et [ e ] conj. I ♦ Conjonction de coordination qui sert à lier les parties du discours, les propositions ayant même fonction ou même rôle et à exprimer une addition, une liaison, un rapprochement.
1 ♦ Reliant des mots ou des groupes de mots de même catégorie.
♢ (Exprimant des éléments de même nature). Paul et Virginie. Le meunier, son fils et l'âne. Toi et moi. Faire vite et bien. « je payerai la demoiselle; Et je l'épouserai » (Beaumarchais). ⇒ puis. Cela et le reste. ⇒ et cætera. Deux et deux font quatre. ⇒ plus. Cela n'est pas et ne sera pas. ⇒ ni. Vous mentez l'un et l'autre. ⇒ comme. Plus je le fréquente et plus je l'apprécie. J'ai accepté. Et vous ? — (avec nuance d'insistance) C'est fini, et bien fini. — Littér. Devant chaque terme d'une énumération « Cette mince et pâle et fine Juliette » (France). — Reliant deux sujets séparés par un verbe « Albe le veut, et Rome » (P. Corneille). — Spécialt Il y a parfum et parfum, mensonge et mensonge : tous les parfums, tous les mensonges ne sont pas identiques.
♢ (Rapprochant des éléments différents ou opposés). « Je plie et ne romps pas » (La Fontaine). ⇒ mais . Nous t'hébergeons et tu nous voles. ⇒ pourtant. « Le peuple n'a guère d'esprit, et les grands n'ont point d'âme » (La Bruyère). ⇒ alors (que).
2 ♦ Reliant deux parties de nature différente. Un gilet long et sans manches. « Les esprits justes, et qui aiment à faire des images » (La Bruyère). Il parle l'anglais, et couramment. — Tu as accepté ? — Et après ?
3 ♦ Dans des nombres composés Vx « la règle des vingt et quatre heures » (P. Corneille).
♢ Mod. Joint un aux dizaines (sauf dans quatre-vingt-un) et dans soixante et onze. Vingt et un, trente et un. Littér. Les Mille et Une Nuits. — Devant la fraction d'un nombre fractionnaire. Et demi. Quatre heures et quart (cf. Un quart). Deux heures et demie. Deux pages un cinquième, ou et un cinquième.
II ♦ En début de phrase avec une valeur emphat. Et voici que tout à coup il se met à courir. ⇒ alors. « Et je pleurais ! et je me trouvais à plaindre et la tristesse osait approcher de moi ! » (Rousseau). Et les enfants de crier ! Et comment ! Et alors ? Fam. Et d'un(e), et de deux... Mettant en évidence un processus. Et d'un tu parles trop, et de deux, on m'a tout raconté.
III ♦ En emploi nominal ou adjectival Math., log., inform. Symbole ou opérateur représentant l'intersection, le produit logique. La fonction ET. — Et/ou.
⊗ HOM. Eh. Hé.
● et conjonction de coordination (latin et) Marque : une liaison entre deux mots, deux groupes de mots ou deux propositions (généralement une adjonction ou une succession immédiate) : Il faut agir vite et bien. Je finis ce travail et je suis à vous. une opposition : Tu viens d'arriver et tu veux déjà repartir ? une conséquence : On l'a menacé d'un procès, et il n'a pas insisté. une précision surajoutée, avec une nuance d'insistance : C'est fini, et bien fini. un sentiment (étonnement, indignation, contentement de soi, etc.), en tête d'une phrase plus ou moins conclusive : Et moi qui ne me doutais de rien ! l'addition dans les noms de nombre composés, entre un nombre de dizaines et un (ou unième) : Vingt et un. Et/ou, formule indiquant que les deux termes coordonnés le sont, au choix, soit par et, soit par ou. Familier. Et d'un, et de deux, etc., s'ajoute parfois à chacun des termes d'une énumération, par exemple dans une argumentation. Il y a + nom et + nom, indique qu'on veut marquer une différence de qualité, de valeur entre des éléments de même espèce : Il y a parfum et parfum. ● et nom masculin invariable Opérateur booléen binaire donnant la valeur si, et seulement si, les deux opérandes ont la valeur « vrai », et prenant la valeur « faux » sinon. ● et (difficultés) conjonction de coordination (latin et) Orthographe 1. Ponctuation devant et. La conjonction et est précédée d'une virgule : 1o Lorsqu'elle coordonne deux propositions construites de manières différentes : « Vezzano n'était qu'un îlot minuscule, et les traités de navigation que j'avais feuilletés à l'Amirauté ne lui consacraient qu'une notice »(J. Gracq). 2o Pour mettre en évidence le contraste ou l'opposition entre les éléments qu'elle coordonne : je l'avoue, et même je le revendique. 3o Lorsqu'elle est précédée ou suivie d'une autre conjonction de coordination : il doit partir demain ou après-demain, et rejoindre des amis à Dijon. Aucune ponctuation ne précède et lorsque cette conjonction unit des mots ou des membres de phrase de même nature : je l'ai croisée et je l'ai saluée ; j'attendrai ton retour le jour et la nuit ; il partira demain matin et il arrivera à destination avant la nuit. 2. Et dans les noms de nombres. Dans les noms de nombres, et n'est pas séparé par un trait d'union des éléments qu'il coordonne : vingt et un, trente et unième. Accord 1. Accord de l'adjectif après deux noms coordonnés par et. Si l'adjectif ne se rapporte qu'au dernier des noms coordonnés par et, il s'accorde avec ce nom : vivre d'amour et d'eau fraîche. S'il se rapporte aux deux noms, il prend la marque du pluriel : un bordeaux et un bourgogne excellents. 2. Accord des adjectifs coordonnés par et après un nom au pluriel. Si les adjectifs se rapportent au nom au pluriel, ils prennent la marque du pluriel : les villes françaises et allemandes proches de la frontière se ressemblent (= les villes françaises et les villes allemandes). Si le nom au pluriel peut former, avec chacun des adjectifs respectivement, un groupe au singulier, les adjectifs s'écrivent au singulier : les langues française et italienne présentent beaucoup de racines communes (= la langue française et la langue italienne). Recommandation Il est souvent préférable, pour plus de clarté, de répéter le nom au singulier : l'équipe sud-africaine et l'équipe néo-zélandaise s'affronteront en finale. 3. Accord du nom après deux adjectifs numéraux ordinaux coordonnés par et. On écrit : le dix-septième et le dix-huitième siècle (siècle est sous-entendu après dix-septième), mais : les dix-septième et dix-huitième siècles (= les siècles dix-sept et dix-huit). Le premier et le deuxième cheval, les premier et deuxième chevaux. Emploi 1. Et dans l'expression de l'heure : midi et demi ; onze heures et quart ou onze heures un quart. Recommandation Dans l'expression soignée, on dit plutôt onze heures et quart que onze heures un quart. 2. Et commercial. Dans les inscriptions commerciales (enseignes, en-têtes de lettres, cartes de visite professionnelles, etc.), il est d'usage de remplacer et par le signe &, dit «et» commercial ou esperluette : Société des ciments & chaux du Brabant-Hainaut. Marchand & frères. Remarque L'esperluette était d'un usage beaucoup plus répandu dans la typographie ancienne (XVIe-XVIIIe s.). Elle n'est plus utilisée aujourd'hui que dans le domaine commercial. ● et (homonymes) conjonction de coordination (latin et) eh ! interjection hé ! interjection
et
conj.
d1./d Conjonction de coordination liant des parties du discours de même nature. Bon et beau. Soixante et un. Vous avez tort et vous le regretterez.
|| (Marquant l'opposition.) "Je plie et ne romps pas" (La Fontaine).
d2./d Conjonction de coordination liant des parties du discours de nature différente. Un garçon courageux et qui ne se vante pas de l'être.
d3./d Dans une énumération, pour insister. Et le riche et le pauvre, et le fort et le faible.
d4./d Conjonction à valeur emphatique, en début de phrase. Et tous de rire!
⇒ET, conj. de coordination.
Conj. copulative servant à coordonner des termes, des groupes de termes et des phrases, et exprimant une addition, une jonction, un rapprochement.
I.— [Conj. coordonnant des termes ou groupes de termes.]
A.— [Deux termes reliés]
1. [Deux éléments de même nature, de même catégorie gramm. et de même fonction dans la phrase]
a) [Deux adj., deux adv., deux subst. ou équivalents, deux verbes]
— [Deux adj. épithètes] Le village d'Herlem, un amas disparate de maisons rouges et blanches (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 7).
— [Deux adj. apposés] Je pense à toutes les dames de province, sublimes et incomprises, qui ont tenu leur journal (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p. 5).
— [Deux adj. attributs] Redevenues folles et sauvages (BLOCH, Dest. du S., 1931, p. 191).
♦ [Dans une phrase négative] Les hommes n'étaient point ignorants et grossiers (FRANCE, Pierre bl., 1905, p. 19).
— [Deux adv.] Bel et bien; parler haut et clair.
— [Deux subst. ou équivalents de subst.]
♦ [Sujets] Hier matin, lui et moi avons bavardé au salon, près du feu (GREEN, Journal, 1943, p. 4).
Rem. Et peut coordonner, dans le style littér., deux suj. dont le second est inversé, disjoint du premier, postposé au verbe. Jeanne. — Frère Dominique, la bonté de Dieu y suffira et le sang de cette fille innocente (CLAUDEL, J. d'Arc, 1939, p. 1202).
♦ [Compl. d'obj. dir.] Si le moyen âge a une littérature et un art, il n'a pas de philosophie qui lui soit propre (GILSON, Espr. philos. médiév., 1935, p. VII).
Rem. Le pron. pers. tonique se répète devant et. J'ai trouvé, disait-elle, bien des choses qui vous concernent, mon cher Laurent, vous et ceux de votre famille (DUHAMEL, Nuit St-Jean, 1935, p. 7).
♦ [Compl. d'obj. indir.] Nous les accuserions de se payer de mots et de formules (BLOCH, Destin du S., 1931, p. 254).
♦ [Compl. circ.]
[prép.] Les silhouettes des hommes se livrant avec acharnement et dans le silence à un travail qu'ils ne comprenaient pas (PEISSON, Parti Liverpool, 1932, p. 205).
[avec ell. de termes] Loth, assis avec sa cuirasse et une barbe du plus beau rouge (ARTAUD, Théâtre et double, 1938, p. 41).
[non prép.] Sur la cheminée, la même dame en bronze, robe montante et manches longues (MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p. 12).
♦ En appos. ou apostrophe. Je vous remercie, Monsieur et cher Bien-Aimé, de n'avoir jamais répondu à mes lettres (MONTHERL., J. filles, 1936, p. 919).
Rem. 1. Et joint parfois deux subst. dont le premier pourrait être compl. déterminatif du second (souvent dans les titres), ou dont le second pourrait être remplacé par un adj. (cf. GREV. 1969, § 965, 2°, N.B. 2). Oublions les crapauds et leur flûte nocturne (DUHAMEL, Maîtres, 1937, p. 8). 2. La coordination peut se faire après pause (mise en relief). Le temps des horloges se règle d'après certains événements rythmiques, tels que la rotation de la terre sur son axe, et autour du soleil (CARREL, L'Homme, 1935, p. 189). 3. On rencontre ds la docum. une coordination insolite de compl. de loc. verbale, empl. ici p. plais. Le même héros des garnisons prend du galon et du ventre (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 189).
— [Deux verbes] Il fabriquait et vendait, ou achetait pour revendre (BALZAC, C. Birotteau, 1837, p. 222). Je pensais et pense toujours que (cf. MONTHERL., Pasiphaé, 1936, p. 104).
Rem. On peut aussi considérer cette coordination comme une coordination de phrases (avec effacement du sujet).
b) [Deux prop.]
— [Deux rel.] L'inclination naturelle que l'homme éprouve vers le bien et sans laquelle il ne saurait d'ailleurs subsister (GILSON, Espr. philos. médiév., 1931, p. 528).
— [Deux inf.] Mme Joigneau l'entend fermer sa porte et se jeter sur son lit (MARTIN DU G., Vieille Fr., 1933, p. 1018).
— [Deux complétives d'obj.] Il me déclare que son cœur est lié à jamais à une dame de votre pays, Doña Inès de Castro, et que notre union n'aura pas lieu (MONTHERL., Reine morte, 1942, I, 1er tabl., 1, p. 138).
— [Deux interr. indir.] Un mot enfin pour savoir s'il faut t'écrire, et quoi (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1894, p. 197).
— [Deux circ.]
♦ [La seconde est reprise par que] La Providence a donc choisi spécialement l'espèce humaine et la conduit à sa fin d'une manière toute particulière, puisque Dieu est la fin de l'univers et que c'est par l'humanité que l'univers l'atteindra (GILSON, Espr. philos. médiév., 1931, p. 170).
♦ [Effacement du suj. et de l'auxil. dans la seconde] Quand les hommes (...) furent tous embarqués dans la chaloupe et rangés à leur banc (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 10).
2. [Deux éléments de nature différente mais de même fonction] Qu'on me permette de traduire mot à mot et sans chercher aucunement l'élégance du langage actuel (STENDHAL, Amour, 1822, p. 184).
— En partic. [Adj. + rel. déterminative : fonction épithète] Un jeune professeur à la Faculté de Droit de Paris, et qui compte parmi ses principaux (BLOCH, Destin du S., 1931, p. 11).
3. [Deux éléments de fonction voisine (deux circonstances)] Ce commérage avec et sur soi-même (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p. 5).
— [Après pause] J'écris ceci pour dérouiller ma plume et m'entraîner; et aussi parce que je me sens, vis-à-vis du Caire, dans un état d'incuriosité totale (GIDE, Carnets Égypte, 1939, p. 1049).
B.— Spécialement
1. [Coordonnant deux termes dans un groupe nom. ou adj. plus ou moins lexicalisé] Aristote et saint Thomas; les Ponts et Chaussées; un va-et-vient; des allées et venues; le jour et la nuit; bel et bon; etc. Pourquoi ne commencerais-je pas l'année 1869 en vous la souhaitant, à vous et aux vôtres, « bonne et heureuse (...) »? (FLAUB., Corresp., 1869, p. 1).
— [Exprimant, dans un titre, non une simple coordination, mais une mise en rapport et une sorte de confrontation] Bouvard et Pécuchet (Flaubert), La Belle et la Bête (Mme Leprince de Beaumont), Racine et Shakspeare (Stendhal); Suzanne et le Pacifique (Giraudoux), Le Vieil homme et la mer (Hemingway), L'Enfant et les sortilèges (Ravel), etc.
2. [Joignant deux termes synon. ou (quasi-)synon., ou de sens voisins].
— [Deux synon. ou (quasi-)synon.] Briand c'est le chef de bande, (...) celui sur qui s'appuient et s'étayent tous les abandons (L. DAUDET, Police pol., 1934, p. 13). Ma mère se dépensait et se dévouait non seulement sans ostentation, mais même en se cachant (GIDE, Geneviève, 1936, p. 1351).
— [Deux termes de sens voisins] Un bourdonnement à mille pétillements et crépitements lui emplit les oreilles (POURRAT, Gaspard, 1931, p. 6).
3. [Exprimant l'accompagnement, l'association (et = avec) + n. de pers.] M. et Mme Untel; Dupont et compagnie. Les paysans avec lesquels j'allais (Joseph Brun et son fils, Sébastien Charrière, etc.) (STENDHAL, H. Brulard, t. 2, 1836, p. 355). Il faut que j'aille chercher un jambon chez Potel et Chabot (GONCOURT, Journal, 1860, p. 683). À dix heures arrivaient en auto deux officiers et un sergent (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 127).
4. [Exprimant l'addition (devant des n. de nombre)] Deux et deux font quatre; cent francs et quelques, et des poussières. Synon. plus. Notre siècle a produit huit grandes comédiennes : quatre du théâtre et quatre de la société (CHAMFORT, Caract. et anecd., 1794, p. 84). Il faut venir en province (...) pour trouver des femmes de trente et quelques années aussi fraîches que l'est madame (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 62).
— En partic.
a) [Servant à former certains nombres composés]
♦ Vx. Jamais il n'avait parlé à ce grand vieillard, qu'il rencontrait et saluait souvent, ferme et droit sous ses soixante et quinze ans (A. DAUDET, Évangéliste, 1883, p. 154).
♦ Mod. [Joignant un aux dizaines, et dans soixante et onze, soixante et onzième] Je sais votre âge. Vous avez vingt et un ans, j'en ai vingt-six (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 414).
b) Littér., dans des loc. figées. Cent et une fois; les mille et une nuits.
♦ [Pour exprimer l'intensité] Des mille et des cents; mille et mille fois. Tous ces visages à la bouche tordue, ces milliers et ces milliers d'yeux... (BERNANOS, Dialog. Carm., 1948, p. 1569).
♦ [Pour exprimer un redoublement intensif (sans expression de nombre)] Voilà que tu vas te remettre à divaguer, dit Andrea, à parler et à reparler du passé toujours (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 327). Dzinng et dzinng! Ce sont les cymbales! (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 188).
c) [Devant la fraction d'un nombre fractionnaire (et se place devant demi, et ou un devant quart, un ou et un devant les autres fractions)] Une heure et/un quart. En l'honneur de l'oncle Xavier, ils ne se coucheraient qu'à neuf heures et demie (MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p. 13).
d) [Dans l'expression de l'âge ou de la durée (et se place devant le dernier terme)] Deux ans et trois mois; un an et un jour. Il y a aujourd'hui trois cent quarante-huit ans six mois et dix-neuf jours que les Parisiens s'éveillèrent au bruit de toutes les cloches (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 11).
C.— [Plus de deux termes reliés, dans une énumération (et introduit le dernier terme, les autres étant juxtaposés)]
1. [Plusieurs termes] Ces gens prêts au mariage civil, au divorce et à l'avortement (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1372).
Rem. La répétition de et, tour littér., notamment en poésie, peut se faire a) devant un ou plusieurs des termes d'une énumération. Ils vinrent, ceux-là plus sots encore avec leurs raisons et leurs mobiles et leurs belles argumentations (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 666). b) devant chacun des termes d'une énumération. Qu'à ton réveil joyeux, les chants des jeunes mères T'annoncent et l'enfance, et la vie, et le jour (HUGO, Odes et ball., 1828, p. 375).
2. [Plusieurs prop.] Je vis la supérieure éclater de rire, Madame Eugénie s'essuyer les yeux et toute la communauté se dérider (SAND, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 239) :
• 1. GIACCOMO. — Mais s'il passait en ce moment devant nous, et qu'il te rencontre ainsi que je t'ai rencontrée, et qu'il t'appelle comme je t'ai appelée, le suivrais-tu comme tu m'as suivi?
SALACROU, Terre ronde, 1938, I, 1, p. 132.
II.— [Conjonction coordonnant des phrases.]
A.— [La coordination s'accompagne ou ne s'accompagne pas d'effacement de termes]
1. [Coordination sans effacement]
a) [Sans pause] Ne pas laisser échapper les nuances, les petits faits, même s'ils n'ont l'air de rien et surtout les classer (SARTRE, Nausée, 1938, p. 13).
b) [Après virgule] Le temps s'était rétabli, et, ce matin-là, il s'annonçait magnifique (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 5) :
• 2. Les grandes personnes ne comprennent jamais rien toutes seules, et c'est fatigant, pour les enfants, de toujours et toujours leur donner des explications.
SAINT-EXUP., P. Prince, 1943, p. 412.
c) [Après point] Un saturnien, évidemment. Et il n'y a rien à faire à cela (GIDE, Journal, 1905, p. 146).
2. [Coordination avec effacement]
a) [Sans pause]
— [Effacement du suj.] Ils étaient vêtus de noir et cherchaient à se faire tout petits (SARTRE, Nausée, 1938, p. 119).
— [Effacement du verbe et du suj.] Ils disent « oui » en inclinant la tête, et « non » en la renversant en arrière (ABOUT, Grèce, 1854, p. 42).
b) [Après virgule] On me posait dans un losange de tigres quand j'étais méchant, et dans un hexagone de fleurs quand j'étais sage (GIRAUDOUX, Électre, 1937, I, 1, p. 13).
c) [Après point] J'aurais pu être chirurgien, moi aussi, pensa-t-il. Et posséder une voiture comme celles-là (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 7) :
• 3. Il passe la plus grande partie de sa vie dans des laboratoires à étudier les êtres vivants. Et une autre partie dans le vaste monde, à regarder les hommes et à essayer de les comprendre.
CARREL, L'Homme, 1935, p. 1.
— [Dans un dialogue] Le Chevalier. — (...) Tu m'as dit qu'on t'appelle Auguste, n'est-ce pas? Auguste. — Et ma femme Eugénie (GIRAUDOUX, Ondine, 1939, I, 2, p. 18).
Rem. La coordination est possible a) Entre deux phrases négatives. Nous n'avons pas d'amis, c'est un grand point, et pas d'ennemis (BAUDEL., Salon, 1845, p. 4). b) Entre deux phrases dont l'une est négative. Je suis caché et je ne le suis pas (RIMBAUD, Saison enfer, 1873, p. 222). c) Entre deux phrases interr. Mais, enfin, qu'avez-vous et pourquoi ces lamentations? (CAMUS, Caligula, 1944, I, 1, p. 10). d) Entre deux phrases dont l'une est interr. Seul son regard est hors de l'eau et qu'est-ce qu'il voit? Un bronze de Barbedienne (SARTRE, Huis clos, 1944, 1, p. 117).
B.— Spéc. (effets de sens, valeurs sém. de la coordination)
1. [Introduisant un ajout, une précision supplémentaire, une explication, avec valeur d'insistance, de renchérissement (avec ou sans effacement de termes dans la phrase explicative)]
— [Le plus souvent après virgule] Ils (...) feront avancer, et vivement, toute la troupe de ces oiseaux-là (BALZAC, Chouans, 1829, p. 28). Je vois entrer, et pas plus tard qu'hier, quelque camarade ou quelque collègue (FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 9).
♦ Et ce, et ceci..., et cela (valeur anaphorique). Utiliser un objet dont on n'a pas le goût, parce qu'on l'a eu pour rien, et cela quand on est dans la grande aisance (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1372).
— [Après point] Nous avons tous vu des empires s'effondrer, et les plus solides. Et les plus habiles à croître et les plus justifiés à durer (GIRAUDOUX, Sodome, 1943, I, p. 12).
— [Après tiret] L'heure (...) où l'on n'a plus devant soi que l'insomnie, — et les spectres... (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 913).
— [En phrase exclam., avec valeur emphatique de soulignement] Le fait est que (...) il n'a plus que la peau sur les os. — Et quelle peau! (SUE, Myst. Paris, t. 8, 1843, p. 279) :
• 4. — Et tu n'as pas averti ta tante! exclama Mme Vanières. Non?... non? ... Eh bien je vais la trouver, moi! Et tout de suite encore!
REIDER, Mlle Vallantin, 1862, p. 137.
♦ Loc. interjective. Et pour cause (cf. cause2 II A 2).
— [En incise]
♦ [Dans une parenthèse, avec ou sans tiret] Mon grand-père qui s'est donné tant de peine pour déguiser sa maison en château (et jusqu'à le flanquer d'une tourelle supplémentaire) (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 106).
♦ [Entre virgules] Mes préparatifs faits, et la chose ne fut pas longue, je sortis (DUMAS père, Comment je devins aut. dram., 1833, introd., p. 3).
2. [Exprimant la succession temporelle] Synon. puis, ensuite.
a) [Succession immédiate]
— [En structure binaire] Le Prologue se détache et s'avance (ANOUILH, Antig., 1946, p. 135).
♦ [Après pause] Elle parut réfléchir, et, d'un ton bref : — Demain, à onze heures, dans la cathédrale (FLAUB., Mme Bovary, t. 2, 1857, p. 83) :
• 5. Parfois, comme un soupir de leur âme brûlante,
Du sein des épis lourds qui murmurent entre eux,
Une ondulation majestueuse et lente
S'éveille, et va mourir à l'horizon poudreux.
LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1852, p. 225.
— [En structure binaire après virgule, précédé d'un compl. de durée (idée de conséquence)] Une minute à peine, et elle revient (GIRAUDOUX, Ondine, 1939, I, 1, p. 13).
♦ Encore..., et... Encore un point, et j'ai fini (MUSSET, Caprice, 1840, 1, p. 175).
— [En structure ternaire] À ce moment-là, je me suis arrêté, j'ai laissé tomber le caillou et je suis parti (SARTRE, Nausée, 1938, p. 14).
b) [Concomitance] Ensuite le chœur (...) croquant des pommes et se donnant des bourrades (CLAUDEL, Chr. Colomb., 1929, 1re part., p. 1141).
— En partic. [Et + verbe = en + part. prés. (gérondif)] Une sœur à cornette, assise devant un registre, lui souriait et disait : — Bonjour, Monsieur 6... (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 9).
3. [Exprimant le résultat, la conséquence] Synon. alors, en conséquence.
a) [Après une pause légère (après virgule le plus souvent)] À bord des avions découverts (...) on s'inclinait hors du pare-brise, pour mieux voir, et les gifles de vent sifflaient longtemps dans les oreilles (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 142).
— En partic. [Dans un système hypothétique] Qu'elle se fasse attendre encore un quart d'heure, et je m'en vais (MUSSET, Lorenzaccio, 1834, I, 1, p. 83).
b) [Après une pause forte] On ne lui rendra pas Hélène. Et la guerre de Troie aura lieu (GIRAUDOUX, Guerre Troie, 1935, I, 1, p. 11).
— P. iron. (oppos., sous l'apparence d'une conséquence) :
• 6. — J'en connais un qui, depuis des mois, prépare un rapport... Savez-vous sur quoi?... Sur les muscles des araignées! Les muscles des araignées! Mais il n'en a seulement jamais vu, des araignées... Et naturellement il en tire des conclusions d'intérêt mondial...
GIDE, Journal, 1910, p. 289.
c) Et ainsi. Sa mère lui avait enjoint de se taire et ainsi il ne devait plus faire d'efforts pour lutter contre son mal (DRIEU LA ROCH., Rêv. bourg., 1939, p. 112).
4. [Exprimant l'oppos., le contraste] Synon. mais, pourtant.
a) [Sans pause] Le fameux :« Ils ont des oreilles et n'entendent pas, des yeux et ne voient pas » (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 319).
— [En corrélation (pas encore... déjà)] Il n'y a pas encore un an que ce rêve a pris fin et il me semble que j'ai déjà tout oublié de nos détresses (DUHAMEL, Maîtres, 1937, p. 8).
b) [Après pause (très fréq.), le plus souvent après virgule] On ne sort même pas les bêtes, et tu cours les routes? (MAURIAC, Journal 3, 1940, p. 209) :
• 7. — Comment, Maurice, s'écria le moribond (...) voici sept ou huit fois que je vous envoie chez mon avoué, depuis quinze jours, et il n'est pas venu? Croyez-vous que l'on puisse se jouer de moi?
BALZAC, Gobseck, 1830, p. 431.
III.— [Élément de coordination entrant dans une structure corrélative, notamment dans un système comparatif.]
A.— [Dans un système d'identité]
1. Et ...(,) et ... D'une part ..., d'autre part ...; aussi bien... que; autant ... que; non seulement ... mais encore (pour mieux marquer l'égalité entre deux termes). Vous faussez également la vision de votre œil, et si vous mettez l'objet sur vos yeux et si vous le posez hors de votre portée (RENAN, Drames philos., Caliban, 1878, II, 1, p. 392).
2. Le même dans ... et dans ... :
• 8. Ce musicien est du très-petit nombre de ceux qui combinent aussi agréablement les mots de la langue que les notes de la gamme, et qui se feraient écouter avec le même plaisir dans une tribune et dans un orchestre...
JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 221.
3. L'un et l'autre. L'un comme l'autre, autant l'un que l'autre (cf. autre).
4. Plus ..., (et) plus ...; moins ..., (et) moins; mieux ..., (et) mieux ..., etc. (pour introduire la seconde prop. compar.). Plus je le vois et plus je l'apprécie (Ac. 1932). Plus on connaîtra la Louisiane, et plus l'observation que nous faisons paraîtra politique et raisonnable (BAUDRY DES LOZ., Voy. Louisiane, 1802, p. 204).
Rem. Et ne s'emploie pas avec autant ..., autant ...; il est facultatif dans les autres cas.
5. (Tout) à la fois ... et ...; en même temps ... et...; tour à tour ... et ... En ce moment le palais rit et pleure à la fois (GIRAUDOUX, Électre, 1937, I, 1, p. 12).
6. Également ... et ...; indistinctement ... et ... Il écrivait aux femmes et aux hommes indistinctement (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 394).
B.— [Dans un système de disparité, pour exprimer une différenciation, une distinction, une séparation, une opposition; et = tandis que dans la coordination de phrases, d'autre part dans la coordination de termes]
1. L'un ..., et l'autre ... Les deux moucheurs de chandelles. « L'un mouche le devant du théâtre, et l'autre le fond (...) » (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 365).
2. D'une part ..., et de l'autre ... Elle doit, d'une part, convenir à tous les peuples, indistinctement, et, de l'autre, on doit en voir suivre naturellement cette foule d'idées (LACLOS, Éduc. femmes, 1803, p. 461).
3. Dédoublement en ... et en ... Le dédoublement d'un chimiste en chimiste et en chrétien (NIZAN, Chiens garde, 1932, p. 61).
4. Mélange de ... et de ... Pour lui, la police était un mélange de combines et de chantage (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 299).
5. Opposition, séparation de ... et de ... :
• 9. Après toutes les dissociations et les dualismes de l'âge humaniste anthropocentrique, — séparation et opposition de la nature et de la grâce, de la foi et de la raison, de l'amour et de la connaissance, comme dans la vie affective de l'amour et des sens...
MARITAIN, Human. intégr., 1936, p. 38.
6. Entre ... et ... La soudure est faite entre le passé et le présent (BLOCH, Dest. du S., 1931, p. 130) :
• 10. ... la différence entre le triangle et le carré n'est pas la même qu'entre le fer et l'azote, entre un oiseau et un mammifère, entre un Allemand et un Russe.
RUYER, Esq. philos. struct., 1930, p. 83.
7. (Moi) je ... et toi tu ... (et = tandis que) :
• 11. Le monde est divisé en deux catégories de personnes. Celles qui acceptent de se gêner pour les autres. Et celles qui s'y refusent.
MONTHERL., Incompris, 1944, 1, p. 402.
8. Loc. Il y a ... et ... Il y a parfum et parfum, mensonge et mensonge. Tous les parfums, les mensonges ne sont pas pareils, il ne faut pas confondre. Attesté ds ROB., Pt ROB. et Lar. Lang. fr.
IV.—[En début de phrase, à valeur phatique ou emphatique]
A.— [À valeur dynamique, servant à accélérer un récit ou un dialogue] Synon. alors.
1. [En début de phrase affirmative]
a) [Pour poursuivre le récit, avec valeur d'enchaînement] Non; c'était le sang de son bras qui coulait goutte à goutte. Et toujours cette sensation de mal de mer (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 182) :
• 12. Davis jeta un regard sur sa montre. Il était neuf heures vingt. Et il retourna sur la passerelle suivi des deux officiers.
PEISSON, Parti Liverpool, 1932, p. 157.
b) [Pour accélérer le récit, avec valeur de soudaineté] Et voilà qu'elles lui tournent le dos ensemble (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1351) :
• 13. Un cri part; et soudain voilà que par la plaine
Et l'homme et le cheval, emportés, hors d'haleine (...)
Volent avec les vents!
HUGO, Orient., 1829, p. 180.
c) [Pour conclure le récit] Et voilà. — Et voilà. Voilà la dignité humaine qui vous revient. C'est formidable (SARTRE, Huis clos, 1944, 1, p. 116).
d) [Avec effet oratoire ou poét., notamment dans le style biblique et le style poét.] Madrid se pansait. Et ils allaient vers un autre bruit (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 761).
2. [Devant un inf. de narration, avec valeur de soudaineté, de rapidité, parfois de conséquence] Et les dames de s'écrier, et moi d'appeler à tout rompre, et gens d'accourir, et chien d'aboyer (BALZAC, Œuvres div., t. 2, 1830-35, p. 321).
B.— [En début de phrase exclam. ou interr., avec valeur de renforcement]
1. [Exclam.] Et comment! [Ils] n'abordaient aux Îles Blanches qu'en passant, par curiosité. Et comment donc! (LAFORGUE, Moral. légend., 1887, p. 144).
— Loc. Et d'une! et de deux! etc. (cf. de1).
— En partic. [Devant une interj.] Et hop! et zou! Vous vous allongez sur le canapé et pffft... le sommeil s'envole (SARTRE, Huis clos, 1944, 1, p. 117).
2. [Interr.]
a) [Avec une nuance de sentiment vif, indignation, colère, étonnement, etc.] Monsieur Alphonse, et la musique que vous deviez m'avoir copiée pour demain? (LECLERCQ, Proverbes dram., Bal, 1835, 4, p. 104).
— Et si ...? Et si je ne veux pas, moi, être vengé par le bourreau!... (SARDOU, Patrie! 1869, IV, tabl. 6, 7, p. 152).
b) [Souvent empl. devant un pron. pers. tonique] Et moi alors? Et nous? Et vous, vous en avez, des gosses? demanda Shade (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 601).
— Et alors? (cf. aussi alors) Je ne peux pas m'empêcher de le plaindre, je m'attendris, je le raisonne... — Et alors? — Alors, des fois il ne répond pas (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1503).
— Pop. Et ta sœur?
V.— [Particule de renforcement, explétive, ou élément de loc. adv.] Et puis (non pléonastique, cf. puis), et enfin, et encore (pour introduire une restriction), et ainsi de, et pourtant, et ainsi de suite (en fin d'énumération, cf. et cœtera). Tu seras dégoûté de la précédente [beauté] sans même en avoir joui; et ainsi de l'autre, et ainsi de celle qui suivra (SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 1, 1834, p. 180). Elle résolut d'entrer un instant à l'église. Aussitôt dit, aussitôt fait. Et pourtant elle n'aimait pas cette église (DRIEU LA ROCH., Rêv. bourg., 1939, p. 9). Et encore trouve-t-il le moyen de ramener les angoisses de son Claude à des tares héréditaires (GIDE, Journal, 1943, p. 162) :
• 14. ... nous sentons qu'elles [les habitudes] ont un rapport entre elles, étant réclamées de nous par notre entourage immédiat, ou par l'entourage de cet entourage, et ainsi de suite jusqu'à la limite extrême, qui serait la société.
BERGSON, Deux sources, 1932, p. 3.
Prononc. et Orth. :[e]. Seuls LITTRÉ et, apparemment, FÉR. Crit. t. 2 1787 préconisent un timbre [], qui fait par ailleurs l'objet de mises en garde de la part de LAND. 1834 et GATTEL 1841. Le timbre [] est l'objet d'une recommandation ds Ac. dep. 1835. En tant qu'élément inaccentué, est assimilé par GRAMMONT Prononc. 1958, p. 40, à une syll. non finale et, en tant que telle, ,,articulé comme l'é fermé accentué, mais avec diminution de l'effort organique``; v., quant à l'intensité, les indications ds ROUSS.-LACL. 1927, pp. 98, 99. Étymol. et Hist. 1. 842 coordonne des éléments de phrase (subst., adj., syntagmes) (Serments de Strasbourg, 1 ds HENRY Chrestomathie t. 1, p. 2); figure devant le premier d'un groupe de termes coordonnés, renforçant la notion d'ensemble (ibid., 5, ibid. : et in aiudha et in cadhuna cosa); en tête d'une phrase, marque un enchaînement (ou une opposition) (ibid., 6, ibid.); 881 coordonne deux propositions (Eulalie, 28, ibid, p. 3); 2. ca 1100 en tête de phrase interrogative ou exclamative (Roland, éd. J. Bédier, 748). Du lat. et conj. de coordination, exprimant le lien, le renforcement, l'opposition; fréq. en tête de phrases interr. ou exclamatives. Fréq. abs. littér. : 1 745 248. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 2 631 087, b) 2 620 959; XXe s. : a) 2 470 605, b) 2 287 001. Bbg. ANTOINE (G.). La Coordination. Paris, 1959-1962, 2 vol., 701 + 1408 p. — COHEN 1946, p. 13, 22, 45. — MANOLIU-MANEA (M.). Les Conj. de coordination dans une gramm. transformationnelle rom. B. de la Soc. roum. de ling. rom. 1970, t. 7, pp. 5-20. — MCA'NULTY (J.). Les Éléments non ordonnés de la struct. sous-jacente. Cah. Ling. Montréal, 1973, n° 3, pp. 1-37. — MÉRIZ (D.). O.F. Imp(érative) + et/ou + imp. Two problems. In : [Mél. Solano (L.F.)]. Chapel Hill, 1970, pp. 141-151. — Mots dans le vent. Vie Lang. 1969, p. 332. — PINCHON (J.). Des Mots coordonnants. Fr. Monde. 1973, n° 96, pp. 49-50. — ROTHENBERG (M.). Les Prop. rel. à antécédent explicite... In : [Mél. Michéa (R.)]. Ét. Ling. appl. 1971, n° 2, pp. 112-113. — SANDMANN (M.). Et de fermeture et et de continuation en fr. mod. In : [Mél. Burger (A.)]. Cah. F. Sauss. 1966, t. 23, pp. 151-164. — TANQUEREY (F.J.). Et particule. In : [Mél. Pope (M.K.)]. Manchester, 1939, pp. 339-350. — VAN HOUT (G.). La Coordination. Cah. Ling. théor. appl. 1972, t. 9, p. 257.
et [e] conj.
ÉTYM. 842; var. e, Xe; refait en et, XIIe, sur le lat.; lat. et.
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I Conjonction de coordination qui sert à lier les parties du discours, les propositions ayant même fonction ou même rôle, à exprimer une addition, une liaison, un rapprochement.
1 Reliant deux éléments linguistiques de même nature. || Paul et Virginie. || Le meunier, son fils et l'âne. || Lui et son fils. || Toi et moi. || L'un et l'autre. || Cela… et le reste. ⇒ Et cætera. || Un tel et compagnie. || Deux et deux font quatre. ⇒ Plus. || Cent francs et quelques. || Un climat sec et froid. || Faire vite et bien. || Taisez-vous et écoutez. || Ceux que vous commandez et dont vous devez être obéi. || Il reste chez lui et ne veut voir personne. || Il ne peut rester chez lui et fait de fréquents voyages. || Il n'a pas d'amis et ne cherche pas à s'en faire. || Cela n'est pas et ne sera pas. ⇒ Ni (rem.). || Ainsi fit-il, et chacun de s'émerveiller. || Plus je le fréquente et plus je l'apprécie. — REM. Littré considère que et fait pléonasme dans cette tournure, sans pour cela la condamner — J'ai accepté; et vous ? || Et moi ? Vous m'oubliez ! || Et quoi encore ? || Et voilà ! Le travail est terminé. Fam. || Vous en aurez ? Et comment ! — Spécialt. || Il y a parfum et parfum…; il y a mensonge et mensonge… : tous les parfums, tous les mensonges ne sont pas pareils.
1 Ton prince et ton pays ont besoin de ton bras.
Corneille, le Cid, III, 6.
2 Trois et deux font cinq, et cinq font dix, et dix font vingt.
Molière, le Malade imaginaire, I, 1.
3 Un homme (…) n'aurait rien trouvé à reprocher aux uns et aux autres.
Racine, Livres annotés, Homère, IV.
4 (…) on n'a pas dans le cœur de quoi toujours pleurer et toujours aimer.
La Bruyère, les Caractères, IV, 34.
5 (…) une volage (est) celle qui ne sait si elle aime, et ce qu'elle aime (…)
La Bruyère, les Caractères, III, 24.
6 (…) il n'est pas dit dans l'écrit : « laquelle somme je lui rendrai, et je l'épouserai », mais « laquelle somme je lui rendrai, ou je l'épouserai »; ce qui est bien différent. — (…) je soutiens, moi, que c'est la conjonction copulative et qui lie les membres corrélatifs de la phrase; je payerai la demoiselle; et je l'épouserai.
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, III, 15.
7 Mortel, ange et démon, autant dire Rimbaud (…)
Verlaine, Dédicaces, LVI.
8 Addition d'une ligature. — On lie souvent la donnée à l'autre proposition par et. Dis-moi qui tu hantes, et je te dirai qui tu es; — Qu'il se fasse attendre encore un quart d'heure, et je m'en vais; — Que Dieu vous conserve longtemps, Madame… et peut-être laisserons-nous une institution qui fera bénir sa sainte religion; — Que je trouve un sujet dans ma soif, et j'irai loin.
F. Brunot, la Pensée et la Langue, p. 874.
9 Aussi bien Dostoïevski fut-il un romancier chrétien. Non pas romancier et chrétien, comme Pasteur était chrétien et savant : romancier pour servir le Christ.
Sartre, Situations I, p. 38.
♦ Signe typographique représentant le mot « et » (). ⇒ Esperluette.
2 Reliant deux éléments de nature différente. || Un paletot court et sans manches. || Voici un livre nouveau et qui n'est pas encore en librairie. || Vous êtes injuste, et plus souvent que moi. || Il parle l'anglais, et couramment.
10 Les esprits justes, et qui aiment à faire des images (…)
La Bruyère, les Caractères, I, 55.
11 (…) la nouveauté, qui est un mal, et fort dangereux.
La Bruyère, les Caractères, X, 7.
12 Manger, et modérément, ce que vous savez par expérience vous convenir.
Voltaire, Dict. philosophique, Maladie.
13 Je ne parle pas de ces multiples éléments auxquels l'œuvre d'art dramatique, pour être exécutée, et avec succès, fait appel (…)
Gide, Nouveaux prétextes, p. 12.
14 (…) le chef des pilotes, un garçon tout jeune, ami de tous, et qui avait descendu quatre avions fascistes.
Malraux, l'Espoir, II, I, I, IV.
♦ Rapprochant certaines idées, certains faits. || Je le prête et ne le donne pas. ⇒ Mais. || Nous t'hébergeons et tu nous voles ! ⇒ Pourtant. || Il divorça et se remaria. ⇒ Puis. || Vous mentez l'un et l'autre. ⇒ Comme.
3 Littér. Reliant deux sujets séparés par un verbe. || L'automne arriva, et les premières pluies.
15 La raison veut, et la nature Qu'après le mal, vienne le bien.
16 Albe le veut, et Rome; il leur faut obéir.
Corneille, Horace, II, 6.
♦ (XVIIe). Vx. Après un verbe séparant le pronom complément lié à un nom. — Mod. Après la reprise du pronom, dans ce cas. || Je l'aime bien, lui et ses parents (et non : je l'aime bien, et ses parents).
17 Elle rappelait ensuite toutes les calomnies dont on l'avait déchirée et ses religieuses.
Racine, Port-Royal, IV, p. 513.
4 Précédant le dernier terme dans une énumération. || Elle était souriante, calme, détendue et reposée. — Littér. (Devant chaque terme d'une énumération, pour insister sur la longueur, l'importance des éléments — en donnant plusieurs fois l'impression que l'énumération se termine). || Il est tellement bon, et juste, et indulgent… Et peut même précéder le premier terme d'un ensemble de deux ou plusieurs éléments déjà coordonnés, afin de le mettre en relief et d'annoncer qu'il sera suivi d'autre chose (→ À la fois).
18 On égorge à la fois les enfants, les vieillards, Et la sœur et le frère, Et la fille et la mère (…)
Racine, Esther, I, 5.
19 (…) princes qui ont su joindre aux plus belles (…) connaissances et l'atticisme des Grecs et l'urbanité des Romains (…)
La Bruyère, les Caractères, XII, 18.
20 Et le riche et le pauvre, et le faible et le fort
Vont tous également des douleurs à la mort (…)
Voltaire, 1er discours sur l'égalité des conditions.
21 Songez que cette douce Madame de Tillières, cette mince et pâle et fine Juliette, cette délicate et fière et pure créature, presque une sainte, a deux amants à la fois.
France, la Vie littéraire, 4e série, Un cœur de femme, p. 23.
REM. 1. Lorsque et joint deux ou plusieurs syntagmes, on peut exceptionnellement laisser le verbe au singulier selon que l'on considère du point de vue du sens :
a) une même substance conçue sous des aspects un peu différents :
22 Parler imprudemment et parler hardiment est presque toujours la même chose (…)
Vauvenargues, Réflexions et Maximes, 205.
b) un ensemble inséparable :
23 Voir cajoler sa femme et n'en témoigner rien Se pratique aujourd'hui par force gens de bien.
Molière, Sganarelle, 17.
c) un ensemble non inséparable mais complémentaire.
24 La terreur et la désertion se met dans leurs troupes.
Bossuet, Oraison funèbre du Prince de Condé.
2. Et peut introduire le premier de deux éléments coordonnés, au lieu de ne servir qu'à lier les deux éléments.
24.1 Tant il est peu et de réussites faciles, et d'échecs définitifs.
Proust, le Temps retrouvé, Pl., t. III, p. 732.
5 Dans des nombres composés. Vx. (Joignant les unités aux dizaines). || Dix et sept, dix et huit. — (1680). Mod. Et joint un aux dizaines (sauf dans quatre-vingt-un et dans soixante et onze). || Vingt et un (vingt-deux, vingt-trois…). || Trente et un (trente-deux…). — Littér. || Cent et une fois. || Mille et un. || Les Mille et Une Nuits. || Les mille et trois conquêtes de Dom Juan.
25 Je ne puis dénier que la règle des vingt et quatre heures presse trop les incidents de cette pièce.
Corneille, Examen du Cid.
26 Soixante et trois livres, quatre sols, six deniers.
Molière, le Malade imaginaire, I, 1.
27 Soixante et quinze francs (…)
Flaubert, Mme Bovary, I, III.
28 Pour le pauvre « Bajazet », de 1730 à 1800, il est donné cent et une fois.
Émile Faguet, Propos de théâtre, 2e série, p 37.
29 Mille ! Vous m'avez bien dit mille. — Mille et trois, exactement.
G. Duhamel, Cri des profondeurs, p. 158.
30 Il y a des artistes qui demeurent jusqu'à la fin maîtres de leur talent. Voltaire composa Candide à soixante-cinq ans (…) De nos jours Claudel récrit entièrement, à soixante et onze ans, l'Annonce faite à Marie.
A. Maurois, Un art de vivre, p. 203.
6 Et devant la fraction d'un nombre fractionnaire :
a Et se met devant demi. || Deux heures et demie.
31 Je vous attendrai donc (…) jusque vers onze heures et demie.
Malraux, la Condition humaine, IV, « 11 avril, 3 heures ».
b Et (concurremment à un) se met devant quart, sans article. || Deux heures et quart ou deux heures un quart. ⇒ Heure.
c Et un (concurremment à un) se met devant les autres fractions. || Deux pages et un cinquième ou deux pages un cinquième.
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II (1080, Chanson de Roland). Au début d'une phrase, avec une valeur emphatique. || Et voici que tout à coup il se met à courir. || Et Jésus dit à ses disciples… ⇒ Alors. || Et vous ne ferez rien pour vous disculper ? ⇒ Quoi. || Et moi je vous affirme que…
32 Et moi loup j'en ferai scrupule ?
La Fontaine, Fables, X, 6.
33 Et voilà donc l'hymen où j'étais destinée !
Racine, Iphigénie, III, 5.
34 Misérable ! Et je vis ? et je soutiens la vue
De ce sacré soleil dont je suis descendue ?
Racine, Phèdre, IV, 6.
35 Et je pleurais ! et je me trouvais à plaindre et la tristesse osait approcher de moi (…)
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, V, IX.
36 (…) certains poèmes commencent par « et ». Cette conjonction n'est plus pour l'esprit la marque d'une opération à effectuer : elle s'étend tout à travers le paragraphe pour lui donner la qualité absolue d'une suite.
Sartre, Situations II, p. 68.
♦ Fam. || Et d'un(e), et de deux, et de trois, etc., s'ajoute aux termes d'une énumération pour mettre en évidence un processus. || Et d'un il le savait, et de deux il ne l'a pas fait.
———
III En emploi nominal ou adj. Math., log. Symbole ou opérateur représentant l'intersection, le produit logique. || La fonction et.
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HOM. Eh, hé.
Encyclopédie Universelle. 2012.