1. détremper [ detrɑ̃pe ] v. tr. <conjug. : 1>
• mil. XIIe; bas lat. distemperare « délayer »
♦ Amollir ou délayer en mélangeant avec un liquide. Détremper des couleurs. Détremper de la chaux, du mortier. — Chemin détrempé, très mouillé et amolli. « La terre des allées, détrempée par la pluie, empêchait les chevaux d'avancer » (Chateaubriand).
détremper 2. détremper [ detrɑ̃pe ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1692; de dé- et tremper
♦ Techn. Faire perdre sa trempe à (l'acier). P. p. adj. Acier détrempé.
♢ Fig. et littér. Rendre plus faible. « Ces deux années vécues dans une quiétude confortable l'avaient évidemment détrempé » (Aymé).
● détremper verbe transitif (bas latin distemperare, délayer) Modifier la consistance de quelque chose, l'amollir en l'imprégnant d'un liquide : La pluie a détrempé les chemins. Provoquer la détrempe d'une peinture. Effectuer la détrempe d'une pâte. ● détremper verbe transitif (de tremper) Supprimer, par chauffage, les effets de la trempe de l'acier.
détremper
v. tr. Délayer dans un liquide; mouiller abondamment. Détremper du pain.
————————
détremper
v. tr. TECH Détruire la trempe de (l'acier).
I.
⇒DÉTREMPER1, verbe trans.
A.— [Le compl. d'obj. désigne une substance solide] Amollir en imprégnant de liquide ou d'humidité; délayer en mélangeant avec un liquide. Détremper qqc. (avec/dans qqc.); détremper qqc. en le mouillant (cf. tremper). Une fine averse d'automne Mouille et détrempe les terrains (LORRAIN, Griseries, 1887, p. 26). Ses souliers plats, l'eau les avait détrempés (POURRAT, Gaspard, 1930, p. 241) :
• 1. Pour procéder sûrement dans le traitement des obstructions, il faut commencer par délayer et détremper la matière épaisse qui les forme, et sur-tout si on a affaire à un tempérament sec, bilieux et échauffé.
GEOFFROY, Manuel de méd. pratique, 1800, p. 286.
— Souvent à la forme passive Chaux éteinte détrempée à l'eau. Une femme (...) avec un chapeau détrempé par les pluies (ZOLA, Nana, 1880, p. 1360). De tous ces journaux détrempés par la buée du bain, il fit une boule qu'il jeta loin de lui (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 561).
— Emploi pronom. à sens passif. Le plâtre est à écarter. Il se détrempe et tombe sous les gouttières (PESQUIDOUX, Livre raison, 1925, p. 143).
— P. anal. et au fig. [L'idée dominante est celle de ramollissement] Es-tu de force, Ou si d'avoir pleuré t'a détrempé le cœur! (VERLAINE, Œuvres compl., Sagesse, Paris, Gallimard, 1962 [1881], p. 244). La mère déjà si faible (...) brisée, détrempée par les larmes (A. DAUDET, Évangéliste, 1883, p. 194).
B.— Spécialement
1. ART CULIN. Délayer de la farine avec une substance liquide pour obtenir une pâte. Détremper de la farine :
• 2. ... mettez sur le tour huit onces de belle farine; faites-en une fontaine, et mettez au milieu quatre gros de levure, que vous délayez avec le quart d'un verre de lait. Vous y joignez deux onces de beurre, deux jaunes, un grain de sel, les amandes et le sucre à l'orange. Détrempez le tout...
Les Gdes heures de la cuis. fr., Carême, 1833, p. 148.
Rem. Pour MONT. 1967 et LASNET 1970, le terme n'est utilisé que si le liquide employé est de l'eau.
— Au fig. [L'idée dominante est celle de délayage] :
• 3. Ces romans [de M. Paul Perret], d'une grande médiocrité, dorment dans les caves des éditeurs. Je ne connais rien de plus gris, de plus insignifiant. Imaginez les romans de George Sand détrempés à grande eau.
ZOLA, Doc. littér., La Critique contempor., 1881, p. 267.
2. PEINT. Détremper une couleur. La broyer généralement avec de l'eau puis la délayer avec un agglutinant (colle, gomme, blanc d'œuf...), de manière à en augmenter l'adhérence. Souvent au passif. Couleur qui est détrempée avec de la colle, à l'eau. Teinture d'ocre jaune détrempé dans de la colle de peau (VIAUX, Meuble Fr., 1962, p. 22).
— Emploi pronom. passif. La céruse déjà déposée se détrempait de nouveau (Manuel fabr. coul., t. 1, 1884, p. 103).
C.— P. ext.
1. [Le compl. d'obj. désigne une substance liquide] Diluer par addition d'un autre liquide :
• 4. Dans cette espèce d'asthme, où le sang trop épais et visqueux engorge les vaisseaux du poulmon, (...) on détrempera le sang en faisant boire abondamment soit du petit-lait, soit de l'eau de veau ou de poulet, ...
GEOFFROY, Manuel de méd. pratique, 1800, p. 136.
— En partic., vieilli [Le compl. d'obj. désigne une liqueur] Diluer, étendre, couper par addition d'un autre liquide.
♦ Emploi pronom. à sens passif. Une liqueur d'hysope qui se détrempe si on veut, mais que les hommes boivent pur (GIONO, Regain, 1930, p. 149).
2. [Le compl. d'obj. désigne une pers.; le suj. désigne un agent atmosphérique (pluie, neige, humidité...)] Imprégner d'eau, d'humidité; pénétrer d'humidité, mouiller en profondeur. Cf. tremper1. L'eau grêlait, (...) et venait, (...) détremper nos personnes et notre nourriture (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 122).
— À la forme passive. Cependant à jeun et faible, détrempée par le temps humide (MICHELET, Journal, 1860, p. 553).
— P. hyberb. La pluie de novembre vous détrempera les os (QUENEAU, Enf. du limon, 1938, p. 133).
Prononc. et Orth. :[], (je) détrempe []. Ds Ac. 1694 et 1718, s.v. destremper; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. 1155 puisun... de venim tote destempree (WACE, Brut, 8271 ds KELLER, p. 55 a). Du lat. impérial distemperare « mélanger, délayer ». Fréq. abs. littér. :19.
DÉR. Détrempage, subst. masc., rare. Action de détremper (supra A). Il nous faut évoluer en empoignant un piquet que le détrempage du sol a fait pencher de travers (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 183). En partic., chim. L'empâtage, connu aussi sous le nom de détrempage, trempe, brossage, a pour but de dissoudre toutes les matières solubles (WURTZ, Dict. chim., t. 1, 1er vol., 1869, p. 590). — []. — 1re attest. dernier quart XIVe s. (TAILLEVENT, Le Viandier, éd. Pichon et Vaucaire, 79); rare av. 1869 (WURTZ, loc. cit.); du rad. de détremper, suff. -age. — Fréq. abs. littér. : 1.
II.
⇒DÉTREMPER2, verbe trans.
MÉTALL. [Le compl. d'obj. désigne l'acier ou un obj. en acier] Faire perdre en partie ou totalement sa trempe à l'acier ou a un objet en acier en le chauffant au rouge pour ensuite le laisser refroidir lentement. Anton. tremper2. Il n'est pas à conseiller de détremper les couteaux [à betteraves] avant de les affûter (SAILLARD, Betterave, 1923, p. 215) :
• 1. Le chauffeur prenait le bout de fer dans le fourneau; le frappeur le plaçait dans la clouière, qu'un filet d'eau continu arrosait pour éviter d'en détremper l'acier; ...
ZOLA, L'Assommoir, 1877, p. 536.
— En emploi pronom. à sens passif. Lorsqu'on prend un acier trempé et qu'on le porte à 700o, l'acier se détrempe (CHAMPLY, Nouv. Encyclop. prat., t. 2, 1927, p. 28). On a soin de jeter de l'eau dans le trou de mine pour (...) empêcher le fleuret de se détremper (BOURDE, Trav. publ., 1928, p. 107).
— P. métaph. :
• 2. ... cette trop justement critiquée « soumission à la volonté de Dieu » qui risquerait d'amollir, de détremper, le bel acier de la volonté humaine brandie contre toutes les puissances de ténèbres et d'affaiblissement!
TEILHARD DE CHARDIN, Le Milieu divin, 1955, p. 99.
— Au fig. [L'idée dominante est celle de perte de qualité, de force, de résistance] Rendre plus faible, priver de sa vigueur. Anton. tremper2 (fig.). Le malheur, ... m'a — pour un temps — trempé, puis peut-être détrempé faute d'avoir été pratiqué judicieusement (VERLAINE, Corresp., t. 3, 1889. p. 52). Il était détrempé par la souffrance (ROLLAND, J. Chr., Buisson ard., 1911, p. 1411) :
• 3. La première [de deux femmes supérieures] avait su résister à cette vie tiède et relâchante [de province], qui dissout la plus forte volonté, détrempe le caractère, abolit toute ambition...
BALZAC, Œuvres diverses, t. 3, 1850, p. 229.
Rem. On rencontre ds la docum. une attest. d'un homogr. construit à partir de tremper et du préf. dé- avec valeur privative pour signifier « perdre son humidité ». Cf. détremper1. Sous l'action des éléments combinés, (...) la goutte qui distend, le rayon qui contracte, les fibres du lin commencent à se détacher les unes des autres, à se dissocier, au fur et à mesure que la matière agglutinante se détrempe et se sèche davantage (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p. 251).
Prononc. et Orth. :[], (je) détrempe []. Ds Ac. 1740-1932. Étymol. et Hist. Av. 1468 espée destrempée (CHASTELLAIN, Chronique, éd. Kervyn de Lettenhove, III, 347); 1547 au fig. « amollir » (AMYOT, Hist. Aethiop. L. V, 53 v°); 1572 un trait ... dont elle avait détrempé la pointe (Yver, 554 ds LITTRÉ). Dér. de tremper; préf. dé(s)-. Fréq. abs. littér. :8.
1. détremper [detʀɑ̃pe] v. tr.
ÉTYM. V. 1155; du bas lat. distemperare « délayer », de dis-, et temperare « allier, mêler ». → Tempérer, d'après tremper.
❖
1 Amollir ou délayer en mélangeant avec un liquide. ⇒ Délayer, tremper. || Détremper des couleurs, les broyer avec de l'eau et les délayer avec un agglutinant pour en augmenter l'adhérence. ⇒ 1. Détrempe. || Détremper de la chaux, du mortier. — Au p. p. || Chaux détrempée à l'eau. — (Sujet n. de chose). || La pluie a détrempé les terres. ⇒ Délaver, imbiber. — Au p. p. || Chemins détrempés, très mouillés, amollis.
1 La terre des allées, détrempée par la pluie, empêchait les chevaux d'avancer; la voiture versa.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. III, p. 4.
♦ Spécialt (cuis.). Délayer de la farine avec un liquide (eau, lait) pour obtenir une pâte. — Diluer (un liquide). — Pronominal :
2 Une liqueur d'hysope qui se détrempe si on veut, mais que les hommes boivent pure.
Giono, Regain, in Œ. roman., Pl., t. I, p. 387.
2 Par ext. Imprégner (qqn) d'humidité. ⇒ Tremper. || La pluie nous avait détrempés. — Par métaphore :
3 La grosse Mme Kratzmann s'était mise à pleurer, mais personne n'y prêtait attention, elle était comme ça (…) Tout événement heureux ou malheureux, qui coupait le train-train de la vie, déclenchait pareillement ses larmes, des ruisseaux de grosses larmes qui coulaient sans effort, inondaient ses grosses joues, détrempaient ses grosses lèvres.
Roger Ikor, les Fils d'Avrom, « La greffe de printemps », p. 201.
❖
CONTR. Sécher.
DÉR. 1. Détrempe.
————————
2. détremper [detʀɑ̃pe] v. tr.
ÉTYM. Av. 1468; de 1. dé-, et tremper.
❖
1 Techn. Faire perdre la trempe à (l'acier). || Détremper des couteaux. — Pron. || Acier rougi qui se détrempe en refroidissant.
♦ Au p. p. || Acier détrempé.
2 Fig. et littér. Rendre plus faible. ⇒ Affaiblir. || Détremper les caractères (→ Aveulissement, cit.).
0 Ces deux années vécues dans une quiétude confortable l'avaient évidemment détrempé et il ne sentait plus en lui cette puissante indifférence de jadis aux hasards de l'existence.
M. Aymé, Travelingue, p. 108.
❖
CONTR. Tremper.
DÉR. 2. Détrempe.
Encyclopédie Universelle. 2012.