n'être pas venu à sa rencontre (FLAUB., Salammbô, t. 1, 1863, p. 127).
♦ Au part. passé. Acte incriminé. Incriminés comme des improvisateurs, les techniciens impressionnistes ont été de parfaits ouvriers, ils ont donné à la peinture de demain un répertoire de procédés (MAUCLAIR, Maîtres impressionn., 1923, p. 213). Gicleur de marche normale obstrué. Arrêter le moteur, enlever le gicleur incriminé, le déboucher (CHAPELAIN, Techn. automob., 1956, p. 345).
— Incriminer de + inf. ou subst. Imhoff (...) incrimina les poux de pouvoir être des incubateurs de tuberculose (BRUMPT, Parasitol., 1910, p. 551). L'enregistrement de l'admirable chœur de femmes caucasiennes (...) incriminé de « formalisme » (GIDE, Journal, 1936, p. 1253).
REM. 1. Incriminable, adj. Qui peut être incriminé. a) [Au sens A] Synon. accusable. (Dict. XIXe et XXe s.). b) [Au sens B] Synon. blâmable, condamnable, répréhensible. Action incriminable. Cette brochure contient plusieurs passages incriminables (Ac. 1878-1935). 2. Incriminant, -ante, part. prés. en emploi adj., rare. Qui incrimine. Dans l'espoir mi-conscient de recevoir une réponse incriminante pour l'étranger (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p. 35). 3. Incriminateur, -trice, adj., rare. Qui incrimine. Un correspondant qui sait qu'une phrase obscure, mensongère, incriminatrice, est mise à dessein pour qu'il proteste (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 632).
Prononc. et Orth. : [], (il) incrimine []. Att. ds Ac. dep. 1835. Étymol. et Hist. 1558 « déclarer criminel » (S. FONTAINE, Histoire catholique, 65b ds Fr. mod. t. 6, p. 63); 1791 « id. » (P.-V. MALOUET, Collection des opinions, II, 231 ds DG). Empr. au b. lat. incriminare/incriminari « accuser » (TLL; NIERM.), dér. du lat. class. criminare/criminari, lui-même dér. de crimen (crime); cf. l'a. prov. encrimar « accuser » (XIIe-XIIIe s. ds RAYN. t. 2, p. 518). Incriminer a évincé, au moment de la Révolution, criminaliser au sens de « déclarer criminel ». Fréq. abs. littér. : 123.
incriminer [ɛ̃kʀimine] v. tr.
ÉTYM. 1558, rare av. 1791; bas lat. incriminare « accuser », de in- (→ 2. In-), et criminare ou criminari « accuser, accuser de façon calomnieuse », de crimen, criminis « accusation, grief ». → Crime.
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1 Vieilli. Déclarer (qqn) criminel, accuser d'un crime. ⇒ Inculper. || Les pièces, les indices qui incriminent un suspect. || Incriminer qqn de… (un crime).
1 Cette résolution (…) incrimine de haute trahison quiconque tenterait de la dissoudre (la chambre).
Villemain, Souvenirs contemporains, Les Cent-Jours, XIII.
2 (1867). Mod. Mettre en cause, considérer comme une faute. ⇒ Accuser (de); cf. Imputer à crime (qqch.). || Incriminer la bonne foi, la conduite de qqn (Académie). || Incriminer les actes, les intentions de qqn.
1.1 Ce n'est pas votre bonne foi que j'incrimine; c'est votre négligence.
G. Leroux, le Parfum de la dame en noir, p. 99, in T. L. F.
♦ (XXe). Compl. n. de personne. Mettre en cause (qqn), considérer comme coupable. || On l'incrimine à tort. ⇒ Accuser, suspecter.
♦ Pron. réfl. || « Il s'incriminait, il s'accusait… » (J. Verne, le Tour du monde en 80 jours, in T. L. F.). — Récipr. || Ils s'incriminent l'un l'autre.
♦ Par ext. Considérer (qqch., qqn) comme responsable (sans qu'il y ait faute). || Incriminer les circonstances, les événements.
♦ Littér. et rare. || Incriminer qqn, qqch. de (et n. ou inf.). || Incriminer un écrivain d'immoralité, de corrompre la jeunesse.
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incriminé, ée p. p. adj.
ÉTYM. (1834).
1.2 Une douzaine de personnes causaient, incriminées, pour défaut de balayage, chiens errants, manque de lanterne ou avoir tenu pendant la messe un cabaret ouvert.
Flaubert, Bouvard et Pécuchet, éd. Folio, p. 401.
2 Elle leva les yeux vindicativement sur le bistrot incriminé et vit qu'il dormait, les cils rabattus sur ses joues blanches, la bouche close.
Colette, Chéri, p. 26.
3 (…) il n'y aurait qu'à sourire de ces vaines dévastations, si les livres incriminés n'étaient en passe d'être effectivement supprimés de nos librairies.
Gide, Attendu que…, p. 34.
4 (…) il (leur) arrivait de relire trois ou quatre fois de suite les citations incriminées, sans rien y découvrir d'étrange (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XVIII, p. 241.
♦ N. Personne incriminée. || Les incriminés.
5 L'incriminé va jusqu'au bout de la rue et tourne à l'angle devant le café du Cygne.
Robert Pinget, Graal Flibuste, p. 35.
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CONTR. Disculper, justifier.
DÉR. Incriminable, incriminant, incriminateur, incrimination.
Encyclopédie Universelle. 2012.