acerbe [ asɛrb ] adj.
• 1195; « cruel, méchant » jusqu'au XVIe; lat. acerbus
1 ♦ Vx Aigre et âpre. Goût acerbe.
2 ♦ Qui cherche à blesser; qui critique avec méchanceté. ⇒ acrimonieux, agressif, 1. caustique, mordant, sarcastique, virulent. Répondre d'une manière acerbe. Un ton acerbe. Critiques acerbes. — N. f. Rare ACERBITÉ , 1327 .
● acerbe adjectif (latin acerbus) Qui manifeste une agressivité blessante, mordante ; âpre : Sa pièce a été l'objet de critiques acerbes. ● acerbe (synonymes) adjectif (latin acerbus) Qui manifeste une agressivité blessante, mordante ; âpre
Synonymes :
- acéré
- âcre
- agressif
- âpre
- blessant
- incisif
- mordant
- piquant
Contraires :
- agréable
- aimable
- amène
- doux
acerbe
adj. Fig. Caustique, blessant. Son ton acerbe l'irrita. Syn. acrimonieux, mordant, sarcastique.
⇒ACERBE, adj.
I.— Au propre, didact.
A.— [Surtout en parlant de produits naturels, en partic. de fruits non encore mûrs ou de leur saveur] Aigre et âpre au goût :
• 1. Le fruit [du cornouiller sauvage] (...) a une saveur agréable quoiqu'un peu acerbe.
J. BAUDRILLART, Nouveau manuel forestier, trad. de Burgsdorf, 1808, p. 284.
• 2. C'est ainsi que les orientaux ont tiré parti de la graine coriace et acerbe du café par la torréfaction, et les peuples méridionaux de l'Europe, du fruit amer de l'olivier par des lessives.
J.-H. BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature, 1814, p. 53.
• 3. Ceux qui n'ont pas manipulé ne se doutent pas des difficultés qu'on éprouve pour parvenir à la perfection, en quelque matière que ce soit, ni ce qu'il faut d'attention, de tact et d'expérience pour nous présenter un chocolat qui soit sucré sans être fade, ferme sans être acerbe, aromatique sans être malsain, et lié sans être féculent.
J.-A. BRILLAT-SAVARIN, Physiologie du goût, 1825, p. 120.
• 4. Acerbe. Se dit principalement des fruits lorsqu'ils sont âpres au goût et qu'ils laissent sur la muqueuse de la langue une impression légèrement déchirante; à peu près analogue à celle qui reste lorsqu'on mange des fruits encore verts.
E.-A. CARRIÈRE, Encyclopédie horticole, 1862, p. 5.
• 5. Les fruits (...) ils commencent tous par être acerbes; ils deviennent acides et enfin sucrés et nourrissants.
L.-E. AUDOT, La Cuisinière de la campagne et de la ville, 1896, p. 623.
• 6. Un vin âpre au goût passe difficilement dans la gorge; il est dit acerbe quand il joint à l'âpreté la saveur qui caractérise les végétaux; il agace les dents.
ALI-BAB, Gastronomie pratique, 1907, p. 131.
• 7. Un certain nombre de fruits sauvages, c'est-à-dire de ceux que l'on peut cueillir dans les bois ou dans les haies, présentent de l'intérêt au point de vue économique et sont trop négligés. Ils sont, il est vrai, moins sucrés et plus acides ou acerbes que les fruits cultivés et présentent un pourcentage plus élevé de déchets, mais quelques-uns sont très parfumés et on n'a que la peine de les cueillir.
Lar. mén. 1926, s.v. fruit, p. 602.
Rem. 1. L'ex. 1 est le seul dans lequel la saveur d'un produit acerbe est par ailleurs agréable. 2. Acerbe, amer et acide sont fréquemment associés. 3. Dans les ex. 4 et 5, les fruits sont qualifiés d'acerbes. Il s'agit de fruits encore verts, leur saveur est astringente (cf. ce mot).
B.— P. ext. et anal. [Appliqué à d'autres sens] Qui produit une sensation trop intense et par là désagréable.
1. À la vue :
• 8. [Les] arêtes aiguës, [les] formes acerbes (...) caractérisent en général la sculpture du moyen âge en Italie.
A. LENOIR, Architecture monastique, t. 1, 1852, p. 220.
• 9. Qu'il vête ses personnages de robes de brocart, qu'il les déguise en Japonais comme dans Aladin ou qu'il leur conserve le costume style empire, Crane ne peut échapper à la hantise de son maître; s'il se sert d'une gamme plus étendue, plus variée de couleur, s'il va jusqu'aux tons les plus acerbes, aux orangés les plus féroces et aux verts presque noirs, tant ils sont intenses...
J.-K. HUYSMANS, L'Art moderne, 1883, p. 213.
• 10. ... dans le Kabyle mort, il [Fortuny] mêle la hachure au vernis mou pour obtenir un effet à la fois velouté et acerbe...
C. MAUCLAIR, De Watteau à Wistler, 1905, p. 167.
2. Except., à l'ouïe :
• 11. Les successions continues d'accord de neuvième à l'état direct ont une sonorité moins acerbe quand la dissonance principale opère la résolution médiate et anticipée, et que la partie de basse est rendue plus mobile par l'insertion de notes de passage.
GEVAERT, Traité d'harmonie, 1885, p. 93.
Rem. Dans ces ext. d'emploi la compar. avec les fruits reste sensible.
II.— Au fig. Désagréable, plein d'une âpreté mordante mais généralement passagère.
A.— Rare. [En parlant de pers.] :
• 12. Sans vous j'allais succomber à cette vie, me dit Henriette un soir où le comte avait été, comme les mouches par un jour de grande chaleur, plus piquant, plus acerbe, plus changeant qu'à l'ordinaire.
H. DE BALZAC, Le Lys dans la vallée, 1836, p. 113.
• 13. C'est Nion qui a plaidé pour Hamard, il a été assez acerbe dans sa plaidoirie...
G. FLAUBERT, Correspondance, 1848, p. 69.
B.— Cour. [En parlant de dispositions de l'esprit, de sent., d'attitudes, de paroles, de moy. d'expr...] :
• 14. Toutes les considérations personnelles sont secondaires pour moi. Je désirerais ne pas employer le moyen acerbe des destitutions, je ne veux pas employer de moyens infâmes, du reste je sacrifie tout pour arriver au succès.
STENDHAL, Lucien Leuwen, t. 3, 1836, p. 137.
• 15. Les ambitieux ajournés et les mécontents irréconciliables commençaient à former le noyau de cette opposition acerbe où les regrets du despotisme tombé et les aspirations à la république, par une contradiction que la passion commune explique, se confondaient sous le nom de libéralisme, dans leur animosité contre l'aristocratie et contre les Bourbons.
A. DE LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, p. 313.
• 16. Les manières brusques, le sang-gêne, la franchise acerbe d'Everard, n'étaient qu'une apparence, et, avouons-le, une affectation devant les gens hostiles...
G. SAND, Histoire de ma vie, t. 4, 1855, p. 318.
• 17. ... et madame, qui s'appelait Palmyre accablait sans cesse monsieur, qui s'appelait Gustave, de compliments désobligeants, d'allusions blessantes, de paroles acerbes, sans raison apparente.
G. DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, La Serre, 1883, p. 674.
• 18. « Pardonnez-moi de vous presser de la sorte, mais je suis pressé moi-même par l'acerbe voix de l'exacteur qui menace de me dépouiller de mon bien.
L. BLOY, Journal, 1892, p. 42.
• 19. Il [le pailleur] dessinait aussi, d'un crayon acerbe et inhabile, sans indulgence, mais sans trait.
A. DAUDET, L'Amour est un songe, 1920, p. 45.
• 20. C'est sur ce stock d'idées qu'il vivra, épurant, émondant, enjolivant sous des phrases faussement respectueuses et câlines ce qu'avait d'agressif comme un défi le « sectarisme » acerbe de l'Avenir de la science.
H. MASSIS, Jugements, t. 1, 1923, p. 60.
• 21. Elle attendait que la famille fût installée au bas de l'escalier, ou sur le porche, pour gâter les plus belles soirées par son rire caustique (9 déc.) et d'acerbes plaisanteries sur son visage, sur ce qu'elle appelait son nez de garnement et ses dents d'ogresse.
J. GREEN, Journal, 1934, p. 282.
• 22. L'épisode idyllique qu'imagine Sarment (...) est prétexte à une scène quasi conjugale, scène mélancolique, acerbe, jolie...
COLETTE, La Jumelle noire, 1938, p. 176.
Rem. Syntagmes fréq. : ironie, manières, paroles acerbes. Assoc. fréq. avec moqueur, caustique, blessant, mauvais, méchant, agressif.
Prononc. — 1. Forme phon. :[]. Enq. :/ase2/. 2. Dér. et composés : acerbement, acerbité.
Étymol. ET HIST. — 1. 1192-1198 « dur, cruel, méchant, agressif » emploi fig. (en parlant de la bouche, du cœur hum.) (EVERAT, Genèse, Bibl. nat., ms. 12456, f° 13 r° ds GDF. Compl. : Mult ameres et mult acerbes); début XIIIe s., GAUTIER DE COINCI, De la bonne empereris, éd. Erik V. Kraemer, 82, 8 : Salemons dist en proverbes Qu'ameres bouches et acerbes Les pluseurs guilent et deçoivent Et par elles maint mal reçoivent; 1525, J. BOUCHET, Epistres morales du Traverseur, II, 1, 7 ds HUG. : Se garde bien un Roy d'estre superbe, Fier, arrogant, et d'avoir cueur acerbe); 2. 1572 « aigre, piquant (de fruits) » sens propre (JEAN LIEBAULT, Maison rustique, III, 47 ds DG :fruits austeres et acerbes).
Empr. au lat. acerbus. 2 dep. Caton (Agr., 65, 1 olea ds TLL s.v. acerbe I, 367, 69), (cf. PLINE, Nat., 16, 105, ibid., 367, 71 : bacas acerbas et ingustabiles). 1 dep. L. Accius (Tragoediarum fragmenta, 201 ds TLL s.v. acerbus, I, 370, 47 : illius acerbum cor contundam et comprimam).
STAT. — Fréq. abs. litt. :76.
BBG. — BAR 1960. — BÉNAC 1956. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — MILLEPIERRES (F.). Promenade philologique parmi les arbres. Vie Lang. 1969, n° 204, p. 124. — NYSTEN 1814-20.
acerbe [asɛʀb] adj.
ÉTYM. 1195, sens 2.; lat. acerbus.
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1 (1572). Didact. Aigre et âpre. ⇒ Acide, mordicant (vieilli), vert. || Des fruits verts acerbes. || Une saveur, un goût acerbe.
♦ Littér. Qui provoque une sensation trop forte. || Des formes, des tons acerbes.
1 Tu n'es que venin perfide et poison acerbe.
France, Thaïs, II, p. 202.
2 Fig. et cour. Qui cherche à blesser; qui critique avec méchanceté. || Une personne acerbe. ⇒ Acrimonieux, agressif, blessant, caustique, sarcastique. || Un langage, un ton acerbe. ⇒ Incisif, mordant. || Répondre d'une manière acerbe. || Formuler des critiques acerbes. ⇒ Acéré, virulent.
2 Martial en appela aux mânes de sa défunte mère (…) Acerbe, Félix exhorta l'un des joueurs à prendre une chambre à l'hôtel avec son adversaire (…)
Jean-Louis Curtis, le Roseau pensant, p. 18.
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CONTR. Doux, suave. — Agréable, amène, bienveillant.
DÉR. Acerbité.
Encyclopédie Universelle. 2012.