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appréhension

appréhension [ apreɑ̃sjɔ̃ ] n. f.
• 1265; lat. apprehensio
Action d'appréhender.
1Vx Fait de saisir par l'esprit. compréhension. « L'appréhension, je l'ai lente et embrouillée » (Montaigne). Philos. Opération par laquelle l'esprit atteint un objet de pensée simple. Appréhension et compréhension. « tout état affectif constitue un mode d'appréhension » (P. Foulquié).
2(XVIe) Action d'envisager qqch. avec crainte; crainte vague, mal définie. alarme, angoisse, anxiété, inquiétude, peur. Éprouver de l'appréhension. Il a de l'appréhension, un peu d'appréhension avant son examen. Avoir une appréhension, comme une appréhension. pressentiment. Avoir de l'appréhension à faire qqch. Littér. (avec un compl.) « La vague et confuse appréhension d'une menace suspendue sur son coupable bonheur » (Bourget). L'appréhension d'échouer. « une vive appréhension qu'on ne nous ôte ce qui nous appartient » (La Rochefoucauld).
⊗ CONTR. Confiance, espoir, sérénité, tranquillité.

appréhension nom féminin (bas latin apprehensio, action de saisir) Action d'appréhender quelque chose, de le saisir par l'intelligence : Être peu préparé à l'appréhension d'une question. Crainte vague d'un danger futur : Envisager l'avenir avec appréhension. Chez Kant, acte par lequel la conscience se représente le divers des perceptions. ● appréhension (expressions) nom féminin (bas latin apprehensio, action de saisir) Champ d'appréhension, limitation que l'on observe dans les activités de perception et de mémoire à court terme. ● appréhension (synonymes) nom féminin (bas latin apprehensio, action de saisir) Action d' appréhender quelque chose, de le saisir par l'intelligence
Synonymes :
- compréhension
Crainte vague d'un danger futur
Synonymes :
- alarme
- angoisse
- anxiété
- inquiétude
- peur
- prémonition
- pressentiment
Contraires :
- attente
- confiance
- espoir
- quiétude
- sérénité
- tranquillité

appréhension
n. f.
d1./d Crainte, anxiété vague. Avoir des appréhensions. Syn. inquiétude.
d2./d PHILO Opération intellectuelle simple et immédiate qui s'applique à un objet.

I.
⇒APPRÉHENSION1, subst. fém.
Saisie (cf. appréhender1).
A.— Vieilli. Action de saisir (une chose) :
1. Le travail de l'homme ne consistât-il qu'en une simple appréhension de la main, il n'y a pour lui valeur produite que lorsqu'il s'est donné cette peine : jusque-là le sel de la mer, l'eau des fontaines, l'herbe des champs, le bois des forêts, sont pour lui comme s'ils n'étaient pas.
PROUDHON, Qu'est-ce que la propriété? 1840, p. 253.
DR., rare, vx. Action de prendre au corps (un débiteur, un criminel) (cf. Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845).
B.— PHILOSOPHIE
1. Rare, vx. Faculté de saisir par l'intelligence :
2. Le président disait que les sciences exactes ont un charme infini pour les jeunes gens capables d'application, que le penchant que l'homme a pour la vérité, se trouve satisfait par l'enchaînement de vérités progressives qui mènent à de grands et incontestables résultats; c'est dans la jeunesse, ajoutait-il, que l'esprit a toute l'appréhension nécessaire pour saisir les choses abstraites, et que leur connaissance se grave plus profondément dans la mémoire.
SÉNAC DE MEILHAN, L'Émigré, 1797, p. 1578.
2. Saisie par l'intelligence, et plus particulièrement ,,toute opération intellectuelle relativement simple ou immédiate, soit de perception, soit de jugement, soit de mémoire, soit d'imagination, considérée comme s'appliquant à un contenu distinct de l'opération elle-même.`` (LAL. 1968) :
3. ... plus et mieux que bien des historiens postérieurs, il a su apercevoir l'analogie qui apparente toutes les créations de l'imagination humaine, reconnaître dans les grands mythes collectifs, aussi bien que dans les visions des poètes et dans les intuitions des songes, une seule et même appréhension de l'univers par une conscience différente de notre conscience diurne.
BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, p. 113.
4. Au sujet des « visions », des « paroles » et des autres « consolations » communes dans l'extase, saint Jean de la Croix témoigne sinon d'hostilité du moins de réserve. L'expérience n'a pour lui de sens que dans l'appréhension d'un Dieu sans forme et sans mode.
G. BATAILLE, L'Expérience intérieure, 1943, p. 19.
C.— Faculté de saisir (et donc de retenir) vite :
5. ... on pourra méditer cette observation : Les primitifs, dit Lévy-Bruhl (« la mentalité primitive », ch. XIV), procèdent par intuition directe, appréhension immédiate, interprétation rapide et presque instantanée de ce qui est perçu : etc...
BENDA, La France byzantine, 1945, p. 213.
En partic., PSYCHOL. ,,Mémoire immédiate ou capacité limite de reproduction correcte, sans délai, après une perception unique, de chiffres, lettres, mots, images, etc.`` (PIÉRON 1963).
II.
⇒APPRÉHENSION2, subst. fém.
A.— Au sing. [Avec un compl. prép. de, indiquant ce qu'on appréhende] Appréhension de qqc. Fait d'appréhender, d'envisager avec inquiétude une chose imminente (cf. appréhender2) :
1. L'autre, non moins naïf, s'étonne, trouve que partout tout est tranquille, et demande de quoi on s'inquiète. Celui-là certes n'a point de place, et ne va pas chez les ministres; car il y verrait que le monde (le monde, comme vous savez, ce sont les gens à places), bien loin d'être tranquille, est au contraire fort troublé par l'appréhension du plus grand de tous les désastres, la diminution du budget, dont le monde en effet est menacé, si le gouvernement n'y apporte remède.
COURIER, Pamphlets pol., lettres au rédacteur du « Censeur », 1819-20, p. 38.
2. Il lui donna la main. Elle la saisit et la serra, à le faire crier. Ils jouèrent, comme deux paysans, à se faire le plus de mal possible. Ils étaient heureux, sans arrière-pensée. Tout le reste du monde, les chaînes de leur vie, les tristesses du passé, l'appréhension de l'avenir, l'orage qui s'amassait en eux, tout avait disparu.
R. ROLLAND, Jean-Christophe, Le Buisson ardent, 1911, p. 1373.
B.— Au sing. ou au plur. (à valeur intensive). [Avec un compl. prép. de ou un adj. poss. indiquant la pers. qui appréhende] Appréhension de qqn. État d'une personne qui appréhende :
3. Chaque soir, en s'endormant, elle revoyait la physionomie de Montriveau sous un aspect différent. Tantôt son sourire amer; tantôt la contraction jupitérienne de ses sourcils, son regard de lion, ou quelque hautain mouvement d'épaules, le lui faisaient terrible. Le lendemain, la carte lui semblait couverte de sang. Elle vivait agitée par ce nom, plus qu'elle ne l'avait été par l'amant fougueux, opiniâtre, exigeant. Puis ses appréhensions grandissaient encore dans le silence, elle était obligée de se préparer, sans secours étranger, à une lutte horrible dont il ne lui était pas permis de parler. Cette âme, fière et dure, était plus sensible aux titillations de la haine qu'elle ne l'avait été naguère aux caresses de l'amour.
BALZAC, La Duchesse de Langeais, 1834, p. 290.
4. On ne juge pas mieux l'événement de près que de loin. En France, la veille du jour où la Révolution va éclater, on n'a encore aucune idée précise sur ce qu'elle va faire. Parmi la foule des cahiers, je n'en trouve que deux où se montre une certaine appréhension du peuple. Ce qu'on redoute, c'est la prépondérance que doit conserver le pouvoir royal, la cour, comme on l'appelle encore.
TOCQUEVILLE, L'Ancien Régime et la Révolution, 1856, p. 59.
Emploi abs. :
5. Toute ascension, toute entreprise, toute création me font peur maintenant. Je ne puis plus rien oser, aventurer, tenter. La paresse le dispute à l'appréhension.
AMIEL, Journal intime, 1866, p. 381.
SYNT. Appréhension irréfléchie, irraisonnée; vague, obscure; soudaine, subite; objective, légitime, fondée; aiguë, extrême, violente, douloureuse, cruelle. Légère, confuse, sourde, secrète appréhension; forte, terrible, grande, vive appréhension; noire, sinistre, affreuse, mortelle appréhension; sans aucune appréhension. Une sorte d'appréhension; appréhension de l'inconnu. Avoir, éprouver de l'appréhension, être dans l'appréhension, causer de l'appréhension, attendre avec (une certaine) appréhension; justifier, confirmer les appréhensions de qqn.
C.— Loc. Avoir une appréhension :
6. Voici la rue des Saints-Pères. J'approche de mon logis avec cette appréhension qu'on a en se rendant chez un dentiste. Toutes les fenêtres sont sombres. On dort sans doute.
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, La Patronne, 1884, p. 696.
Avoir une certaine appréhension de + subst. :
7. ... comme je demande à Daudet si son traité était complètement arrêté pour son futur roman avec Lemerre, il me répond : « Oui et non », ajoutant : « Au fond, j'ai une certaine appréhension superstitieuse du définitif... »
E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1887, p. 711.
Avoir comme une appréhension :
8. Pourtant elle avait comme une appréhension en s'y rendant, un pressentiment secret qui lui disait de retourner.
MOSELLY, Terres lorraines, 1907, p. 94.
Avoir comme une (vague) appréhension de + inf. :
9. ... il y a des instants où j'ai comme une vague appréhension de les voir [ces dames] me sauter au cou! ...
GYP, Le 13e, 1894, p. 194.
Rem. Même vague, il s'agit toujours d'une appréhension déterminée, relevant du domaine du « un certain » (quidam en lat.).
(Avoir l') appréhension que + subj.
♦ [On appréhende la survenance de qqc.] Généralement : appréhension que + négation ne + subj. Dans l'appréhension qu'il a qu'on ne le trompe (Ac. 1835-1932).
Rem. Dans l'ex. suiv., la substitution de l'ind. (fut. proche) à la constr. ne + subj. marque la quasi-certitude de voir se réaliser l'événement appréhendé :
10. Ennui, toute la journée, de l'appréhension que la princesse va me demander le nom du dîneur auquel Mlle Abbatucci a parlé chez Mme Gallaup, demande faite hier par la princesse dans une lettre à Mlle Zeller.
E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1891, p. 102.
♦ [On appréhende la non-survenance de qqc.] Appréhension que + négation ne... pas + subj. :
11. Pas un mot dans une feuille quelconque sur mon Journal paru depuis huit jours, et l'appréhension que ma pièce retirée du Gymnase ne soit pas reçue par Antoine.
E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1892, p. 204.
PRONONC. ET ORTH. :[]. Demi-longueur pour [] ds PASSY 1914. FÉR. Crit. t. 1 1787 admet une var. graph. apréhension.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. a) 1265 « faculté de comprendre » (BRUNET LATIN, Trésor ds GDF. Compl. : Apprehension de l'intellect) — St Simon ds Lar. 19e qui mentionne à nouveau le mot; b) 1559 log. « idée que l'on se fait d'une chose » (CALV., Instit., II, II ds GDF. Compl. : Qu'ils n'aient tous ceste premiere apprehension d'equité que nous avons dicte); p. ext. 2. 1558-59 « action d'envisager qqc. avec crainte; crainte » (LA REINE DE NAVARRE, Heptaméron, XV ds Dict. hist. Ac. fr. t. 3, p. 463 : Elle qui avoit des-ja passé les premières apprehensions de la crainte de mourir, print cueur); 3. a) 1375 gén. « fait, action de prendre » (Reg. du Parlem., ms. Ste-Gen., p. 202 ds GDF. Compl. : La terre de Beaujeu est en pays de droit escrit ou n'a pas lieu la coutume que le mort saisit le vif, encore nul heritier ne autre ne se peut dire saisy, sinon par apprehension de fait) — XVIe ds HUG. : repris au XIXe s. (DUPIN-LAB.) mais rare; b) 1450-1520 dr. apprehencion « prise de corps » (Arch. Nord, B 1715 f° 26) — BESCH. 1845.
Empr. au b. lat. apprehensio; 1 a « compréhension » dep. Saint Irénée, 1, 12, 2 ds TLL s.v., 308, 45; à partir du XVIe s., évolution du sens avec l'idée de crainte (comme appréhender), d'où 2; 3 a « action de saisir » dep. SAINT-JÉRÔME in Ezech. 8, 3, ibid., 308, 27; 3 b « arrêter qqn » dep. Itala Joh. 7, 30, ibid., 308, 29; 1 b lat. médiév. XIIIe s. ALBERT LE GRAND, phys. 4, 3, 4, p. 313a, 35 ds Mittellat. W. s.v., 811, 53.
STAT. — Fréq. abs. littér. :593. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 313, b) 793; XXe s. : a) 947, b) 1 259.
BBG. — BACH.-DEZ. 1882. — BRUANT 1901. — DUPIN-LAB. 1846. — Foi t. 1 1968. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — FRANCK 1875. — GOBLOT 1920. — LACR. 1963. — LAFON 1969. — LAL. 1968. — Méd. Biol. t. 1 1970. — PIÉRON 1963. — PIGUET 1960.

appréhension [apʀeɑ̃sjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1265; du lat. apprehensio « fait de comprendre, de saisir », de apprehendere. → Appréhender.
Action d'appréhender.
———
I Abstrait.
1 Vx. Fait de saisir par l'esprit. Compréhension.
1 L'esprit, je l'avais lent (…) l'appréhension tardive (…)
Montaigne, Essais, I, 25.
2 L'appréhension, je l'ai lente et embrouillée; mais ce qu'elle tient une fois, elle le tient bien et l'embrasse bien universellement, étroitement et profondément, pour le temps qu'elle le tient.
Montaigne, Essais, II, 17.
(Mil. XVIe). Mod. Opération par laquelle l'esprit atteint immédiatement (par la perception, l'imagination, la mémoire) un objet de pensée simple (distinct de la compréhension d'un objet complexe par le jugement, le raisonnement).
2.1 (…) la conscience étant toujours conscience de quelque chose, tout état affectif constitue un mode d'appréhension.
Foulquié, Dict. de la langue philosophique, art. Appréhension.
Psychol. Acte par lequel la mémoire saisit immédiatement et retient ce qu'elle enregistre. || Capacité d'appréhension ou mémoire immédiate.Appréhension des concepts : processus d'apprentissage qui permet à un sujet de découvrir une classe de concepts à travers des exemples particuliers.
2 (1558). Action d'envisager qqch. avec crainte; crainte vague, mal définie. Alarme, angoisse, anxiété, crainte, doute, inquiétude, peur, pressentiment, timidité, transe. || Une appréhension soudaine, terrible; irréfléchie, irraisonnée, obscure, vague. || Légère, fugitive appréhension. || Appréhension affreuse, horrible. || Éprouver de l'appréhension, une vague appréhension. || L'appréhension de qqn devant un danger.Une, des appréhensions (avec un possessif). || Les appréhensions (de qqn). || « … ses appréhensions grandissaient dans le silence » (Balzac, la Duchesse de Langeais, in T. L. F.). — ☑ Loc. Avoir une appréhension, comme une appréhension.
L'appréhension de qqch. (par qqn) : le fait d'appréhender. || L'appréhension de la mort.
(Avec un inf.). || Appréhension à (faire qqch.). || Le public m'intimide, j'éprouve toujours de l'appréhension, un peu d'appréhension, une certaine appréhension, comme une appréhension à parler devant un auditoire.
Appréhension que (suivi d'un indic.). → cit. 3. || Appréhension que (qqn, qqch.) ne (suivi d'un subj.). → cit. 4.
3 Quelquefois cette vertu imaginative (l'imagination) fait choir la personne de quelque lieu haut, pour (à cause de) la grande appréhension et timidité qu'elle a de tomber.
Ambroise Paré, XVIII, 11, in Littré.
4 La justice n'est qu'une vive appréhension qu'on ne nous ôte ce qui nous appartient (…)
La Rochefoucauld, Maximes, 578.
4.1 Cette journée qu'elle avait espéré si bonne, lui laissait à l'âme une tristesse inexprimable et pénétrante, une appréhension sans cause, tenace et confuse comme un pressentiment.
Maupassant, Fort comme la mort, II, p. 210.
5 (…) l'angoisse de ses scrupules religieux (…) l'appréhension des luttes déchirantes qu'elle devrait soutenir.
Paul Bourget, Un divorce, III, p. 89.
6 La vague et confuse appréhension d'une menace suspendue sur son coupable bonheur s'était changée en une vision épouvantée, presque hallucinatoire (…)
Paul Bourget, Un divorce, VI, p. 201.
7 Ma belle sérénité du mois d'octobre est en déroute. Je vis d'inquiétude et d'appréhension.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, VI, 9.
8 Et pourtant, je n'ai aucune confiance dans la vie, dans ma vie; cette appréhension ne me quitte pas, de la voir finir brusquement (…)
Gide, Journal, 21 janv. 1917.
9 (…) il envisagea cette mort tout autrement que d'habitude, sans appréhension aucune, sans tristesse; au contraire, comme une délivrance nécessaire, attendue (…)
Martin du Gard, les Thibault, IV, XIII.
———
II (1375). Sens concret. Vx. Action d'appréhender (II.), de saisir, d'attraper (qqch.).
(1450). Dr. || Appréhension d'un criminel, le fait de l'appréhender. Prise (de corps).
CONTR. (De I.). Confiance, espoir, sérénité, tranquillité.

Encyclopédie Universelle. 2012.