égarement [ egarmɑ̃ ] n. m.
• esgarement v. 1175; de égarer
1 ♦ Vx Fait de s'égarer.
2 ♦ Fig. et littér. Action de s'écarter des voies de la morale, de la raison; état qui en résulte. ⇒ aberration, dérèglement, désordre, erreur. « La faiblesse commence l'égarement, la passion entraîne dans la mauvaise voie » (Balzac) . — Au plur. Dérèglement de la conduite, des mœurs. « L'humiliant aveu de mes longs égarements » (Laclos) .
● égarement nom masculin Action de perdre momentanément un objet : L'égarement d'une lettre. Action de s'écarter des voies de la raison ; folie passagère ; aberration, dérèglement : Un moment d'égarement. ● égarement (citations) nom masculin André Dhôtel Attigny 1900-Paris 1991 Une science subtile de l'égarement illuminera les plus humbles choses. Rhétorique fabuleuse Cahiers du Sud ● égarement (synonymes) nom masculin Action de perdre momentanément un objet
Synonymes :
- perte
Action de s'écarter des voies de la raison ; folie passagère ;...
Synonymes :
- délire
Contraires :
- bon sens
- calme
- lucidité
- sagesse
- sérénité
égarement
n. m.
d1./d Fait d'avoir l'esprit égaré.
d2./d (Surtout au Plur.) Litt. Dérèglement, erreur. Les égarements du coeur.
⇒ÉGAREMENT, subst. masc.
A.— Rare.
1. Action, fait de s'égarer, de perdre son chemin. Les vallées d'égarement et de perdition, semées d'os blanchis pour jalons de route (GAUTIER, Roman momie, 1858, p. 297). Vous scrutez la brume au lointain prêts à payer d'un prix sans mesure le simple égarement d'une patrouille de SS avec ses chiens (ARAGON, Rom. inach., 1965, p. 213).
— Employé métaphoriquement ou dans un cont. symbolique. Une fois de plus donc, si correctement tracés soient-ils et propres à nous éviter les égarements sur un terrain touffu, les chemins de la méthode expérimentale nous conduisent vers des régions qu'ils ne suffisent plus à explorer (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 30).
2. Fait de se trouver en un lieu insolite. L'absurde de sa position, cette sensation d'égarement dans un monde compliqué que lui avait déjà donnée l'après-midi la foule au Pré Saint-Gervais (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 356).
B.— Au fig. et usuel, gén. au plur. [L'idée dominante est celle d'un écart par rapport à une norme]
1. Dans le domaine moral ou relig.
a) Action de s'écarter des voies de la religion et de la morale; état résultant de cette action. Cela me causa une sorte de frayeur, comme tout ce qui porte le caractère de l'égarement et de la dépravation (SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 91). Si l'on vous propose un autre salut que Jésus crucifié, (...) ce prétendu salut n'est qu'un égarement (MONOD, Sermons, 1911, p. 287).
b) Au plur. Actes, états dénotant l'égarement. Synon. dérèglement. Les égarements de la chair, du cœur, de la raison; les égarements de la jeunesse. Je retrouve dans les traits d'Athalie ceux mêmes de Phèdre — d'une Phèdre que l'âge aurait guérie des égarements de l'amour (MAURIAC, Journal 3, 1940, p. 298). Manquements à la morale professionnelle et (...) égarements déontologiques (BARIÉTY, COURY, Hist. méd., 1963, p. 817) :
• 1. ... ce qu'il y a de meilleur contre tous les égarements de la sensualité, c'est encore et toujours la femme. Le vrai guérit des emportements dangereux de la chimère et des folies malsaines de l'exagération.
AMIEL, Journal intime, 1866, p. 375.
• 2. Il expose comme un fait certain que les familles ont été viciées par les égarements des maris et des femmes : la débauche de l'homme, coupable en elle-même, a aussi pour conséquence, explique-t-il, l'infidélité de la femme.
FARAL, La Vie quotidienne au temps de St Louis, 1942, p. 256.
2. Dans le domaine intellectuel
a) Action de s'écarter de la vérité, de se tromper; état résultant de cette action. Les seules connaissances qu'il nous soit possible d'acquérir à son égard, sont et seront toujours uniquement celles que nous aurons puisées dans l'étude suivie de ses lois; hors de la nature, en un mot, tout n'est qu'égarement et mensonge (LAMARCK, Philos. zool., t. 2, 1809, p. 3).
— P. anal., dans le domaine esthétique. L'égarement du goût français (MAUCLAIR, Maîtres impressionn., 1904, p. 125).
b) Au plur. Actes dénotant l'égarement. Synon. erreurs :
• 3. Dans son principal essai pour interpréter un grand artiste, ce Rêve de jeunesse de Léonard de Vinci, qu'il publia en 1910, Freud ne semble guère avoir mis à profit les perspectives qu'il avait esquissées. Il y fait l'effarante démonstration des lacunes et des égarements de sa méthode. Les secrets de l'âme ne s'ouvrent pas avec une seule clef, serait-ce celle des songes.
HUYGHE, Dialogue avec le visible, 1955, p. 327.
C.— Au fig. [L'idée dominante est celle d'un trouble des facultés psychiques]
1. État, généralement de courte durée, caractérisé par une perte de conscience ou de contrôle de soi, et dû à un excès de plaisir ou de douleur, à une forte surprise. J'y découvris [en vacances] un aspect nouveau de la vie sexuelle : ni tranquille joie des sens, ni égarement troublant, elle m'apparut comme une polissonnerie (BEAUVOIR, Mémoires j. fille, 1958, p. 164) :
• 4. Shakespeare a dû savoir que l'on observe chez certaines personnes extrêmement ivres, de quelque ivresse qu'il s'agisse, le penchant presque irrésistible à feindre leur égarement plus complet qu'elles ne l'éprouvent en réalité...
ÉLUARD, Donner à voir, 1939, p. 125.
2. Trouble mental, généralement de courte durée, proche de la folie. L'égarement de son cerveau, de sa tête, de ses yeux; égarement passager, subit; une crise, une minute, un moment d'égarement. Lélia, voyant la fureur et l'égarement dans ses yeux, lutta avec force pour se débarrasser de cette main de fer, qui lui meurtrissait le bras (SAND, Lélia, 1833, p. 323) :
• 5. Un ouvrier pauvre à la fin d'une semaine rentre chez lui rapportant sa paye en billets. Un petit garçon de quelques années voit les billets, joue avec et les jette au feu. L'apercevant trop tard, le père voit rouge, s'empare d'une hache et dans l'égarement tranche les deux mains de l'enfant. (...) Devenu subitement fou, le père s'enfuit, erra dans la campagne.
BATAILLE, L'Expérience intérieure, 1943, p. 187.
— Au plur. Actes dénotant l'égarement. [Les] égarements de la plus aveugle fureur (CABANIS, Rapp. phys. mor., t. 2, 1808, p. 334).
Rem. La plupart des dict. du XIXe et du XXe s. (cf. LITTRÉ, etc.) attestent l'acception « action d'égarer quelque chose » qui n'est pas attestée ds la documentation.
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 esgarement « action de se perdre » (B. DE STE-MAURE, Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 27519), attest. isolée; de nouv. 1587 (LANOUE, Discours politiques et militaires, 151 ds LITTRÉ); 2. 1600 egarement « action de perdre quelque chose » (O. DE SERRES, I, 6 ds GDF. Compl.) — 1638, SULLY, Œcon. roy., ch. CXIX, ibid.; de nouv. 1874 (Gazette des Tribunaux, 3-4 août ds LITTRÉ Suppl.). Dér. du rad. de égarer; suff. -(e)ment1. Fréq. abs. littér. :591. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 1 200, b) 547; XXe s. : a) 558, b) 859.
égarement [egaʀmɑ̃] n. m.
ÉTYM. V. 1175, esgarement; de égarer.
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1 Elle (l'âme) fait la même chose qu'une personne qui, désirant arriver en quelque lieu, ayant perdu le chemin, et connaissant son égarement, aurait recours à ceux qui sauraient parfaitement ce chemin (…)
Pascal, Sur la conversion du pécheur.
2 Fig. et littér. Action de s'écarter de ce qui est défini par la morale, la raison, de la norme; état qui en résulte. ⇒ Aberration, dérèglement, désarroi, désordre, erreur, fourvoiement. || L'égarement de l'âme, des mœurs. || Être dans l'égarement de l'ivresse, de la colère, de la douleur. — Absolt. || L'égarement (→ ci-dessous, cit. 3, 4) : le fait de s'écarter du comportement admis par la morale, la religion. — (Un, des égarements). Acte qui dénote cet état. ⇒ Dérèglement.
2 (…) si quelques-uns de ces hommes qui, par une vocation extraordinaire, ont fait profession de sortir du monde et de prendre l'habit de religieux pour vivre dans un état plus parfait que le commun des chrétiens, sont tombés dans des égarements qui font horreur au commun des chrétiens et sont devenus entre nous ce que les faux prophètes étaient entre les Juifs, c'est un malheur particulier et personnel (…)
Pascal, Pensées, XIV, 889.
3 Je parvins jusqu'à l'âge de quarante ans, flottant entre l'indigence et la fortune, entre la sagesse et l'égarement, plein de vices d'habitude sans aucun mauvais penchant dans le cœur, vivant au hasard sans principes bien décidés par ma raison, et distrait sur mes devoirs sans les mépriser, mais souvent sans les bien connaître.
Rousseau, Rêveries…, 3e promenade.
4 La faiblesse commence l'égarement, la passion entraîne dans la mauvaise voie, le vice, qui est une habitude, y embourbe; et l'homme ne fait aucun progrès vers les états meilleurs.
Balzac, Séraphîta, Pl., t. X, p. 573.
♦ Égarement du cerveau, de l'esprit; de la conduite, des sens. → ci-dessous les emplois absolus. || Égarement moral. ⇒ Aveuglement.
♦ Spécialt. État où l'on perd le contrôle de soi, parfois la conscience, par excès d'émotion, de plaisir, de douleur… ⇒ Absence, aliénation, délire, démence, dérangement, divagation, folie, frénésie. || Être dans un égarement total. ⇒ Affolement. || Un égarement de bonheur. ⇒ Éblouissement, trouble, vertige.
5 De tous leurs égarements, c'est sans doute celui qui les convainc le plus de folie et d'aveuglement, et dans lequel il est le plus facile de les confondre par les premières vues du sens commun et par les sentiments de la nature.
Pascal, Pensées, III, 195.
5.1 (…) il paraissait très enflammé; une sorte d'égarement se peignait dans ses yeux (…)
Sade, Justine…, t. I, p. 205.
♦ Action qui exprime, témoigne de l'égarement.
6 (…) elle fut amenée à une incroyable aberration. Que veux-tu ! ces pauvres folles prouvent par leurs égarements les saintes lois de la nature et leur inévitable fatalité.
Renan, Souvenirs d'enfance…, I, IV, p. 48.
♦ Spécialt (souvent au plur.). Dérèglement de la conduite, des mœurs. ⇒ Abandon, débauche, dérèglement, écart, faute, perversion (→ Dépraver, cit. 5). || Des égarements de jeunesse. || Revenir de ses égarements. || Les égarements de mon cœur. → Recoin, cit. 3. — Les Égarements du cœur et de l'esprit, roman de Crébillon fils (1736).
7 Ô haine de Vénus ! Ô fatale colère !
Dans quels égarements l'amour jeta ma mère !
Racine, Phèdre, I, 3.
8 Ce ne sera qu'après cette expiation préliminaire, que j'oserai déposer à vos pieds l'humiliant aveu de mes longs égarements (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXX.
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CONTR. Calme, lucidité, ordre, prudence, tranquillité.
Encyclopédie Universelle. 2012.