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lester

lester [ lɛste ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1366; de lest
1Mar. Garnir, charger (un navire) de lest. P. p. adj. Navire lesté (opposé à lège) .
Lester un ballon.
2Fig. et fam. Charger, munir, remplir. Lester son estomac, ses poches. Se lester l'estomac. 2. caler. Être lesté : avoir l'estomac plein.
⊗ CONTR. Alléger, délester.

lester verbe transitif (de lest) Charger un navire, un aérostat d'un lest. Familier. Charger quelque chose en le remplissant : Lester ses poches d'objets divers. Garnir de lest le pied d'un filet ou plomber une ligne. ● lester (homonymes) verbe transitif (de lest)

lester
v. tr. Garnir, charger de lest.

⇒LESTER, verbe trans.
Fréq. au part. passé (passif)
A. — Lester qqc.1 (de/par/avec qqc.2).
1. MAR. Garnir de lest (v. ce mot A); ajouter un poids pour augmenter le tirant d'eau. On parvint enfin à l'embarquer (...) sur un mauvais bâtiment marchand qui n'était pas même lesté (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 11, 1868, p. 259). Une disposition spéciale permet de lester le navire par l'introduction de l'eau à l'intérieur (LEDIEU, CADIAT, Nouv. matér. nav., 1899, p. 154).
2. P. anal.
a) Ajouter un corps pesant, un poids à un objet (généralement à sa partie inférieure) pour lui donner une plus grande stabilité, de l'équilibre, ou pour le maintenir dans une même position. Lester un filet, une ligne. Faire l'assiette d'une torpille, c'est la lester pour lui donner une certaine flottabilité et la mettre dans de bonnes conditions d'équilibre (LEDIEU, CADIAT, Nouv. matér. nav., 1890, p. 687). Les locomotives électriques qui pourraient ne peser que quelques tonnes doivent être lestées avec des amas de plomb pour arriver à posséder un poids adhérent suffisamment élevé (SOULIER, Gdes applic. électr., 1916, p. 166). Les bouées sont (...) lestées de façon à laisser toujours émerger la même surface (BOURDE, Trav. publ., 1929, p. 322) :
1. Nos chats brisent le plus beau vase du salon (...), un grand vase persan gris et bleu (...). Sa base rétrécie prêtait à craindre et j'avais eu soin de le lester abondamment avec de la grenaille de plomb.
GIDE, Journal, 1916, p. 535.
P. métaph. Ils [les Italiens] disent que si la voiture, en France, n'a pas tourné, c'est qu'elle était lestée par les biens nationaux (STENDHAL, Corresp., t. 2, 1818, p. 67).
b) Garnir (un aérostat) de sacs de lest (v. ce mot B 1). Lester un ballon. (Dict. XIXe et XXe s.).
c) Placer, charger à l'intérieur (de quelque chose). La jeune fille (...) ayant lesté son mouchoir de quelques cailloux, le lança dans le courant (FEUILLET, Rom. j. homme pauvre, 1858, p. 183).
d) Qqn leste son estomac. Cf. C 2 b. N'est-il pas juste que de si zélés comédiens ne se mettent pas en route sans avoir lesté leur estomac d'une soupe puissante et solide? (BAUDEL., Poèm. prose, 1867, p. 225).
B. — Rare. Qqc.2 leste qqc.1. Constituer une charge qui sert de lest. On ne rapporte [de Chine] (...) que du thé vert ou noir (...); car je compte pour rien les porcelaines qui lestent les vaisseaux (Voy. La Pérouse, t. 2, 1797, p. 321).
C. — 1. Au fig. ou p. métaph.
a) Qqn leste qqn de qqc. Munir quelqu'un de ce qui lui permettra d'avoir une grande stabilité morale, intellectuelle; pourvoir quelqu'un de ce qui est nécessaire pour une fin déterminée. Il (...) y installa [sur une bicyclette] son nouvel élève, non sans l'avoir au préalable lesté des conseils d'usage (COURTELINE, Ah! Jeun., Qd je pédalais, 1897, p. 136). Un père m'eût lesté de quelques obstinations durables; faisant de ses humeurs mes principes, de son ignorance mon savoir, de ses rancœurs mon orgueil, de ses manies ma loi (SARTRE, Mots, 1964, p. 70).
Au part. passé. Il repartit vers l'hôtel du Louvre lesté de connaissances exactes sur la migration des anguilles et leur reproduction (...), sur la petite usine qui utilise le flux et le reflux du golfe de Gascogne, sur la beauté du vert de nos feux fixes (GIRAUDOUX, Bella, 1926, p. 178).
b) Qqc. leste qqn. Donner de la stabilité, du poids moral ou intellectuel (à quelqu'un). Vous avez deux choses qui doivent vous lester dans l'agitation : votre enfant et Dieu (MICHELET, Journal, p. 693). Un vent épineux de mars (...) me soumet à son humeur vagabonde, car rien ne me leste (ARNOUX, Paris, 1939, p. 86).
[P. méton. du compl.] Ce million d'or s'en va en poussière (...), devient respirable, charge, dose, leste et appesantit les consciences (HUGO, Homme qui rit, t. 1, 1869, p. 11). Un remords qu'on traîne derrière soi, une haine qui tient au cœur et l'amour d'une femme belle et grave, il y a de quoi lester une existence au départ (AYMÉ, Vouivre, 1943, p. 246) :
2. Une vie d'homme (...) n'est pas quelque chose de si uni, de si cohérent, de si dense, qu'elle puisse lester comme une masse de vertu son âme à la dérive. Nous divaguons, nous ne cessons de nous trahir nous-mêmes, notre moi d'aujourd'hui dément notre moi de la veille.
GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p. 51.
Au part. passé. Elle retomba encore une fois parmi nous, lestée de soucis, d'amour, d'enfants et de mari (COLETTE, Sido, 1929, p. 51).
2. [Sens concr.] Qqn se leste (de qqc.)
a) Se charger, se munir (de quelque chose, généralement pour augmenter son poids). Il était si léger (...) que le vent l'empêchait d'avancer, quoiqu'il eût pris une pierre en chaque main et rempli ses poches de cailloux pour se lester (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 143) :
3. Ce n'est pas pour se nourrir (...), mais pour se lester, que ces amphibies avalent des pierres. C'est un moyen d'augmenter leur pesanteur spécifique et d'aller facilement au fond de l'eau.
VERNE, Enf. cap. Grant, t. 3, 1868, p. 92.
Au part. passé. Courageux et lesté d'un sac où quelques jaunets luisaient parmi les piècettes blanches (ARÈNE, Veine argile, 1896, p. 233). Cette voyageuse qui s'en allait par un chemin peu sûr, lestée d'une paire de bas de soie, de fard rose, de fruits (COLETTE, Képi, 1943, p. 52).
Emploi abs. Dantès dut déguerpir (...) mais, tête dressée (...) et lesté, assez pour acheter une maison en ville (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 92).
Au fig. Je suis trop léger. Il faut que je me leste d'un forfait bien lourd qui me fasse couler à pic, jusqu'au fond d'Argos (SARTRE, Mouches, 1943, I, 4, p. 64).
b) Se nourrir, prendre des aliments solides ou parfois liquides (généralement en abondance).
) Qqn se leste de qqc. Pendant que mes compagnons se lestent d'un solide déjeuner, tout plein du souvenir de Thomas Becket (...), je cours visiter la cathédrale (MICHELET, Chemins Europe, 1874, p. 16).
Au part. passé. Vers neuf heures et demie, lesté d'une douzaine d'huîtres, d'un gruyère et d'un mazagran, Cozal s'achemina (...) vers la rue Grange-Batelière (COURTELINE, Linottes, 1912, XI, p. 149).
Au part. passé. Un déjeuner interminable (...). Après quoi, quand on est bien lesté, on se lève, on siffle les chiens (A. DAUDET, Tartarin de T., 1872, p. 6).
) Qqn se leste qqc. (de qqc.). [Le compl. désigne un organe de l'appareil digestif] Se lester les boyaux. Cette glaise dont certains sauvages d'Amérique se lestent le jabot lorsque la chasse et la pêche ont été malheureuses (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 156).
Absol. Nous commençâmes l'un et l'autre à manger et à boire largement (...). Je me lestai d'importance (VIDOCQ, Mém., t. 2, 1828-29, p. 46).
REM. Lesté, -ée, adj. [En parlant d'une embarcation]. Qui est muni d'un lest fixe. Anton. lège. Les dériveurs se divisent en dériveurs lestés, type Corsaire, et dériveurs légers qui ne portent aucun lest (BARBER. 1969).
Prononc. et Orth. : [], (il) leste []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1366 laster « charger (un navire) de lest » (doc. ap. J. FINOT, Étude hist. sur les relations comm. entre la Flandre et l'Espagne au moyen âge, p. 339); 1611 lester (COTGR.); 2. 1771 « charger, remplir (en gén.) » (BUFFON, Hist. nat. des oiseaux, t. 2, p. 103); 3. 1787 bien lesté « bien repu » (FÉR. Crit.); 1828-29 se lester « manger » (VIDOCQ, loc. cit.). Dér. de lest; dés. -er. Au sens de « charger (un navire) », le mot peut être empr. directement au m. néerl. lasten « id. ». Fréq. abs. littér. : 20.
DÉR. 1. Lestage, subst. masc. Action de lester (v. supra A); résultat de cette action. Lestage d'un flotteur. Leurs caractéristiques générales sont les mêmes que celles des engins classiques, mais leur lestage est plus réduit (BOYER, Pêches mar., 1967, p. 57). []. Att. ds Ac. dep. 1762. 1res attest. a) 1366 lastage « lest » (doc. ap. J. FINOT, Et. hist. sur les relations comm. entre la Flandre et l'Espagne au moyen âge, p. 339), b) 1369 « droit payé par les navires pour leur chargement » (Rev. du comté de Ponth. ds GDF.), c) [1529 en gasc. lastage « action de charger un navire » (doc. ap. K. BALDINGER ds Mél. Flasdieck (H.M.), p. 33)], 1568 en fr. (ibid., p. 35), d) 1681 « action de lester (un navire) » (Ordonnance de la marine ap. ISAMBERT, Recueil gén. des anc. lois fr., t. 19, p. 347); de lester, suff. -age. 2. Lesteur, adj. et subst. masc. Qui porte, qui arrime le lest. Matelot, navire lesteur. On appelle quelquefois bateaux lesteurs, ceux d'un port qu'on charge habituellement de lest pour le transporter à bord d'un bâtiment (WILL. 1831). Emploi subst. masc. Le meilleur lesteur aujourd'hui est le capitaine ou son second (WILL. 1831). []. Att. ds Ac. dep. 1762. 1res attest. a) 1366 lasteur « homme chargé de porter ou de disposer le lest » (doc. ap. J. FINOT, loc. cit.), 1723 lesteur (J. SAVARY DES BRUSLONS, Dict. universel de comm. d'apr. FEW t. 16, p. 446a), b) 1681 bateau lesteur (Ordonnance de la marine, loc. cit.), 1710 lesteur subst. (RICH. Additions); de lester, suff. -eur2.
BBG. — BEHRENS D. 1923, p. 71. - KEMNA 1901, p. 69 (s.v. lesteur). - LA LANDELLE (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 272 (s.v. lesté).

lester [lɛste] v. tr.
ÉTYM. 1366, laster; de lest.
1 Mar. Garnir, charger (un navire) de lest.Par ext. || Lester un ballon.
2 (1771). Fig. et fam. Charger, munir, remplir. || Lester ses poches, son portefeuille. || Lester son estomac de nourriture.
1 L'utilité matérielle (d'un roman), ce sont d'abord les quelques mille francs qui entrent dans la poche de l'auteur, et le lestent de façon que le diable ou le vent ne l'emportent (…)
Th. Gautier, Préface de Mlle de Maupin, p. 29 (éd. critique Matoré).
2 N'est-il pas juste que de si zélés comédiens ne se mettent pas en route sans avoir lesté leur estomac d'une soupe puissante et solide ?
Baudelaire, le Spleen de Paris, I.
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se lester v. pron.
(Réfl.). || Se lester (l'estomac) de nourriture; (absolt) se lester : manger une nourriture abondante (→ Se caler). Fig. || Se lester (l'esprit) de connaissances.
(Passif) :
3 (…) c'était assez pour avoir mis du plomb dans sa tête (de Tonquedec) : mais, il y a des têtes qui ne se lestent jamais.
Mme de Sévigné, 195, 19 août 1671.
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lesté, ée p. p. adj.
Mar. || Navire lesté (contr. : lège).Fig. (Personnes). || Être lesté de provisions, d'argent. Muni.(1787). Spécialt. || Être lesté, bien lesté : avoir bien mangé, bien bu. || Rasé, lesté de sa tasse de café dès huit heures du matin (→ Horloge, cit. 8; et aussi casquette, cit. 3).(Abstrait). || Lesté de connaissances, d'un bagage intellectuel.
4 Il repartit vers l'hôtel du Louvre lesté de connaissances exactes sur la migration des anguilles et leur reproduction dans la mer des Sargasses, sur la petite usine qui utilise le flux et le reflux du golfe de Gascogne, sur la beauté du vert de nos feux fixes, si envié des Anglais.
Giraudoux, Bella, VII.
5 Cependant le voici lesté de ses cent vingt écus et prenant tout allègre la direction d'Angers. Il a vingt-cinq ans. Il est libre. Plus riche qu'il n'a jamais été et ne sera sans doute jamais.
Francis Carco, Nostalgie de Paris, p. 78.
CONTR. Alléger, délester.
DÉR. Lestage, lesteur.

Encyclopédie Universelle. 2012.