Akademik

désenchanter

désenchanter [ dezɑ̃ʃɑ̃te ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1260 ; de dés- et enchanter
1Vx ou littér. Rompre l'enchantement, faire cesser le charme de.
(1802) Désenchanter qqn, le faire revenir de ses illusions. ⇒ décevoir, désappointer, désillusionner.
2Cour., au p. p. Qui a perdu son enthousiasme, ses illusions. blasé, déçu, 1. las. Il est désenchanté de tout. Un sourire « tristement tendre, céleste et désenchanté » (Proust). Subst. « Les Désenchantées », de Loti.
⊗ CONTR. Charmer, émerveiller, enchanter, enthousiasmer.

désenchanter verbe transitif Littéraire. Désillusionner quelqu'un, lui faire perdre son enthousiasme ; décevoir, désappointer.

⇒DÉSENCHANTER, verbe trans.
A.— Rare. Détruire un enchantement, rompre un charme magique, un pouvoir surnaturel :
Le château d'Artus est intoxiqué, drogué. Les uns mettent cela sur le compte du Graal, tabou mystérieux, relique du Christ qui enchante ou désenchante la Bretagne; les autres s'y complaisent ou se révoltent.
COCTEAU, Les Chevaliers de la Table Ronde, 1937, préf., p. 73.
PARAD. (Quasi-)anton. charmer, émerveiller, enchanter, ensorceler, ravir.
B.— Faire cesser une illusion, faire perdre à un objet son caractère illusoire ou le charme, l'attrait, le mystère qui peuvent lui être prêtés (notamment par la voie de l'imagination, du souvenir, de l'amour). (Quasi-)synon. décevoir, dépoétiser, désappointer. La vérité désenchante toujours. L'art est là pour la falsifier (RENARD, Journal, 1909, p. 1250).
1. [L'obj. désigne une chose, une entité] Plusieurs personnes ont pensé que la science entre les mains de l'homme dessèche le cœur, désenchante la nature (CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 34). Nous avons tous dans le passé un jour qui nous désenchante l'avenir (BERTRAND, Gaspard, 1841, p. 45).
Emploi pronom. Perdre son charme, son attrait, son mystère. La vie présente, la beauté de ce monde, le chant de la terre et cet immense amour qui le transfigure chaque jour en un hymne céleste, tout cela devra se désenchanter (VUILLEMIN, Essai signif. mort, 1949, p. 90).
2. [L'obj. désigne une pers.] Si j'ai un conseil à vous offrir, c'est (...) de la traiter comme une simple esclave. Ahasvérus. — Tu peux la tuer, mais tu ne peux pas désenchanter cet être tout céleste (QUINET, Ahasvérus, 1833, 3e journée, p. 256).
C.— Faire perdre à quelqu'un ses illusions, son enthousiasme, son engouement. La médiocrité de ces strophes composées pour les pèlerins (...) ne pouvait pas, non plus que l'accent lorrain de la chanteuse, désenchanter ce petit monde (BARRÈS, Colline insp., 1913, p. 145).
PARAD. (Quasi-)synon. dégoûter, désabuser, désillusionner; (quasi-) anton. enthousiasmer, illusionner.
Emploi pronom. Perdre son enthousiasme, son engouement pour quelqu'un, quelque chose. (Quasi-) synon. se lasser. Il vient tôt ou tard un moment où le monde vous quitte, où le public qui vous avait porté se désenchante de vous, se retire de vous (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 9, 1863-69, p. 359).
Rem. On rencontre ds la docum. désenchantant, ante, part. prés. et adj. Qui désenchante, qui fait cesser une illusion, qui prive d'enthousiasme. (Quasi-)synon. décevant. Rien n'est en effet, plus désenchantant, plus pénible, que de regarder, après des années, ses phrases (HUYSMANS, À rebours, 1884, préf. p. I).
Prononc. et Orth. :[], (je) désenchante []. Ds Ac. 1718-1932. Étymol. et Hist. Ca 1261 « rompre l'effet d'un charme » (RUTEBEUF, Le Miracle de Théophile, éd. E. Faral, 459); av. 1648, p. ext., part. passé adj. « libéré d'une passion, qui maintenait comme sous un charme » [âme] desenchantée (VOITURE, Œuvres, poésies Élégie éd. 1654 II p. 10); 1800 22 déc. « être désabusé » (CHATEAUBR. Corresp. gén., t. 1, p. 41); 1804 part. passé adj. « qui a perdu ses illusions » (M.-J. CHÉNIER, La Promenade ds ROB.). Dér. de enchanter; préf. dé-. Fréq. abs. littér. :48 (désenchantant : 2). Bbg. QUEM. Fichier (s.v. désenchantant).

désenchanter [dezɑ̃ʃɑ̃te] v. tr.
ÉTYM. V. 1261; de dés- (→ 1. Dé-), et enchanter.
1 (V. 1261). Vx ou littér. Rompre l'enchantement, faire cesser le charme de. || Magicien qui a le pouvoir d'enchanter et de désenchanter un lieu.
0.1 (…) les pleurs et les gémissements de ton mari, que tu traites tous les jours avec tant d'indignité et de barbarie, m'empêchent de dormir nuit et jour. Il y a longtemps que je serais guéri, et que j'aurais recouvré l'usage de la parole, si tu l'avais désenchanté.
A. Galland, les Mille et une Nuits, p. 86.
Par extension :
0.2 Il y a ceci à dire sur le péché, c'est qu'il désenchante le monde spirituel.
J. Green, Journal, 15 août 1960, Vers l'invisible, p. 218.
2 (1800, Chateaubriand). Mod. || Désenchanter qqn, le faire revenir de ses illusions. Décevoir, dégoûter, désappointer, désillusionner.
1 (…) avec elle point de déception, point de satiété ! elle ne désenchante pas par des phrases vulgaires ou ridicules (…)
Th. Gautier, la Toison d'or, IV.
Désenchanter qqch., lui faire perdre le charme, l'attrait, la poésie…
2 Ne croyons pas toutefois qu'en nous découvrant les bases sur lesquelles reposent les passions, le christianisme ait désenchanté la vie.
Chateaubriand, Génie du christianisme, t. II, III, I.
3 (…) nous avons tous dans le passé un jour de bonheur qui nous désenchante l'avenir.
Aloysius Bertrand, Gaspard de la nuit, p. 9.
——————
se désenchanter v. pron. réfl.
Perdre son pouvoir d'enchantement.
3.1 Mort n'est pas le mot. Vivant au contraire, obsédant, et que je n'ai pu tuer qu'en utilisant et publiant ces notes. Aujourd'hui il est bien mort — au point que ce roman Toutes les femmes sont fatales qui a tant compté pour moi s'est entièrement désenchanté à mes yeux — quant au fond.
Claude Mauriac, le Temps immobile, p. 94.
Faire cesser l'effet d'un charme.
3.2 Nietzsche se désenchantait des philtres wagnériens en écoutant le rire de Carmen.
G. Bauër, les Billets de Guermantes, nov. 1938, p. 304.
Perdre son enthousiasme. || Le public s'est désenchanté de cette actrice.
——————
désenchanté, ée p. p. adj.
Plus cour. Dont on a fait cesser l'enchantement.N. || Les Désenchantées, roman de Loti.
4 On vit, dans les romans (…) des palais enchantés et désenchantés.
Montesquieu, l'Esprit des lois, XXVIII, 22.
(1804). En parlant des personnes. Qui a perdu son enthousiasme, ses illusions. Blasé, déçu, dégoûté, désespéré, désillusionné, las. || Il est désenchanté de tout. || C'est une âme désenchantée.N. || Un désenchanté.
5 Vous m'avez délaissé, doux rêves de la vie,
Plaisirs, gloire, bonheur, patrie et liberté
Vous fuyez loin d'un cœur vide et désenchanté.
M.-J. Chénier, « La promenade ».
6 Alexis (…) avait voulu contempler le visage d'un mourant à jamais détaché des réalités vulgaires et où ne pouvait plus flotter qu'un sourire héroïquement contraint, tristement tendre, céleste et désenchanté.
Proust, les Plaisirs et les Jours, I.
CONTR. Charmer, émerveiller, enchanter, enthousiasmer; embellir. — (Du p. p. adj.) Enthousiaste, joyeux.
DÉR. Désenchantement, désenchanteur.

Encyclopédie Universelle. 2012.