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justicier

justicier, ière [ ʒystisje, jɛr ] n.
• v. 1131; de justice
1Personne qui rend justice, qui fait régner la justice ou l'applique. Saint Louis, roi et justicier. « En sa personne [de Pierre Ier] se confondent le juge et le justicier » (Balzac).
Féod. Personne qui a droit de justice en un lieu. Haut, bas justicier.
2Personne qui agit en redresseur de torts, vengeant les innocents et punissant les coupables. Se poser en justicier. Les justiciers de la route. Le justicier des romans, des films populaires.

justicier nom masculin Seigneur qui avait le droit de rendre la justice. (On distinguait le seigneur haut justicier, qui jugeait les causes les plus graves, et le seigneur bas justicier, compétent pour les autres causes.) Officier royal de justice. ● justicier, justicière nom (de justice) Personne qui agit en redresseur de torts sans en avoir reçu le pouvoir. ● justicier, justicière adjectif Littéraire. Qui symbolise l'action du justicier, du redresseur de torts : Doigt justicier.

justicier, ère
n. et adj.
d1./d Personne qui aime à faire régner la justice, qui l'exerce et l'applique.
adj. Un roi justicier.
d2./d Personne qui prétend exercer la justice et redresser tous les torts. S'ériger en justicier.

I.
⇒JUSTICIER1, verbe trans.
Vieilli. Infliger (à un condamné) la peine corporelle fixée par la sentence; généralement, (l')exécuter. Renaud d'Apremont, mon beau-frère, est en prison, sur le point d'être justicié (MÉRIMÉE, Jacquerie, 1828, p. 150). — Tu ne seras pas contente que tu n'aies fait pendre cet enfant, avec ta damnée langue? lui dit-il (...) d'une voix sévère. — Je l'aimerais mieux justicié mais sauvé, que vivant et Huguenot, dit-elle d'un air sombre (BALZAC, Martyr calv., 1841, p. 78).
P. ext. Tuer. Les Bourguignons mettaient le feu aux maisons, pillaient les églises, justiciaient les plus gros bourgeois (FRANCE, J. d'Arc, t. 2, 1908, p. 2).
Prononc. : []. Étymol. et Hist. 1. 1121-34 « gouverner » Lëuns... Mustes bestes justise (PH. DE THAON, Bestiaire, 28 ds T.-L.); 2. 1160-74 sa char justicier « mortifier sa chair » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1708); 3. 1174-76 « juger, châtier » (G. DE PONT-STE-MAXENCE, St Thomas, 45 ds T.-L.). Dér. de justice; dés. -er; cf. le lat. médiév. justitiare « contraindre quelqu'un à s'incliner devant la justice; juger » (cf. NIERM.).
II.
⇒JUSTICIER2, -IÈRE, subst.
A. — [Correspond à justice B] Celui, celle qui fait justice. Faire œuvre de justicier; s'ériger, parler en justicier. Cicéron est un justicier par la pensée de même que Brutus est un justicier par l'épée (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 419). As-tu jamais songé à cela, toi, que la postérité n'est peut-être pas l'impeccable justicière que nous rêvons? (ZOLA, Œuvre, 1866, p. 350) :
1. Il (...) attendait (...) que la place arrivât dans le viseur (il lui restait deux bombes de cinquante kilos). Indifférent aux mitrailleuses de terre, il se sentait à la fois justicier et assassin, plus dégoûté d'ailleurs de se prendre pour un justicier que pour un assassin.
MALRAUX, Espoir, 1937, p. 520.
[Avec déterminant] Il ne marchait plus à terre, comme soulevé par cette idée intense de se faire le justicier des maux qu'il avait vu souffrir (ZOLA, Ventre Paris, 1873, p. 845) :
2. Me voici sur mon trône assis comme un grand juge.
L'innocence à mes pieds peut chercher un refuge.
Irus est le bourreau, Silvio le confesseur.
Nous sommes justiciers de l'honneur des familles.
MUSSET, À quoi rêvent j. filles, 1832, II, 7, p. 383.
En partic.
1. Celui qui lutte pour la justice, prenant la défense des innocents, châtiant les coupables. Ce défenseur des pauvres, des veuves, des orphelins [saint Yves], est devenu dans le pays le grand justicier, le redresseur de torts (RENAN, Souv. enf., 1883, p. 10) :
3. ... aujourd'hui (...) les positions sont nettes : d'une part, les coupables qui ne veulent pas que la lumière se fasse; de l'autre, les justiciers qui donneront leur vie pour qu'elle soit faite.
Doc. hist. contemp., 1959, p. 59.
2. Celui qui est partisan d'une justice rigoureuse. La reine Isabelle (...) ne voulut pas qu'on dît Pèdre le Cruel; mais d'accord avec le peuple (...) elle l'appela Pèdre le Justicier (MÉRIMÉE, Don Pèdre Ier, 1848, p. 536).
Emploi adj.
[En parlant d'une pers. ou d'une personnification] Qui fait justice. Ange, dieu, bandit justicier. Pour un roi justicier l'indulgence est un crime (BAINVILLE, Gringoire, 1866, 7, p. 49). V. échec 2 ex. :
4. ... un comportement de dépendance passive, obséquieuse devant l'autorité, qui oriente l'adoration vers le Père tout-puissant et justicier plutôt que vers le Christ fraternel.
MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 745.
[En parlant d'un acte, d'une attitude ou d'une expression] Qui révèle un comportement de justicier. Geste, ton justicier; diatribe, fureur, voix justicière. Je n'admets pas l'amour grognon, despotique, justicier, qui vitupère et assassine (CHARDONNE, Éva, 1930, p. 23). On a cité d'elle des mots pénétrants, des mots justiciers, des mots impitoyables (COLETTE, Belles sais., Discours de réception, 1936, p. 223) :
5. ... coincé entre les deux branches — paternelle et maternelle — comme dans une tenaille, sentant converger sur lui autant de regards justiciers qu'il y avait d'assistants, Lulu Maublanc demeurait silencieux...
DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 195.
B. — [Correspond à justice C]
1. Celui, celle, qui a la charge de la justice. Le grand justicier Brisson (...) va poursuivre le colonel Picquart, et (...), pour nous donner le change, fait la frime d'arrêter Esterhazy (CLEMENCEAU, Iniquité, 1899, p. 479). Grâce à mon titre de justicier officiel, je bénéficie d'un préjugé favorable, jusqu'à ce que j'aie fait abondamment la preuve de mon incapacité (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 110).
[Avec déterminant] Le roi est justicier de Dieu. La direction qu'il donne au glaive est l'effet même de la volonté de Iahvé (RENAN, Hist. Isr., t. 2, 1889, p. 109).
MOY. ÂGE. Celui qui a droit de justice en un lieu donné (cf. basse, haute justice, s.v. justice C 1). Seigneur bas justicier. Le duc de Lorges, grand justicier du royaume (BALZAC, Œuvres div., t. 1, 1830, p. 244). La guerre d'usure, poursuivie par la royauté contre les grands seigneurs, hauts justiciers, attachés, en l'espèce, à un privilège que ne leur reconnaît aucun texte de l'ancien droit commun (E. SCHNEIDER, Charbon, 1945, p. 119) :
6. Cette déclaration du roi (...) : c'était ce qu'on nommait des lettres de justice; elles se terminaient par l'ordre donné aux justiciers et officiers royaux de procéder, chacun dans sa juridiction, contre lesdits coupables, (...) et d'administrer justice aux parties.
BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 328.
Emploi adj. Toute l'organisation justicière et universitaire dont les costumes, les hermines, les coiffures vous ramenaient au temps du vieux Paris (A. DAUDET, Nabab, 1877, p. 107). Dans les années qui suivent l'année 1261, la lutte, qui se prolonge, fatigue le bras justicier (FARAL, Vie temps st Louis, 1942, p. 229).
2. Celui qui exécute la sentence :
7. ... il obtint, plusieurs fois, des gouverneurs, d'exercer les horribles fonctions de justicier, aux lieu et place des exécuteurs orientaux.
VILLIERS DE L'I.-A., Contes cruels, 1883, p. 146.
Prononc. et Orth. : [], fém. [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1119 dr. féod. « celui qui a droit de justice en quelque lieu » ici en parlant de Dieu Deus est forz justisier (PH. DE THAON, Comput, 960 ds T.-L.); b) ca 1135 « celui qui fait régner la justice » justisier (Couronnement Louis, éd. G. Lepage, AB 146); 2. av. 1801 « qui a ou qui s'arroge le droit de porter un jugement » hauts justiciers de la littérature (RIVAROL ds Lar. Lang. fr.); 3. 1873 « qui fait justice lui-même » (ZOLA, loc. cit.). Dér. de justice; suff. -ier. Fréq. abs. littér. : 144.
DÉR. Justiciard, subst. masc., péj. Magistrat, auxiliaire de justice. Quand il aurait retrouvé l'homme (...), certes, il ne pensait nullement à le rendre au bourreau! Pas de jeu, ça! Flammèche n'avait rien d'un justiciard (...). Il espérait seulement toucher la grosse somme (LA VARENDE, Homme aux gants, 1943, p. 179). Emploi adj. Qui est propre aux gens de justice. Mais, à l'intérieur [de la maison de M. Lescuyer], c'était encore pis. Tout y respirait l'avarice provinciale et la morgue justiciarde (COPPÉE, Coupable, t. 8, 1897, p. 7). [], fém. [-]. 1res attest. 1834 subst. plur. « les gens de justice » (BALZAC, Œuvres div., t. 2, p. 669), 1897 adj. « relative aux gens de justice » (COPPÉE, loc. cit.); de justicier2 par substitution de suffixe.
BBG. — GOHIN 1903, p. 233. - QUEM. DDL t. 10 (s.v. justiciard).

1. justicier [ʒystisje] v. tr.
ÉTYM. V. 1131, « gouverner »; justisier, v. 1119; au sens ci-dessous, v. 1175; de justice, et -ier.
Vx. Punir (un condamné), lui faire subir une peine corporelle, en exécution d'une sentence, d'un arrêt. || Justicier un criminel.Au p. p. || Justicié, ée.
DÉR. Justiciable.
HOM. 2. Justicier.
————————
2. justicier, ière [ʒystisje, jɛʀ] n. et adj.
ÉTYM. V. 1131; en dr. féodal, 1119; de justice, et -ier.
1 a N. Personne qui rend la justice, qui fait régner la justice ou l'applique. || Saint Louis, roi et justicier.Le justicier de Dieu (au nom de Dieu).
1 Le czar Pierre 1er abattait lui-même les têtes de ses sujets : en sa personne se confondent le juge et le justicier, et le justicier est vénéré parce qu'il est à la fois la tête qui condamne et le bras qui exécute la sentence.
Balzac, Souvenirs d'un paria, II, in Œuvres diverses, t. I, p. 229.
Féod. Personne qui a droit de justice en un lieu. || Haut, bas justicier.
b Adj. || Seigneur justicier, dame justicière.
Rare. || Le bras justicier, de la justice.
2 N. m. Personne qui agit en redresseur de torts, en vengeur des innocents et punisseur des coupables. || Les justiciers des romans d'aventures. || Se faire le justicier de… (qqn, qqch.; une injustice).
1.1 Cicéron est un justicier par la pensée de même que Brutus est un justicier par l'épée.
Hugo, les Misérables, t. 2, p. 419, in T. L. F.
2 Au dedans, dès le douzième siècle, le casque en tête et toujours par chemins, il est le grand justicier, il démolit les tours des brigands féodaux, il réprime les excès des forts, il protège les opprimés, il abolit les guerres privées, il établit l'ordre et la paix (…)
Taine, les Origines de la France contemporaine, I, t. I, p. 17.
3 Il (…) attendait (…) que la place arrivât dans le viseur (il lui restait deux bombes de cinquante kilos). Indifférent aux mitrailleuses de terre, il se sentait à la fois justicier et assassin, plus dégoûté d'ailleurs de se prendre pour un justicier que pour un assassin.
Malraux, l'Espoir, 1937, p. 520.
3 Adj. (V. 1131). Qui fait régner la justice. || Un dieu justicier. || Ange justicier.Un bandit justicier, qui veut corriger des injustices.
(Au sens 2). || « Des éclats justiciers, de tonnantes algarades » (cit. 3). || Geste, regard, ton justicier. || Des mots justiciers. || Un livre justicier et accusateur.
(1873, Zola). Qui se fait justice lui-même.N. m. || Se faire le justicier des iniquités.
4 N. m. (Villiers de L'Isle-Adam, in T. L. F.). Rare. Bourreau.
DÉR. Justiciard.
HOM. 1. Justicier.

Encyclopédie Universelle. 2012.