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SAVOIR-FAIRE
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SAVOIR-FAIRE

Naturel à l’époque préindustrielle, voire dans la société industrielle, le savoir-faire a pris des proportions spécifiques dès lors que l’ère postindustrielle a placé le savoir au premier plan de ses préoccupations. En tertiairisant de façon accélérée l’activité humaine, les économies contemporaines des pays industrialisés ont suscité une régression considérable du savoir-faire manuel. La prise de conscience progressive de cet affaiblissement a conduit à des efforts importants de redressement de toutes parts.

La mécanisation, la standardisation et le travail à la chaîne ont en effet réduit sensiblement l’intervention musculaire dans les processus de production et de transformation des matières premières, de fabrication d’objets de toute nature et de fourniture de services de tout genre. L’évolution vers l’automatisation des tâches a renforcé cette propension à faire fi de l’effort dit non intellectuel. Les formations théoriques se gonflèrent rapidement; les compétences furent mesurées en fonction du degré de savoir et de maîtrise des sciences appliquées ou applicables. Le déclin des techniques traditionnelles et des entreprises à main-d’œuvre s’accompagna du licenciement, de la mise à la retraite ou du déclassement d’un nombre important d’ouvriers qualifiés, d’artisans adroits. Dans la mesure où ceux-ci furent repris par de nouvelles unités industrielles, ils se retrouvèrent embauchés en tant que simple personnel spécialisé, voire comme manœuvres. De nombreuses enquêtes ont révélé entre-temps que l’interruption du savoir-faire manuel, même professionnel, provoquait la disparition pure et simple de celui-ci, dans la plupart des cas en un laps de temps inférieur à sept ou huit ans. Comme les métiers qualifiés se transmettaient très souvent de génération en génération, la famille d’artisans ou d’ouvriers professionnels était à même d’accumuler une expérience séculaire, enrichie d’une génération à l’autre. Le monde du travail était ainsi doté d’un extraordinaire capital en savoir-faire manuel qui disparut lors des ruptures inhérentes aux mutations technologiques entraînées par le passage à la mécanisation, puis aux automatismes. Le monde industriel a perdu de la sorte des centaines de milliers d’aptitudes individuelles au travail manuel qualifié, sans compter la non-insertion de la nouvelle génération.

Le seul fait du transfert de l’apprentissage à l’atelier, auprès d’un maître des métiers, vers un apprentissage scolaire de plus en plus théorique, en dépit de l’intérêt du principe, a diminué l’engagement des jeunes en faveur d’une profession manuelle et affaibli l’aptitude naturelle au travail manuel qualifié considéré, par la force des choses et par la pression sociale, comme moins valorisant que les tâches tertiaires. Ce fut une autre façon d’opposer les cols blancs aux cols bleus. L’école, les moyens de communication sociale, l’opinion publique renchérissaient et continuèrent à creuser en fait le fossé entre la considération accordée aux emplois et formations tertiaires et la compassion avec laquelle on traitait les activités manuelles.

Les crises qui ont secoué notamment les bassins miniers et les régions de métallurgie différenciée, de travail du bois, des peaux, du cuir ou du textile, ont accéléré par l’intensité et la rapidité des secousses subies la disparition d’un potentiel très important de savoir-faire manuel. Plus ces perturbations furent proches de l’époque présente, plus elles eurent d’effets pernicieux, parce que le réservoir collectif de savoir-faire s’est pratiquement épuisé avec toutes les turbulences enregistrées depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La raréfaction des ressources en compétence manuelle a conduit à un amenuisement préjudiciable surtout aux petites et moyennes entreprises de la nouvelle génération qui, en dépit et à cause de leurs technologies fort avancées, devaient avoir recours à des effectifs en nombre limité, hautement compétents en savoir et savoir-faire.

La brèche malheureusement ouverte dans les États industrialisés d’Occident fut évitée au Japon et dans ce que l’on est convenu d’appeler les nouveaux pays industrialisés. La transition entre l’ère préindustrielle souvent encore très proche, l’époque industrielle et la période postindustrielle y a modifié de nombreuses orientations. À chaque étape de l’évolution les responsables ont su intégrer les acquis, conscients de l’énorme richesse que constituait pour le monde du travail et la productivité la symbiose étroite entre le savoir et le savoir-faire manuel ou intellectuel. La rationalité extrême-orientale différait et diffère encore ainsi fondamentalement de celle de l’Europe ou de l’Amérique du Nord: elle s’appuie sur une éthique, une conception culturelle de l’entreprise, qui ne sous-estime ni l’adhésion idéologique au travail, ni le patriotisme, ni la notion de valorisation individuelle et collective par le labeur bien fait. L’impulsion donnée par le Pacifique devait vite se répercuter sur le reste du monde où désormais la compétition est partout sous-tendue par une articulation étroite entre le savoir et le savoir-faire, ce dernier bénéficiant d’une promotion insoupçonnée il y a peu de temps encore. Le savoir-faire tertiaire s’est ajouté au savoir-faire manuel. Le transfert du savoir en savoir-faire, dénommé transfert technologique, constitue une préoccupation constante dans la conquête des débouchés, voire dans l’espionnage économique. Le binôme savoir/savoir-faire consacre la réhabilitation et la valeur intrinsèque de l’habileté.

savoir-faire [ savwarfɛr ] n. m. inv.
• 1671; de 1. savoir et 1. faire
1Habileté à faire réussir ce qu'on entreprend, à résoudre les problèmes pratiques; compétence, expérience dans l'exercice d'une activité artistique ou intellectuelle. 2. adresse, art, dextérité. « Pour gagner du bien, le savoir-faire vaut mieux que le savoir » (Beaumarchais).
2(trad. de l'angl. know how) Dr. comm. Ensemble des connaissances, expériences et techniques accumulées par un individu ou une entreprise. Savoir-faire industriel, commercial. Exploiter, valoriser un savoir-faire. « la diffusion des savoirs et des savoir-faire » (M. Blanc).

savoir-faire nom masculin invariable Compétence acquise par l'expérience dans les problèmes pratiques, dans l'exercice d'un métier. Synonyme de know-how. ● savoir-faire (citations) nom masculin invariable Pierre Augustin Caron de Beaumarchais Paris 1732-Paris 1799 Pour gagner du bien, le savoir-faire vaut mieux que le savoir. Le Mariage de Figaro, V, 3 Charles Perrault Paris 1628-Paris 1703 Aux jeunes gens pour l'ordinaire L'industrie et le savoir-faire Valent mieux que des biens acquis. Le Chat botté ou le Maître Chat, Moralité l'adresse ● savoir-faire (difficultés) nom masculin invariable Orthographe Avec un trait d'union et invariable. Emploi L'emploi au pluriel, bien que rare, n'est pas fautif : ces artisans ont développé des savoir-faire spécifiques. ● savoir-faire (synonymes) nom masculin invariable Compétence acquise par l'expérience dans les problèmes pratiques, dans l'exercice...
Synonymes :
- adresse
- chic (familier)
- compétence
- dextérité
- ingéniosité
- maestria
- maîtrise
- talent
- tour de main (familier)
- virtuosité
Synonymes :
- know-how

savoir-faire
n. m. inv. Habileté à mettre en oeuvre son expérience et ses connaissances; compétence, adresse.

⇒SAVOIR-FAIRE, subst. masc. inv.
A. — 1. Pratique aisée d'un art, d'une discipline, d'une profession, d'une activité suivie; habileté manuelle et/ou intellectuelle acquise par l'expérience, par l'apprentissage, dans un domaine déterminé. Synon. adresse3, art, compétence, expérience, maîtrise, pratique, savoir2, technique, tour de main (v. ce mot 1re Section I H 1 d ). Grand savoir-faire; avoir du savoir-faire; montrer son savoir-faire. Thuillier (...) apprit à valser et à danser au point d'être cité (...) Il résulta de ces petits savoir-faire cette apparence de succès qui trompe la jeunesse et l'étourdit sur l'avenir (BALZAC, Pts bourg., 1850, p. 15).
2. DR. COMM. ,,Connaissances dont l'objet concerne la fabrication des produits, la commercialisation des produits ou services ainsi que le financement des entreprises qui s'y consacrent`` (Jur. 1985).
B. — Qualité d'une personne qui manifeste de l'habileté à réussir ce qu'elle entreprend, dans divers domaines, surtout pratiques: affaires, relations, vie sociale. Synon. art, adresse (v. adresse3), astuce, dextérité, diplomatie, finesse, ingéniosité. Ah! Madame de Chasteller répond! aurait dit le jeune homme de Paris un peu plus vulgairement élevé que Leuwen (...). Voilà le premier pas. Le reste est une affaire de forme; ce sera un mois ou deux suivant que j'aurai plus ou moins de savoir-faire (STENDHAL, L. Leuwen, t. 2, 1835, p. 25). On donne les rassortiments à faire aux novices, parce qu'on est sûr que la clientèle ne sortira pas sans racheter: le savoir-faire est donc inutile avec elle (AVENEL, Calicots, 1866, p. 52).
Prononc. et Orth.:[]. Ac. 1694, 1718: sçavoir-faire; dep. 1740: savoir-faire. Étymol. et Hist. 1671 (BOUHOURS, Entretiens d'Ariste et d'Eugène, 2, Bibl. de Cluny, p. 60). Comp. de savoir1 et de faire. Fréq. abs. littér.:156.

savoir-faire [savwaʀfɛʀ] n. m. invar.
ÉTYM. 1671; de 1. savoir, et faire.
1 Habileté à faire réussir ce qu'on entreprend, à résoudre les problèmes pratiques; compétence, expérience dans l'exercice d'une activité artistique ou intellectuelle. Adresse (cit. 1), art, chic (infra cit. 2), doigté, entregent, habileté (cit. 7), industrie, ruse, tact (→ Énorme, cit. 12, La Bruyère; inaugurer, cit. 5; jeu, cit. 37). || Le savoir-faire et le savoir. || Des savoir-faire.
1 (…) je commençais même à comprendre que, pour gagner du bien, le savoir-faire vaut mieux que le savoir.
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, V, 3.
2 (…) je me mis donc de bon cœur à montrer mon savoir-faire aux maîtres ouvriers, qui jugèrent du premier abord que j'étais propre aux opérations les plus difficiles et les plus compliquées de la profession.
Charles Nodier, Contes, « Fée aux miettes », XIII.
2 (Trad. de l'angl. know how). Dr. comm. Ensemble des connaissances, expériences et techniques accumulées par une personne ou une société, que l'on peut mettre à la disposition d'autrui, à titre onéreux ou gratuit.

Encyclopédie Universelle. 2012.