dévider [ devide ] v. tr. <conjug. : 1>
1 ♦ Mettre en écheveau (le fil qui est sur le fuseau ou sur les bobines d'un métier à filer). Dévider du fil. Absolt Machine à dévider. ⇒ dévidoir; rouet. « Assise auprès du feu, dévidant et filant » (Ronsard). — Mettre en pelote (un écheveau). Par ext. Dérouler. Dévider une bobine de fil (⇒ débobiner) . Dévider un cordage. ⇒ filer. Pronom. « Tant l'écheveau du temps lentement se dévide ! » (Baudelaire).
2 ♦ (1830) Faire passer entre ses doigts. « Une des femmes, l'Irlandaise, dévidait éperdument son rosaire » (Hugo). Loc. fig. vieilli Dévider son chapelet, son écheveau : raconter, débiter tout ce qu'on a à dire (cf. Vider son sac).
⊗ CONTR. Enrouler, renvider, rouler.
● dévider verbe transitif Mettre du fil en écheveau ou en pelote. Dérouler ce qui est enroulé : Dévider des câbles. Vider quelque chose de ce qui y est enroulé : Dévider une bobine. Familier. Exposer quelque chose, le raconter rapidement ou avec prolixité : Dévider ses souvenirs.
dévider
v. tr.
d1./d Mettre en écheveau ou en pelote (le fil embobiné ou en fuseau).
d2./d Dérouler. Dévider une bobine.
d3./d (Réunion) Syn. de vider (sens 1). Dévider ses poches.
— Dévider son coeur: se confier, dire ce que l'on a sur le coeur.
⇒DÉVIDER, verbe trans.
A.— Dérouler du fil. Dévider la soie, du coton, un cocon.
1. Spécialement
a) Dérouler le fil qui est sur le fuseau pour le mettre en écheveau au moyen du dévidoir. Dévider le fil que l'on a filé (Ac. 1798-1932). Les fuseaux [de lin] succèdent aux fuseaux. On les met de côté à mesure qu'ils sont terminés. Après quoi on les dévide, on en fait des écheveaux (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p. 255) :
• 1. ... ils dévident leurs phrases comme dans les filatures on dévide le coton. Voyez quels écheveaux interminables celui-ci s'efforce de tirer!
MUSSET, Le Temps, 1831, p. 73.
— Emploi pronom. à sens passif. Cette soie se dévide très bien (LITTRÉ).
b) Mettre en pelotes le fil qui est en écheveau ou en bobine. Dévider des bobines. Elle a dévidé trois écheveaux dont elle n'a fait qu'un peloton (Ac. 1798-1932).
2. P. ext. Dérouler une matière souple enroulée. Dévider des boyaux, des câbles, des tuyaux.
— Emploi pronom. à sens passif. Les câbles cessèrent de se dévider (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 312).
3. P. anal. Dévider son chapelet, son rosaire. Le faire passer régulièrement entre ses doigts.
B.— P. métaph. et au fig.
1. Dévider sa bobine, son écheveau, son chapelet (cf. chapelet II A 1 c). Exprimer à la suite et sans interruption ce que l'on a à dire, souvent avec véhémence et profusion. Synon. fam. vider son sac. Il se mit alors à débiter ses bons mots de coulisses, à dévider sa bobine de gracieusetés (HUYSMANS, Marthe, 1876, p. 41) :
• 2. « Qu'est-ce que la vieille Katel va me dire? pensait-il. Elle va me dévider son chapelet; elle va me reprocher une si longue absence. »
ERCKMANN-CHATRIAN, L'Ami Fritz, 1864, p. 63.
— Emploi pronom., proverbe. La fusée est prête à se dévider. Des événements contraires vont se dérouler (cf. MARAT, Pamphlets, Affreux réveil, 1790, p. 239).
2. P. ext.
a) Exprimer à la suite et sans interruption. Dévider son histoire, ses souvenirs. Synon. débiter. C'est un homme qui passe ses idées au laminoir, (...) et qui dévide en vingt pages une pensée qui pourrait s'exprimer en quelques mots (JOUY, Hermite, t. 3, 1813, p. 82) :
• 3. Toutes ces choses ne touchaient guère Hendrijk Van de Goo. Mais comme il s'apercevait du plaisir qu'elle avait à se confier ainsi, il l'écoutait patiemment dévider sa monotone histoire.
VAN DER MEERSCH, L'Empreinte du dieu, 1936, p. 52.
b) Fam. Dévider le jars (« jargon »). Parler argot (cf. SUE, Myst. Paris, t. 1, 1842-43, p. 127).
c) Démêler, débrouiller. Lettre interminable où j'ai eu l'art de dévider toutes les ficelles d'un esprit usé jusqu'au chanvre (MALLARMÉ, Corresp., 1870, p. 319).
Prononc. et Orth. :[devide], (je) dévide [devid]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Fin du XIe s. desvuidier « dévider » (RASCHI Blondh., p. 41); b) début XIIIe s. « défaire, dérouler » (Bible Guiot, 1871 ds T.-L.); 2. mil. XVe s. « énoncer, raconter, débiter » (Erreurs du Jugement de l'amant banny, 80 ds Romania, t. 34, p. 413); 3. av. 1592 « expliquer, débrouiller » (CHOLIÈRES, Contes, f° 264 ds LAC.); 4. 1830 « faire passer entre ses doigts » (LAMARTINE, Harm., p. 432 : le mendiant timide Et dont la main dévide Son rosaire enfumé). Dér. de vider; préf. dé(s)-. Fréq. abs. littér. :203. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 188, b) 371; XXe s. : a) 380, b) 270. Bbg. GOTTSCH. Redens. 1930, p. 238. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 123.
dévider [devide] v. tr.
ÉTYM. Fin XIe, desvuidier; de 1. dé-, et vider.
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1 Techn. (ou vx). Mettre en écheveau (le fil qui est sur le fuseau ou sur les bobines d'un métier à filer). || Dévider du fil, de la soie (→ Cocon, cit. 1). — Absolt. || Machine à dévider. ⇒ Dévidoir; rouet.
1 Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant (…)
Ronsard, Second livre, sonnets pour Hélène, XLIII.
♦ Mettre en pelote (un écheveau).
♦ Par ext. Dérouler. || Dévider une pelote de laine, une bobine de fil (⇒ Débobiner). || Dévider un cordage. ⇒ Filer.
1.1 Je courus au pin le plus proche, et j'y grimpai, épouvanté. Je m'assis à califourchon sur une grosse branche, craignant l'apparition subite d'un sanglier blessé, celui-là même qui avait dévidé sur dix mètres les entrailles du braconnier manchot.
M. Pagnol, la Gloire de mon père, t. I, p. 242.
♦ Par métaphore. || Dévider le fil de ses pensées.
2 Les Parques d'une même soie
Ne dévident pas tous nos jours.
Malherbe, Poésies, I, I, « À la Reine… »
3 (…) il est bien difficile de dire ce qu'il y a au fond d'un homme; la sonde serait attachée à une corde de cent mille toises de longueur, et on la déviderait jusqu'au bout qu'elle filerait toujours sans rien rencontrer qui l'arrêtât.
Th. Gautier, Mlle de Maupin, I, p. 16.
4 Tant l'écheveau du temps lentement se dévide !
Baudelaire, les Fleurs du mal, Spleen et idéal, XXX.
5 Il gagne le Luxembourg avec son livre, et s'assied sur un banc. Sa pensée soyeusement se dévide; mais fragile; s'il tire dessus, le fil rompt.
Gide, les Faux-monnayeurs, III, IX, p. 390.
♦ Pron. || Le fil qui se dévide. — Au p. p. || Fil dévidé.
2 (Mil. XVe). Fam. Raconter, débiter (de nombreuses phrases, un long discours). || Il dévida toute son affaire.
♦ Argot ancien. || Dévider le jar : parler argot.
3 (1830). Faire passer entre ses doigts. || Dévider son chapelet.
6 Une des femmes, l'irlandaise, dévidait éperdument son rosaire.
Hugo, l'Homme qui rit, I, II, XII.
♦ ☑ Loc. fig. Dévider son chapelet, un chapelet de reproches; dévider son écheveau. → Vider son sac.
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CONTR. Enrouler, lover, renvider, rouler.
DÉR. Dévidage, dévideur, dévidoir.
Encyclopédie Universelle. 2012.