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insurrection

insurrection [ ɛ̃syrɛksjɔ̃ ] n. f.
• 1361; bas lat. insurrectio, de insurgere s'insurger
1Action de s'insurger; soulèvement qui vise à renverser (le pouvoir établi). émeute, mutinerie, rébellion, résistance (active), révolte, révolution, sédition, soulèvement, 2. trouble (cf. Levée de boucliers). Insurrection populaire. Insurrection de paysans ( jacquerie) , des chouans ( chouannerie) . Journées d'insurrection. Foyer d'insurrection. « l'insurrection [...] peut être, comme a dit La Fayette, le plus saint des devoirs » (Hugo). Briser, réprimer une insurrection.
2Le fait de s'insurger, révolte (fig.). L'insurrection de qqn contre l'injustice.
⊗ CONTR. Soumission.

insurrection nom féminin (bas latin insurrectio, -onis) Action de s'insurger, de se soulever contre le pouvoir établi pour le renverser : L'insurrection de février 1848. Littéraire. Opposition vivement exprimée : Insurrection de la dignité en face d'une humiliation.insurrection (citations) nom féminin (bas latin insurrectio, -onis) Ludovic Halévy Paris 1834-Paris 1908 Académie française, 1884 Je commence à m'embrouiller, moi, dans ces insurrections qui sont un devoir et dans ces insurrections qui sont un crime!… Monsieur et Madame Cardinal Calmann-Lévy Maximilien de Robespierre Arras 1758-Paris 1794 Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple le plus sacré et le plus indispensable des devoirs. À la Convention nationale, 10 juillet 1794 Donatien Alphonse François, comte de Sade, dit le marquis de Sade Paris 1740-Charenton 1814 L'insurrection n'est point un état moral ; elle doit être pourtant l'état permanent d'une république. La Philosophie dans le boudoir Jules Vallès Le Puy 1832-Paris 1885 Ah ! ceux qui croient que les chefs mènent les insurrections sont de grands innocents ! Jacques Vingtras, l'Insurgé Giuseppe Mazzini Gênes 1805-Pise 1872 L'insurrection finit quand la révolution commence. L'insurrezione finisce quando la rivoluzione comincia. Scritti politici insurrection (difficultés) nom féminin (bas latin insurrectio, -onis) Prononciation [̃ ;&ph103; ;&ph109; ;ʀɛ ;&ph95; ;&ph103; ;&ph94; ;̃ ;], prononcer insu-, avec le son s, comme dans à l'insu de, et non avec le son z (ne pas se laisser influencer par résurrection). Orthographe Avec deux r.insurrection (synonymes) nom féminin (bas latin insurrectio, -onis) Action de s'insurger, de se soulever contre le pouvoir établi...
Synonymes :
- chouannerie
- jacquerie
- mutinerie
- rébellion
- révolte
- révolution
- sédition
- soulèvement

insurrection
n. f. Action de s'insurger; soulèvement en masse contre le pouvoir établi, révolte.

⇒INSURRECTION, subst. fém.
A. — Action de s'insurger, de se soulever contre un pouvoir politique établi en recourant à la violence armée; le mouvement lui-même, quand il est de grande ampleur.
Insurrection contre qqc. L'étendard de l'insurrection contre le gouvernement (ROBESP., Discours, Guerre, t. 8, 1792, p. 137). Leur action [des Alliés], appuyée au moment voulu par l'insurrection nationale contre l'envahisseur, pèsera lourdement sur la décision stratégique (DE GAULLE, Mém. guerre, 1956, p. 561) :
1. L'accord, à droite, était complet, le succès était en vue et les partis républicains alarmés se rapportaient et fondaient l'union des gauches, fort troublés d'ailleurs à l'idée de recourir à l'insurrection contre une restauration légale.
BAINVILLE, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 229.
Absol. L'insurrection de 1830, de 1848, de la Commune de Paris. Il y a l'émeute, et il y a l'insurrection; ce sont deux colères; l'une a tort, l'autre a droit (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 270). Le passage de la situation révolutionnaire à l'insurrection, c'est une chose; mais le passage de l'insurrection à la révolution, c'en est une autre (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 60) :
2. L'insurrection devait commencer à une heure — la grève générale, donc, à midi — et il fallait que la plus grande partie des groupes de combat fût armée avant cinq heures. La moitié de la police, crevant de misère, passerait sans doute aux insurgés.
MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 211.
Droit à l'insurrection. Droit revendiqué (et reconnu par certaines constitutions) de se soulever contre l'autorité légale lorsqu'elle va contre la volonté populaire ou les intérêts du peuple. Le droit à l'insurrection est celui en vertu duquel un peuple peut revendiquer sa liberté, soit contre la tyrannie d'un despote, soit contre les privilèges d'une aristocratie, sans dénonciation préalable, et par les armes (PROUDHON, Confess. révol., 1849, p. 295).
Rare. [Constr. avec un compl. prép. de] Cette insurrection de la famine fut un véritable guet-apens des royalistes, pour écraser le peuple et lui donner un roi (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 364).
En partic.
[En parlant d'un groupe numériquement peu important] Vieilli. Synon. de rébellion, révolte. L'insurrection du régiment de Château-Vieux (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 311). Une insurrection générale des équipages, qui éclata bientôt à Brest, n'eut pas de sanction (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 50).
P. anal. Le pont ressemble à un dortoir de collège en insurrection (ABOUT, Grèce, 1854, p. 174).
Action de se révolter, de contester une autorité (sans nécessairement recourir à la violence). Synon. contestation, révolte. Comme si la nature (...) avait voulu prévenir toute insurrection de la part du sexe faible, elle a donné à celui-ci en prédominance, la vénération, la subordination, l'attachement (PROUDHON, Pornocratie, 1865, p. 29).
P. méton. Groupe de personnes insurgées. Le second jour, vingt mille hommes de sections thermidoriennes et royalistes (...) repoussèrent l'insurrection dans ses quartiers misérables, d'où la famine l'avait fait sortir (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 2, 1870p. 360). L'insurrection triomphante s'emparait définitivement de tous les ministères et de toutes les administrations publiques (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 587).
SYNT. Pays, peuple, ville en insurrection; se mettre en insurrection; fomenter, appeler à l'insurrection; l'insurrection couve, éclate, se prépare, échoue, triomphe; écraser, étouffer, mater, réprimer une insurrection; insurrection et anarchie.
B. — Au fig.
1. Action de se révolter, de contester une autorité sociale, morale, religieuse, esthétique, un état de fait.
Insurrection contre qqc. L'insurrection stoïcienne contre le mal (J. SIMON, Relig. natur., 1856, p. 285). Entrer en insurrection contre la logique (BRETON, Manif. Surréal., 2e Manif., 1930, p. 98) :
3. Caravage, dont tout l'art est une véhémente insurrection contre les conventions idéalistes de la Renaissance, bâtit de solides et rudes gaillards, aux membres durs, à la peau tannée, ridée par les intempéries et les brutalités de l'existence.
HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 283.
Absol. Le canon ou le dogme écrit est produit par l'hérésie qui est une insurrection religieuse (J. DE MAISTRE, Souveraineté, 1821, p. 374). Dans ces espèces d'insurrections spirituelles du seizième siècle, ce n'étaient pas seulement les doctrines, c'étaient les mœurs qui étaient en jeu (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 7, 1853, p. 269) :
4. Ici, quel recours d'abord? Rien à attendre du peuple (...). Rien à attendre de ses représentants (...). Rien à attendre que de la conscience humaine révoltée. Rien de possible que l'insurrection de l'individu. Par son gant jeté à la face de toutes les puissances qui sont, Zola, superbement rebelle, a fait l'acte sauveur.
CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p. 490.
2. Littér. État d'exaltation intérieure. Gide me disait : « Ce qui nous a séduits dans cette morale, c'est son danger. » Je ne saurais vivre sans danger, sans ce danger-là. Cette insurrection intérieure elle m'est joie, mais en tant que périlleuse, en tant que presque insurmontable (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1909, p. 104). Shelley était nerveux et agité. Une sorte d'insurrection sentimentale soulevait en lui les uns contre les autres des sentiments contradictoires (MAUROIS, Ariel, 1923, p. 168).
REM. Insurrectionner, verbe trans. Synon. de insurger (dans ses différentes accept.). Il faut (...) insurrectionner les prolétaires, sans attendre que les chefs donnent l'ordre! (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 101). Emploi pronom. Les générations contemporaines ne s'insurrectionnent que pour la satisfaction d'intérêts matériels (GONCOURT, Journal, 1871, p. 755). Au fig. — De quoi! Est-ce que tu t'insurrectionnes, par hasard? Quel est ce genre de scrupules, monsieur? (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 80).
Prononc. et Orth. : []. [] ou [] ds BARBEAU-RODHE 1930 et WARN. 1968. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. 1372-77 (ORESME, Politiques, éd. A. D. Menut, 182a), rare du XVIe au XVIIIe s., à nouveau 1748 (MONTESQUIEU, Lois, VIII, XI ds BRUNOT t. 6, p. 45, note 4). Empr. au b. lat. insurrectio, -onis « action de s'élever », formé sur le supin insurrectum de insurgere, v. insurger. Fréq. abs. littér. : 628. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 936, b) 1 389; XXe s. : a) 438, b) 863. Bbg. DUB. Pol. 1962, p. 325.

insurrection [ɛ̃syʀɛksjɔ̃; ɛ̃zyʀɛksjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1361; bas lat. insurrectio, du supin du lat. insurgere. → Insurger.
1 Action de s'insurger; soulèvement qui vise à renverser (le pouvoir établi). Émeute, levée (de boucliers), mouvement (insurrectionnel), mutinerie, révolte, révolution, sédition, soulèvement, trouble. || L'insurrection d'une population contre le pouvoir, contre l'occupant.Plus cour. (sans compl. en contre). || Insurrection de paysans ( Jacquerie). || L'insurrection des Chouans ( Chouannerie). || L'insurrection des canuts de Lyon (→ Faim, cit. 12). || Peuple en insurrection. Insurgé (s'insurger). || L'insurrection de 1830. || Journées d'insurrection (→ Essuyer, cit. 15). || Foyer (cit. 21) d'insurrection. || Mouvement d'insurrection qui avorte (cit. 10), qui est étouffé, réprimé; qui aboutit à la révolution. || Droit à l'insurrection. Résistance (à l'oppression).
1 Mes Crétois, pour tenir les premiers magistrats dans la dépendance des lois, employaient un moyen bien singulier : c'était celui de l'insurrection. Une partie des citoyens se soulevait (…) Une institution pareille, qui établissait la sédition pour empêcher l'abus du pouvoir, semblait devoir renverser quelque république que ce fût. Elle ne détruisit pas celle de Crète (…)
Montesquieu, l'Esprit des lois, VIII, XI.
2 Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.
Constitution du 24 juin 1793, art. 35.
3 Il y a l'émeute, il y a l'insurrection; ce sont deux colères; l'une a tort, l'autre a droit (…) la guerre du tout contre la fraction est insurrection; l'attaque de la fraction contre le tout est émeute (…)
De là vient que, si l'insurrection, dans des cas donnés, peut être, comme a dit Lafayette, le plus saint des devoirs, l'émeute peut être le plus fatal des attentats.
Hugo, les Misérables, IV, X, II.
4 (…) l'insurrection eut, pendant une heure ou deux, une certaine recrudescence (…) des barricades s'ébauchèrent. Devant la porte Saint-Martin, un jeune homme, armé d'une carabine, attaqua seul un escadron de cavalerie (…) Rue Saint-Denis, une femme tirait sur la garde municipale de derrière une jalousie baissée (…) on jeta du haut des toits sur la troupe de vieux tessons de vaisselle et des ustensiles de ménage (…)
Hugo, les Misérables, V, I, XIII.
5 (…) le propre d'une insurrection populaire, c'est que, personne n'y obéissant à personne, les passions méchantes y sont libres autant que les passions généreuses, et que les héros n'y peuvent contenir les assassins.
Taine, les Origines de la France contemporaine, t. III, II, p. 69.
6 (…) un coup de force politique, qui sous le nom d'insurrection est le plus sacré des devoirs quand il vient d'en bas, et sous le nom de coup d'État est le plus exécrable des abus quand il vient d'en haut (…)
Ch. Péguy, la République…, p. 364.
7 Le droit à l'insurrection, incontestable en théorie, est en fait dépourvu d'efficacité. La loi constitutionnelle d'un pays ne peut le reconnaître sans jeter dans ce pays un ferment d'anarchie. C'est ce qui faisait dire à Boissy d'Anglas que la Constitution de 1793 avait organisé l'anarchie.
L. Duguit, Traité de droit constitutionnel, t. III, p. 806.
2 (Mil. XIXe; in Littré). Littér. Révolte (fig.). || L'insurrection de la conscience, de l'amour-propre, contre… || Une insurrection morale spirituelle.L'insurrection de qqn contre l'injustice.
8 Et j'ai lutté cette fois encore par des moyens généraux, par des moyens valables pour toute l'humanité. Par une insurrection organisée de l'esprit contre la morale, contre la conscience.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, VII, p. 66.
CONTR. Soumission.
DÉR. Insurrectionnaire, insurrectionnel. — V. Insurrecteur.

Encyclopédie Universelle. 2012.