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SWAHILI
SWAHILI

La langue swahili (kiswahili ) appartient à l’ensemble linguistique bantou. Née sur la côte d’Afrique orientale, elle est le fruit de la symbiose de peuples d’origines diverses. Le fait de parler cette langue définit de nos jours une communauté composée de personnes (Mswahili , pluriel: Waswahili ) qui restent attachées à leurs traditions historiques et sociales propres. Cependant, l’extension considérable de la langue swahili depuis un siècle et demi contribue à l’élaboration de traits culturels communs qui, dans l’avenir, se révéleront, peut-être, comme les germes d’un peuple ou d’une nation.

La langue swahili

L’utilisation de la langue swahili par quarante-sept millions de personnes et ses usages commerciaux, administratifs, politiques ont favorisé son expansion en Afrique, mais aussi dans d’autres parties du monde. Elle est enseignée notamment aux États-Unis, à Londres, à Paris, en Chine; et certaines organisations internationales envisagent de la retenir comme langue de travail. En Tanzanie, elle est la langue nationale, alors qu’au Kenya elle se place après l’anglais. Son nom provient d’un mot arabe s ムil qui désigne la côte où elle est parlée aujourd’hui et qui va du sud de la Somalie au nord du Mozambique (comme elle l’est, en face, dans l’archipel des Comores). À l’intérieur du continent, elle est utilisée à des degrés divers jusque dans l’est et le sud-est du Zaïre (à Kisangani et à Lubumbashi), mais aussi au nord de la Zambie. Cette extension géographique explique la grande variété dialectale du swahili, qui est encore renforcée par les traditions culturelles locales. Ainsi chaque ville ou principauté côtière a élaboré et perpétué un dialecte très marqué (kiamu à Lamu, kimvita à Mombasa, kihadimu et kitumbatu à Zanzibar), dans lequel s’est développée, au cours des siècles, une littérature épique et religieuse. Un swahili normalisé (standard swahili ), fondé sur le dialecte urbain de Zanzibar, a été intentionnellement modelé par les colons britanniques dans la première moitié du XXe siècle; il est de plus en plus répandu du fait de son utilisation par l’administration et les moyens d’information. À Dar es-Salaam, un Institut de recherche swahili (Taasi ya Uchunguzi wa Lugha ya Kiswahili) fournit un effort important en vue de définir et d’unifier les usages et les lexiques spécialisés, sans pour autant négliger l’étude des dialectes.

Étant une langue bantoue, le swahili appartient à un ensemble linguistique africain très caractérisé qui, approximativement, englobe les langues parlées au sud de l’équateur. Par là, une grande partie de son vocabulaire participe au fonds du «bantou commun» (ensemble fictif qui regroupe les formes lexicales et syntaxiques typiques communes, en totalité sinon en partie, aux langues bantoues), avec toutefois la particularité d’avoir incorporé et assimilé un nombre élevé de mots arabes, persans, indiens et européens. Sa structure est spécifiquement bantoue, c’est-à-dire que, d’une part, les formes nominales sont rangées en une quinzaine de classes qui impliquent des accords particuliers avec les verbes, adjectifs et pronoms (exemple: watu wote wameanguka , tous les hommes sont tombés; vijiko vyote vimeanguka , toutes les cuillères sont tombées); d’autre part, les verbes sont construits à partir d’une racine minimale sur laquelle viennent se greffer toute une série de préfixes et de suffixes, qui précisent ainsi le sens, la forme, l’aspect ou le temps et l’accord au sujet comme la référence à un objet (exemple: nilisikia , j’entendais; nilisikiwa , j’ai été entendu; tulisikizana , nous nous entendions, nous étions d’accord; kusikia , entendre).

Naissance et histoire d’une communauté

L’histoire et l’archéologie révèlent l’ancienneté des échanges entre la péninsule arabique, le golfe arabo-persique et la côte orientale de l’Afrique. On possède quelques témoignages antérieurs à l’islam sur le commerce exercé par des Égyptiens et des Grecs qui troquaient sur la côte du métal et de la verrerie contre de l’ivoire, des écailles de tortues, de la myrrhe, des aromates et des esclaves. Mais après la naissance de l’islam, les chroniques et les récits des géographes sont plus précis. Ainsi al-Mas‘ d 稜 (mort en 956 env.), qui a fait deux voyages sur la côte orientale, fournit les premières indications sur l’existence d’établissements permanents dont la population mixte – musulmane immigrée et africaine – parle une langue locale qui, d’après le faible corpus de mots notés, pourrait déjà être le swahili. Par la suite, on cite beaucoup de mouvements d’immigration: d’Oman, de Daybul (nord-ouest de l’Inde), du golfe arabo-persique (aristocratie shirazi). D’abord installées à Mogadiscio, les familles shirazi se répandront vers le sud. Associées aux autres négociants arabo-musulmans et dominant une population africaine maintenue en semi-esclavage, elles contrôleront, pendant plusieurs siècles, des cités commerciales riches et puissantes, qui peu à peu deviendront autonomes les unes par rapport aux autres. Au XIVe siècle, le grand voyageur Ibn Ba ta se réfère expressément à la communauté swahili lors de son voyage entre Mogadiscio et Kilwa. C’est l’époque où cette dernière ville, située au sud de la Tanzanie actuelle, impose sa prédominance aux établissements plus petits de la côte de Sofala et même, un moment, à Pemba et à Zanzibar.

Bâtie en «pierre de corail», Kilwa possédait des édifices (palais, mosquées, tombes) à l’architecture très riche, comme les fouilles menées par N. Chittick l’ont révélé. Elle était le nœud commercial pour l’or qui provenait du Zimbabwe et était échangé contre des cotonnades de fabrication locale. Comme la plupart des villes côtières, elle était entourée de plantations qui assuraient son ravitaillement en produits frais. Ce sont des villes très actives et très riches que les Portugais découvriront quand Vasco de Gama franchira le cap de Bonne-Espérance, en 1497-1498. Les ports étaient fréquentés par des dhows , ou boutres, de tout l’océan Indien, qui débarquaient des porcelaines, des soieries, des produits de luxe. La langue swahili était alors parlée sur toute la côte, et son utilisation par des commerçants navigateurs explique la richesse de sa terminologie maritime. Les Portugais s’installeront, au départ, à Malindi, qui désirait s’affranchir de la tutelle des principautés shirazi, et ils s’y imposeront avec une violence inouïe. En quelques années, Kilwa sera ruinée, avant d’être détruite lors de l’invasion zimba en 1587.

C’est plus au nord que la résistance s’organise, à Mombasa, qui a récupéré une grande partie de l’activité commerciale de Kilwa. Assiégé à partir de 1589 par les Portugais et les Zimba, le sultan de Mombasa tente une expédition contre Malindi; il échoue, et les Européens s’emparent de sa ville en 1592. Ils y bâtissent Fort-Jésus. Le sultan d’Oman, après avoir recruté une armée parmi les révoltés de Pate, les en chasse le 13 décembre 1698. Toutes les villes, alors, tout en conservant leur autonomie, reconnaissent la suzeraineté d’Oman; certaines, telle Malindi, disparaîtront. C’est Mombasa qui dominera sous la dynastie des Mazrui, jusqu’à ce que le sultan d’Oman, Sayyid Saïd Ben Sult n, s’installe à Zanzibar, au début du XIXe siècle. Il y encouragea la culture du giroflier et développa le commerce à longue distance à l’intérieur du continent. En 1840, une colonie arabo-swahili s’établit sur la rive est du lac Tanganyika, après la fondation du relais de Tabora. Au royaume du Buganda, en 1844, une caravane est mentionnée pour la première fois. Le négociant arabo-swahili Hamed Ben Mohammed el-Murjebi, connu sous le nom de Tippu Tip, franchit le lac, à partir d’Ujiji, et fonde, dans l’est du Zaïre actuel, une principauté qu’il dirigera de 1870 à 1884, quand les Belges y entreprendront leur conquête. Cette politique d’expansion commerciale, qui était une conséquence du développement des relations économico-politiques avec les Européens et les Américains, favorisera la diffusion de la langue swahili. Dans la course aux colonies qui devient leur objectif à la fin du XIXe siècle, les Européens saisissent le prétexte de l’esclavage pour intervenir dans la région et, en 1890, un traité établit le partage en deux zones d’influence. Les Allemands et les Britanniques reconnaîtront au swahili sa valeur comme langue de communication et tenteront d’en réglementer l’usage. Au moment où ces pays accèdent à l’indépendance, plusieurs dizaines de journaux swahili existent en Tanzanie et au Kenya. Depuis lors, la Tanzanie a fait du swahili sa langue nationale et elle a fourni un effort considérable pour favoriser ses caractéristiques de langue moderne.

La culture swahili se trouve donc être en formation depuis plusieurs siècles. Les Portugais ont fait état d’une chronique de Kilwa datée du XVe siècle, mais le plus ancien document conservé est un long poème de 1728. L’islam a, dans cette culture, une valeur de référence qui reste constante jusqu’au XIXe siècle. À cette époque, le premier poète nationaliste, Muyaka Bin Haji al-Ghasany, incite à la lutte, à partir de Mombasa, contre le sultan d’Oman. Par la suite, l’action des missionnaires chrétiens et l’usage qu’ils font du swahili pour l’évangélisation vont renforcer la pénétration commerciale de cette langue à l’intérieur du continent. Au XXe siècle, celle-ci joue, grâce à la scolarisation, un rôle politique considérable tandis que des hommes tels que Shaaban Robert et Julius Nyerere lui donnent une véritable dimension poétique et socio-politique.

swahili, ie [ swaili ] ou souahéli, ie [ swaeli ] n. m. et adj.
• 1881, -1902; souahili 1873; ar. sawâhil, par l'angl.
Langue bantoue parlée au Kenya, en Tanzanie, et écrite depuis le XVIe s. en caractères arabes. — Adj. Grammaire swahilie.

swahili ou souahéli nom masculin Langue bantoue parlée dans l'est de l'Afrique. Le swahili est utilisé comme langue de relation sur une aire très vaste comprenant le Kenya, la Tanzanie, l'Ouganda et la République démocratique du Congo (ex-Zaïre). [Il a statut de langue officielle au Kenya et en Tanzanie. Le lexique a fait de nombreux emprunts à l'arabe.]

Swahili ou, vieilli, Souahéli
peuple établi en Tanzanie (près de 2,5 millions de personnes), ainsi qu'au Kenya, en Ouganda et au nord du Mozambique. Ils parlent une langue bantoue, le swahili, langue véhiculaire de plusieurs dizaines de millions de personnes. Ils sont musulmans.

⇒SOUAHÉLI, SOUAHILI, SWAHILI, subst. masc.
LING. Langue bantoue parlée à l'origine près de la côte africaine de l'Océan indien et largement répandue dans les états de l'Afrique Orientale, écrite dès le XVIe s. en caractères arabes puis en caractères latins. Le vocabulaire arabe a pénétré en masse dans le lexique de langues importantes (persan, hindoustani, turc, malais, (...), souahili) (Lang. Monde 1952). Ces spots, pour la plupart montés sur place, sont en général commentés en swahili lorsqu'il s'agit de biens de consommation courante (Le Monde aujourd'hui, 20-21 oct. 1985, p. VII).
Empl. adj. Qui est relatif, qui appartient à cette langue. Langue souahélie (ROB. Suppl. 1970).
Prononc. et Orth.:[swœli]. Formes: -héli, -hili (Pt ROB., Lar. Lang. fr.); on écrit: soua-, swa- (Pt ROB., Lar. Lang. fr.). Étymol. et Hist. 1873 souhahili (sic) subst. (Lar. 19e t. 10, p. 158c, s.v. langue); 1875 suaheli subst. (Lar. 19e); 1881 swahili adj. (E. COSQUIN ds Romania t. 10, p. 550); 1891 (Ch. SACLEUX, Dict. fr.-swahili, Zanzibar ds Catal. gén. des l. imprimés de la BN); ca 1896 suahili subst. (Gde Encyclop. t. 22, p. 293a, s.v. linguistique); ca 1902 souahéli adj. et subst. (Gde Encyclop.); 1912 swahili subst. (G. FERRAND ds B. Soc. Ling. t. 17, p. 86). Empr. au swahili Swahili « la côte swahilie » (d'où mswahili « habitant de cette côte », kiswahili « la langue swahilie ») et celui-ci à l'ar. « Swahili », littéral. « habitant de la côte », dér. au moyen du suff. ethnique - de , plur. de « côte » (cf. sahel). Bbg. QUEM. DDL t. 20.

souahéli, ie [swaeli] ou swahili [swaili] adj. et n. m.
ÉTYM. 1875, in P. Larousse, suaheli; de l'arabe sawâhil, par l'anglais.
tableau Mots français d'origine arabe.
De la langue bantoue parlée sur et près de la côte (Sahil) africaine de l'Océan Indien, et répandue dans l'Afrique orientale (Kenya, Tanzanie, Ouganda, Rwanda, Burundi, Est du Zaïre…), écrite depuis le XVIe siècle en caractères arabes, puis en caractères latins. || Langue souahélie.N. m. || Le souahéli. || Le swahili est une langue sans tons; il est parlé à 90% en tant que langue seconde.
0 Et je sais aussi le swahili, parce que les indigènes de toutes les races le comprennent (cet amalgame d'arabe et d'idiomes indigènes, imposé autrefois par les trafiquants d'esclaves, sert aujourd'hui de langue commune à toutes les tribus de l'Afrique orientale).
J. Kessel, le Lion, p. 23.
REM. On écrit aussi souahili [swaili], ou swahéli, swahili (1922), d'après l'anglais. Les spécialistes écrivent swahili; au sens large, le terme englobe la langue bulu (Cameroun, Nord du Gabon). La langue est appelée par ses locuteurs kiswahili; sa forme standard est fondée sur le dialecte de Zanzibar.
tableau Classification des langues.

Encyclopédie Universelle. 2012.