émietter [ emjete ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1572; de é- et miette
♦ Réduire en miettes, désagréger en petits morceaux. « Antoine y émiettait un peu de pain » (Martin du Gard). — Roche émiettée par l'érosion. ⇒ effriter. — Agric. Réduire les mottes en miettes (avec une émietteuse).
♢ Morceler à l'excès. ⇒ atomiser, fragmenter, parcelliser. Pronom. « Le patrimoine était menacé de s'émietter » (Madelin).
● émietter verbe transitif Réduire une substance en miettes. Morceler, diviser quelque chose à l'extrême : Émietter un domaine. Littéraire. Disperser, éparpiller quelque chose : Émietter son temps, ses efforts.
émietter
v. tr. Réduire en miettes, en petits morceaux. émietter du pain.
|| Par anal. Réduire en petites parcelles. émietter une terre en petites propriétés.
|| Fig. émietter ses forces, ses efforts, les disperser.
|| v. Pron. Tomber en miettes.
— Fig. Se disperser, s'éparpiller. Le pouvoir s'émiette. La foule s'émiette.
⇒ÉMIETTER, verbe trans.
A.— Réduire quelque chose en miettes. Émietter du pain. Jeanne trempa ses lèvres dans une tasse de thé après y avoir émietté un gâteau (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 609).
— P. ext. Réduire en menus morceaux. Les gels et les dégels les brisent [les pierres] et émiettent même les terres (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 173). Elle [Françoise] arracha du mur de petits fragments de plâtre (...) Elle émietta encore la muraille, elle s'écorchait les doigts (ZOLA, Soir. Médan, Attaque moulin, 1880, p. 30).
♦ P. métaph. Ses premières sorties, Sulphart les fit dans le petit jardin de l'Hôtel-Dieu, dont les beaux arbres émiettaient le soleil (DORGELÈS, Croix bois, 1919, p. 306).
♦ Emploi pronom. à valeur passive. Le mât de l'avant cassa net et tomba en arrière sur la passerelle, brisant un compas et des vitres qui s'émiettèrent (PEISSON, Parti Liverpool, 1932, p. 249) :
• Saint-Loup semblait presque présent (...) grâce au feu qui avait fini par s'habituer à la cheminée et, comme une bête couchée (...), laissait seulement de temps à autre une braise qui s'émiettait, ou léchait d'une flamme la paroi de la cheminée.
PROUST, Le Côté de Guermantes 1, 1920, p. 74.
Rem. On rencontre ds la docum. émietteur, euse, adj. Qui émiette. Sous le soleil émietteur des falaises et de l'océan décoloré (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 925).
B.— Au fig.
1. Morceler, diviser à l'extrême en détruisant la cohésion. Émietter un domaine. Le goût baisse, depuis que la division des héritages émiette les fortunes (TAINE, Notes Paris, 1867, p. 240).
2. [Le compl. désigne une pers., un attribut hum., une activité ou une production] Disperser, éparpiller au hasard. Émietter son temps. Alors, sciemment, délibérément, on gâche sa vie, on émiette son intelligence, on aime le mal pour le mal (PELADAN, Vice supr., 1884, p. 48). Sur le lac, un disque de glace d'une seule coulée, un orchestre émiettait des valses dans le vent (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 138).
— Emploi pronom. Toutes mes lectures, mes heures de travail, mes volontés s'émiettent, s'éparpillent, s'égrènent (AMIEL, Journal, 1866, p. 89). Des familles sont ainsi envoyées à de grandes distances, (...) des groupes sont dispersés et s'émiettent (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 62).
Prononc. et Orth. :[] ou, p. harmonis. vocalique, [emjete]; (j')émiette []. Ds Ac. 1718-1932. Étymol. et Hist. 1572 « réduire en miettes » (Commentaires de Mathiolus sur Dioscoride, 159 b ds Vaganay, Rom. Forsch, t. 32, p. 54); 1818 « disperser » (NODIER, J. Sbogar, p. 89); 1838 « morceler à l'excès » (HUGO, Ruy Blas, p. 331). Dér. de miette, préf. é-, dés. -er. Fréq. abs. littér. :134. Bbg. LAURIE (X.). Sur qq. néol. de Proust. Vie Lang. 1972, p. 622 (s.v. émietteur).
émietter [emjete] v. tr.
ÉTYM. 1572; de é-, miette, et -er. → Mie.
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1 Réduire en miettes. || Émietter de la terre, du fumier. || Le gel émiette les pierres. — Au p. p. ⇒ Désagréger, émier (vx), fragmenter. || Émietter du pain pour les oiseaux, le désagréger en petits morceaux. || Roche émiettée par l'érosion.
1 Le pauvre homme n'est plus qu'un petit tas d'ossements émiettés dont personne ne se souvient.
Léon Bloy, la Femme pauvre, p. 239.
2 Elle emplit la tasse de lait chaud; et, tandis qu'Antoine y émiettait un peu de pain, elle recula d'un pas, attentive, les mains dans les poches de son tablier.
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 22.
2 (1838). Fig. Diviser, morceler à l'excès. || Émietter un domaine, une fortune.
3 La cause du mal gît dans le Titre des Successions du Code civil, qui ordonne le partage égal des biens. Là est le pilon dont le jeu perpétuel émiette le territoire, individualise les fortunes (…) Si le Titre des Successions est le principe du mal, le paysan en est le moyen (…) La valeur insensée que le paysan attache aux moindres parcelles, rend impossible la recomposition de la Propriété.
Balzac, le Curé de village, Pl., t. VIII, p. 713-714.
3 (1818). Disperser, éparpiller. || Émietter ses activités, son temps, son existence, son inspiration.
4 (…) obligé pour vivre à multiplier les articles, à « émietter » comme il (Sainte-Beuve) dit, son effort, en collaborations diverses (…)
Émile Henriot, les Romantiques, p. 254.
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s'émietter v. pron.
♦ Tomber en miettes. — Fig. Se disperser. || La foule s'émietta. — Se morceler.
5 Le patrimoine était menacé de s'émietter, la propriété de se morceler à l'infini.
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, XII, p. 185.
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CONTR. Agglomérer, agréger.
DÉR. Émiettement, émietteur, émietteuse.
Encyclopédie Universelle. 2012.