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angoisseux

⇒ANGOISSEUX, EUSE, adj.
Littér., peu usité
A.— [En parlant d'un événement de la vie extérieure ou intérieure] Qui cause de l'angoisse. Synon. angoissant :
1. ... il se présente souvent, pour les gens de cœur et d'intelligence, un cas difficile et angoisseux comme une tragédie...
BAUDELAIRE, Maximes consolantes, 1867, p. 622.
2. ... cette année, je me suis trouvé dans une de ces heures de la vie, vieillissantes, maladives, lâches devant le travail poignant et angoisseux de mes autres livres...
E. DE GONCOURT, Les Frères Zemganno, 1879, p. 13.
B.— [En parlant d'une pers., de son âme] Qui éprouve de l'angoisse. Synon. angoissé :
3. Je courais, angoisseux et si loin du réel
Que j'incarnais déjà mon impalpable idole
Dans la belle marcheuse au frisson de gondole
Qui glissait devant moi...
M. ROLLINAT, Les Névroses, La Chimère, Les Spectres, 1883, p. 318.
Emploi subst. :
4. Rosny, après avoir aujourd'hui vanté la solidité de sa santé et déploré le manque d'une maladie, en général attestatrice du talent chez un écrivain, confesse cependant qu'il est un angoisseux, que son esprit se forge des ennemis qu'il n'a pas et qu'en tisonnant au coin du feu, dans la flambée de sa cheminée, parfois, il voit comme des êtres chimériques lui voulant du mal.
E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1888, p. 891.
P. méton. [En parlant des traits du visage, de l'expression...] Qui trahit l'angoisse. Synon. angoissé :
5. De chastes épaules voilées d'un fichu de gaze [Mme Necker] (...) de petits traits tiraillés, joliment souffreteux, presque angoisseux, et racontant l'état nerveux de la délicate agitée, qui avait perdu le sommeil, et qui, toujours debout, ne pouvait demeurer assise.
E. DE GONCOURT, La Maison d'un artiste, 1881, p. 159.
PRONONC. — Dernière transcription ds DG : an-gwà-seú, -seúz'.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. Mil. XIe s. angoissouse (fém.) de « impatiente de, désireuse de » [l'interprétation « douloureuse » de l'éd. Chr. Storey, coll. Textes litt. fr., 1968, gloss., semble moins probable] (Alexis, éd. G. Paris, 457 : [lamentations de la mère d'Alexis à la mort de son fils] Ainz que t'ousse en fui molt desidrouse; Ainz que nez fusses sin fui molt angoissouse) — 1606, NICOT; 2. ca 1100 « qui éprouve de l'angoisse » (Rol., éd. Müller, 2199 ds T.-L. : La meie mort me rent si anguissus Ja ne verrai le riche emperëur) — 1737 (J.-J. ROUSSEAU, Lettres ds Dict. hist. Ac. fr. t. 3 1888, p. 238 a : Une de ces ressources inespérées que la Providence m'a ménagées jusqu'ici dans les temps les plus angoisseux de ma vie); qualifié de vieux et hors d'usage dep. Trév. 1752.
Dér. de angoisse étymol. 1; suff. -eux.
STAT. — Fréq. abs. littér. :14.
BBG. — LAURENT (P.). Contribution à l'hist. du lex. fr. Romania. 1925, t. 51, p. 33. — LEW. 1960, p. 224, 226, 262. — POPE 1961 [1952], § 733.

angoisseux, euse [ɑ̃gwasø, øz] adj. et n.
ÉTYM. Du XIe au XVIIe; repris au XIXe; de angoisse.
Archaïsme littér. Plein d'angoisse. Anxieux; angoisser (p. p.).
1 (…) je les examinais tour à tour avec une angoisseuse curiosité.
Balzac, Souvenirs d'un paria, VI, in Œ. diverses, t. I, p. 257.
(Choses). Angoissant :
2 Le désir lui vint de se dédoubler et de se transporter instantanément rue du Chevalier-de-la-Barre pour imposer ses mains fraîches sur le front brûlant de l'artiste, comme il est d'usage entre amants dans les situations angoisseuses.
M. Aymé, le Passe-muraille, p. 35.
N. Personne qui est sujette à l'angoisse. Angoissé.
3 Telles sont les lubies inconcevables, jaculatoires, poétiques et, par conséquent, grotesques, qui me hantent et qui troublent la lucidité de mes idées. C'est une simple maladie; — je suis un angoisseux. Je me suis traité par les douches, le quinquina, les purgatifs, les amers et l'hydrothérapie; — je vais mieux, beaucoup mieux ! — Je commence à me rassurer (…)
Villiers de L'Isle-Adam, Tribulat Bonhomet, p. 47.

Encyclopédie Universelle. 2012.