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AVESTA
AVESTA

Livre saint de la religion zoroastrienne, l’Avesta constitue, encore aujourd’hui, les Écritures et le rituel des Parsis de l’Inde et des Guèbres de l’Iran.

Le terme Avesta (forme persane du moyen perse apast k , de sth - , se tenir, soit: texte de base) désigne les livres sacrés de la religion mazdéenne et les formules rédigées dans la même langue, puis cette langue même, qu’on appelle aujourd’hui avestique, mais qu’on a longtemps appelée zend, d’après le composé Zend-Avesta (traduction glosée et texte), sous lequel l’Avesta a d’abord été connu en Europe par la traduction d’Anquetil-Duperron.

L’Avesta

Du texte original de l’Avesta, rédigé dans une très ancienne langue iranienne proche du védique, il ne subsiste que ce que les minorités zoroastriennes de l’Iran, sous la domination musulmane, avaient recopié pour leur usage liturgique. Au IXe-Xe siècle, une vaste compilation zoroastrienne, le Denkart, donnait, dans ses huitième et neuvième livres, un sommaire en moyen perse de l’Avesta tout entier: nous pouvons mesurer sa fidélité à la manière dont il résume les parties que nous possédons dans l’original.

L’Avesta se composait de 21 sections, appelées nask- s, formant trois groupes qui correspondent aux trois domaines du savoir religieux: la g s nik 稜h , ce qui est de l’ordre des g th - s et exprime l’essentiel de la doctrine mazdéenne; la d t 稜k 稜h , qui comprend la législation; la hata-m nsr 稜k 稜h , qui embrasse le reste. Si la division est ancienne, la répartition des nask- s dans les trois catégories est postérieure: elle entend superposer les 21 nask- s aux 21 mots de la prière Ahuna Varya. Mais les trois séries s’enchevêtrent. Le sommaire du Dk 8 s’étend surtout sur les nask- s juridiques, et le Dk 9 sur trois commentaires g thiques, le S tgar, le Varštmansr et le Bak, ce dernier étant une glose spirituelle sur les g th -s.

Presque tous les ouvrages moyen-perses postérieurs renverront, tantôt explicitement, tantôt par la littérature même de leur traduction, à des nask -s dont l’original est perdu. Les plus importants sont la légende de Zarathustra (Dk 7 et 5), en grande partie d’après le Spend nask, et le Zand du Vohuman Yašt, texte eschatologique doté d’un commentaire tardif. Des morceaux beaucoup plus courts sont incorporés en traduction dans les récits de type mythologique du Dk 9.

Parmi les textes conservés, on compte:

1. Le Yasna , rituel du sacrifice du haoma , centre de la liturgie mazdéenne, comme le soma est celui du sacrifice védique. L’un et l’autre consistent dans le pressurage d’une plante dont on boit le jus mêlé à de l’eau et à du lait. On y invoque tous les dieux du riche panthéon mazdéen. Centrale est la récitation des g th -s, poèmes de métrique stricte, de style invocatoire très abstrait dont le sens est toujours discuté. Beaucoup de savants y voyaient un message prophétique de Zarathustra, semé de détails autobiographiques permettant de retracer sa vie et sa mission. Aujourd’hui, on y lit plutôt le déroulement même de l’action sacrificielle dont Zarathustra est le prêtre archétypique, et dont l’objet est de rénover la création à l’instar du sacrifice créateur en préparant la transfiguration eschatologique. La langue des g th -s est un dialecte archaïque de l’Est: elles sont certainement antérieures aux Achéménides, mais de combien?

2. Le Vid 勒vd t , chapitres sur les feux, l’exposition des morts, la protection des chiens, les diverses purifications.

3. Les Yašt- s, longs hymnes en vers aux divinités du mois, dont certains sont très anciens et dont la matière mythologique sera reprise plus tard dans les épopées persanes.

4. Le Visprat , qui célèbre les chefs de l’ordre créé.

5. Les Siroza -s, les dieux du mois.

6. Le «Petit Avesta», qui contient les Ny yišn- s (prières aux éléments), les G h -s (aux heures rituelles), les Afring n- s (pour les fêtes saisonnières). Forment un tout à part l’Erpatist n et le N 稜rangist n accompagnés d’une traduction et d’un important commentaire en moyen-perse et traitant des fonctions du prêtre et du rituel.

L’avestique

L’avestique, dialecte oriental de l’iranien ancien, fournit un matériel linguistique important pour l’histoire de l’indo-iranien et de l’indo-européen.

Au stade de l’iranien ancien, deux dialectes seulement ont donné des textes: l’avestique et le vieux-perse. Des autres dialectes, comme le mède, le scythe et les ancêtres du parthe, du sogdien, du saka, de l’ossète et du pašt 拏, les vestiges, quand ils existent, sont fort maigres (noms propres et toponymes). Le vieux-perse, connu par les inscriptions des rois achéménides, est situé géographiquement (à l’ouest de l’Iran) et historiquement (VIe-IVe s. av. J.-C.) de façon précise; il est l’ancêtre direct du moyen-perse et du persan moderne. En revanche, la région où était parlé l’avestique au début du premier millénaire ne peut être déterminée avec certitude, même s’il faut vraisemblablement la chercher à l’est de l’Iran; il est impossible de démontrer une parenté de l’avestique avec les autres dialectes iraniens orientaux, eux-mêmes non homogènes et connus plus récemment. L’avestique apparaît comme étant un dialecte oriental indépendant, qui se distingue plus par l’addition de ses particularités que par leur singularité. Le vieil avestique ou «g thique» – langue des g th s et de quelques autres prières – est l’idiolecte des derniers représentants (au moins 600 av. J.-C., et sans doute aux alentours de 1000 av. J.-C.) d’une tradition poétique remontant à la période indo-iranienne, tandis que les textes en lingua sacra de l’Avesta récent ont été composés à des dates différentes et ont subi des adaptations de la part de clercs de provenances diverses. L’utilisation linguistique de l’Avesta doit tenir compte des conditions de la transmission.

Les manuscrits, qui comportent tous des leçons fautives, sont écrits dans un alphabet spécial, destiné à rendre avec une précision nuancée les caractéristiques d’une prononciation ritualisée.

L’Avesta est passé par les étapes suivantes:
1. État phonétique oriental.
2. Prononciation savante traditionnelle au sud-ouest de l’Iran.
3. Notation, dans un alphabet adapté de la cursive pehlevi, du texte récité: archétype sassanide (Ve-VIe s.).
4. Transmission manuscrite, influencée par la prononciation post-sassanide (après la conquête arabe).
5. Copie des modèles de nos manuscrits (IXe-Xe s.).
6. Prononciation de la vulgate et copie des manuscrits que nous possédons (le plus ancien date de 1288).

Tout ce développement a été accompagné d’une activité «savante», responsable de nombreuses altérations, alors que la langue avait cessé d’être vivante (sans doute à partir de 400 av. J.-C. environ).

Les vicissitudes de la transmission empêchent d’avoir un accès direct à la phonologie de la langue. Ici comme ailleurs, c’est le védique qui, avec sa masse de données bien attestées et étudiées, constitue le guide indispensable. On se limitera à quelques faits qui donneront une idée de l’originalité de l’avestique dans le groupe indo-iranien. Les quatre séries d’occlusives, avec corrélation de sonorité et d’aspiration, sont réduites en iranien ancien à deux séries d’occlusives – les sourdes simples (p , t , k ), les sonores simples (b , d , g ) – et à une série de fricatives sourdes (f , , x ); la sifflante s s’est affaiblie en aspirée h , passée à l’avestique 兀h entre deux a . Dans l’avestique récent apparaît une série de fricatives sonores ( 廓, 嗀, 塚),qui correspondent régulièrement aux occlusives sonores du g thique et du vieux-perse, dans toutes les positions, sauf à l’initiale et après une nasale et une sifflante. Les autres évolutions essentielles sont résumées par les correspondances avestique s / vieux-perse / védique et ch , avestique z / vieux-perse d / védique j et h , avestique r / vieux-perse ç / védique tr / avestique sp / vieux-perse s / védique ごv ; on notera également l’aboutissement š propre à l’avestique de la séquence indo-iranienne rt : par exemple, védique リtá - / vieux-perse arta - / avestique aša - «vérité». D’après l’avestique, une isoglosse importante passe entre l’indien et l’iranien: les laryngales, qui sont reflétées entre consonnes par -i - en indien, tombent en iranien sans laisser de trace en syllabe intérieure. Mais, pour le traitement intervocalique, la métrique des g th s suppose, comme les parties anciennes du ブgveda , un hiatus -a’a - 麗 -aHa - antérieur à la contraction. La morphologie est très semblable à celle de l’indo-aryen ancien, avec des archaïsmes remarquables. Les neutres en -n -, -r -, -s - présentent au nominatif-accusatif pluriel une finale à vocalisme long sans désinence, qui relève d’une formation de collectif, attestée également en hittite: par exemple, ay r : singulier ayarjour»). À la première personne du singulier de la flexion thématique, le g thique a encore - (indo-eur. - ), en regard de l’innovation indo-iranienne - mi ; la désinence secondaire de la troisième personne du pluriel - ユt est continuée par g th. -at , alors qu’elle est remplacée par -ur en indien; de l’impératif zd 稜 («sois!»), on ne peut rapprocher que le grec ísthi . Dans la dérivation, l’avestique conserve, plus nettement que le védique, le système de substitution suffixale entre -i -, -ra- et -ma- dans les adjectifs: par exemple, tira- : ti face="EU Caron" ゼi-aršti- («au glaive aigu»). Ces exemples montrent que l’avestique, et notamment le g thique, préserve des formes remontant à l’indo-européen, et qui ont parfois disparu en védique; une évolution est sensible: l’avestique récent, d’une grande hétérogénéité linguistique, dénonce une tendance marquée au nivellement. Archaïsme syntaxique: le g thique emploie, comme le grec, le verbe au singulier avec un sujet au neutre pluriel; innovation: comme en vieux-perse, un tour particulier pour l’expression de l’attribut s’est développé à partir de phrases relatives nominales, annonçant l’i ボ fat du persan. Les parallèles avec le védique concernent non seulement des lexèmes, mais aussi des syntagmes, qui renvoient à des conceptions et institutions communes. Néanmoins, l’avestique possède des racines sorties de l’usage en indien: par exemple, varz -(«travailler») (gotique waurkjan ), vad -(«conduire») (vieux-slave ved face="EU Domacr" 串). Le dualisme a scindé le vocabulaire entre les deux forces en lutte: Vérité et Mensonge; aux démons (da 勒va -: védique devá - «dieu») ont été attribués des mots considérés comme bas: karna- au lieu de gaoša-oreille»), drav- au lieu de tak-courir»), etc.

Avesta
ensemble des livres sacrés des anc. Perses, qui réformèrent les principes du zoroastrisme. V. Zoroastre.

⇒AVESTA, subst. masc.
A.— RELIG. Ensemble des textes sacrés mazdéens (notamment Vendidad, Vispered, Yasna) :
1. Enfin, voici les livres sacrés des brahmanes et des mages, le véda et l'avesta, apportés à Alexandrie par le premier des lagides, après l'expédition d'Alexandre.
MÉNARD, Rêveries d'un païen mystique, 1876, p. 128.
B.— P. métaph. Somme :
2. Il faut les voir rangés, ces testaments massifs,
...
Ces tomes à stature écrasante, ulémas
Des lutrins monstrueux et des puissants formats;
...
Chacun d'eux est un fort, chacun d'eux est un mont,
Chacun d'eux est un culte; eux des livres, fi donc!
Ils sont des avestas, ils sont des lévitiques,
Chacun d'eux est le Livre; ...
HUGO, L'Âne, Colère de la bête, éd. crit. de P. Albouy, 1966 [1880], p. 95.
PRONONC. — Seule transcr. ds LITTRÉ : a-vè-sta.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1765 (Encyclop. t. 17, s.v. zenda vesta : Le texte des vingt et une parties ou nosks du legislateur Parsis s'appelle l'avesta ou le monde).
Empr. au m. perse avistak, de apastak « ordre donné, consigne, prescription » (d'apr. J. KNOBLOCH, Sprachwissenschaftliches Wörterbuch, p. 239).

Encyclopédie Universelle. 2012.