idiotisme [ idjɔtism ] n. m.
• 1534; lat. idiotismus, gr. idiôtismos « langage courant »
♦ Forme ou locution propre à une langue, impossible à traduire littéralement dans une autre langue de structure analogue (gallicisme, anglicisme, germanisme, hispanisme, latinisme...).
● idiotisme nom masculin (latin idiotismus, du grec idiôtismos, de idios, particulier) Forme linguistique propre à une langue donnée et qui ne possède pas de correspondant syntaxique dans une autre langue. (Ainsi le français Comment allez-vous ? correspond à l'anglais How do you do ? On parle de gallicisme, d'anglicisme, de germanisme, d'hispanisme, de latinisme, d'hellénisme, etc.) Fait de langue propre à telle ou telle région francophone et qui n'existe pas en français standard. (On parle, dans ce cas, d'africanisme, de belgicisme, de canadianisme, d'helvétisme, etc.) ● idiotisme (difficultés) nom masculin (latin idiotismus, du grec idiôtismos, de idios, particulier) Sens Ne pas confondre ces deux mots de forme proche. 1. Idiotie : manque d'intelligence ; action, parole inepte. 2. Idiotisme : tournure idiomatique, expression ou construction d'une langue qu'il est impossible de traduire mot à mot dans une autre. « L'échapper belle », « être sur les dents » sont des idiotismes du français.
idiotisme
n. m. LING Expression ou construction particulière à une langue, intraduisible dans une autre langue. Idiotisme arabe.
I.
⇒IDIOTISME1, subst. masc.
Synon. vieilli de idiotie.
A. — MÉD. Arriération mentale. État de quasi-idiotisme, de demi-idiotisme. M. Pinel, médecin de l'hospice de Bicêtre, dans un ouvrage sur l'aliénation mentale (...) a remarqué que l'idiotisme ôte à l'homme la parole, et le conduit au mutisme (BONALD, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 274). L'absence de tout mouvement dans le corps, de toute chaleur dans le regard, s'accordait avec une certaine expression de démence triste, avec les dégradants symptômes par lesquels se caractérise l'idiotisme (BALZAC, Chabert, 1832, p. 31). Avec des conformations moins défectueuses, on observe des nuances d'idiotisme moins prononcées et qu'on peut évaluer aisément par l'inspection de divers crânes (BROUSSAIS, Cours phrénol., leçon 1, 1836, p. 6).
B. — Absence d'intelligence, stupidité. Un postillon, l'idiotisme en personne, ne put retenir ses chevaux et nous campa dans un fossé (STENDHAL, Journal, 1809, p. 3). Dans ces lettres [à Voltaire] le grand Frédéric est un sot. — L'admiration pour les écrivailleurs le rogne jusqu'à l'idiotisme (BARB. D'AUREV., Memor. 1, 1837, p. 146). Les Italiens ont autant que les Français de ce prétendu bon goût qui est de l'idiotisme. Ah! la bêtise, quel gouffre! (FLAUB., Corresp., 1875, p. 229).
Prononc. et Orth. : []. ,,Malgré l'étymologie, l'o est tout à fait ouvert et bref dans (...) les dérivés des mots en -ot, suivant l'analogie des mots en -ote`` (MART. Comment prononce 1913, p. 111). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1611 (COTGR.). Dér. de idiot; suff. -isme. Bbg. JOURJON (A.). Rem. lexicogr. R. Philol. fr. 1917/18, t. 30, pp. 57-58.
II.
⇒IDIOTISME2, subst. masc.
A. — LING. ,,Construction qui apparaît propre à une langue donnée et qui ne possède aucun correspondant syntaxique dans une autre langue`` (Ling. 1972). Un idiotisme est plutôt un syntagme figé rebelle à l'analyse grammaticale comme il y a en français (DUPRÉ, 1972). Des tournures comme il y a ou c'est... qui, c'est... que sont des idiotismes, particuliers au français; d'autres langues exprimeraient les mêmes rapports par des constructions différentes (Lang. 1973) :
• 1. ... il frappa gentiment à sa porte. — On y va, dit le bandit, qui, en fréquentant la maison de maître Pastrini, avait fini par apprendre le français jusque dans ses idiotismes.
DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 740.
— P. ext. Mot, expression propre à une personne, à un groupe. Il disait : Cet homme n'est pas de mon ciel, là où les autres disaient : Nous ne mangerons pas un minot de sel ensemble. Chaque homme de talent a ses idiotismes particuliers (BALZAC, L. Lambert, 1832, p. 187) :
• 2. Dans notre langage collégial, ce mot être faisants constituait un idiotisme difficile à traduire. Il exprimait un partage fraternel des biens et des maux de notre vie enfantine, une promiscuité d'intérêts fertile en brouilles et en raccommodements...
BALZAC, L. Lambert, 1832p. 37.
B. — P. anal., rare. Caractère qui appartient en propre à quelqu'un, à quelque chose. Nous avons parlé déjà de l'idiotisme de beauté particulier à chaque époque, et nous avons observé que chaque siècle avait, pour ainsi dire, sa grâce personnelle (BAUDEL., Curios. esthét., 1863, p. 347). Il y a dans tous les êtres un idiotisme de métier, une caractéristique qui peut se traduire physiquement en laideur (BAUDEL., Curios. esthét., 1863p. 359).
Prononc. et Orth. Cf. idiotisme1. Att. ds Ac. dep. 1835. Étymol. et Hist. 1558 (B. DES PÉRIERS, Nouvelles récréations et joyeux devis, éd. P. Jourda, II, p. 370). Empr. au lat. idiotismus « expression propre à une langue », gr. « langage courant ou vulgaire ».
STAT. — Idiotisme1 et 2. Fréq. abs. littér. : 72.
BBG. — MILITZ (H.-M.). Zur gegenwärtigen Problematik der Phraseologie. Beitr. rom. Philol. 1972, t. 11, pp. 102-103.
1. idiotisme [idjɔtism] n. m.
ÉTYM. V. 1534; lat. idiotismus, du grec idiôtismos « langage particulier », d'abord « genre de vie, habitude, langage d'une personne simple », de idiôtes « individu quelconque ». → Idiot.
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♦ Ling. Forme ou locution propre à une langue, impossible à traduire littéralement dans une autre langue de structure analogue. || Idiotisme français (⇒ Gallicisme, cit. 2), anglais (⇒ Anglicisme; aussi américanisme, britannisme, briticisme), allemand (⇒ Germanisme), espagnol (⇒ Hispanisme), grec (⇒ Hellénisme), latin (⇒ Latinisme), arabe (⇒ Arabisme), etc. — Par ext. Locution, tournure propre à quelqu'un.
1 Mais, monsieur le philosophe, il y a une conscience générale, comme il y a une grammaire générale, et puis des exceptions dans chaque langue, que vous appelez je crois, vous autres savants, des… aidez-moi donc… des… — Idiotismes.
Diderot, le Neveu de Rameau, p. 449.
2 Son langage devait surprendre d'autant plus qu'il parlait plus rarement. Il disait : Cet homme n'est pas de mon ciel, là où les autres disaient : Nous ne mangerons pas un minot de sel ensemble. Chaque homme de talent a ses idiotismes particuliers.
Balzac, Louis Lambert, Pl., t. X, p. 440.
3 L'encre a pâli, le papier a jauni, l'orthographe est peu sûre, l'écriture, pleine de paraphes et de queues compliquées, est difficile à déchiffrer, la langue est pleine d'idiotismes, de termes de dialecte bâlois, d'amerenglish.
B. Cendrars, l'Or (La merveilleuse histoire du Général Johann August Suter), in Œ. compl., t. II, p. 185.
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2. idiotisme [idjɔtism] n. m.
ÉTYM. 1611, « absence de culture »; de idiot, et -isme.
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1 Puisque idiot signifiait autrefois solitaire, le vieillard avoue qu'il est un grand idiot; et, comme les organes de l'âme s'affaiblissent avec ceux du corps, il avoue encore qu'il est idiot dans le sens qu'on attache aujourd'hui à ce terme. Il pense que l'idiotisme est l'état d'un idiot, comme le pédantisme est l'état d'un pédant (…)
Voltaire, Lettres, 4016, 28 juin 1773.
1.1 Taine, vous me semblez donner dans l'idiotisme bourgeois.
Th. Gautier, cité par Ed. et J. de Goncourt, Journal, 22 juin 1863.
2 Méd. (vx). Arriération mentale de l'idiot (2.).
2 Enfin l'absence de tout mouvement dans le corps, de toute chaleur dans le regard, s'accordait avec une certaine expression de démence, triste, avec les dégradants symptômes par lesquels se caractérise l'idiotisme.
Balzac, le Colonel Chabert, Pl., t. II, p. 1096.
Encyclopédie Universelle. 2012.