engloutir [ ɑ̃glutir ] v. tr. <conjug. : 2>
1 ♦ Avaler rapidement, tout d'un coup et sans mâcher. ⇒ dévorer, engouffrer. « Il voit les élèves engloutir viandes et légumes » (G. Lecomte). — Absolt « Les hommes déboutonnés, la face rougie, engloutissaient comme des gouffres » (Maupassant). ⇒ se gaver; fam. s'empiffrer.
2 ♦ Fig. Dépenser rapidement. ⇒ dilapider, dissiper, gaspiller, 1. manger. Engloutir de grosses sommes dans une entreprise. « Ces fameuses coquettes qui dévorent et engloutissent en peu de temps les plus gros patrimoines » (Lesage).
♢ (Sujet chose) Absorber, épuiser. « Villa et château eussent englouti plus que le revenu total des Genillé » (Romains).
3 ♦ ( XVe) Faire disparaître brusquement en noyant ou submergeant. Séisme qui engloutit une ville. « Les uns, habitants de la terre sèche, se sont vus engloutis par des déluges » (Cuvier). — Pronom. Un navire qui s'engloutit. ⇒ s'abîmer, couler, sombrer. — Une vallée engloutie dans un lac. « Quand le dernier cercle de l'eau se ferme sur un navire englouti » (Suarès).
♢ Fig. Poét. « Le temps nous engloutit » (Chateaubriand).
● engloutir verbe transitif (bas latin ingluttire, avaler) Avaler, dévorer, absorber gloutonnement des aliments ; engouffrer : Engloutir les morceaux sans les mâcher. Submerger, engouffrer, faire disparaître quelque chose : La mer engloutit le navire. Dépenser de l'argent, le dissiper rapidement dans une entreprise ; engouffrer : Il a englouti une fortune dans sa collection. ● engloutir (synonymes) verbe transitif (bas latin ingluttire, avaler) Avaler, dévorer, absorber gloutonnement des aliments ; engouffrer
Synonymes :
- absorber
- avaler
- enfourner (familier)
Contraires :
- cracher
Dépenser de l'argent, le dissiper rapidement dans une entreprise ; engouffrer
Synonymes :
- claquer
- croquer
- dévorer
- dissiper
Contraires :
- économiser
engloutir
v. tr.
d1./d Avaler gloutonnement. Syn. dévorer, engouffrer.
d2./d Faire disparaître dans un gouffre. La mer a englouti le navire.
— Fig. Absorber, consumer. Ces dépenses ont englouti toutes mes économies.
|| Pp. adj. Une ville engloutie.
⇒ENGLOUTIR, verbe trans.
A.— [Le suj. désigne une pers. ou un animal]
1. Avaler avec avidité par excès de gourmandise. L'homme jaune ne mord pas dans le pain; il happe des lèvres, il engloutit sans le façonner dans sa bouche un aliment semi-liquide (CLAUDEL, Connaiss. Est, 1907, p. 115). Pendant tout le crépuscule, il [l'engoulevent] (...) engloutit quantité d'insectes volumineux comme des hannetons, des sphinx, des géotrupes (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 124) :
• 1. ... cette femme de la Salpêtrière qui mangeait quotidiennement huit livres de pain, engloutit une fois quatorze potages et une autre soixante bols de café.
FLAUBERT, Bouvard et Pécuchet, t. 2, 1880, p. 155.
— Emploi abs. Il avalait tout sur la table, les petites cuillers, les ronds de serviette, le poivre, les burettes, et même les couteaux... C'était sa passion d'engloutir (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 269).
2. Au fig. Consommer, dépenser pour en jouir, avec une rapidité excessive (une somme d'argent, etc.). Engloutir de l'argent, un héritage, sa fortune :
• 2. Il [Saccard] vivait sur la dette, parmi un peuple de créanciers qui engloutissaient au jour le jour les bénéfices scandaleux qu'il réalisait dans certaines affaires.
ZOLA, La Curée, 1872, p. 463.
— Emploi pronom. à sens passif. Que de fortunes sont venues s'engloutir à la bourse (BOYARD, Bourse et spécul., 1853, p. 399). Il [Eugène] s'engageait à se marier et à délaisser le « panier fleuri » où, pendant les dernières années du père, tout l'argent d'Eugène s'engloutissait (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 14).
B.— P. anal. [Le suj. désigne une chose] Faire disparaître totalement et de façon soudaine. L'océan, la forêt, la neige engloutit qqc. ou qqn. Bien plus redoutable que le glacier, est la mobile avalanche qui peut, en quelques secondes, engloutir tout un village (MICHELET, Chemins Europe, 1874, p. 395). De grands nuages voyageurs, par intervalles, engloutissaient puis dégageaient le croissant de lune (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 361).
♦ Emploi pronom. à sens passif. Disparaître, sombrer. S'engloutir dans un abîme, une fosse, un gouffre. Soudain le toit tout entier s'engloutit entre les murs, et un volcan de flammes jaillit jusqu'au ciel (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Horla, 1886, p. 1123). Les vols, en accents circonflexes, des mouettes gris perle, montaient s'engloutir dans ces ténèbres blafardes (HAMP., Marée, 1908, p. 9).
— Rare. En 1817, la mode engloutissait les petits garçons de quatre à six ans sous de vastes casquettes en cuir maroquiné à oreillons (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 143).
— P. métaph. La mort, le temps engloutit tout. Traverse les sables des déserts jusqu'à ce que la fin du monde engloutisse les étoiles dans le néant (LAUTRÉAM., Chants Maldoror, 1869, p. 301). Je veux quelqu'un qui m'aide et non pas qui m'engloutisse! (CLAUDEL, Soulier, 1944, 4e journée, 6, p. 889).
♦ Emploi pronom. à sens passif. Une de ces stériles bouderies, où s'engloutissent tant d'affections (ROLLAND, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 603).
Rem. On rencontre ds la docum. engloutisseur, euse, adj. et subst. (Personne ou chose) qui engloutit. Ce théâtre est un engloutisseur : ne le regrettez pas trop (RENARD, Corresp., 1883-1910, p. 317). Une sensibilité extraordinairement engloutisseuse, comme de sables mouvants (GIONO, Eau vive, 1943, p. 333).
Prononc. et Orth. :[], (j')engloutis []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. [1050 anglutet (Vie de St Alexis, éd. C. Storey, 305, leçon du ms. L. ne convenant pas à l'assonance, éd. Gaston Paris de 1872)]; 1193-97 « dévorer, avaler gloutonnement » (HÉLIMANT, Les vers de la mort, éd. Walberg, XXX, 5). Du b. lat. ingluttire. Fréq. abs. littér. :1 027. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 653, b) 1 769; XXe s. : a) 1 504, b) 1 100.
engloutir [ɑ̃glutiʀ] v. tr.
ÉTYM. Fin XIe; du bas lat. ingluttire « avaler », de in, et lat. class. gluttire « avaler », de gluttus « gosier ». → Glouton.
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1 (Fin XVIe). Avaler tout d'un coup, gloutonnement. ⇒ Dévorer, enfourner, engouffrer. || Engloutir les morceaux sans les mâcher (→ Appétissant, cit. 1).
1 (…) il se trouva là un grand poisson qui engloutit Jonas; il demeura trois jours et trois nuits dans le ventre de ce poisson.
Bible (Sacy), Jonas, II, 1.
♦ Absolt. S'empiffrer. || Il ne mange pas, il engloutit.
2 Elle mangeait, mâchait, broyait, dévorait, engloutissait, mais avec l'air le plus léger et le plus insouciant du monde.
Baudelaire, le Spleen de Paris, XLII.
3 À huit heures on mangeait encore. Les hommes déboutonnés, en bras de chemise, la face rougie, engloutissaient comme des gouffres.
Maupassant, Contes de la bécasse, « Farce normande ».
♦ Par métaphore. || Conquérant, empire qui engloutit de petits États. ⇒ Absorber, dévorer.
2 (V. 1460). Fig. Dépenser rapidement. ⇒ Dévorer (littér.), dissiper, gaspiller. || Il a englouti son héritage en moins d'un an. || Engloutir des sommes considérables dans une entreprise.
4 Pourquoi les quatre mille francs destinés à cette vaisselle ont-ils été engloutis encore dans cet équipage ?
Mme de Sévigné, 1270, mars 1690.
5 Une de ces fameuses coquettes qui dévorent et engloutissent en peu de temps les plus gros patrimoines.
A. R. Lesage, Gil Blas, X, 11.
♦ (Sujet n. de chose). Absorber, épuiser.
6 Villa et château, par leurs frais d'entretien et de personnel eussent englouti plus que le revenu total des Genillé.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XIII, p. 181.
3 (Sujet et compl. n. de chose). Faire disparaître brusquement, en noyant ou submergeant. ⇒ Abîmer, détruire. || Le déluge (cit. 1) engloutit les terres. ⇒ Noyer, submerger. || La ville d'Ys aurait été engloutie par les flots. || Séisme qui engloutit une ville. ⇒ Ensevelir, enterrer.
7 J'entends le signal et les cris des matelots; je vois fraîchir le vent et déployer les voiles : il faut monter à bord, il faut partir. Mer vaste, mer immense, qui dois peut-être m'engloutir dans ton sein, puissé-je retrouver sur tes flots le calme qui fuit mon cœur agité.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, III, Lettre XXVI.
8 C'est d'un reflet pareil que la mer brille languissamment, quand le dernier cercle de l'eau se ferme sur un navire englouti.
André Suarès, Trois hommes, « Pascal », p. 30.
♦ Fig. (poét.). || La mort nous engloutit. || Le temps nous engloutit (→ Abîme, cit. 8; cours, cit. 11). || L'homme est englouti dans l'immensité de l'univers (→ Comprendre, cit. 1).
9 Et le Temps m'engloutit minute par minute,
Comme la neige immense un corps pris de roideur (…)
Baudelaire, les Fleurs du mal, Spleen et idéal, LXXX.
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s'engloutir v. pron.
ÉTYM. (Av. 1781).
♦ || Le navire s'est englouti dans les flots. ⇒ Abîmer (s'), couler, disparaître, sombrer. || Le toit s'engloutit dans le brasier. — Par métaphore :
10 Oh ! s'arracher les yeux pour ne plus les revoir !
S'engloutir dans la nuit solitaire et profonde
Dans l'oubli de la vie et de son désespoir !
Leconte de Lisle, Poèmes tragiques, « Le lévrier de Magnus », III.
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englouti, ie p. p. adj.
♦ || Aliments engloutis. — Fortune engloutie en un instant. — Navire englouti (→ ci-dessus, cit. 8). || La Cathédrale engloutie, pièce pour piano de Debussy.
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DÉR. Engloutissement, engloutisseur.
Encyclopédie Universelle. 2012.