outrance [ utrɑ̃s ] n. f.
1 ♦ Chose ou action outrée. ⇒ excès. Une outrance de langage. Les outrances du mélodrame.
♢ Caractère de ce qui est outré. ⇒ démesure, exagération. L'outrance de son langage, de ses propos. « Pour éviter le commun, ils seraient allés jusqu'à l'outrance, jusqu'au paroxysme » (Gautier). Complimenter qqn avec outrance.
2 ♦ Loc. adv. À OUTRANCE : avec exagération, avec excès. « La femme de Montchevreuil était [...] dévote à outrance » (Saint-Simon). Poursuivre un combat à outrance, jusqu'à victoire totale. « Des républicains ardents [...] qui voulaient la guerre à outrance » (Bainville).
● outrance nom féminin Caractère de ce qui est outré, de ce qui a de la démesure : Un avis peu crédible à cause de son outrance. Action ou parole qui passe les bornes, dépasse la mesure : Les outrances des critiques adressées à un film. ● outrance (expressions) nom féminin À outrance, avec excès, exagération ; jusqu'à l'élimination d'un des deux adversaires, jusqu'à la victoire totale. ● outrance (synonymes) nom féminin Caractère de ce qui est outré, de ce qui a...
Synonymes :
- démesure
- exagération
- excès
- exubérance
- intempérance
outrance
n. f.
d1./d Excès. De regrettables outrances de langage.
d2./d Loc. adv. à outrance: exagérément.
⇒OUTRANCE, subst. fém.
A. —Caractère de ce qui est outré (dans les paroles, le comportement). Synon. démesure, exagération. L'outrance du langage. Dans cette puissante serre chaude parisienne, les vertus et les vices, de même que les talents, se développent avec une sorte d'outrance (FEUILLET, Paris., 1881, pp.1-2). Mon cher ami, lui expliquai-je, l'outrance seule du fait dont tu parles est un indice certain de son invraisemblance (COURTELINE, Ronds-de-cuir, Homme qui boit, 1890, p.222).
B. —Action, chose excessive, exagérée. Synon. excès. On crut l'empêcher de parler au procès Zola. Il parla (...). Ni faiblesses ni outrances en ses paroles (A. FRANCE, Bergeret, 1901, p.195). La sculpture-moulage nous rend chères les outrances expressives de Rodin (HOURTICQ, Hist. art, Fr., 1914, p.440). Par ses outrances comme par ses reculs, il [le surréalisme] a donné sa dernière et somptueuse expression à une théorie pratique de la révolte irrationnelle (CAMUS, Homme rév., 1951, p.107).
C. —Loc. À outrance
1. [Détermine un verbe] Jusqu'à l'excès, avec exagération. Synon. à mort, jusqu'à la gauche (fam.). Vous avez affaire à de mauvaises gens qui ne transigeront point, ils veulent poursuivre à outrance pour avoir la ferme des Bordières, lui dit l'avoué (BALZAC, U. Mirouët, 1841, p.192).
— Vieilli. À toute outrance. Jusqu'à l'extrême. [Lui] qui proposait de transiger à l'amiable, s'avise de nous envoyer une citation et veut plaider à toute outrance contre moi (PICARD, Théâtre, t.4, M. Musard, 1804, p.221). Je viens de voir un auditoire de Marseillais et de Marseillaises en colère. On venait de siffler à toute outrance un acteur, horriblement laid et vieux, qui veut jouer le gamin; l'orage avait duré vingt minutes (STENDHAL, Mém. touriste, t.3, 1838, p.233).
2. [Détermine un subst. ou un adj.]
a) (À caractère) excessif. Il n'en revenait pas qu'elle fût si forte, et, dans un de ces vifs retours qui sont l'attrait de ces caractères à outrance, il prenait à deux mains cette tête raisonneuse (A. DAUDET, N. Roumestan, 1881, p.54).
b) Avec exagération. Durant la première partie de la nuit on avait joué, comme on jouait en ce temps-là, lorsque peu de gens étaient riches, mais l'étaient à outrance (FEUILLET, Onesta, 1848, p.286). Ce Borrow a fait un livre très amusant intitulé Bible in Spain. C'est dommage qu'il mente comme un arracheur de dents et qu'il soit protestant à outrance (MÉRIMÉE, Lettres ctesse de Montijo, 1845, p.135).
c) [En parlant d'un combat, d'une lutte] D'une opiniâtreté sans répit jusqu'à l'élimination de l'adversaire. Prenons à témoin tous ceux ici présents, que nous te défions au combat à outrance (...), soit à l'épée seule, soit à la dague et au poignard (DUMAS père, Henri III, 1829, II, 4, p.155). Je préfère les combats à mort à ceux où l'on se contente de harceler les taureaux (...) il y a la même différence qu'entre les combats à outrance et les tournois à lances mornées (MÉRIMÉE, Mosaïque, 1833, p.253).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Loc. adv. a) 1220 mener a outrance «mettre hors combat, vaincre» (Mort Artu, éd. J. Frappier, § 152, 5); ca 1280 metre a outrance (GIRART D'AMIENS, Escanor, 15530 ds T.-L.); fin du XIVe s. combatre a outrance (EUSTACHE DESCHAMPS, OEuvres, III, 101, 48 ds T.-L.); b) 1458 a outrance «fortement» (ARNOUL GREBAN, Mystère de la Passion, éd. O. Jodogne, 951: le sang de ton frère a oultrance Crye a moy pour avoir vengeance); 2. 1543 [éd.] oultrance «chose outrée, excès» (MAROT, Epître du Coq à l'âne, p.31). Dér. de outrer; suff. -ance. Fréq. abs. littér.:293. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 214, b) 643; XXe s.: a) 438, b) 455. Bbg. QUEM. DDL t.15.
outrance [utʀɑ̃s] n. f.
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1 (Une, des outrances). Chose ou action outrée. ⇒ Excès. || Une outrance de langage. || Les outrances du mélodrame (→ 1. Mineur, cit. 5). || Il a des hardiesses (cit. 27) et des outrances de jeune.
1 Mais je trouve que c'est outrance
Que l'un a trop et l'autre rien.
Clément Marot, Épîtres, XLIX.
2 Cette chronique était écrite à la diable, avec des cabrioles de phrases, une outrance de mots imprévus et de rapprochements baroques.
Zola, Nana, VII.
2 (V. 1530, Marot). || L'outrance. Caractère de ce qui est outré. ⇒ Démesure, exagération. || L'outrance de son langage. || Être capable d'outrance dans la fumisterie (cit. 2). || Arriver à une prodigieuse outrance dans le dithyrambe (cit.). — Ne pas haïr l'outrance (→ Excès, cit. 8, Baudelaire). || Aller jusqu'à l'outrance. ⇒ Exagérer (→ Passer, dépasser les bornes). || Porter un caractère à l'outrance (→ Amplifier, cit. 2).
3 Pour éviter le commun, ils seraient allés jusqu'à l'outrance, jusqu'au paroxysme (…)
Th. Gautier, Portraits contemporains, « Jules de Goncourt. »
4 L'orgueil de Talleyrand saignait : Chateaubriand dit qu'il « bavait de colère »; mais il y a bien souvent de l'outrance à la Saint-Simon chez l'auteur des Mémoires d'Outre-Tombe.
Louis Madelin, Talleyrand, IV, XXXII.
♦ ☑ Loc. adv. (Déb. XVe, Ch. d'Orléans). À outrance : avec exagération, avec excès. || Une femme dévote à outrance (→ Baguette, cit. 4). || Gens de bien à outrance (→ Hypocrite, cit. 9). || Se déclarer contre le morcellement (cit. 1) à outrance de la propriété. — Argumenter (cit. 1) à outrance. || Ramer à outrance, avec beaucoup d'énergie (→ Héler, cit. 1). — ☑ Vx. (1559) À toute outrance.
5 Il y eut un moment de silence; soudain nous vîmes tomber au milieu de nous un train de canonniers, fouettant les chevaux à toute outrance et se jetant sur nous.
A. de Gobineau, Nouvelles asiatiques, p. 199.
♦ Littér. || Se défendre à outrance (→ Assommer, cit. 4). || Poursuivre un combat, une lutte, une guerre à outrance, sans répit ni trêve, jusqu'à la défaite totale de l'un des adversaires. ⇒ Total (guerre totale). || Duel à outrance. || Armes à outrance : armes meurtrières utilisées dans les duels.
6 L'autre groupe, à la tête duquel était Gambetta, se composait de républicains ardents qui conservaient les traditions jacobines et qui voulaient la guerre à outrance.
J. Bainville, Hist. de France, XXI, p. 506.
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DÉR. Outrancier.
Encyclopédie Universelle. 2012.