ASTHÉNIE
ASTHÉNIE
Pour Hippocrate, l’asthénie est «la condition la plus voisine de la maladie»; c’est un état qui favorise la venue de la maladie et explique qu’elle atteigne des sujets robustes. Dans la médecine classique, les asthénies sont les maladies caractérisées par la prostration, la langueur — générale ou partielle — des fonctions et la dissolution des humeurs. La carrière moderne de l’expression remonte à John Brown (1736-1788), «le métaphysicien de la médecine». Pour le fameux Écossais, les maladies sont toutes générales et dues à un excès ou un défaut d’«incitation»; les maladies asthéniques , les plus nombreuses, sont soit directes, par hypersthénie et épuisement de l’incitabilité, soit indirectes, par insuffisance ou défaut des «excitants». Il n’y a entre elles que des différences quantitatives, et la nosologie est illusoire, comme l’anatomie inutile. Un unique traitement, le stimulant, remontera la force vitale: viande, vin, thé, café, chaleur, exercice, quinquina, éther et opium. Cette théorie, qui paraît aujourd’hui bien simpliste, eut un succès considérable, dont témoignent encore des termes comme neurasthénie (épuisement de la force nerveuse, Beard, 1869), et psychasthénie (épuisement du tonus psychologique, Pierre Janet, 1903).
Aujourd’hui, asthénie est devenue un synonyme savant de fatigue, servant plus particulièrement à désigner les fatigues et fatigabilités pathologiques (infections et intoxications chroniques, cancer, anémie, diabète, insuffisance surrénale, psychoses).
On a décrit une asthénie constitutionnelle , qui serait une insuffisance surrénale larvée et congénitale; une asthénie essentielle , que Birket-Smith attribue à une involution cérébrale (visualisée dans plus de la moitié des cas par la pneumo-encéphalographie); une asthénomanie (J. Tastevin, 1911), opposé de la manie (alors que l’on pense généralement que c’est la mélancolie qui est l’opposé de la manie); une asthénie neuro-circulatoire (P. White, 1948), correspondant à peu près à la «névrose cardiaque» des auteurs français; une personnalité asthénique (B. Lindeg face="EU Caron" オrd, 1962).
asthénie [ asteni ] n. f. ♦ Méd. Manque de force, de vitalité physique et psychique; état de dépression, de faiblesse. Asthénie cardiovasculaire. Asthénie psychique. ⇒ neurasthénie. « Une légère tendance à l'asthénie » (Sarraute).
● asthénie nom féminin État de faiblesse générale caractérisé par une diminution du pouvoir fonctionnel de l'organisme, non consécutive au travail ou à l'effort et ne disparaissant pas avec le repos. ● asthénie (synonymes) nom féminin État de faiblesse générale caractérisé par une diminution du pouvoir...
Synonymes :
- adynamie
- déficience
Contraires :
- force
- hypersthénie
- vigueur
asthénie
n. f. MED Fatigue générale.
⇒ASTHÉNIE, subst. fém.
A.— MÉD. Affaiblissement pathologique de l'état général :
• 1. Il ne faut parler d'asthénie que devant une faiblesse habituelle qui marque l'ensemble du comportement. Et dans ce cas faut-il encore distinguer l'asthénie constitutionnelle, qui déborde sur la névrose, et les asthénies légères qui sont extrêmement nombreuses chez les « normaux », notamment dans la population des villes.
MOUNIER, Traité du caractère, 1946, pp. 261-262.
— En partic. ,,Affaiblissement des fonctions d'un organe ou d'un système.`` (Méd. Biol., t. 1 1970).
SYNT. Asthénie acquise, constitutionnelle, générale; asthénie cardiaque, musculaire.
— P. métaph. :
• 2. Quand l'Occident tombe dans l'asthénie, il va vers l'Asie pour s'y dissoudre...
A. ARNOUX, Carnet de route du Juif Errant, 1931, p. 104.
• 3. Pour elle, [la France] ce qui est en jeu, ce n'est pas seulement l'expulsion de l'ennemi hors de son territoire, c'est aussi son avenir comme nation et comme état. Qu'elle demeure prostrée jusqu'à la fin, c'en est fait de sa foi en elle-même et, par là, de son indépendance. Elle glissera du « silence de la mer » à l'asthénie définitive, de la servitude imposée par l'ennemi à la subordination par rapport aux alliés. Au contraire, rien n'est perdu si elle rentre en ligne dans son unité recouvrée.
DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1956, p. 2.
B.— P. ext., PSYCH. Asthénie psychique. ,,Affaiblissement des fonctions intellectuelles et de la mémoire; difficulté de fixer l'attention ou de concentrer les idées`` (Méd. Biol. t. 1 1970).
♦ Asthénie morale. État d'indifférence, d'apathie :
• 4. Ce sont eux [les coloniaux] qui assument la responsabilité des maux dont souffrent, à l'heure actuelle, certaines parties du pays des Noirs. (...) Ils n'ont pas eu le courage de parler. Et, à leur anémie intellectuelle l'asthénie morale s'ajoutant, sans un remords, ils ont trompé leur pays.
MARAN, Batouala, 1925, p. 15.
Rem. 1. Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845, Lar. 19e et Nouv. Lar. ill. enregistrent le subst. fém., vieilli, asthénopyre. Fièvre accompagnée d'asthénie. 2. On rencontre ds la docum. le subst. fém. asthénopie (1864, R. LIEBREICH, Nouv. dict. de méd. et de chir. pratique, d'apr. Lar. 19e; comp. du gr. « faible » et « œil », suff. -ie). Faiblesse, fatigue de l'œil s'accompagnant d'une instabilité de l'acuité visuelle. Asthénopie nerveuse.
PRONONC. :[asteni]. — Asthénopie. Seule transcription ds LITTRÉ : a-sté-no-pie.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1790 (Encyclop. méthod., méd.).
Empr. au gr. « manque de vigueur » (THUCYDIDE, 1, 3 ds BAILLY).
STAT. — Fréq. abs. littér. :29.
BBG. — BOUILLET 1859. — BONV. 1969. — CHEVALLIER 1970. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — GALL. 1955, p. 65, 135, 139. — GARNIER-DEL. 1961 [1958] (et s.v. asthénopie). — LAFON 1969 (et s.v. asthénopie). — Lar. méd. 1970 (et s.v. asthénopie). — LITTRÉ-ROBIN 1865 (et s.v. asthénopie). — MARCH. 1970. — Méd. 1966. — Méd. Biol. t. 1 1970 (et s.v. asthénopie). — MIQ. 1967. — MOOR 1966. — Mots rares 1965. — NYSTEN 1824. — PIÉRON 1963 (s.v. asthénopie). — POMM. 1969 (et s.v. asthénopie). — POROT 1960. — PRIVAT-FOC. 1870. — Psychol. 1969. — Sexol. 1970. — SILL. 1965.
asthénie [asteni] n. f.
ÉTYM. 1790; du grec astheneia « manque de vigueur », de asthenês « sans force », de a- priv., et sthenos « force ».
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♦ Médecine.
1 Manque général de force, de vitalité sur les plans physique et psychique, avec sensation de lassitude, fatigabilité anormale, absence d'initiative, dégoût de l'action… || L'asthénie, faiblesse d'origine centrale (à la différence de l'adynamie). || Asthénies dues à des troubles organiques (avitaminose, intoxication, insuffisance rénale…), au surmenage. || Asthénie de convalescence. || Asthénie des états dépressifs. || Asthénie permanente avec fatigue plus accablante au réveil. ⇒ Neurasthénie. || Asthénies névrotiques, psychosomatiques, psychogènes. ⇒ Psychasthénie. — Asthénie psychique : état de fatigue psychique, avec affaiblissement de la mémoire, labilité de l'attention, ralentissement du travail intellectuel.
1 En somme, ceux-mêmes de ses amis, de ses parents, qui étaient férus de psychiatrie ne pouvaient rien lui reprocher, sinon, peut-être, devant ce manque chez lui d'inoffensives et délassantes lubies, devant son conformisme par trop obéissant, une légère tendance à l'asthénie.
N. Sarraute, Tropismes, p. 129.
2 (…) pendant ces cinq jours de voyage il lui semble qu'il a dormi profondément, ou plutôt qu'il a été en proie à une sorte de maladie de faiblesse, à une extrême asthénie, et il ne veut ni ne saurait se rappeler le moindre point des mornes endroits ou des gens vulgaires qui ont passé devant ses yeux.
A. Pieyre de Mandiargues, la Marge, p. 22.
3 Avec Bugard on peut considérer l'asthénie comme un phénomène global qui intéresse la totalité de l'homme en situation dans le monde; dans la perspective du travail, il faut surtout retenir que l'asthénie survient avec prédilection lorsque les motivations sont faibles et lorsque l'automatisation, la contrainte, la dysharmonie dans le milieu social prennent trop d'ampleur.
2 Affaiblissement des fonctions d'un organe ou d'un système (Manuila). || Asthénie cardiaque. || Asthénie musculaire. ⇒ Myasthénie.
3 Par métaphore ou fig. || Ce pays sombre dans l'asthénie.
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DÉR. Asthéniant, asthénique.
COMP. Myasthénie, neurasthénie, psychasthénie.
Encyclopédie Universelle. 2012.