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THRILLER
THRILLER

THRILLER

L’étymologie du terme (en anglais «qui donne des frissons») est responsable de son extension et, partant, de la constitution d’une espèce de catégorie aux contours très imprécis: est souvent baptisé thriller tout roman, pièce ou film qui, pour toucher lecteurs ou spectateurs, s’attache avant tout à déclencher en eux des émotions ou sensations fortes aussi nombreuses et intenses que possible. L’étiquette finit ainsi par pouvoir tout recouvrir, alors qu’historiquement le thriller se définit en se démarquant.

Le thriller est, à l’origine, un récit policier qui s’écarte radicalement du traditionnel roman à énigme. Celui-ci repose sur l’élucidation d’un crime mystérieux par un héros, généralement un amateur de génie qui, pour démasquer l’assassin, n’utilise que les ressources de son intelligence; le genre commandant, par ailleurs, que le lecteur soit mis en possession de toutes les données qui lui permettront de trouver seul la solution du crime par l’exercice de ses facultés logiques. Un grand ancêtre: Edgar Allan Poe et son héros Dupin; de nombreux disciples, parmi lesquels, en dépit de quelques entorses à la stricte orthodoxie, John Dickson Carr, Rex Stout et Agatha Christie, créatrice du célèbre Hercule Poirot.

De cet exercice mental rigoureusement codifié, le thriller ne garde que le recours nécessaire au suspense et s’oriente vers des voies tout à fait différentes. Il faut dire qu’il apparaît aux États-Unis peu après la Première Guerre mondiale et que son émergence coïncide avec la prohibition, qui elle-même engendre l’illégalité collective, le gangstérisme organisé et le développement de rackets en tout genre. Le thriller est d’emblée marqué par les conditions de sa naissance et reflète la violence et le crime, particulièrement en milieu urbain. Alors que le roman à énigme part d’un crime mystérieux, souvent commis dans la bonne société et résolu par un brillant dilettante, dans le thriller les assassinats sont volontiers multipliés: près d’une trentaine dans La Moisson rouge (Red Harvest , 1929) de Dashiell Hammett. Ces crimes ne sont pas nécessairement mystérieux, ils ont plutôt pour cadre les bas-fonds de la société, et le héros est généralement un enquêteur professionnel, la plupart du temps privé.

Le ressort principal du thriller, c’est l’action. Le héros réfléchit très peu, il agit. Ce n’est pas que le thriller soit dépourvu de psychologie, mais il rejette l’analyse psychologique et se situe délibérément dans le béhaviorisme, d’où une accélération du rythme ou du tempo, dont l’importance est primordiale.

Dans un monde violent et irrationnel, le héros doit avant tout compter sur ses muscles, son courage et son adresse. Cela ne le rend pas nécessairement uniforme, comme l’attestent les différences entre le Spade ambigu de Dashiell Hammett, l’attachant (ou irritant) Marlowe de Raymond Chandler, et la brute sadique que représente le Hammer de Mickey Spillane; mais la diversité est surtout d’ordre éthique et tient en fait au code moral du héros.

À de rares exceptions près, le thriller est d’ailleurs, comme le roman à énigme classique, un genre, en définitive, très «moral». Sa langue (rude, brutale, argotique) et son style (qui abandonne les fleurs pour le coup de poing) peuvent renforcer l’impression qu’aucune similitude ne subsiste entre ces deux formes de récit. Il en existe au moins une: le châtiment, soit par un justicier individuel, soit par la voie des instances légales, de ceux qui transgressent les interdits sociaux. Le thriller véhicule une idéologie du maintien de l’ordre; quant à sa variante un peu dégradée, le roman d’espionnage, elle tend à affirmer la supériorité d’un ordre sur un autre et donc à justifier tous les moyens permettant son triomphe.

thriller [ srilɶr ] n. m.
• 1927; mot angl. (en angl. amér. thriller-diller), de to thrill « faire frissonner »
Anglic. Film (policier, fantastique), roman, pièce qui procure des sensations fortes. « un thriller comme on dit en Amérique, avec une énigme, du sadisme, un suspense savamment entretenu » (F. Dard).

thriller nom masculin (anglais thriller, de to thrill, faire tressaillir) Film ou roman (policier ou d'épouvante) à suspense, qui procure des sensations fortes.

thriller
n. m. (Anglicisme) Film, roman dont l'intrigue (policière, fantastique) vise à faire frémir.

⇒THRILLER, subst. masc.
Roman, film (fantastique ou policier) à suspense, conçu pour provoquer des émotions fortes chez le lecteur, le spectateur. Le livre de John Toland est aussi un roman policier, dans la meilleure tradition des « thrillers » d'outre-Atlantique (L'Express, 30 mai 1966, p. 118, col. 2). Vous aimez le suspense, les coulisses, les hommes de l'ombre, l'espionnage vous fascine. Espions et journalistes bien informés vous feront passer des nuits aussi blanches que les meilleurs des thrillers (Télérama, 17 sept. 1986, p. 51, col. 1).
Prononc. et Orth.:[], []. Plur. des thrillers. Étymol. et Hist. 1927 « livre qui donne le frisson » cité comme terme angl. (L. CAZANIAN, Ce qu'il faut connaître de l'âme anglaise, 101 ds HÖFLER Anglic. 1982); 1937 « id. » d'excellents « thrillers » (F. FOSCA, Histoire technique du roman policier, 112, ibid.); 1946 « id. » (L'Écran fr., 27 mars, n° 39, p. 13); 1947 « film qui donne le frisson » (L. H. EISNER, in La Revue du cin., série nouv., t. 1, 1er févr., n° 5, p. 10). Empr. à l'angl. thriller « œuvre à sensations, qui émeut ou donne le frisson » (dep. 1889 ds NED, v. aussi NED Suppl.2) dér. de to thrill au sens de « provoquer une sensation de frisson, émouvoir, faire frémir ». Bbg. HUMBLEY t. 2 1974, p. 758.

thriller [tʀilɛʀ; sʀilœʀ] n. m.
ÉTYM. 1927 (roman, récit), 1946 (film); mot angl. (en angl. des États-Unis thriller-diller), de to thrill « faire frissonner ».
Anglic. Film (policier, fantastique), roman, pièce qui procure des sensations fortes. || « C'est un excellent “thriller” qui a la dimension de la vérité, puisqu'il s'agit d'un fait divers retentissant » (l'Express, 26 mars 1973, p. 140). || Un thriller politique.
0 Fritz Lang recourra souvent à ce même facteur dramatique (le jeu des ombres), et il en tire ses meilleurs effets dans Les Espions, mélodrame à mi-chemin d'un fantastique dû à de savants éclairages et du réalisme du thriller.
L. H. Eisner, in la Revue du cinéma, 1er févr. 1947, p. 10.

Encyclopédie Universelle. 2012.