ORTIE
ORTIE
«Mauvaise herbe» détestée, l’ortie est pourtant l’une des plantes les plus utiles d’Europe. Les deux espèces les plus répandues, l’ortie dioïque ou grande ortie (Urtica dioïca ) et l’ortie brûlante ou petite ortie (Urtica urens ), ont les mêmes emplois. Plante des terres azotées, fréquentant surtout les lieux habités, l’ortie, qui se rappelle toujours chaudement à l’attention des hommes, a été employée très tôt par eux. C’est un légume préhistorique, consommé de tout temps, surtout pendant les disettes, encore apprécié en Europe septentrionale et orientale et, çà et là, en Europe occidentale. Au Ier siècle, Dioscoride signalait déjà les propriétés hémostatiques qui seront constamment mises à profit par les médecins et la pratique populaire, jusqu’à nos jours. Au Moyen Âge, on attribuait à l’ortie toutes les vertus. Les meilleurs phytothérapeutes contemporains l’ont remise à l’honneur. En effet, l’ortie renferme un hétéroside spécifique, l’urticoside, une matière cireuse à action cholagogue, une lécithine, un taux assez important de carotène, de fer, de nitrates de potassium et de calcium, d’acide silicique. Le liquide urticant des poils contient des excitants musculaires, dont l’histamine, et de l’acétylcholine qui intervient dans la transmission de l’influx nerveux.
Plante tonique, employée en Suède contre l’anémie en raison de sa grande richesse en fer, l’ortie a une heureuse action sur les sécrétions de l’estomac, du foie et de la rate et favorise la formation des globules rouges. Simplement cuite en légume, elle est bénéfique contre l’atonie digestive, l’insuffisance hépatique, la constipation. Diurétique et dépurative, elle a été prescrite autrefois contre les rhumatismes, la goutte, l’hydropisie et surtout contre certaines dermatoses. Elle est encore considérée comme tonique de la circulation, galactogène, hypoglycémiante. On retiendra ses propriétés hémostatiques: Cazin (1850) «a employé le suc d’ortie avec un succès presque constant comme hémostatique dans l’hémoptysie et surtout dans les pertes utérines» et bien entendu dans les saignements de nez (coton imbibé introduit dans les narines). L’ortie a aussi une action antidiarrhéique (diarrhée, dysenterie). Une infusion tonique, cholagogue, dépurative se prépare avec les feuilles ou sommités non fructifiées, de trente à soixante grammes par litre d’eau (trois tasses par jour).
À l’extérieur, outre l’épistaxis, l’ortie s’emploie soit en collutoire (suc frais) contre l’angine, les aphtes, les gingivites, soit en cataplasmes (feuilles cuites et broyées) contre les ulcères; elle aurait également donné des résultats contre la gangrène.
Les orties, jeunes de préférence, se mangent cuites à la façon des épinards ou en potage comme le cresson (la chaleur détruit le principe urticant). C’est un mets utile aux débiles, aux convalescents et aux vieillards, à condition de ne pas en abuser; c’était autrefois un aliment traditionnel de la volaille. Tous les bestiaux aiment l’ortie sèche, très nourrissante. Les tiges renferment une fibre textile, utilisée jadis comme celle du chanvre. La racine, tinctoriale, donne un assez beau jaune. La plante décomposée fournit un excellent engrais sous forme de compost.
ortie [ ɔrti ] n. f.
• fin XIIe; orttrie v. 1120; lat. urtica
♦ Plante herbacée (urticacées) dont les feuilles sont couvertes de poils fins qui renferment un liquide irritant (acide formique). Piqûre d'ortie. Soupe aux orties. — Jeter le froc aux orties. Fam. Faut pas pousser grand-mère dans les orties : il ne faut pas exagérer. — Par ext. Ortie blanche. ⇒ lamier.
● ortie nom féminin (latin urtica) Plante herbacée (urticacée) hérissée de poils urticants et habitant les régions tempérées. (Les orties, exigeantes en nitrates, sont des plantes rudérales.) ● ortie (citations) nom féminin (latin urtica) Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 J'aime l'araignée et j'aime l'ortie Parce qu'on les hait ; Et que rien n'exauce et que tout châtie Leur morne souhait. Les Contemplations, Aux arbres, III, 27 ● ortie (expressions) nom féminin (latin urtica) Ortie blanche, nom usuel du lamier blanc. Ortie de Chine, nom usuel de la ramie blanche. Ortie jaune, nom usuel d'un lamier. Ortie de mer, nom donné à divers cnidaires (anémones de mer, méduses, siphonophores) dont les nématocystes ont une action urticante sur la peau. Ortie puante, nom usuel de la bétoine.
ortie
n. f. Plante herbacée (genre Urtica) des régions tempérées, dont les feuilles dentées et les tiges sont couvertes de poils qui libèrent un liquide irritant.
⇒ORTIE, subst. fém.
BOT. Plante herbacée dont les feuilles sont couvertes de poils fins renfermant un liquide qui produit sur la peau une irritation douloureuse. Infusions, shampooing, soupe à l'ortie. L'ortie, qui croît si vigoureusement le long des murs de métairies, plaît aux poules d'Inde au point que, lorsqu'elle est hachée, elle est la meilleure nourriture que l'on puisse donner à leurs poussins (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p.91):
• 1. Mais, parmi les herbivores même, il y a d'excellents destructeurs de plantes nuisibles. L'ortie, inutile, piquante, désagréable en tout sens, est respectée des quadrupèdes; à peine un seul daigne y toucher: et cinquante espèces d'insectes travaillent, d'accord avec nous, pour nous en débarrasser.
MICHELET, Oiseau, 1956, p.146.
— P. anal.
♦Ortie blanche, jaune, rouge. Espèce de lamier aux fleurs blanches, jaunes ou rouges qui ressemble beaucoup à l'ortie par l'aspect de ses feuilles mais qui n'a pas d'effet urticant. Le Lamier blanc (Lamium album), improprement appelé Ortie blanche à cause de la forme de ses feuilles, à limbe denté (PLANTEFOL, Bot. et biol. végét., t.2, 1931, p.434).
♦ZOOL. Ortie de mer. Nom usuel des méduses (v. actinie). Y fait des oursins, des arapètes [sic], des orties de mer et y boulotte tranquille (MUSETTE, [Cagayous phil.], 1906, p.152).
— Au fig. Tout ce qui est irritant, désagréable, insupportable. Vous voyez, ça s'emmaillotte pas pareil. Vous êtes plus facilement ma mère que la sienne avec vos paroles d'ortie (GIONO, Bout route, 1937, I, 5, p.30):
• 2. Don Quichotte était entre trois gardes et, devant lui, Flor, les mains liées, suivie du sergent qui, ayant choisi au bord de la route un bâton d'aubépine, en régalait parfois la prisonnière un peu plus bas que la ceinture, pour lui faire, sans doute, sentir par avant goût les orties de la geôle.
TOULET, Mariage Don Quichotte, 1902, p.102.
♦Loc. proverbiale. Jeter le/son froc aux orties. Renoncer à l'état ecclésiastique. Dans sa vie agitée, Filippo Lippi prit le froc, le jeta aux orties, et, entre autres aventures, fut pris par des corsaires barbaresques (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p.94).
P. ext. Renoncer à une entreprise quelconque; se débarrasser de quelque chose de gênant. Toutes les modesties Et toutes les pudeurs, je les jette aux orties (AUGIER, Jeunesse, 1858, p.300).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep.1694. Étymol. et Hist. a) Début XIIe s. bot. orthie (St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1746); b) 1176-84 au fig. p.oppos. à rose pour signifier «le pire» (GAUTIER D'ARRAS, Eracle, éd. G. Raynaud de Lage, 1268); c) 1496 gecter le froc es ortyes (Mystère de St Martin, éd. A. Duplat, 7993 cité ds Z. rom. Philol. t.97, p.445); 1564 jetter le froc aux orties (THIERRY, s.v. froc). Du lat. urtica «ortie». Fréq. abs. littér.:243. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 224, b) 595; XXe s.: a) 459, b) 246.
ortie [ɔʀti] n. f.
ÉTYM. V. 1165; orttrie, v. 1120; du lat. urtica.
❖
♦ Plante (Urticacées) dont les feuilles sont couvertes de poils fins qui renferment un liquide irritant (acide formique). || Piqûre d'ortie : brûlure causée par le contact avec les feuilles d'orties. || Éruption semblable à celle que produit le contact de l'ortie. ⇒ Urticaire. || Fouetter, frotter, piquer un membre perclus avec des orties pour produire un effet révulsif (⇒ Ortier, urtication). || Ortie dioïque ou grande ortie, très commune dans les lieux incultes et les décombres. || Ortie de Chine dont on tire une fibre textile. ⇒ Ramie. — Cuite, l'ortie est comestible. || Soupe à l'ortie, aux orties. — Par ext. || Ortie blanche, rouge. ⇒ Lamier. — Par anal. || Ortie de mer. ⇒ Actinie.
0 Quand l'ortie est jeune, la feuille est un légume excellent; quand elle vieillit, elle a des filaments et des fibres comme le chanvre et le lin. La toile d'ortie vaut la toile de chanvre. Hachée, l'ortie est bonne pour la volaille.
Hugo, les Misérables, I, V, III.
♦ ☑ Loc. fig. (1564). Jeter le froc (cit. 7, 8 et 9) aux orties.
❖
DÉR. Ortier.
Encyclopédie Universelle. 2012.