SACERDOCE
L’histoire des religions présente l’exercice du sacerdoce et la figure du prêtre sous les traits les plus variés, parfois les plus contrastés. Mais, pour que des spécialistes du sacré apparaissent dans une société et s’y maintiennent comme corps, il faut toujours qu’une répartition de la puissance ait été faite. Il faut, en particulier, que deux conditions se trouvent réunies: premièrement, que le dépositaire de l’autorité (chef politique ou chef de famille) ait abandonné une partie de ses prérogatives; en second lieu, qu’il n’y ait plus confusion entre magie et religion, entre numineux de transgression et numineux de respect, ce dernier méritant seul d’être considéré comme sacré. C’est pourquoi on déclare communément que la fonction du prêtre hérite, pour une part, de la fonction royale et se distingue de la fonction du sorcier.
L’histoire des religions montre également que cette distribution des tâches crée quelques problèmes: collusions ou conflits, tensions diverses entre royauté et clergé, ligne de partage fluctuante entre procédés magiques et procédés religieux, divergences sur le statut et le rôle du prêtre qui peut revêtir l’un des attributs suivants ou les rassembler tous en sa personne: fonctionnaire cultuel, technicien du rite (spécialement du rite sacrificiel), président ou délégué de la communauté, serviteur et témoin des forces transcendantes, médiateur de grâces, inspiré, thaumaturge, prophète, docteur.
Mais il est donné à notre époque, au moins dans notre portion d’Occident, en raison d’une crise religieuse qui secoue le christianisme lui-même, de modifier en profondeur l’image et la condition du prêtre. Dans certaines régions de pratique traditionnelle, le prêtre catholique avait encore le visage du curé de Bernanos. À présent, le sacerdoce d’obédience romaine est en pleine mutation. Socialement, il n’a plus la même marque; idéologiquement, voire théologiquement, il ne répond plus au même modèle. La Réforme, au XVIe siècle, avait souhaité le «dédramatiser», le «déhiérarchiser». L’évolution actuelle des mœurs permet d’autres audaces. Les partisans d’un sacerdoce sans cléricature suppriment le prêtre de caste, récusent le prêtre porteur de puissance, minimisent le prêtre administrateur de sacrements; ils rêvent d’un prêtre qui aurait le style de vie et le genre d’occupation de son entourage, la même liberté et les mêmes charges que ses fidèles, qui n’aurait en propre qu’une volonté d’engagement plus poussée. Ce projet est en gestation. Mais s’il est encore vague, la sociologie des religions aurait tort de le croire sans portée.
Quand des institutions séculaires sont ébranlées, c’est un signe que la société tout entière repense son organisation, ses principes et ses fins.
1. Les spécialistes du sacré
Parmi les représentants ou spécialistes du sacré que l’on rencontre en histoire des religions, on peut distinguer les personnages suivants: le fondateur, le prophète, le mystique, le réformateur, le prêtre et le chamane. Le spécialiste de la religion est quelqu’un qui, en vertu d’une vocation spéciale ou d’un mérite personnel, est habilité plus qu’aucun membre de sa communauté à remplir certaines tâches religieuses. Le fondateur détermine la nature et la pratique de la religion qu’il instaure et il exerce une influence décisive sur les phases de développement de cette dernière. Le prophète proclame ou interprète un message divin qui lui est livré sous forme de visions ou de «voix»; il a pour caractéristique d’avoir été mandaté pour transmettre un tel message. En prônant le retour aux origines, le réformateur est un innovateur qui reprend les traditions existantes dans le sens d’une plus grande authenticité de la doctrine et de la pratique. Le mystique fait l’expérience de l’union avec l’Être suprême ou de la solitude en sa présence selon un mode qui transcende l’espace, le temps et le changement; vivant dans un état pour ainsi dire inconditionnel et éternel de paix, de joie, d’immortalité, il travaille à approfondir et à accomplir en lui-même les valeurs religieuses.
Le prêtre est celui dont la fonction officielle consiste à établir ou à maintenir le contact entre le sacré et la communauté; à ce titre, il est en antagonisme à la fois avec le prophète et avec le mystique. En tant que chef religieux, il se situe à l’opposé des laïcs (du grec laos , peuple); en tant que représentant de la communauté, il est habilité par priorité à assurer et à contrôler le culte public en général et le sacrifice en particulier. Par son statut de médiateur, il assume un rôle central en matière de rite et défend la fidélité à la tradition religieuse. Le prêtre peut être aussi un prophète ou un voyant, comme c’était le cas chez les anciens Arabes et chez les Hébreux: c’est le même mot qui désigne dans la langue hébraïque le prêtre du sacrifice (kôh 勒n ) et en arabe le prêtre qui rend des oracles ou le voyant (kah 稜n ).
Parmi les spécialistes du sacré, on peut faire une nouvelle différenciation, plus fine encore, en distinguant le prêtre du chamane. Celui-ci se rencontre plus fréquemment dans les sociétés humaines dont la technologie demeure rudimentaire, tandis que le sacerdoce ne s’est développé que dans les groupes humains relevant d’une structure sociale plus complexe. Le chamane reçoit ses pouvoirs directement des dieux ou des esprits et acquiert son statut à travers une communication personnelle avec le surnaturel; le prêtre est un praticien du cérémonial, spécialement formé pour l’accomplissement des rites prescrits (Lowie).
Même lorsque son action revêt une forme ritualisée, le chamane ne se réfère pas à un rituel, mais à sa propre aptitude à entrer en contact avec le surnaturel par le moyen d’un rite ou non; le prêtre n’a pas recours aux esprits, et sa relation avec les puissances surnaturelles dépend d’un rituel et passe par cette médiation; aussi la connaissance de celui-là est-elle pour lui essentielle, s’agissant du mode établi et privilégié qui permet d’entrer en rapport avec le surnaturel. Enfin, tandis que le prêtre tient son pouvoir sacré de la vertu même de sa consécration, le chamane ou le prophète est en général «possédé par le divin» d’une manière seulement sporadique.
2. Le sacerdoce dans les anciennes religions
La religion assyro-babylonienne
Dans les temps les plus anciens du monde assyro-babylonien, le roi était le prêtre suprême qui assurait le lien entre les dieux et les hommes. Par la suite, la monarchie ayant à assumer d’autres charges, une séparation s’esquissa entre le pouvoir séculier et le pouvoir rituel, séparation qui conféra au grand prêtre du temple important de Marduk un rôle politique étendu.
Les prêtres étaient répartis en trente ordres hiérarchisés. Bien que leur charge fût assez souvent héréditaire, ils devaient être exempts de défauts physiques, versés dans la connaissance de la langue liturgique de Sumer, capables d’écrire et régulièrement initiés. Le groupe sacerdotal jouissant du plus haut prestige était celui des devins (Baru ), qui lisaient l’avenir dans les astres, les rêves, les présages, les entrailles d’animaux immolés. Les exorcistes avaient pour fonction de faire disparaître les impuretés rituelles, de guérir les malades, de chasser les démons. Signalons, outre l’existence d’un autre groupe intéressant, celui des prêtres-chantres, le fait que certains prêtres d’Ishtar étaient castrés. Les prêtresses étaient réparties en vingt ordres différents. À Ur, la grande prêtresse de Sîn, le dieu lunaire, était une princesse et était regardée comme étant l’épouse de celui-ci. Les prêtresses étaient astreintes à la chasteté et vivaient cloîtrées. Toutefois, quelques temples abritaient un groupe de hiérodules qui se livraient à la prostitution sacrée.
La religion celtique
Les Celtes avaient pour prêtres privilégiés les druides («ceux qui connaissent en profondeur»). Ceux-ci n’accédaient pas à la charge sacerdotale par voie héréditaire, mais seulement au prix d’une instruction, d’une formation et après un temps de noviciat. Leur principale fonction était d’offrir des sacrifices, et quiconque était par eux exclu de ces derniers se trouvait frappé d’ostracisme social et économique. Exemptés du service militaire et du paiement des impôts, ils étaient si hautement respectés que leurs décisions mettaient fin aux disputes et aux conflits. Les chefs religieux s’intéressaient aussi aux problèmes philosophiques et transmettaient leur savoir à leurs disciples.
La religion égyptienne
Aux époques les plus reculées de l’histoire égyptienne, le prince d’un district jouait en même temps le rôle de grand prêtre du dieu local. Le pharaon était le prêtre suprême du pays. De hauts personnages remplissaient des offices sacerdotaux, et des femmes servaient comme prêtresses des déesses Neith et Hathor. Mais, avec le temps, le rituel devint si compliqué que le sacerdoce finit par être l’apanage d’un groupe spécialement organisé. Le roi y tenait la place du prêtre principal; représentant à la fois le sacrificateur et le dieu – toutes les offrandes, en effet, venaient de lui et étaient présentées par lui –, il en vint à être le médiateur entre le peuple et le dieu. Les prêtres occupaient souvent des postes officiels et jouèrent un rôle important dans la politique du nouveau royaume.
La religion grecque
Il n’y avait pas en Grèce de sacerdoce hiérarchiquement organisé. Toutefois, des fonctionnaires de l’État, attachés à de nombreux temples, tenaient lieu de prêtres et accomplissaient les rites sacrés. Voyants et devins étaient hautement considérés. Un goût prononcé pour la divination poussa les Grecs à consulter fréquemment les oracles et à leur attacher une particulière importance. Dans de nombreux temples, on pouvait bénéficier de prophéties de toutes sortes et de conseils intéressant aussi bien l’action politique que la vie privée. À Dodone, Zeus faisait connaître sa volonté à travers le bruissement des chênes des bois sacrés; à Delphes, la prêtresse d’Apollon, la pythie, qui mâchait des feuilles de laurier, juchée sur un trépied au-dessus d’une crevasse, émettait, sous l’action des émanations vaporeuses qui s’échappaient de celle-ci, des paroles que les prêtres interprétaient et qui étaient par la suite mises en vers. Le prêtre le plus révéré de l’Attique était le grand prêtre d’Éleusis, choisi dans la famille sacerdotale des Eumolpides. Lors de son élection, il prenait le nom de hiérophante et jetait symboliquement son nom ancien dans la mer. Prêtre à vie, il révélait aux initiés les mystères et devait, pour cette raison, avoir une voix prenante.
La religion romaine
Dans le culte domestique, le paterfamilias était, chez les Romains, le responsable attitré de tous les actes liturgiques. Au niveau de l’État lui correspondait le roi (rex ). Après l’abolition de la monarchie, celui-ci fut remplacé pour les fonctions sacrées par le roi du sacrifice (rex sacrificulus ), dont la charge fut, par la suite, reprise par un prêtre de Janus. Pour le culte de Vesta et plus tard pour celui de Junon, la prêtresse était la reine elle-même. Lorsque le rituel se compliqua et que le nombre des dieux à honorer augmenta, les fonctions sacerdotales du paterfamilias furent confiées à des prêtres professionnels. De même, le roi du sacrifice abandonna une grande partie de ses fonctions religieuses à d’autres prêtres. Ainsi les flamines («ceux qui soufflent sur le feu sacré») étaient au service de Jupiter, de Mars et de Quirinus et venaient après le roi du sacrifice dans la hiérarchie sacerdotale; celle-ci correspondait à l’ordre selon lequel étaient rangés les dieux: Janus, Jupiter, Mars, Quirinus. Ensuite apparut le pontifex maximus qui, considéré comme le conjoint de Vesta, devint, avec le temps, le grand prêtre chargé non seulement de superviser l’ensemble de l’organisation du culte, mais aussi de nommer le roi du sacrifice. Les arvales («prêtres des dieux des champs»), les luperques («prêtres des faunes») et les saliens («sauteurs», «danseurs», qui se livraient à des danses guerrières) constituaient des confréries culturelles probablement formées, à l’origine, d’individus appartenant à des familles déterminées. Ces confréries se manifestaient à l’occasion de fêtes particulières.
Parmi les prêtresses, les vierges de Vesta vivaient en recluses comme des moniales et se vouaient à la parfaite exécution des rites sacrés. Les vestales qui avaient manqué à leur vœu de chasteté étaient brûlées vives.
Les Incas du Pérou
Le sacerdoce chez les Incas constituait une hiérarchie complexe, ayant à sa tête l’empereur lui-même, lequel était regardé comme un personnage si divin que seule sa sœur était assez sainte pour être son épouse. Au-dessous de l’empereur, les postes clés étaient occupés par des membres de la famille royale inca. Les temples les plus importants possédaient un corps de devins, de sacrificateurs, de surveillants et d’autres employés du culte. Dans les temples du Soleil, un groupe de femmes, les vierges du Soleil, qui portaient des vêtements sacrés, préparaient la chicha (alcool de maïs ). Les temples incas étaient destinés à abriter prêtres et prêtresses, ainsi que les objets liturgiques, mais ne servaient pas au culte, les cérémonies publiques se tenant à l’extérieur; des milliers de fidèles y prenaient part, dansant, chantant, buvant de la chicha ou s’adonnant à d’autres rites.
3. Le prêtre chez les peuples sans écriture
Les religions africaines
Pour les Abaluyia du Kavirondo (Kenya), l’homme dont la femme est atteinte de stérilité, dont le bétail périt, dont les récoltes sont dévastées par les tempêtes et dont le caractère est en contradiction avec les dispositions des représentants du sacré est frappé d’interdit et ne peut se voir confier la charge sacerdotale (omusalisi ). Le fait d’être avancé en âge ne suffit donc pas à conférer l’autorité et un rang élevé. Ce statut, en effet, est défini par l’idée qu’il implique des pouvoirs supérieurs.
Chez les Shilluk du haut Nil, les prêtres des temples du premier roi shilluk, Nyikang, sont pris parmi les serviteurs du roi: épouses des rois précédents, descendants des familiers du roi, personnes possédées par l’esprit de Nyikang. Les sacrifices offerts dans ces temples sont considérés comme partie du culte de Nyikang et de la maison royale.
Les Achanti du Gh na croient que chacun a directement accès à l’Être suprême. Selon une de leurs anciennes maximes, aucun chemin d’un homme ne croise celui d’un autre (c’est-à-dire que chacun a son chemin direct pour atteindre l’Être suprême); personne ne montre à un enfant l’Être suprême (il le connaît d’instinct); personne ne montre à un enfant le ciel (celui-ci est la demeure de l’Être suprême). Aussi est-il intéressant de remarquer que les Achanti n’ont jamais eu de prêtres spécialisés dans le culte de l’Être suprême, bien que chaque dieu ( face=F3210 履bosom ) en ait un. Tout le monde pourrait présenter son offrande de nourriture ou de vin à l’Être suprême, mais, comme celui-ci est lui-même trop éloigné pour qu’on puisse l’approcher, on a recours à des divinités intermédiaires. Le prêtre prépare pour l’esprit de son dieu une image en bois ou confectionne un rempart de terre mêlée de sang; il place cela dans un bassin, lui-même déposé dans un temple; le dieu entre quand il le veut ou sur l’invocation du prêtre. Plus d’un prêtre achanti déclarerait qu’il a été choisi directement par le prêtre du dieu qu’il sert; il peut dire qu’il a découvert dans la forêt une pierre brillante renfermant des pouvoirs particuliers et représentant la demeure temporaire de l’esprit; ainsi est-il devenu possédé par le prêtre d’un dieu. Dans un temple contenant une telle pierre, le novice était initié aux secrets de la prêtrise, de sorte qu’il pouvait comprendre et interpréter la volonté du dieu dont il était possédé. Parfois, l’esprit du dieu s’exprime en modifiant la personnalité du prêtre, lequel devient un véritable médium qui se comporte et parle comme poussé par l’esprit; un interprète expérimenté donne alors la signification des émissions de voix et des gestes du prêtre. D’autres fois, celui-ci peut lui-même interpréter la volonté du dieu, par exemple, en étirant des lanières de cuir, en lançant des coquillages ou des bâtons. On recourt aux dieux parce qu’ils sont censés procurer la santé, une postérité, la réussite dans les affaires, la protection contre la malchance ou contre les charmes de sorcellerie.
Chez les Fon du Dahomey, la formation religieuse et l’initiation aux mythes et aux rites étaient assurées directement par les prêtres, dans le cadre de communautés nettement structurées. Ceux-là, ainsi que les néophytes qu’ils instruisaient, se consacraient spécialement au service d’un dieu ou d’un groupe de dieux (vaudou).
Le rôle premier des médiums est de mettre les humains en relation avec les trépassés et avec les esprits. Ils transmettent des messages venant de l’au-delà ou une connaissance particulière de choses qui autrement seraient difficiles ou impossibles à connaître. Les médiums permettront par exemple à quelqu’un de trouver un objet perdu ou de découvrir celui qui lui a dérobé ses biens. Ils agissent ainsi uniquement quand ils sont «possédés» par un esprit; dans les autres circonstances, ils se comportent comme des hommes ordinaires. De leur côté, les esprits ou les disparus cherchent à communiquer avec les médiums et à entrer en eux. Parmi les nombreuses sortes de médiums, il en est une qui est liée aux prêtres et aux temples et qu’on rencontre dans des sociétés telles que les Achanti, les Baganda, les Ewe, les Fon, les Yoruba et beaucoup d’autres groupes, spécialement en Afrique occidentale. Nombre de prêtres dahoméens ne sont jamais eux-mêmes sujets à des phénomènes de possession, mais ils disposent de médiums qui sont attachés à leurs temples et qui entrent en transe à volonté. D’ordinaire, le phénomène de possession se déclenche chez un individu qui assiste à une cérémonie religieuse publique; au cours de la danse et au milieu des dévots inspirés, celui-ci devient une personne nouvelle qui est prise de convulsions ou saute à l’intérieur du cercle en dansant d’une manière extravagante. Les prêtres qui président la cérémonie interprètent l’événement comme un appel divin et jettent leur dévolu sur le sujet qu’ils vont commencer à former en vue du service d’un dieu et qui restera investi de cette charge pendant deux ans ou plus, avec l’obligation stricte d’observer la chasteté. À la fin de la période de formation, le disciple s’adresse à la divinité en ces termes: «Aujourd’hui je contracte mariage avec toi», à la suite de quoi il peut, lorsqu’il est déjà marié, soit résilier, soit reprendre sa condition et ses devoirs conjugaux. Chez les Ga sont ainsi formés au rôle de médiums des sujets désignés par les prêtres eux-mêmes ou par les anciens du village. Si, après avoir été choisi pour cet office, l’un d’eux refuse d’y souscrire, les gens disent de lui: «La divinité ou l’esprit le trouble tellement qu’il est devenu fou.» Pendant sa formation, le candidat dort sur le plancher, insuffisamment couvert, même durant les nuits froides; il s’occupe à couper du bois, à tirer de l’eau; il s’abstient de tout commerce sexuel; il s’adonne aussi à la danse dans les moments où il est possédé.
La médiumnité est un moyen de rendre le passé contemporain en réintroduisant dans l’histoire humaine les faits et gestes de gens qui ont disparu par-delà l’horizon du présent. La mort et la résurrection ont valeur de signe quand le candidat, au moins rituellement et symboliquement, a rejeté sa personnalité ancienne et qu’il en a revêtu une ou plusieurs autres pour se vouer au service des dieux et des communautés. Durant le temps de solitude que les médiums consacrent à se former, ces personnalités nouvelles sont en gestation comme un embryon dans le sein maternel; quand elles sortent de leur réclusion, il s’agit d’une espèce de naissance.
Les Indiens d’Amérique
Chez les Indiens d’Amérique, la religion pueblo, qui est parfaitement intégrée et possède une véritable organisation sociale, a institué des cérémonies dont le but est d’abord de procurer la pluie et la fertilité et, en second lieu seulement, d’apporter la guérison. Ces cérémonies sont dirigées par des groupes sacerdotaux et des associations religieuses hautement structurés plutôt que par des ministres agissant personnellement; elles se déroulent selon un cycle annuel réglé par un calendrier liturgique et sont centrées sur la prospérité commune, les individus étant tellement subordonnés à celle-ci qu’ils semblent à peine exister.
Les Navaho n’ont ni sacerdoce ni communautés religieuses organisés; leurs cérémonies sont dirigées par des spécialistes exerçant leurs fonctions de manière individuelle, et le culte n’influe sur l’organisation sociale que très peu ou sur des points mineurs.
Compte tenu de la fréquence et de l’importance de leurs cérémonies, il est étrange de constater que les Hopi n’aient pas vraiment de sacerdoce; même ceux de leurs chefs qui sont responsables de l’accomplissement exact d’observances majeures ne peuvent guère être tenus pour des prêtres; en effet, ils ne s’occupent pas exclusivement d’exercices religieux; ils ne portent pas habituellement de costume distinctif et ils ne sont pas regardés comme étant sanctifiés ou saints. Au cours du cycle liturgique, des individus différents se succèdent pour présider au culte, chacun retournant à la vie laïque pour le reste de l’année. Toutefois, dans le système socio-politique des Hopi, le sacré et le profane sont étroitement liés; ainsi, chaque magistrat est chargé au moins d’une pratique importante; chacun des chefs des villages notamment est ipso facto le président d’une cérémonie essentielle.
4. Les grandes religions actuelles
L’hindouisme
Dans la tradition indo-iranienne, la classe sacerdotale constitue un groupe social distinct; chez les Perses et chez les Aryens védiques, on trouve en effet la même division entre prêtres, guerriers et agriculteurs. À la période du Rigveda, plusieurs prêtres officiaient dans le sacrifice: celui qui assurait l’«invocation» des dieux s’appelait hotri ; à ses côtés se tenaient l’udg tri , le prêtre qui «chante à haute voix», et l’adhvaryu , le prêtre chargé de l’action sacrée ou du sacrifice lui-même. Le Rigveda avait été composé à l’intention du hotri, tandis que le S maveda servait à l’udg tri et le Yajurveda à l’adhvaryu. Après la période védique, seul le prêtre avait le droit d’enseigner les textes sacrés; il jouissait de l’immunité vis-à-vis des châtiments corporels, pouvait recevoir des présents et bénéficier d’autres privilèges particuliers. Les trois castes supérieures avaient chacune le droit et le devoir d’étudier les textes sacrés pendant un certain nombre d’années.
Les br hmanes sont censés constituer le grand corps central autour duquel gravitent comme des satellites les autres classes ou ordres d’êtres. Non seulement ils sont revêtus de dignité divine, mais ils sont liés entre eux par les règles les plus rigoureuses, tandis que les trois autres classes des soldats, des agriculteurs et des serviteurs se trouvent affaiblies dans leur union par des réglementations également astreignantes. Les brahmanes agissaient comme conseillers des rois, détenaient une grande part de l’autorité judiciaire et de l’interprétation des lois et étaient en principe d’un rang plus élevé. En somme, la distinction des castes et la supériorité d’une classe sur l’autre sont considérées comme relevant d’une loi de nature ou d’une sorte de décret divin tout autant que la création, chez les animaux, de classes séparées par d’insurmontables différences de constitution physique.
Il incombe au brahmane, entre autres obligations, d’être le gardien de l’héritage spirituel de la race; il a pour premier devoir de se spécialiser dans les choses de l’esprit, dans les rites, dans la sagesse et de communiquer aux autres ce qu’il y a ainsi acquis. Il est l’ami, le philosophe et le guide de l’humanité. Il n’a pas à s’encombrer de biens matériels, la société veillant à ce qu’il ne soit pas dans le besoin. Chef (purohita ) de la communauté, il exerce cette fonction en vertu non de ses qualités physiques, mais d’une force spirituelle. Ses conseils sont recherchés de tous, depuis le roi jusqu’aux gens du peuple. Sérénité, maîtrise de soi, austérité, pureté, patience, droiture, connaissance, acuité d’esprit, foi, telles sont les vertus que lui reconnaît la Bhagavad G 稜t (XVIII, 41-44).
L’«acte» propre du brahmane est en réalité le sacrifice et l’étude des Véda. Les brahmanes sont les gardiens de ces derniers et ils en enseignent la doctrine aux autres classes des «deux fois nés» mais non aux ご dra (serviteurs). Leurs devoirs sont purement religieux: obligation d’étudier et d’enseigner les Véda et les sm リitis , d’offrir le sacrifice pour eux-mêmes et pour d’autres; ils doivent donc en être récompensés et l’une des actions les plus hautement méritoires d’un kshatriya (membre de la deuxième classe, guerrière et princière) ou d’un vaishya (agriculteur ou commerçant) consiste à faire des présents aux brahmanes.
Le mot brahman désigne aussi une personne qui est en rapport avec le sacré et le personnifie. L’homme est coextensif au Tout, du fait qu’il participe au Brahman. En ce dernier se rencontrent le macrocosme et le microcosme, mais leur union n’est pleinement accomplie que dans le brahmane qui est dépositaire du Brahman, le pouvoir sacré qui garde le monde dans l’être: «Un brahmane [prêtre], qu’il soit instruit ou non, est une divinité puissante, tout comme le feu est une divinité puissante, qu’il ait été consacré ou non» (Manu , IX, 317). Il y a ainsi des dieux parmi les hommes; on peut même les dire dieux de dieux; ils ont le pouvoir de faire et de défaire les dieux à leur gré, car ils sont les seigneurs de la création et les «formes» du dharma. Yudhishthira déclare: «Je dois et montre du respect aux brahmanes, car, bien qu’il soit vrai qu’il puisse exister de mauvais brahmanes de même qu’il y a de mauvais prêtres dans les autres religions, on doit les vénérer pour leur capacité sacramentelle, en tant qu’ils sont les dépositaires humains du Brahman, principe et source éternels du dharma. Mais le brahmane qui a une conduite mauvaise n’est pas meilleur qu’un s dra, et un ご dra qui mène une vie sainte doit être regardé comme étant un brahmane.» En raison du lien causal qui unit le Brahman, éternel principe et fondement de tout, et le caste des brahmanes, ceux-ci peuvent être tenus pour des dieux sur terre.
Le bouddhisme
Il semble que, dans les temps les plus anciens, les bouddhistes aient fait appel aux prêtres du Brahman pour présider aux formes publiques et privées du culte des dieux, mais ils ne participaient pas aux sacrifices d’animaux, contre lesquels le Bouddha avait lutté et qui étaient apparemment habituels à cette époque. Dans le Grand Véhicule, peu à peu des moines devinrent prêtres, cessant ainsi d’être liés par l’obligation de la chasteté; leur fonction principale fut de diriger les cérémonies sacrées et les rites magiques. Le caractère du Vajr ya ユa, qui était étroitement lié à l’occulte, est à mettre en relation avec le fait que les grands magiciens (siddhi ) qui possédaient des pouvoirs miraculeux jouissaient d’un prestige élevé.
Les sikhs
Dans les grands temples sikhs, tel celui d’Amritsar, les p j ri reçoivent par héritage le droit de présider aux cérémonies du culte. Les granthi , instruits à Amritsar ou dans d’autres centres de formation, sont des hommes particulièrement versés dans la connaissance du granth. Pour le reste, toutefois, ils ne se distinguent en rien de leurs coreligionnaires. Les guru n’attribuaient aucun mérite spécial à l’ascèse; ils étaient eux-mêmes mariés et exigeaient de leurs disciples qu’ils eussent également une vie de famille. Néanmoins, on trouve chez les s dhu (saints immaculés) et chez les akali (adorateurs de l’Être éternel) des ordres ascétiques dont les membres vivent à la manière des samnyasi et des fakirs.
L’islam
L’islam ne possède pas de sacerdoce au sens précis du mot, car il «n’admet pas de prêtre entre l’homme et Dieu». La conduite du service religieux y est confiée à un membre de la communauté particulièrement estimé et instruit de la foi musulmane. Il arrive souvent aussi que le service soit dirigé par l’im m (modèle ou chef); ce titre d’ailleurs n’a pas le même sens pour les sunnites et pour les sh 稜‘ites; chez les premiers, ce sont les chefs qui sont engagés et payés par la communauté pour assurer le service. Les spécialistes du Coran et de la loi islamique, les oulémas , détiennent un important pouvoir, spécialement par leurs verdicts. L’islam ne possédant pas une autorité centrale qui déciderait des problèmes de la foi, c’est le consensus de la communauté qui, avec le concours de ceux qui étudient la loi, garantit l’unité à travers le développement doctrinal.
Le judaïsme
Le sacerdoce, dans le judaïsme ancien, était un apanage de la tribu de Lévi et de la descendance d’Aaron. À la tête des différentes classes de prêtres se trouvait le grand prêtre, Aaron et son fils étant regardés comme les premiers détenteurs de cette fonction suprême. À l’origine, les prêtres étaient les gardiens d’un sanctuaire et de son trésor. Au commencement de l’histoire d’Israël, ils furent habilités à offrir le sacrifice. Leur principale fonction de médiation était de rendre des oracles et d’enseigner au peuple la tradition d’Israël. Lorsque le rôle des prophètes se fit prééminent et que les lévites, après l’exil, puis les scribes se chargèrent d’enseigner, le soin d’offrir les sacrifices devint la fonction exclusive et essentielle du sacerdoce israélite. Celui-ci disparut avec la destruction du second Temple. Par la suite, la présidence des communautés particulières fut confiée aux rabbins dont la tâche est non seulement d’officier au cours de diverses cérémonies sacrées (mariages, funérailles, prédications), mais aussi de trancher dans les questions de loi religieuse.
Le christianisme
Pour la foi chrétienne, c’est seulement parce qu’il devient un homme véritable que le Fils de Dieu est capable d’apporter le salut à l’homme. Seul un homme peut accomplir la destinée de l’homme et présenter à Dieu tous les hommes. Aussi Jésus-Christ s’offre-t-il lui-même à Dieu dans l’obéissance et par la mort, paraissant ainsi devant celui-ci comme précurseur et représentant de l’humanité. Telle est la doctrine exposée par l’Épître aux Hébreux dans le langage du sacrifice et du sacerdoce. Le véritable sacrifice est obéissance et le véritable sacerdoce consiste en ce que tous les hommes sont représentés par l’homme qui seul est parfait. Jésus-Christ est ainsi le grand prêtre de la Nouvelle Alliance; il est réellement «prêtre pour toujours selon l’ordre de Melchisédech» (Hébr., V, 7), car il n’a pas de successeur dans le sacerdoce. D’autres peuvent avoir part à cet unique sacerdoce du Christ, qui se trouve ainsi se prolonger dans le temps. La fonction et le ministère sacerdotaux ont été confiés, au sein de l’Église, à un groupe élu, un rite d’investiture, le sacrement de l’ordre, conférant à ses membres un pouvoir spécial et une grâce qui les habilitent pour le ministère, à la fois sacrificiel et pastoral. La fonction du prêtre est non seulement d’enseigner, de prêcher, de conduire le troupeau du Christ, mais par-dessus tout de donner, par l’eucharistie qui est le sacrifice de la Croix, une expression sacramentelle à l’unique oblation du Christ au calvaire et à l’oblation continuée de l’Église.
Le prêtre comme médiateur représente le peuple devant les dieux ou devant Dieu, et il unit ainsi le divin et l’humain. Aux niveaux de civilisation les plus élevés, les prêtres agissent en tant que médiateurs socialement reconnus entre l’homme et le sacré. Ils sont les spécialistes de celui-ci, en même temps que de l’accomplissement des rites; et, dans les sociétés sans écriture, ils conservent par transmission orale les mythes et l’ensemble des idées religieuses qui constituent la tradition intellectuelle d’un peuple. Formés dans la doctrine sacrée et chargés de l’enseigner, ils en viennent souvent à lui donner sa formulation authentique, leur principale fonction étant cependant d’offrir le sacrifice à la divinité, de lui consacrer efficacement et symboliquement ces offrandes, de les lui présenter d’une manière qui soit digne d’elle.
sacerdoce [ sasɛrdɔs ] n. m.
• XVe; lat. sacerdotium, de sacerdos « prêtre »
1 ♦ État ou dignité du ministre des dieux ou de Dieu. ⇒ ministère; sacerdotal. « le sacerdoce romain n'était qu'une sorte d'émanation de la royauté primitive » (Fustel de Coulanges).
♢ (1611) Relig. cathol. Ministère du pape et des évêques (sacerdoce de premier rang), et par ext. des simples prêtres (sacerdoce de second rang ⇒ prêtrise), considéré par les théologiens comme une délégation du « sacerdoce de Jésus-Christ ».⇒ ordre.
♢ Fig. Fonctions auxquelles on peut attacher un caractère quasi religieux, qui exigent beaucoup de dévouement. Le sacerdoce du médecin, du professeur. C'est un sacerdoce, pas un métier. ⇒aussi vocation.
2 ♦ Didact. Corps ecclésiastique (considéré dans sa puissance, son autorité). Les querelles entre l'Empire et le sacerdoce.
● sacerdoce nom masculin (latin sacerdotium, de sacerdos, prêtre) Fonction du prêtre. Fonction qui présente un caractère particulièrement respectable en raison du dévouement à l'égard d'autrui qu'elle exige. ● sacerdoce (citations) nom masculin (latin sacerdotium, de sacerdos, prêtre) Émile Augier Valence, Drôme, 1820-Paris 1889 Académie française, 1857 La presse étant un sacerdoce, il faut bien pourvoir aux frais du culte. Les Effrontés, III, 3, le marquis Michel Lévy ● sacerdoce (synonymes) nom masculin (latin sacerdotium, de sacerdos, prêtre) Fonction du prêtre.
Synonymes :
- prêtrise
sacerdoce
n. m.
d1./d Dignité et fonction du ministre d'un culte.
d2./d Fig. Toute fonction qui requiert haute conscience et abnégation.
⇒SACERDOCE, subst. masc.
RELIGION
A. — ,,Fonction de ceux qui ont le privilège du sacré ou de certains rapports publics avec la divinité, soit pour offrir les sacrifices et prier au nom du peuple, soit pour transmettre au peuple certains enseignements et bénédictions de Dieu`` (Foi t. 1 1968). Sacerdoce chrétien, égyptien, juif, lévitique. Le sacerdoce de Melchisédech, d'Aaron (Ac.). C'est le sacerdoce, c'est-à-dire un état où il y avait beaucoup de méditations et de loisirs, qui donna à la littérature hébraïque son existence et sa perfection (JOUBERT, Pensées, t. 1, 1824, p. 130). Hanan avait reçu le souverain sacerdoce du légat Quirinius, l'an 7 de notre ère (RENAN, Vie Jésus, 1863, p. 37).
— RELIG. CATH. Ministère du pape et des évêques (sacerdoce de premier rang); ministère des prêtres (sacerdoce de second rang, synon. prêtrise). Sacerdoce épiscopal, pontifical; sacerdoce des prêtres; se destiner, se préparer au sacerdoce; sacrement du sacerdoce. J'exerçais le sacerdoce avec piété. J'ai desservi pendant quarante ans l'église de Sainte-Modeste-hors-les-Murs (A. FRANCE, Île ping., 1908, p. 45). Pour la première fois, il me parut que j'entrevoyais le but véritable de ma vie et la majesté du sacerdoce. Je me jetai, oui, je me jetai aux genoux de M. le curé de Lumbres (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 259).
♦ Sacerdoce royal. Jésus possède le sacerdoce royal, « à la façon de Melchisédech »: sacerdoce unique en son genre et éternel (...), que Jésus tient de sa qualité de Fils de Dieu, glorifié par sa résurrection (Religions 1984).
— P. anal. Fonction qui revêt un caractère quasi-religieux par la vertu et le dévouement qu'elle exige. Synon. vocation. Sacerdoce politique; sacerdoce de la magistrature, du professorat; s'acquitter d'une tâche comme d'un sacerdoce. Ces guides du Sahara sont des personnages respectés (...) ils exercent une sorte de sacerdoce (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 9, 1864, p. 119). Mon respect s'accrut pour ce saint homme dont le dévouement ne trouvait pas de récompense: je fus préparé de bonne heure à traiter le professorat comme un sacerdoce et la littérature comme une passion (SARTRE, Mots, 1964, p. 33).
— P. métaph. Je crois que mes vieux frères [les républicains] doivent frapper de grands coups, et que vous [les saint-simoniens], revêtus d'un sacerdoce d'innocence et de paix, vous ne pouvez tremper dans le sang des combats vos robes lévitiques (SAND, Corresp., t. 1, 1836, p. 342).
B. — Corps sacerdotal; corps ecclésiastique considéré dans sa puissance, sa hiérarchie, son autorité. Le sacerdoce dont parle ordinairement la Bible est celui du Temple de Jérusalem. À sa tête était le grand-prêtre dont Aaron serait le prototype. Il avait à ses côtés un prêtre en second, un surintendant du temple, des gardiens du seuil et un grand nombre de simples prêtres (ALLMEN 1956).
— En partic. [Avec une majuscule] Papauté, Saint-Siège. Les querelles du Sacerdoce et de l'Empire (Ac.).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin XIIIe s. « ministère du prêtre » (Vie del ben. Just., B.N. 818, f ° 302d ds GDF. Compl.); 2. 1677 « fonction qui est revêtue d'un caractère presque sacré » (FLÉCHIER, Lamoignon ds LITTRÉ). Empr. au lat. sacerdotium « sacerdoce », « dignité d'augure ». Fréq. abs. littér.:584. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 981, b) 1 865; XXe s.: a) 424, b) 391.
sacerdoce [sasɛʀdɔs] n. m.
ÉTYM. XVe; lat. sacerdotium, de sacerdos « prêtre ».
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1 État ou dignité du ministre d'un dieu, des dieux ou de Dieu. ⇒ Ministère, sacerdotal (fonction sacerdotale). || Le sacerdoce chez les Hébreux (→ Dîme, cit. 1; ephod, cit. 1; prêtre, cit. 8), dans la Rome antique (→ Autorité, cit. 16; comprendre, cit. 28; dépouiller, cit. 29), dans les sociétés tribales, dans les diverses religions.
1 « (Numa) remplissait, dit Tite-Live, la plupart des fonctions sacerdotales; mais il prévit que ses successeurs, ayant souvent des guerres à soutenir, ne pourraient toujours vaquer au soin des sacrifices, et il institua les flamines pour remplacer les rois, quand ceux-ci seraient absents de Rome ». Ainsi, le sacerdoce romain n'était qu'une sorte d'émanation de la royauté primitive.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, III, IX.
♦ (1611). Relig. cathol. Ministère du pape et des évêques (sacerdoce de premier rang), et, par ext., des simples prêtres (sacerdoce de second rang. ⇒ Prêtrise), considéré par les théologiens comme une délégation du « sacerdoce de Jésus-Christ ». ⇒ Ordre. || Sacerdoce du Christ : sa qualité et son office de médiateur unique entre Dieu et les hommes, de prêtre souverain et d'hostie parfaite (→ Bossuet, Élévation sur tous les mystères, XIII, VI, « Le sacerdoce de Jésus-Christ »).
2 La théologie du sacerdoce s'appuie sur des lieux différents selon qu'elle traite de ce sacerdoce spirituel-réel des baptisés ou du sacerdoce ministériel-sacramentel des prêtres. L'épître aux Hébreux est le « lieu » fondamental de la première, tandis qu'il faut chercher les fondements de la seconde principalement dans les Évangiles et dans les Actes.
P.-M. Gy, in Initiation théologique, t. IV, p. 726.
2 (1677). Fig. Fonctions auxquelles on peut attacher un caractère quasi religieux. || S'acquitter de sa tâche comme d'un sacerdoce (→ Rapporteur, cit. 2). || Le sacerdoce de l'artiste, du professeur… || C'est un sacerdoce, pas un métier. ⇒ Vocation.
3 (…) plus un art est contestable, plus ceux qui s'y livrent tendent à se croire investis d'un sacerdoce et à exiger qu'on s'incline devant ses mystères.
H. Bergson, le Rire, p. 136.
3 Didact. Corps sacerdotal; corps ecclésiastique (considéré surtout dans sa puissance, son autorité). || Querelles entre l'Empire et le sacerdoce (→ Gibelin, cit. 2; investiture, cit.).
4 L'organisation d'un corps sacerdotal proprement dit, différencié du reste de la population, a été très souvent un remède aux excès du traditionalisme magique (…) la possibilité de changement se fait jour. L'une des fonctions principales du sacerdoce étant de lever les interdits ou d'en créer de nouveaux.
Gaston Bouthoul, Traité de sociologie, p. 287.
Encyclopédie Universelle. 2012.