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MYRTALES
MYRTALES

Les Myrtales (Angiospermes Dicotylédones) sont un ordre numériquement très important, dont presque tous les membres sont facilement reconnaissables par d’évidents caractères communs. Cet ensemble taxinomique parfaitement défini aurait pu, à la rigueur, être envisagé comme représentant une seule famille; les groupements naturels que l’on y distingue sur la base de caractères morphologiques, anatomiques et chimiques ont été cependant considérés non comme des sous-familles, mais comme des familles. Celles-ci sont représentées, entre les tropiques, par des arbres, des arbustes ou des herbes, vivaces ou annuelles. Quelques familles comptent des types, tous herbacés, ayant pris place dans les biocénoses des zones à hiver froid. L’importance écologique des Myrtales est soulignée par l’exemple de la réussite des Eucalyptus dans le peuplement de milieux variés en Australie, et par la conquête des zones humides dans les régions tropicales (Rhizophoracées = palétuviers) et tempérées (Habragacées).

Caractères généraux

La fleur, cyclique, hermaphrodite, actinomorphe ou, assez exceptionnellement, zygomorphe, est caractérisée par son réceptacle, par le nombre des pièces florales (sépales, pétales, étamines, carpelles) dans chaque cycle (calice, corolle, androcée, pistil) et par l’architecture du pistil (fig. 1).

Le réceptacle, en forme de coupe, d’urne ou de tube porte, sur son bord, les lobes du calice et les pétales; les étamines sont attachées aussi au bord du réceptacle, ou insérées sur la paroi ou au fond de celui-ci. Le pistil est invariablement posé au fond du réceptacle; il est soit entièrement libre vis-à-vis de ce dernier, soit plus ou moins soudé, dans toute sa partie ovarienne, à la paroi réceptaculaire: dans le premier cas, le pistil est entouré, à distance, par la couronne périanthaire (périgynie ); dans le second cas, l’ovaire, surmonté par la couronne périanthaire, est infère (épigynie ).

Les pièces florales sont généralement au nombre de deux ou d’un multiple de deux: le plus souvent quatre ou six sépales libres, quatre ou six pétales libres, quatre, six, huit, douze étamines libres, deux, quatre ou six carpelles intimement et complètement soudés, jusqu’à l’extrémité du style, toujours simple. Cependant, chez beaucoup de Myrtales, les étamines sont très nombreuses par fission de quatre, six ou huit ébauches; les pièces périanthaires peuvent être au nombre de cinq, les étamines de dix, les carpelles de cinq ou de trois. Les graines sont habituellement exalbuminées.

L’appareil caulinaire comporte, typiquement, des feuilles simples à limbe entier, opposées ou verticillées, sans stipules, ou à stipules très petits ou caducs. Cependant, on connaît des Myrtales à feuilles alternes. Dans la plupart des familles, l’appareil conducteur de la tige comporte un liber interne interposé entre le bois et la moelle.

Le nombre des caractères morphologiques et anatomiques permettant de reconnaître une Myrtale est tel que, même si certains d’entre eux font défaut (ou sont aberrants), le tableau composé par ceux qui subsistent (et sont typiques) suffit à lever tous les doutes: le pistil à carpelles soudés, entouré ou enveloppé par le réceptacle, ne manque jamais et oriente l’identification que confirme soit le mode d’insertion des pièces périanthaires, soit le nombre de celles-ci, soit la présence d’un liber interne, soit d’évidentes affinités avec des espèces présentant le tableau complet des caractères qui définissent l’ordre.

Les Myrtales sont manifestement proches des Rosales à fleurs péri- ou épigynes et à graines exalbuminées, en particulier des Rosacées, famille par enchaînement dont la diversité est presque aussi grande que celle de l’ordre ici étudié. Mais les différences sont significatives: chez les Rosacées, les carpelles ne sont pas soudés, ou ne le sont que dans leur partie ovarienne; le nombre des pétales et des sépales est, typiquement, de cinq; les feuilles, alternes, sont souvent dentées, découpées, ou même composées; les stipules sont très développés; le liber interne fait défaut.

Familles composantes

L’ordre des Myrtales sensu stricto (sans les Thyméléales que l’on tient maintenant pour un ordre distinct) comprend dix familles méritant attention.

Les Myrtacées (100 genres, 3 000 espèces) sont des arbres ou des arbustes très aromatiques (dans tous les organes existent des poches glandulaires élaborant des huiles essentielles), caractère qui, dans l’ordre, est propre à cette famille. L’adnation du réceptacle et de l’ovaire est complète. Les étamines sont très nombreuses (fig. 1 a). Presque toutes les Myrtacées sont tropicales; le myrte (Myrtus communis ) de la région méditerranéenne, l’une des rares reliques de l’époque lointaine où les flores tropicales s’étendaient jusqu’à de hautes latitudes, est une exception.

Plusieurs espèces offrent un certain intérêt économique en raison des essences qu’elles produisent. Dans le genre Syzygium (cent espèces des tropiques de l’Ancien Monde et des îles du Pacifique), S. aromaticum , originaire des Moluques et maintenant cultivé dans d’autres régions tropicales, est le giroflier, dont l’essence est recherchée; les jeunes boutons floraux séchés sont une importante épice («clous de girofle»). Le genre Melaleuca comprend aussi plus de cent espèces spontanées dans les îles du Pacifique; M. viridiflora , de Nouvelle-Calédonie, produit l’essence de niaouli qui, purifiée par des procédés spéciaux, constitue le goménol (marque déposée).

Au genre Pimenta (quatorze espèces des Caraïbes) appartient P. acris , petit arbre extrêmement aromatique, dont le fruit («toute épice») est utilisé comme condiment. Les fruits d’autres Myrtacées sont succulents: la goyave est le fruit de Psidium guayava , d’Amérique tropicale, aujourd’hui acclimaté dans toutes les régions chaudes du monde. Les fruits d’Eugenia uniflora («cerisier de Cayenne») et de divers Syzygium («pomme-rose», «pomme d’eau», etc.), n’ont qu’un intérêt mineur.

Enfin, à la famille des Myrtacées appartient le genre Eucalyptus comprenant plus de six cents espèces arborescentes ou arbustives endémiques d’Australie et de Tasmanie; elles marquent tous les paysages de cette région, car à chaque milieu naturel sont adaptées au moins quelques espèces. Certains Eucalyptus sont des arbres géants: E. amygdalina , par exemple, du sud de l’Australie est le plus grand arbre connu (jusqu’à 150 m de hauteur et 10 m de diamètre à la base du tronc). La diversité écologique des Eucalyptus et la rapidité de leur croissance ont conduit à rechercher parmi eux des espèces de reboisement convenant à toutes les régions où l’hiver n’est pas trop rude.

Les Punicacées (1 genre, 2 espèces) ne diffèrent des Myrtacées que par l’absence de poches glandulaires. L’une des deux espèces du genre Punica est le grenadier (P. granatum ), arbuste à fleurs écarlates, des régions circumméditerranéennes (aujourd’hui répandu dans toute la zone tropicale), dont le fruit (grenade) est comestible.

Les Sonneratiacées (2 genres, 7 espèces), toutes arborescentes et situées dans l’Ancien Monde tropical, diffèrent des familles précédentes par l’incomplète épigynie de la fleur (sépales situés sous le fruit et ne le couronnant pas, comme ils le font chez la grenade, fig. 2). Les cinq espèces du genre Sonneratia vivent dans les riches mangroves de l’océan Indien, de l’Asie tropicale et de l’Indonésie [cf. MANGROVES].

Les Lécythidacées (24 genres, 250 espèces), arbres de forêts denses, surtout représentés en Amérique tropicale, offrent trois originalités caractéristiques: les feuilles sont alternes; le liber interne fait défaut; les étamines, très nombreuses, tendent à former des systèmes étranges et compliqués (soudure des filets staminaux à leur base; soudure d’une partie des étamines en une lame spécialisée, créant ainsi une zygomorphie de l’androcée, transformation de beaucoup d’étamines en staminodes stériles pétaloïdes). La «noix du Brésil», graine de Bertholletia excelsa , grand arbre de la forêt amazonienne, est un produit d’exportation: le volumineux embryon, riche en huiles et en protéines, est comestible.

Les Rhizophoracées (16 genres, 120 espèces) sont des arbres représentés dans toutes les régions tropicales. Elles sont aussi dépourvues de liber interne et, dans quelques genres, les feuilles sont alternes. Les Rhizophoracées diffèrent, cependant, très nettement des Lécythidacées, par un androcée sans fantaisie, dans lequel le nombre des étamines n’excède généralement pas celui des pièces périanthaires (fig. 1 d). Le genre Rhizophora est abondamment représenté dans toutes les mangroves; les genres Bruguiera , Ceriops , Kandelia n’existent que dans les riches mangroves orientales, avec les Sonneratia (cf. MANGROVES).

Les Combrétacées (18 genres, 500 espèces) sont de grands ou de petits arbres, des lianes ligneuses, des buissons; elles abondent dans toutes les régions tropicales et subtropicales, et quelques-unes vivent dans les mangroves. Myrtales typiques, leur seule originalité réside dans leur ovaire uniloculaire, à l’intérieur duquel n’existent que deux ovules, pendant du plafond ovarien; les fruits sont très généralement ailés (caractère observé aussi, exceptionnellement, chez les Lécythidacées et les Rhizophoracées, et qui témoigne des affinités entre ces familles). Le genre pantropical Combretum (250 espèces), riche en lianes, comprend de nombreuses espèces à fleurs ornementales. Le genre Terminalia (200 espèces), pantropical aussi, compte quelques grands arbres exploités pour leur bois.

Les Mélastomacées (200 genres et au moins 4 000 espèces: la plus grande famille de l’ordre) sont de petits arbres, des arbustes et, au contraire des familles précédentes, des herbes, vivaces ou annuelles. Ces plantes, très répandues dans tous les milieux tropicaux, sont terrestres (sols drainés et marécages) ou épiphytiques. L’originalité de la famille réside, d’une part, dans les caractères des étamines qui s’ouvrent par des pores – et non par des fentes, comme chez les autres Myrtales – et sont munies d’appendices de formes extrêmement diverses, d’autre part, dans la nervation des feuilles (plusieurs nervures principales liées par les connexions scalariformes) [fig. 3]. L’adnation du réceptacle et de l’ovaire est plus ou moins complète. Les fleurs de nombreuses Mélastomacées sont ornementales, et certaines espèces (Medinilla magnifica des Philippines, etc.) sont recherchées pour la culture en serre chaude.

Les Lythracées (22 genres, 500 espèces), en majorité tropicales, comptent aussi – au contraire de toutes les familles précédentes – des représentants dans les régions à hiver froid; elles sont des arbres ou des herbes, vivaces ou annuelles, dont certaines sont aquatiques; les Lythracées ligneuses n’existent qu’entre les tropiques. Dans les fleurs, actinomorphes ou, dans le grand genre néotropical Cuphea , zygomorphes, l’ovaire est libre de toute adnation avec le réceptacle (fig. 1 c). Sépales et pétales sont situés au bord du réceptacle; les étamines sont insérées aussi au bord du réceptacle, ou sur sa paroi, ou sur son fond, avec le pistil. Au petit genre Lythrum appartient la salicaire (L. salicaria ), herbe vulnéraire et astringente vivant au bord des eaux, en Europe et dans une grande partie du monde. Le henné (Lawsonia inermis ) est un arbuste cultivé dans les pays musulmans d’Asie et d’Afrique (autrefois dans l’ancienne Égypte) pour la préparation d’un cosmétique. Les Lagerstroemia (Asie tropicale et Indo-Malaisie) sont des arbres et des arbustes à fleurs ornementales: L. indica est souvent cultivée pour la décoration des avenues et des parcs dans les régions d’Europe à hiver doux.

Les Onagracées (Œnothéracées), qui comprennent vingt genres et six cent cinquante espèces, sont surtout américaines. La majorité d’entre elles vit dans des régions tempérées ou froides; aucune ne supporte la sécheresse et une forte minorité est aquatique. Si certaines sont encore de petits arbres ou des arbustes, la plupart sont des herbes, vivaces ou annuelles. Myrtales typiques, elles diffèrent des Lythracées par leurs fleurs épigynes (inferovariées) chez toutes les espèces et la régularisation parfaite du nombre des pièces florales dans chaque cycle (fig. 1 b).

Le genre Oenothera groupe deux cents espèces herbacées américaines; quelques-unes ont été acclimatées en Europe. La découverte, par Hugo de Vries, en 1886, dans un peuplement d’O. lamarckiana , d’un individu géant spontanément apparu (mutation), et dont il devait être démontré plus tard que son gigantisme est lié à un doublement du nombre des chromosomes, a été une étape importante dans l’histoire de la génétique.

Le genre Fuchsia comprend une centaine d’espèces arbustives, lianescentes, herbacées, terrestres ou épiphytiques, presque toutes des montagnes de l’Amérique centrale et de l’Amérique du Sud (six espèces en Nouvelle-Zélande et à Tahiti). Les fleurs des Fuchsia , à sépales et pétales rouges ou pourpres, sont très décoratives; à partir de certaines espèces améliorées par l’horticulture, de nombreuses races commerciales ont été créées.

Le genre Epilobium (200 espèces) compte certaines plantes très communes (E. spicatum : «laurier de saint Antoine», etc.) dans les flores de l’hémisphère Nord.

Les espèces des genres Jussieua (45) et Ludwigia (30), surtout tropicales, mais dont certaines pénètrent jusque dans les régions tempérées, sont aquatiques.

La tendance des Myrtales à vivre dans des stations humides ou dans l’eau est exprimée au maximum dans la famille des Haloragacées : huit genres, cent soixante espèces herbacées répandues dans le monde entier, mais surtout nombreuses en Amérique, et dont la plupart sont aquatiques. Les fleurs sont très petites, souvent sans périanthe et unisexuées, comme celles de beaucoup de plantes vivant dans cet habitat (fig. 4). Le nombre multiple de 2 des carpelles et des étamines, des pétales ainsi que des sépales, lorsque ceux-ci ne font pas défaut, l’inferovarie, évidente quand les pièces périanthaires existent, le fruit ailé, rappelant, en miniature, celui des Combrétacées, sont autant de signes sûrs de l’appartenance de la famille à l’ordre des Myrtales. À la flore d’Europe appartiennent quelques espèces de Myriophyllum , genre cosmopolite dont tous les représentants sont adaptés à la vie dans les eaux douces par leurs feuilles immergées, réduites aux nervures. Elles assument ainsi une fonction respiratoire de type «branchial», puisqu’elles sont capables d’extraire de l’eau les gaz qui s’y trouvent dissous: non seulement l’oxygène nécessaire à leur respiration (exercée seulement pendant l’obscurité nocturne), mais aussi le gaz carbonique utile à leur activité photosynthétique (durant le jour).

Encyclopédie Universelle. 2012.