1. usure [ yzyr ] n. f.
• 1138; lat. usura « intérêt de l'argent »
1 ♦ Vx Intérêt pris sur une somme d'argent.
2 ♦ Mod. Intérêt de taux excessif (par rapport à la norme financière; spécialt au-delà du taux d'intérêt maximum fixé par la loi, dit taux de l'usure); le fait de prendre un tel intérêt (⇒ usurier). Prêter à usure. Il trouvait « de plus gros intérêts dans l'aspect de l'or que dans les bénéfices de l'usure » (Balzac). Délit d'usure (en droit moderne).
♢ (1608 fig.) Littér. AVEC USURE : au-delà de ce qu'on a reçu. Rendre qqch. avec usure.
usure 2. usure [ yzyr ] n. f.
1 ♦ Détérioration par un usage prolongé. ⇒ user; attrition, 1. dégradation. Résister à l'usure. Usure des roches. ⇒ érosion.
♢ Action de ce qui use, dégrade. L'usure du temps.
2 ♦ Diminution ou altération (d'une qualité, de la santé). « Mais qu'est-ce que cette sagesse, sinon l'usure de nos sentiments, et le refroidissement de notre ferveur ? » (Larbaud). L'usure des forces, de l'énergie. « vieilli avant l'âge par l'usure nerveuse » (Thibaudet). ⇒ fatigue.
♢ Le fait d'user qqn. « Guerre d'usure totale. Usure de l'homme vivant, mais aussi de tout ce qui s'attache à lui » (Romains). — Loc. fam. Avoir qqn à l'usure, prendre l'avantage sur lui en le fatiguant peu à peu (cf. Au finish).
3 ♦ État de ce qui est altéré, détérioré par l'usage (⇒ usagé). « une redingote, un pantalon noirs, abominables d'usure et de taches » (Zola) . Usure d'une monnaie (⇒ 2. frai) .
● usure nom féminin (latin usura, intérêt de l'argent) Intérêt perçu au-delà du taux licite. Délit consistant à stipuler dans un prêt d'argent un intérêt à un taux excessif dépassant un plafond fixé par la loi. ● usure (expressions) nom féminin (latin usura, intérêt de l'argent) Littéraire. Avec usure, au-delà de ce qu'on a reçu. ● usure nom féminin (de user) Détérioration progressive par frottement, érosion, utilisation : L'usure des roches. L'usure des vêtements. Littéraire. Affaiblissement, altération d'une qualité, de la santé : Usure nerveuse. ● usure (citations) nom féminin (de user) Paul Fort Reims 1872-Argenlieu, près de Montlhéry, Essonne, 1960 L'amour, ça passe dans tant d'cœurs, c'est une corde à tant d'vaisseaux, et ça passe dans tant d'anneaux, à qui la faute si ça s'use ? L'Amour marin Flammarion Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues Aix-en-Provence 1715-Paris 1747 L'estime s'use comme l'amour. Réflexions et Maximes ● usure (expressions) nom féminin (de user) Familier. Avoir quelqu'un à l'usure, persévérer jusqu'à ce qu'il cède. Guerre d'usure, conflit dans lequel on tente d'user nerveusement l'adversaire.
usure
n. f. Détérioration due à l'usage; état de ce qui est usé. Degré d'usure d'un pneu.
|| Guerre d'usure, dans laquelle chacun des adversaires s'efforce d'user petit à petit les forces de l'autre.
|| Fam. Avoir qqn à l'usure, l'amener à céder à force de démarches, de prières répétées.
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usure
n. f. Intérêt supérieur au taux maximum légal, exigé par un prêteur; infraction de celui qui prête à un taux supérieur au taux maximum légal.
|| Fig., litt. Rendre, payer avec usure, bien au-delà de ce qu'on a reçu.
I.
⇒USURE1, subst. fém.
A. — Vx ou rare. Intérêt que produit l'argent prêté. L'usure est portée à dix pour cent. Une autre question (...) est celle de l'usure ou du prêt à intérêt. L'usure, ou comme qui dirait le prix de l'usage, est l'émolument, de quelque nature qu'il soit, que le propriétaire retire de la prestation de sa chose (PROUDHON, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 130).
B. — 1. Taux d'intérêt abusif, obtenu d'un capital prêté ou d'une marchandise vendue à crédit au-dessus du taux fixé par la coutume ou la loi. Emprunter à l'usure. Changeurs d'or et d'argent bien munis de faux poids (...) et force grippe-sous prêtant à grande usure (LECONTE DE LISLE, Poèmes barb., 1878, p. 343). Dans les pays où l'argent est rare (...) l'intérêt tend à être élevé et parfois le taux couramment admis se rapproche de l'usure (BIROU 1966).
2. Fait de prêter de l'argent à un taux d'intérêt supérieur à la coutume ou la loi. Pratiquer l'usure. [Magus] le dressait à faire l'usure dans le quartier (BALZAC, Cous. Pons, 1847, p. 132). C'est un spéculateur, un maître en fait d'emprunt, et de prêt et d'usure et de bon placement, car c'est le seul banquier qui prête à cent pour un (PÉGUY, Ève, 1913, p. 765).
— DR. Délit consistant à stipuler, dans un prêt d'argent, un intérêt dont le taux effectif dépasse de plus de moitié le taux moyen pratiqué dans les mêmes conditions pour des opérations de crédit comportant les mêmes risques. L'usure est un délit passible d'amende et au cas de récidive, d'emprisonnement (CAP. 1936).
3. Vx, rare. Fait d'emprunter à un usurier. La terre lui rapporte deux, l'usure demande huit (...). Chaque année d'intérêt enlève quatre années de travail (MICHELET, Peuple, 1846, p. 61).
C. — Loc. fig. Avec usure. Au delà de ce qu'on a reçu. Mon confrère, ajouta-t-il en me faisant un salut que je lui rendis avec usure, vous a indiqué la bonne route (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 252). [Christophe] se trouva soudain d'une richesse en ennemis qu'il n'eût jamais soupçonnée. Tous ceux qu'il avait blessés (...) se vengèrent avec usure (ROLLAND, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 500).
REM. Usurer, verbe intrans., vx. Prêter à usure. Il leur est défendu [aux Juifs] de posséder des terres, et en Russie, de les affermer; ils ne peuvent que commercer et usurer, et ils usurent, et ils commercent, que c'est une bénédiction (BALZAC, Œuvres div., t. 3, 1847, p. 667).
Prononc. et Orth.:[]. Homon. et homogr. usure2. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1140 (GEFFREI GAIMAR, Hist. des Anglais, éd. A. Bell, 6066), se restreint au sens péj. de « intérêt perçu au delà du taux légal ou habituel » 1656 (PASCAL, 8e Provinciale, 28 mai, éd. Lafuma, p. 403b), v. aussi RICH. 1680 et FUR. 1690. Du lat. usura « intérêt de l'argent » et « usage du capital prêté, jouissance de l'argent sans intérêt » formé sur la forme du parfait usus de utor « se servir de ». Bbg. WARTBURG (W. von). Glanures étymol. R. Ling. rom. 1960, t. 24, pp. 294-295.
II.
⇒USURE2, subst. fém.
A. — 1. Altération, détérioration d'une chose matérielle, résultant d'un usage prolongé ou d'actions mécaniques ou chimiques. Synon. abrasion, corrosion, érosion. Usure de pièces mécaniques due au frottement; matériaux qui résistent à l'usure; vêtement qui donne des signes d'usure. Une banquette en velours amarante, tournant au lie de vin par suite de l'usure opérée par le frottement continu des râbles (HUYSMANS, Art mod., 1883, p. 114). Premièrement une matière fragile ne se prête pas au travail du sculpteur, et deuxièmement un mauvais bois ou un métal mince et creux ne résistent pas au choc et à l'usure (ALAIN, Beaux-arts, 1920, p. 189).
2. État d'une chose matérielle qui est altérée, détériorée par un usage prolongé ou sous l'effet d'actions physiques ou chimiques. Usure d'un dallage, des marches d'un escalier, d'une statue; pneus dont l'usure est anormale. L'immuable physionomie de mes meubles depuis trente ans à la même place, l'usure de mes fauteuils que j'avais connus neufs (...) m'ont donné, chaque soir, la nausée des habitudes (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Suicides, 1883, p. 825). Elle m'appelait (...) pour que je vinsse sur la pelouse de neige, dans son camp, dont le soleil en lui donnant les reflets roses, l'usure métallique des brocarts anciens, faisait un camp du drap d'or (PROUST, Swann, 1913, p. 399).
3. P. méton. Partie usée d'une chose. Les usures d'un tapis, d'un canapé. [Des barques] remontaient vers Bordeaux (...). Et je ne voyais que la voile brune, chargée d'usures (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 201). Une usure merveilleuse luisait sur la margelle de nos puits, sur la pierre de nos seuils, sur l'épaulement courbe de nos fontaines (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 527).
4. Action de ce qui use, détériore progressivement. [Un tricot bleu] déteint par l'usure des lavages au savon noir (HAMP, Champagne, 1909, p. 83). V. irido-bronze s.v. irid(o)- II ex.
B. — Au fig.
1. Affaiblissement insensible, lente altération des forces vitales, des facultés intellectuelles, des réactions affectives d'une personne. Usure des forces, des sentiments; usure nerveuse. Il s'expliquait (...) l'usure des caractères par les soucis quotidiens du commerce (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p. 971). Peu à peu, l'étau s'est desserré. Aucun stoïcisme, aucun héroïsme, rien qui ressemble à de la résignation. Usure de la sensibilité plutôt, créant un état de moindre réaction, un commencement d'indifférence, ou plus exactement d'anesthésie (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 912).
2. Diminution progressive de la vigueur, de l'efficacité, de l'autorité ou du crédit d'une collectivité ou d'une institution et, p. ext., d'une chose abstraite. Usure d'un adversaire, d'un gouvernement. La crise morale où le pays se débattait, révélait à tous les yeux l'usure d'un système qui avait abouti à l'impuissance dans la corruption (VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 367). Une autre conséquence de la rapidité avec laquelle tout se transforme est l'usure accélérée des connaissances; dans ce domaine aussi tout se dévalue très vite (BERGER, Homme mod. et éduc., 1962, p. 118).
3. Action de ce qui affaiblit, altère progressivement. Usure des ans, du temps; usure du pouvoir, d'une existence médiocre. Christophe ne pouvait comprendre comment une jeune fille (...) qui semblait avoir (...) le désir touchant d'échapper à l'usure dégradante de la vie, pouvait se complaire dans cette société (ROLLAND, J.-Chr., Foire, 1908, p. 747). Elle vit (...) dans l'usure quotidienne d'une activité dépensée sans mesure au service de nos blessés (BOURGET, Sens mort, 1915, p. 315).
— Loc. fam. (Avoir qqn) à l'usure. (Avoir raison de quelqu'un, venir à bout de sa résistance) à force de patience, par une action persévérante et insidieuse. On va rester cachés ici, on les aura par l'usure (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 156). De temps en temps, ces messieurs jouent du couteau ou du revolver (...). Ceci dit, je les trouve plus moraux que les autres, ceux qui tuent en famille, à l'usure (CAMUS, Chute, 1956, p. 1477).
♦ Guerre, lutte d'usure. Conflit dans lequel on tente d'user l'adversaire pour l'amener à renoncer par lassitude. Mais pour faciliter le succès de cette offensive générale (...) il fallait en outre continuer de manière ininterrompue la lutte d'usure menée par les puissances les moins éprouvées ou disposant encore de ressources en hommes importantes (JOFFRE, Mém., 1931, p. 165). Mais, si jamais elle réussissait, qu'en retirerait-elle [Henriette]? Le triste avantage de vous avoir définitivement vaincu (...) se retrouvant auprès de vous comme auprès d'un homme incapable de résister à sa guerre d'usure (BUTOR, Modif., 1957, p. 68).
Prononc. et Orth.:[]. Homon. et homogr. usure1. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1530 (PALSGR., p. 288a). Dér. de user; suff. -ure.
STAT. — Usure1 et 2. Fréq. abs. littér.:476. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 508, b) 420; XXe s.: a) 798, b) 884.
1. usure [yzyʀ] n. f.
ÉTYM. 1138; lat. usura « intérêt de l'argent ».
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1 Vx. Intérêt pris sur une somme d'argent.
2 (Mil. XVIIe). Mod. Intérêt de taux excessif; le fait de prendre un tel intérêt (⇒ Usurier). || L'usure a été condamnée par l'Église et traditionnellement regardée comme immorale. || La tradition juive interdisait aux juifs de pratiquer l'usure entre eux mais non avec les étrangers. || Prêter à usure (→ Débiteur, cit. 1; grippe-sou, cit. 1; retirer, cit. 10). ⇒ 2. Prêt. || Les bénéfices de l'usure (→ Placement, cit. 1). || Délit d'usure habituelle, d'usure simple. || Forme de prêt qui servait à pallier l'interdiction de l'usure. ⇒ Pignoratif (contrat pignoratif). || La concussion (cit. 2) pour solder l'usure.
1 (…) vous enrichir par des usures si criminelles ?
Molière, l'Avare, II, 2.
2 Là, dans l'arrière-boutique, où se faisait en secret la grande et la petite usure, venait tous les jours l'étudiant pauvre et sans souci, amoureux peut-être, emprunter à énorme intérêt quelques pièces dépensées gaîment le soir, et chèrement payées le lendemain.
A. de Musset, Contes, « Mimi Pinson », VI.
♦ Rare. Le fait d'emprunter à un usurier. || « L'usure et le trompeur secours des renouvellements lui firent mener une vie heureuse… » (Balzac, Ursule Mirouët, Pl., t. III, p. 358).
♦ Avec usure (fig., 1608) : au delà de ce qu'on a reçu (comme dans le prêt à usure). || Payer avec usure (→ Magistralement, cit. 1). || Rendre qqch. avec usure.
3 Babylone paya nos pleurs avec usure.
Racine, Esther, III, 4.
4 Ce fut ainsi que Pippo trouva moyen de se débarrasser de la Bianchina, et de lui rendre avec usure le mauvais tour qu'elle lui avait joué.
A. de Musset, Nouvelles, « Fils du Titien », III.
5 J'estime les Allemands, tout en souhaitant de leur rendre un jour, avec usure, la raclée que nous en avons reçue.
R. Rolland, Jean-Christophe, Dans la maison, II, p. 1052.
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DÉR. Usurier.
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2. usure [yzyʀ] n. f.
ÉTYM. 1530; rare av. XIXe; de user, et suff. -ure.
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1 Détérioration par un usage prolongé, par effet mécanique (frottement, etc.), chimique. ⇒ User; abrasion, amoindrissement, corrosion, dégradation, éraillement. || L'usure de deux métaux par cisaillement. || Résister à l'usure. || Planche (cit. 5), mangée et blanchie par l'usure de l'eau. — Par anal. ⇒ Érosion. || L'usure des roches par un courant d'eau rapide.
1 Des escamoteurs, des hercules arrivaient, qui étalaient sur la terre de l'avenue un tapis mangé d'usure.
Zola, l'Assommoir, XI, t. II, p. 160.
♦ Techn. (Sans idée de détérioration). || Usure légère du rodage.
♦ (Rare en emploi concret). || L'usure de…, par… Fig. Action de ce qui use, dégrade, affaiblit progressivement. || L'usure des siècles (→ Dieu, cit. 15), du temps (→ 1. Marbre, cit. 3).
2 Et sans cesse, malgré l'assaut des jours,
Et les peuples minant son orgueil lourd,
Elle (la ville) résiste à l'usure du monde.
Verhaeren, les Villes tentaculaires, « L'âme de la ville ».
2 (Déb. XXe). Diminution ou altération (d'une qualité, de la santé). || « Mais qu'est-ce que cette sagesse, sinon l'usure de nos sentiments, et le refroidissement de notre ferveur ? » (Larbaud). || L'usure des forces, de l'énergie.
3 En 1871, il (Flaubert) atteint ses cinquante ans, il est vieilli avant l'âge par l'usure nerveuse, la claustration, la mauvaise hygiène, le calvados.
A. Thibaudet, Gustave Flaubert, p. 164.
♦ Loc. Le fait d'user qqn. || L'usure de l'ennemi (→ Maquis, cit. 3). — Guerre (cit. 38) d'usure. ☑ À l'usure. Fam. Avoir qqn à l'usure, prendre l'avantage sur lui en l'usant peu à peu (→ Au finish). || En principe, il a moins d'atouts, mais il compte l'avoir à l'usure.
3 État de ce qui est altéré, détérioré par l'usage (⇒ Usagé). || L'usure des marches d'un escalier (→ Abord, cit. 9). || Usure d'une étoffe par endroits. ⇒ Clair. || Usure d'une monnaie (⇒ Frai), d'une inscription à demi effacée.
4 Vimeux (…) toujours vêtu en monsieur, un chapeau, une redingote, un pantalon noirs, abominables d'usure et de taches (…)
Zola, la Terre, IV, III.
♦ Par anal. || L'usure de cette vieille contrée (→ Aplanir, cit. 2). — Par métaphore, fig. || « Un vieux débauché qui s'en va de fatigue et d'usure » (Loti, Aziyadé, III, V).
4 Par métonymie. Rare. (Une, des usures). Partie usée. || Les usures d'un tapis, d'une plaque de cheminée ancienne.
Encyclopédie Universelle. 2012.