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PHYTOTRONIQUE
PHYTOTRONIQUE

«Phytotron», «phytotronique» (qui a été employé pour la première fois en 1964 comme titre d’un colloque tenu à Londres et patronné par l’U.N.E.S.C.O.) et, par analogie, «dendrotron», «biotron», «entomotron», autant de mots qui désignent une évolution moderne des techniques et des méthodes d’approche de la biologie, végétale d’abord, animale ensuite et même humaine. La branche la plus développée de telles recherches est actuellement la phytotronique qui tend à parvenir à une meilleure connaissance des plantes et à une maîtrise de leur fonctionnement pour mieux les asservir à nos besoins.

Le substantif «phytotronique» dérive du substantif «phytotron», comme informatique dérive d’information, et électronique d’électron. Ces mots ont chacun une double signification; on y entend à la fois une technique et une méthode scientifique: ici la technologie de la construction, de l’emploi des phytotrons et de tous les dispositifs qui s’en rapprochent, et là une pensée méthodique et nouvelle par laquelle sont abordés les problèmes les plus variés de la science des plantes en employant des moyens phytotroniques. Si cette méthode a déjà apporté en peu d’années de nombreuses réponses aux problèmes fort divers posés par la biologie et la physiologie végétales, c’est surtout dans un esprit prospectif qu’il faut envisager les services qu’elle peut rendre à la science fondamentale comme aux sciences appliquées.

Origine des phytotrons

L’adaptation des plantes à leur environnement est l’une des plus anciennes constatations des hommes: de là découle l’écologie moderne. Les horticulteurs, et sans doute d’abord ceux de la Chine, furent les premiers à modifier le microclimat local par des artifices tels que l’arrosage, les ados, les haies, des abris divers et, finalement, les serres.

Quand la physiologie végétale permit d’interpréter expérimentalement ces opérations, il devint nécessaire de clarifier le rôle du climat et du sol. Mais l’absence de moyens pour imiter correctement les climats ne permettait que des expériences de trop courte durée et bien peu significatives. La physiologie se limita d’abord aux aspects chimiques du contenu des plantes et du sol et à leurs rapports réciproques, et n’envisagea guère les fondements de la croissance et du développement des végétaux, qui demeurèrent longtemps plus descriptifs qu’expérimentaux. Les progrès de la physiologie du développement des plantes sont associés au perfectionnement des serres, puis d’enceintes diverses à but cultural et expérimental, d’abord par les techniques industrielles du conditionnement de l’air (ventilation d’air à température définie et en débit suffisant pour imposer cette température au local conditionné, quels que soient la température et le rayonnement externes), puis par l’amélioration de l’éclairage (tubes fluorescents dégageant peu de chaleur, arcs au xénon atteignant de très hauts niveaux d’éclairement, comparables à ceux de la lumière du soleil, etc.).

Vers la fin du XIXe siècle, Claude Bernard avait posé, pour la médecine, mais aussi pour toute recherche physiologique, le principe d’une méthode rigoureuse: pour qu’un phénomène soit répétable (exigence nécessaire au moindre rudiment de connaissance), il faut que les circonstances soient identiques (même matériel biologique, même âge, même élevage, conditions identiques de milieu). Le milieu résultant de nombreux facteurs ou paramètres, l’expérimentation ne peut se faire qu’en maintenant invariants tous les facteurs, tout en gardant la possibilité de modifier la valeur de l’un d’entre eux puis d’un second et même des combinaisons de deux ou de trois paramètres. Tel est le fondement de la technique phytotronique comme méthode d’analyse d’un grand nombre de processus vitaux.

Mises à part les tentatives de Gaston Bonnier à Paris, l’ancêtre des études phytotroniques est le Laboratoire de physiologie des plantes bulbeuses, créé de 1920 à 1930, à l’université agronomique de Wageningen (Pays-Bas), par A. A. Blaauw. Ce dernier recherchait systématiquement les effets des températures les plus diverses appliquées à des bulbes en repos apparent en fractionnant l’action des différentes températures en périodes successives. Bien qu’il ne maîtrisât qu’un seul facteur (la température), il découvrit, en une dizaine d’années, les règles de la mise à fleur de la plupart des bulbes et des arbres fruitiers par le «thermopériodisme saisonnier».

Mais le véritable «père» des phytotrons reste son compatriote Frits W. Went, qui avait été au centre de la découverte des auxines (1925-1938). Ayant émigré en 1932 au California Institute of Technology à Pasadena, il poussa très loin, à partir de 1938, la technique de l’air conditionné dans l’aménagement de deux grandes serres. Bénéficiant des progrès de l’éclairage par fluorescence, il conçut en dix ans d’expérience le plan d’un ensemble de locaux plus raffinés et réussit à maîtriser l’éclairage en durée et en intensité ainsi que beaucoup de paramètres secondaires. La générosité du donateur Henri Earhart permit, de 1947 à 1950, la création de l’Earhart Plant Research Laboratory.

Dépenser autant pour des sortes de serres paraissait aux collègues de Went un tel excès que, par dérision, ils comparèrent sa réalisation au grand cyclotron de Berkeley: d’où phytotron, sorte de «cyclotron pour plantes». Mais, à l’inauguration de cette nouvelle sorte d’équipement de laboratoire, R. A. Millikan, le président du Caltech (Californian Institute of Technology), officialisa le mot «phytotron», qui devint aussitôt classique.

Un phytotron se présente comme un ensemble d’enceintes où l’on peut maîtriser, séparément ou simultanément, plusieurs paramètres importants du milieu, réalisant ainsi au même moment plusieurs conditions culturales de plantes ou de fragments de plantes, chaque «condition» étant une des combinaisons possibles des multiples valeurs de ces divers paramètres. Ainsi conçu, un phytotron est un simulateur comparatif de divers climats, ou de divers sols, ou, si l’on préfère, un ensemble de «modèles réduits» de cultures expérimentales.

Le nom de phytotron évoque souvent un ensemble de nombreux équipements classiques et sophistiqués, mais, à vrai dire, la notion s’applique à quelque ensemble de dispositifs que ce soit, à condition qu’il réponde à la définition. Si on se contente de maîtriser deux paramètres importants, et seulement de façon approximative, on parlera de phytotron simplifié ; une seule petite enceinte climatisée représente une unité constitutive d’un phytotron ou encore une unité phytotronique . Un dispositif phytotronique , vocable dont l’acception est plus large, désigne tout objet ou ensemble d’objets pouvant faire partie d’un phytotron. Une unité phytotronique, si elle est de bonne qualité, permet, à elle seule, d’obtenir une excellente répétabilité des phénomènes qu’on y a observés; mais elle ne constitue aucunement un phytotron, car le phytotron se définit non seulement comme permettant la répétabilité des expériences, mais par la complexité et la rigueur du dispositif qui permet d’intervenir, isolément ou globalement, sur les facteurs de l’environnement.

La phytotronique comme ensemble de techniques

Le fonctionnement des dispositifs phytotroniques résulte de la coopération entre les ingénieurs, les techniciens et les mécaniciens qui assurent la fabrication et l’entretien de ces dispositifs, et les chercheurs qui les utilisent.

Techniques de l’environnement maîtrisé

L’essentiel est de réaliser des enceintes climatisées, adaptées au matériel à étudier (jeunes arbres ou plantes de taille moyenne ou petite). Si diverses soient-elles, leur caractéristique est de maîtriser au moins deux ou trois facteurs importants de l’environnement: température et, si possible, humidité de l’air et lumière.

La climatisation comme l’éclairage demandent beaucoup d’énergie électrique; de plus, la climatisation est consommatrice de grandes quantités de fluides: air filtré, eau filtrée (et aussi eau désionisée et solutions nutritives), fluides chauds (vapeur comprimée, eau chaude à 80 0C), fluides froids (eau froide à 4 0C par exemple, saumures glycoliques à 漣 10 ou 漣 15 0C). La production de ces fluides peut être concentrée dans des centrales, ou dispersée dans les petits appareils de réchauffement et de refroidissement associés à chaque petite enceinte.

Ces fluides permettent, en déplaçant l’air à l’aide de ventilateurs et de gaines, de doter les diverses sortes d’enceintes d’une atmosphère à température déterminée et à degré hygrométrique plus ou moins précis.

L’éclairage est naturel (celui du soleil est irremplaçable mais fort variable, sauf dans les climats plus ou moins désertiques) ou artificiel (le seul qui maîtrise exactement l’éclairement en qualité, en intensité, en durée). Les tubes luminescents jouent un rôle capital, mais souvent luminescence et incandescence sont utilisées ensemble. Les spectres d’émission doivent être toujours les mêmes et les lampes mélangées constamment pour maintenir le même niveau d’éclairement malgré leur vieillissement. L’addition de sources de lumières colorées (suffisamment monochromatiques) ou mieux d’un illuminateur spectral est nécessaire pour traiter la physiologie des photorécepteurs et notamment du phytochrome. Il est de même indispensable de recréer la rythmicité de ces paramètres: alternance des jours et des nuits, du chaud et du froid, du sec et de l’humide..., ce qui exige une grande précision et un contrôle important, posant de nombreux problèmes techniques, tels que commande et télécommande de la variation des paramètres; les résultats obtenus sont affichés.

Selon les besoins, d’autres paramètres seront encore maîtrisés: par exemple, la teneur en gaz carbonique qui implique des enceintes convenablement étanches; les facteurs du sol, ou plus exactement des volumes occupés par les racines qui requièrent une climatisation distincte. Le substrat des racines peut être un sol, stérilisé généralement, ou plus souvent un milieu granuleux et inerte (sable, graviers siliceux, vermiculite, laine de verre), ou l’eau (culture hydroponique, aérosols nutritifs); mais la température et la contrainte d’eau (sécheresse ou humidité du sol) ainsi que son aération requièrent des dispositifs appropriés.

Enfin, certains paramètres sont plus accessoires: vent, pluie ou neige artificielles, champ électrique, gravitation, etc.; de même des conditions extrêmes, tels la sécheresse, l’humidité saturante, la température chaude ou au contraire froide, l’éclairement de niveau très élevé. Sauf dans des établissements exceptionnels, il ne peut être question de maîtriser tous ces facteurs à la fois de la manière la plus rigoureuse. L’exigence générale la plus importante est certainement la fiabilité d’un équipement qui puisse fonctionner sans aucune interruption pendant des dizaines d’années (compte tenu des travaux d’entretien, par roulement, des diverses enceintes disponibles).

Si la première exigence de tout dispositif phytotronique est la maîtrise des paramètres de l’environnement (air et sol) – ce qui relève de la technique de l’ingénieur –, les constituants vivants de l’environnement doivent être également contrôlés, ce qui est l’affaire des chercheurs et des techniciens. Il faut, d’une part, éliminer les parasites et tous les facteurs biologiques capables de troubler la répétabilité des expériences. Cela implique des techniques et de la discipline: filtration de l’air, évitant les insectes et une bonne part des spores; désinfection de tout ce qui pénètre dans un phytotron, ou au moins des dispositifs de propreté; dispositifs intérieurs de «quarantaine»; traitements localisés par fongicides et pesticides. La présence même des techniciens et chercheurs dans les salles implique aussi la connaissance des troubles qu’ils peuvent apporter, notamment dans la teneur en gaz carbonique. Il faut, d’autre part, garder la possibilité d’étudier les effets de l’environnement biologique: culture de plantes de même espèce, comparée avec des dispositifs de compétition entre espèces différentes (c’est-à-dire des problèmes d’autoécologie et de synécologie); effets d’ombrage des cultures voisines, etc.

La confrontation expérimentale avec des agents phytopathogènes, avec des parasites, avec des prédateurs, aussi bien que la compétition complexe de la lutte biologique mettant en jeu des hyperparasites impliquent des dispositifs appropriés pour des problèmes trop négligés jusqu’ici en phytotronique.

Emploi et gestion des phytotrons et des dispositifs phytotroniques

L’emploi des phytotrons et des dispositifs phytotroniques exige des appareils et du matériel de culture bien adaptés: chariots réglables en hauteur pour transporter des lots de plantes à cultiver au niveau voulu, dispositifs d’arrosage. Les situations diffèrent selon le volume et l’importance des dispositifs employés. Chercheurs et techniciens de laboratoire suffisent pour les opérations culturales quand elles ne sont pas trop nombreuses, alors que les phytotrons grands et complexes doivent avoir un corps de jardiniers spécialisés. Ce personnel est constamment en rapport avec les chercheurs et avec les mécaniciens, puisqu’il est le plus proche observateur du fonctionnement mécanique du phytotron.

Enfin, l’aménagement de l’emploi de l’espace phytotroné, compte tenu de la valeur de l’équipement et du fonctionnement des salles et des enceintes, implique de grandes difficultés à résoudre dès qu’il s’agit d’un phytotron plus ou moins grand et complexe. Par exemple, un grand phytotron peut nécessiter le concours d’une cinquantaine de chercheurs chargés de réaliser entre 75 et 100 programmes.

Quant aux dimensions des espaces phytotroniques, deux conceptions apparemment opposées sont en réalité complémentaires: les grandes salles, fixes, moins coûteuses, dotées chacune d’une même atmosphère climatisée, pouvant être découpées en compartiments et autorisant des durées différentes d’éclairement; des petits cabinets plus ou moins mobiles, affectés souvent chacun à un seul ensemble de conditions.

Le coût d’investissement et de fonctionnement d’un phytotron (ou de tout dispositif analogue) est fonction de divers critères, en particulier du degré de complexité, c’est-à-dire du nombre de paramètres de l’environnement maîtrisés (deux au minimum), du degré de fiabilité (y compris la sécurité du fonctionnement), du degré de précision dans la maîtrise de chacun des facteurs de l’environnement, du nombre de conditions particulières fonctionnant à la fois (trois au moins), du nombre de conditions extrêmes, de la surface et du volume disponibles pour chaque condition, du degré d’adaptation à un programme précis conduisant au minimum de surface conforme à l’étendue de ce programme scientifique.

Le coût élevé de ces dispositifs fait que chaque phytotron est presque un prototype. Une importante diminution des prix serait atteinte si les cabinets climatisés étaient fabriqués en série.

Apports scientifiques des phytotrons et des méthodes phytotroniques

La phytotronique n’est pas seulement une technique, elle est une méthode d’approche d’un très grand nombre de problèmes de biologie végétale.

Il n’est pas possible ici de réunir tout ce que la science des plantes doit, depuis près de cinquante ans, à la phytotronique. Quelques exemples suffiront. On l’a dit, Blaauw, précurseur des phytotrons, découvre vers 1933 la physiologie du thermopériodisme saisonnier et dévoile les facteurs de mise à fleur des plantes bulbeuses et des arbres fruitiers notamment. Cette découverte est à l’origine d’applications si efficaces qu’aux Pays-Bas elle atténue les désordres résultant de la crise économique.

Le thermopériodisme quotidien (exprimant le rôle indispensable des températures relativement basses durant la nuit comme stimulant de la vigueur de la croissance aussi bien que de la fructification de beaucoup de plantes telles que tomates et pois) a été démontré par Went en 1944 dans les Lucy Clark Greenhouses et par Higgins en 1954 au phytotron de Pasadena.

Si trois des plus importants facteurs du développement des plantes étaient découverts avant 1950, c’est la comparaison de diverses conditions naturelles, préfigurant la méthode phytotronique, qui avait procuré la première connaissance expérimentale de telles fonctions:

– les levées de dormance par le froid (Johannsen, 1890-1900);

– la vernalisation, c’est-à-dire le rôle du froid comme préparatoire à la mise à fleur (Klippart, 1857; Gassner, 1918; Gregory et Purvis, 1936-1948; Melchers et Lang, 1939-1959);

– le photopériodisme régissant la mise à fleur par la durée du jour et de la nuit (Tournois, 1912; Garner et Allard, 1920).

Ces trois fonctions doivent leur développement actuel à des moyens devenus progressivement phytotroniques (K. Hamner) et par l’utilisation de serres en forme de phytotron simplifié (Borthwick et coll., Wareing, entre autres). Le phytotron du C.N.R.S. à Gif-sur-Yvette et l’important dispositif phytotronique de l’université de Clermont-Ferrand ont été, depuis leur mise en service, à l’origine du plus grand nombre de publications sur ces trois fonctions.

Went a analysé strictement par la méthode phytotronique les exigences climatiques du Veratrum viride , plante d’altitude, très rare, contenant d’indispensables substances pharmaceutiques. Après cette étude, comparant les exigences de la plante avec les cartes de conditions climatiques des États-Unis, il a déterminé l’endroit le plus approprié pour l’acclimatation de cette espèce, en vue de sa production pour les industries pharmaceutiques, ce qui a pleinement réussi.

Cette découverte inattendue résultant d’un emploi de semi-routine d’un phytotron peut fournir un autre exemple: Bové, désirant déterminer les conditions climatiques les plus favorables à l’expression des symptômes de certaines maladies dites de dégénérescence des Citrus (maladies à mycoplasmes), avait cultivé ces agrumes dans le phytotron pendant trois ans et selon un nombre assez élevé de combinaisons de conditions thermiques et d’éclairement; l’une d’entre elles donna un maximum d’expression de la maladie. Bové, qui cherchait depuis longtemps, comme beaucoup d’autres, à cultiver les mycoplasmes des végétaux in vitro, tenta de nouvelles cultures de mycoplasmes provenant de mêmes sortes de Citrus en les plaçant dans les conditions d’alternances de température (32 0C-27 0C) qui lui avaient donné le maximum d’expression de la maladie, le «stubborn»; avec Saglio, il réussit alors, pour la première fois, la culture in vitro d’un mycoplasme végétal.

Une nouvelle stratégie de la recherche fondamentale

On peut considérer la phytotronique comme un nouveau plan d’action de la recherche en biologie végétale, dont les phytotrons et les dispositifs phytotroniques seraient les moyens logistiques.

La vie, sous toutes ses formes (chez les végétaux en particulier), se reconnaît à la croissance de germes qui se multiplient, se reproduisent et qui évoluent de la jeunesse à l’état adulte et à la mort. L’ontogenèse se déroule nécessairement dans un ou plusieurs milieux ambiants pourvu qu’ils soient compatibles avec l’expression et le maintien de la vie. En ce qui concerne les plantes, la méthode phytotronique accomplit l’analyse des modes d’intervention de chacun des paramètres du milieu et de leurs diverses combinaisons. La description des formes possibles de l’ontogenèse en rapport avec les circonstances caractéristiques du milieu qui président à leurs expressions est un but direct de la stratégie phytotronique.

L’ontogenèse est aussi associée au système dit «moléculaire» d’expression de l’information génétique et aux conséquences des structures spatio-temporelles (hérédité cytoplasmique et analogues) qui sont également d’autres données initiales de l’œuf ou «germe de vie» dans leur rapport avec les facteurs de l’environnement.

La triade «information génétique-structure cellulaire initiale-environnement» est le fondement de toute vie, mais la structure cellulaire représente un anti-hasard, une production de néguentropie, comme tout le développement des structures des êtres organisés la manifeste par sa complexité croissante. L’environnement physique modifie l’expression de l’information génétique aussi bien que des structures biologiques et est modifié par l’environnement biologique ainsi créé, de sorte que le résultat de la triade de base s’exprime en langage de néguentropie des systèmes ouverts et de cybernétique. Et l’on conçoit que la méthode phytotronique qui analyse l’action des composantes de l’environnement soit une voie privilégiée d’approche du monde végétal, tant pour ses fondements que pour son expression et son devenir.

Il reste donc à donner un panorama prospectif, à court terme du moins, des modes d’intervention de la phytotronique dans les différentes branches de la biologie végétale, et plus particulièrement de la physiologie végétale.

Applications à l’ontogenèse expérimentale des plantes entières

L’ontogenèse expérimentale des plantes entières est le domaine du plein emploi des phytotrons et des dispositifs phytotroniques. Tout l’arsenal des combinaisons des facteurs du milieu peut et doit, autant que possible, y être employé.

La plante entière est mise en culture phytotronique dès l’essai de germination . On rencontre aussitôt la détermination des conditions générales de la germination (eau, oxygène, température) et de celles qui s’y opposent. Les données classiques en cette matière n’ont pas encore été reprises systématiquement en phytotronique.

À l’étape suivante, c’est la plantule , puis la jeune plante devenant adulte qui sont éprouvées d’abord dans leurs stades juvéniles. L’analyse des conditions de la différenciation des structures anatomiques et morphologiques durant ce stade de l’ontogenèse, ou stade de la vie végétative, permet d’interpréter les manifestations de l’ontogenèse: port de la plante, ramification; processus d’amphiblastie (émission de rameaux spéciaux, tels que stolons, drageons); mode d’intervention du milieu sur les phénomènes de «topophysis» (formes et structures foliaires successivement différentes avec l’avancement en âge); durée des plastochrones (intervalles de temps entre émissions successives de feuilles); variations du nombre des hélices foliaires et les éventuelles fascies; vitesse de la croissance (en longueur ou exprimée en masse) et ses modifications; dormances autonomes ou aïtionomes.

On est conduit ainsi à déterminer bon nombre de fonctions qui commandent la productivité totale de la plante considérée et à les mesurer: productivité totale de chaque sorte d’organe, productivité en diverses sortes de substances (glucides, protéines, alcaloïdes, etc.).

Quand la maturité de floraison est atteinte (une fois déterminées les circonstances et les variations de durée qu’elle exige), la méthode phytotronique permet de déterminer les conditions nécessaires pour la mise à fleur ou virage floral: passage à l’état reproductif, ses diverses étapes (induction primaire, secondaire...), expression finale de la floraison, ainsi que les conditions qui permettent ou qui ordonnent la généralisation de la mise à fleur, ou sa localisation stricte, et les divers facteurs de la sénescence finale ou de la protection contre cette sénescence.

De même, on peut connaître l’existence et les degrés d’importance relative des grandes fonctions ou processus physiologiques de la morphogenèse et de l’ontogenèse: photopériodisme; thermopériodisme; vernalisation; diverses entrées en dormance et levées de dormance; conditions imposant les repos forcés. La détermination de l’existence de telles fonctions, de leur importance relative, des valeurs quantitatives de leurs interventions en fonction des divers niveaux des facteurs de l’environnement est à la fois un portrait physiologique et ontogénétique de chaque espèce et de chaque race, et un diagnostic essentiel pour leur comportement dans l’environnement naturel ou cultural, c’est-à-dire pour leur autoécologie.

La méthode phytotronique implique aussi l’intervention, au cours des différentes étapes du développement, de nombreuses conditions; par approximations successives, on parvient à déterminer les facteurs du milieu qui modifient, dans un sens ou un autre, la séquence des événements de l’ontogenèse, de la morphogenèse, autrement dit leur programme cultural et physiologique. On voit apparaître alors, plus ou moins aisément selon les matériels employés, des phénomènes tels que l’accélération de la sénescence sous forme de néoténie, des phénomènes d’antisénescence, c’est-à-dire de réjuvénation, des structures nouvelles anormales, dites tératologiques, qui ouvrent le domaine encore à peine exploré de la tératogenèse expérimentale, contrepartie de la morphogenèse expérimentale.

Les travaux considérables faits depuis 1950 ne représentent cependant qu’une infime partie de ce qui pourrait être fait (en 1973, on pouvait estimer à 3 000 les «portraits écophysiologiques» de cette sorte, sur 200 000 à 300 000 espèces et combien davantage de races et d’écotypes!), surtout si un programme coopératif international était adopté et conduit systématiquement. L’exploration des comportements écophysiologiques de toutes les espèces d’une section ou d’un genre, et cela dans de nombreuses familles, ordres ou classes de végétaux, ou dans le cadre des espèces et races composant des unités de végétation ou des unités phytosociologiques, doit être entreprise. Les premières expériences ont montré qu’une telle exploration met en évidence un comportement prépondérant de telle fonction chez une espèce donnée. Cette espèce peut alors être considérée comme une sorte de «cobaye végétal», et doit faire l’objet d’un autre cycle de recherches d’études phytotroniques plus approfondies: ce sont en effet de remarquables agents, et c’est avec leur aide qu’il faut analyser profondément, en physiologie, les diverses fonctions des plantes.

Débouchés sur la botanique non physiologique

L’écologie, la géographie botanique, la mycologie en particulier peuvent bénéficier des méthodes phytotroniques. Seule une connaissance du comportement vis-à-vis des facteurs du milieu, et ce pour toutes les espèces et races d’un territoire limité et bien défini (tel, par exemple, l’étage alpin des Pyrénées), peut, par confrontation avec les aires de dispersion des mêmes espèces, races ou formes les plus voisines, et par expérimentation phytotronique de quelques-uns de ces taxons dispersés à travers le monde, conduire à des conclusions intéressantes quant à l’origine du peuplement du territoire considéré. Un petit nombre de tentatives ont été faites dans cette voie, mais les moyens phytotroniques utilisés étaient en général anciens ou rudimentaires, et l’expérience portait sur des espèces quelconques et non systématiquement choisies. La chorologie (science de la répartition et de la dispersion des êtres vivants) et la géographie botanique accompliraient des progrès considérables si de telles études étaient abordées systématiquement et si elles étaient confrontées aux observations écologiques faites sur le terrain. Des réponses approfondies sont attendues de la traduction de ces observations en termes d’expérimentations phytotroniques. Différentes branches de la science écologique doivent, nécessairement semble-t-il, tisser désormais des liens étroits avec la physiologie de l’environnement ou phytotronique.

Quant à la morphologie végétale et à la tératologie végétale, elles restent descriptives, ou ne suscitent que des expériences rudimentaires limitées en général à des techniques simples (piqûres et coupures, notamment). Or, les concepts morphologiques pourraient prendre plus de consistance grâce à des expériences physiologiques de caractère phytotronique. Il en irait de même pour l’anatomie. Mais l’absence de certitude dans l’interprétation des structures morphologiques en termes de biologie moléculaire fait que beaucoup de botanistes restent méfiants à l’égard de cette discipline. Dans la méthode phytotronique, on s’efforce de considérer aussi les données de l’information génétique, mais avec les effets de l’environnement et de l’état, dans l’espace et le temps, des structures cellulaires et pluricellulaires, considérées comme des données de fait (axiomatiques) en attendant qu’elles soient mieux interprétées en termes d’énergétique des systèmes ouverts et de cybernétique, enrichis par l’analyse phytotronique. La morphogenèse expérimentée par la stratégie phytotronique peut réconcilier les tenants les plus divers de la biologie végétale.

Expérimentation sur des fragments de plantes et des cultures de tissus et de cellules

Les fragments de plantes qui ont servi à définir les corrélations de croissance et d’inhibition, domaine considérable de la physiologie végétale dont le cas type est celui de la dominance apicale, méritent d’être étudiés par la méthode phytotronique.

Les corrélations observées vont bien au-delà de la croissance et de l’inhibition: elles pénètrent le domaine de la morphogenèse et de l’organogenèse et prennent le caractère de corrélations et de régulations de développement. Les phénomènes, plus simples que dans le cas des plantes entières, suggèrent l’intervention de substances (auxines, cytokinines, gibbérellines, etc.) seules ou conjointement, ou associées à des doses diverses de métabolites.

L’exemple le plus récent est celui de Scrofularia arguta , espèce amphicarpique du Sahara septentrional, qui montre des corrélations complexes. Ces corrélations, d’après les premières études (1965-1972), affectent en même temps la croissance et le développement et sont régies à la fois par la dominance apicale et par la présence ou l’absence des racines, lesquelles sont remplaçables par des cytokinines; il en résulte que, selon ces corrélations et les facteurs du milieu, les propriétés opposées des diverses sortes de feuilles, reconnues par leurs formes, s’opposent partiellement ou ne s’opposent pas à la mise à fleur, elle-même étant attachée à des types de rameaux différemment sensibles au photopériodisme.

On connaît le vaste domaine physiologique du bourgeonnement, normal ou adventif, comprenant les chapitres relatifs à l’organogenèse des racines, des tiges, des fleurs, des feuilles, employant primitivement différentes sortes de boutures et surtout celles qui ne contiennent pas de bourgeons apparents. Le rôle de la balance auxines-cytokinines a été déterminé par R. Skoog, vers 1955, à partir des tissus nés des cals de tabac.

Tous ses essais ont été repris et diversifiés, quant aux espèces utilisées et quant à l’emploi des moyens phytotroniques; on y découvre une multitude de faits nouveaux qui vont jusqu’à la possibilité de faire produire à volonté racines, tiges ou fleurs, à partir des mêmes sortes de cellules, qu’elles soient épidermiques, sous-épidermiques ou autres, et séparées de tout autre tissu. Le contrôle de la croissance des plantes mères, les conditions phytotroniques rendant possible le bourgeonnement, les combinaisons de régulateurs de croissance et de métabolites contribuent à cette maîtrise de l’organogenèse dirigée . Il en résulte une quantité d’hypothèses et de problèmes qui intéressent au plus haut point la notion de séquences ou de programmes de développement.

L’application de la méthode phytotronique aux tissus plus ou moins isolés, en particulier aux cals et aux tissus issus de cals, a permis notamment de définir différentes sortes de gradients de propension à la mise à fleur et a suscité de nouveaux problèmes d’organogenèse et de morphogenèse. La découverte de l’androgenèse – c’est-à-dire de la transformation des cellules mâles précurseurs du pollen ou des cellules polliniques elles-mêmes en plantes entières demeurant haploïdes – bénéficie de la méthode phytotronique qui détermine les conditions les plus appropriées à la manifestation du processus ou à son inhibition. Il en va de même pour l’aptitude des cellules isolées, appelées à fournir des protoplastes et à répondre plus ou moins aisément à l’incorporation végétative d’éléments.

Extension de la méthode phytotronique aux processus du métabolisme

L’intervention des techniques phytotroniques tant sur les plantes entières que sur les fragments de plantes en culture permet de situer la production quantitative de diverses substances, tels les glucides, les acides aminés, les alcaloïdes. Cette manière de faire conduit soit à des perspectives nouvelles sur les voies de la biogenèse, soit à des réponses quant aux meilleures conditions de production des diverses substances.

La méthode du conditionnement climatique peut aussi être appliquée in vitro à des modèles biochimiques ne contenant que des enzymes et quelques substrats, exposés à des conditions de température ou d’éclairement (particulièrement à des rythmes d’éclairement et plus encore en lumière monochromatique) qui permettent de corroborer les premières conclusions obtenues in vivo. Parmi des exemples prometteurs (1970-1973), on peut citer l’application des méthodes phytotroniques ainsi décrites aux modifications profondes du métabolisme crassulacéen en C4.

Enfin, les mêmes méthodes phytotroniques sont applicables à des processus biophysiques, comme ceux qui concernent la recherche des formes d’intervention du phytochrome dans un grand nombre d’actions biologiques et qui sont à la fois d’origine biophysique et biochimique comme les rythmes endogènes.

Les applications de la phytotronique au service de l’homme

Le stade initial des innovations techniques ne diffère guère des recherches fondamentales. À vrai dire, ce sont les mêmes recherches, accomplies pour la seule curiosité scientifique mais dont on aperçoit, en les regardant sous divers aspects, que leurs résultats peuvent se transformer en techniques utiles soit par transfert direct à l’art de l’ingénieur, soit parce qu’elles suscitent des recherches complémentaires. Voici quelques exemples de telles applications.

Les problèmes de forçage peuvent être soumis au préalable avantageusement à l’expérimentation phytotronique. On peut rappeler la recherche préphytotronique de A. A. Blaauw sur l’écophysiologie des plantes bulbeuses, qui a directement conduit à une technique de forçage (des tulipes et des jacinthes notamment) employée dans le monde entier. Les techniques rigoureuses de production de chrysanthèmes de types les plus divers et en n’importe quelle saison ont été mises au point en Amérique et en France d’abord, puis au Japon dès avant la Seconde Guerre mondiale, et de multiples améliorations sont attendues légitimement qui seront dues à la phytotronique.

Un autre exemple, conduit par voie véritablement phytotronique, avec un transfert analogique des plantes sauvages aux plantes ornementales, est celui de l’accélération de l’ontogenèse des orchidées les plus ornementales des pays chauds. D’abord, on a réussi à maîtriser la floraison de la benoîte (Geum ), exigeant normalement la vernalisation par le froid et une certaine vigueur. Ensuite, la transposition analogique des résultats obtenus sur Geum à des orchidées originaires de la strate élevée des forêts tropicales ayant une écologie fort différente conduisit, à la suite d’un petit nombre d’expériences phytotroniques, à faire fleurir des Odontonia en six mois au lieu de quatre ans; mais les fleurs étant trop petites, on parvint à obtenir en douze mois la vigueur des plantes de trois à quatre ans et à provoquer alors la floraison six à huit mois plus tard. Ainsi le temps nécessaire à la mise à fleur fut réduit de moitié et la productivité plus que triplée. Ce procédé est en cours d’application et la même tentative progresse, quoique plus lentement en raison de diverses difficultés techniques, avec d’autres variétés d’orchidées ornementales.

Les problèmes d’acclimatation sont également tributaires de la phytotronique. Le premier exemple, déjà évoqué, est celui du Veratrum viride de Went.

Les recherches d’écophysiologie, c’est-à-dire de physiologie du comportement en divers milieux, sont le domaine central de la phytotronique. Toutes peuvent déboucher sur des applications fort nombreuses. Poursuivies sur des plantes d’intérêt agricole ou horticole, elles fournissent des critères de sélection précoce pour reconnaître les propriétés d’adaptation aux multiples conditions écologiques (climatiques et pédologiques) des diverses races ou variétés de ces plantes. Elles constituent le point de départ d’une technique de sélection accélérée des innombrables mutations que les généticiens peuvent provoquer parmi ces espèces utiles. C’est ainsi que dans plusieurs phytotrons on poursuit des recherches sur la sélection précoce des plantes fourragères, particulièrement des graminées.

Un autre groupe d’applications concerne la connaissance des mécanismes physiologiques de la résistance aux circonstances climatiques défavorables et, du même coup, la connaissance des moyens de sélection des races naturelles ou des mutations provoquées de plantes utiles pour tirer parti des grandes surfaces quasi stériles (Sahara, Inde du Nord-Ouest, déserts froids périarctiques, terres salées des plaines maritimes ou des déserts chauds). Il s’agit notamment des mécanismes de la résistance à la sécheresse, au froid, à la salinité, à l’excès de chaleur.

La participation des phytotrons à ces études est en progrès, et, significativement, de nouvelles coopérations se nouent peu à peu. Il est assez remarquable que, dans les cas considérés, la résistance soit associée à l’élévation de la teneur en proline, phénomène dont la signification doit être recherchée.

Enfin, cas marginal mais important de l’écophysiologie, les mécanismes physiologiques des pollutions de l’atmosphère et du sol et même des eaux relèvent directement d’études physiologiques fondées sur la phytotronique. Plusieurs phytotrons ont en effet déjà des contrats de travail avec des organismes nationaux de lutte contre la pollution, ou avec les industries polluantes. Les mécanismes physiologiques de la pollution par l’ozone, le smog sont au programme de plusieurs phytotrons des États-Unis, comme le sont en France les pollutions occultes par S2. Ces recherches ne concernent pas seulement l’expérimentation écophysiologique, mais aussi l’étude des modifications des systèmes enzymatiques dans les conditions de la pollution.

Les possibilités d’application sont innombrables. On peut encore mentionner que les problèmes d’organogenèse, de plus en plus traités par les phytotrons, conduisent à des possibilités de multiplication végétative susceptibles de rendre les plus grands services. Les progrès de la culture des méristèmes relèvent des mêmes principes physiologiques. Ces applications sont particulièrement précieuses pour l’éradication des virus qui ont fait dégénérer un grand nombre de plantes vivaces à multiplication clonale.

Enfin, les plus importants progrès envisageables avec l’aide de la phytotronique sont ceux qui touchent directement à la productivité , qu’il s’agisse de la productivité spécialisée (alcaloïdes, glucides et amidons, lipides ou protéines) ou de la productivité globale des plantes (matière fourragère). Ils sont du plus haut intérêt pour lutter contre la faim dans de nombreux pays en voie de développement et pour obtenir, dans les pays industriels, une production massive de substances à partir de l’énergie solaire transformée par les plantes. Les mécanismes physiologiques de la productivité et de son optimisation font l’objet d’innombrables modèles plus ou moins mathématiques et théoriques. Jusqu’ici, les résultats ne sont pas à la hauteur des efforts parce que l’on connaît encore trop peu de choses de la nature des fonctions physiologiques qui règlent la productivité (globale ou particulière), et on ignore trop aussi des valeurs optimales d’un grand nombre de facteurs qui entrent en ligne de compte. Or, précisément, la connaissance des fonctions physiologiques en rapport avec les valeurs des divers paramètres de l’environnement sont, très exactement, le centre des recherches phytotroniques. Il est tout à fait surprenant qu’on fasse si peu appel aux phytotrons, et souvent de façon occasionnelle et superficielle, pour parvenir à une optimisation logique et assurée de la productivité.

La difficulté vient sans doute de ce que, au cœur des fonctions de la productivité, se trouve la photosynthèse et que celle-ci est étudiée dans des laboratoires spécialisés et non dans des ensembles phytotroniques. Son étude implique, d’une part, l’introduction de recherches de caractère enzymologique dans les plans de travail des phytotrons (on a vu plus haut combien cela pouvait être fructueux), d’autre part, un intérêt porté en vue de la sélection améliorante à la morphogenèse expérimentale et à l’écophysiologie. La productivité directe de la photosynthèse (glucides en majorité) peut être orientée vers des produits spécialisés tels que protéines, acides aminés précieux, lipides, alcaloïdes, etc., ou vers une majorité d’organes recherchés tels que tubercules, feuilles, tiges à fibres, fleurs, fruits; et ces orientations sont à analyser avant tout par des moyens relevant de la stratégie phytotronique. Les moindres améliorations intervenant dans la culture des plantes utiles sont à l’évidence éminemment rentables, bien qu’il soit difficile d’établir un lien comptable entre l’invention et l’accroissement des bénéfices. Pour prendre un seul exemple, on peut indiquer que l’industrie des œillets et la production de leurs boutures exemptes de virus, processus typiquement physiologique, ont permis d’obtenir ces dernières années, dans les serres à œillets des Alpes-Maritimes, un chiffre d’affaires au moins égal sinon supérieur à celui de la viticulture du département de l’Hérault. Il est facile d’extrapoler pour comprendre la rentabilité des recherches de physiologie végétale lorsqu’elles trouvent des applications.

La phytotronique apparaît à la fois comme une technique et comme une méthode de recherches. On peut constater qu’en une vingtaine d’années phytotrons et ensembles phytotroniques divers se sont révélés être les instruments de découvertes importantes dans les domaines de la botanique et de la physiologie végétale. À leur tour, ces découvertes ont suscité des applications dont la portée sur la quantité et la qualité de la production agricole et horticole, dans les pays développés comme dans les pays en voie de développement, est déjà considérable et le deviendra encore plus. Bien que la technique phytotronique soit déjà fort élaborée, il lui faut constamment progresser et s’adapter; en particulier, elle doit s’adapter aux exigences des écologistes et des bioclimatologistes en vue de transposer rapidement ses acquisitions dans les biotopes naturels et agricoles.

À ce titre, elle doit rechercher les progrès constants de la technique, ce qui demande des équipements onéreux – justifiables toutefois par son importance croissante – et une coopération entre les chercheurs, les utilisateurs, les modélistes de la production et de la planification, tant au niveau national que sur le plan international.

Encyclopédie Universelle. 2012.