ENFANT NATUREL
Un enfant est dit «naturel» ou encore «illégitime» lorsqu’il a été conçu et est né hors le mariage de ses père et mère. Fruit de relations sexuelles non instituées par le droit, l’enfant naturel a longtemps subi, dans sa condition juridique et sociale, l’opprobre suscité par la conduite de ses parents. Bien qu’innocent, il était le signe de relations déviantes, et, jusqu’à une date récente, le droit prétendait fonder la défense du mariage, seule source de la légitimité, sur la négation ou la diminution des droits de l’enfant. Seul le mariage créait la famille et fondait la légitimité.
Le Code civil de 1804, en effet, ignorant dans une large mesure l’héritage du droit révolutionnaire trop en avance sur son temps, s’il admettait que la filiation naturelle puisse être établie par reconnaissance volontaire des parents, n’en déduisait pas pour autant l’existence d’une parenté et d’une famille naturelles et limitait considérablement les droits de l’enfant naturel dans la succession de ses père et mère. Cette sévérité avait pour conséquence de laisser hors de toute protection l’enfant naturel non reconnu, car le Code civil prohibait l’action en recherche de paternité naturelle. De plus, et pour renforcer encore l’institution matrimoniale contre le «bâtard» ou l’«intrus», la reconnaissance d’un enfant naturel adultérin ou incestueux était interdite. L’enfant adultérin n’existait pas en droit, ce qui, en fait, conduisait à admettre l’impunité du père marié par ailleurs. Paradoxalement, l’enfant adultérin par sa mère était légalement rattaché au mari de celle-ci. S’il ne désavouait pas l’enfant de sa femme, ce dernier conservait un statut d’enfant légitime contrairement à la réalité des liens du sang.
Cette condition défavorable faite à l’enfant naturel était révélatrice d’un droit de la famille pour lequel l’institution fondée sur le mariage primait les intérêts individuels, et qui n’avait pas trouvé d’autre moyen de sanctionner les infractions à la morale sexuelle que le sacrifice de l’enfant.
Cette conception persiste de nos jours dans le droit musulman qui prohibe tout établissement d’une filiation naturelle et marque d’infamie la mère célibataire.
Le droit contemporain a renversé l’édifice élaboré au XIXe siècle. Les réformes se sont imposées sous l’action conjuguée de plusieurs facteurs. L’évolution des mœurs, le libéralisme et la tolérance de l’opinion publique en matière de relations sexuelles, le souci de protection de l’enfant, auquel il paraissait insupportable de faire subir les conséquences de ce que l’on n’ose plus nommer la «faute» de ses parents, les principes internationaux ou constitutionnels de lutte contre les discriminations, les transformations intervenues dans d’autres domaines du droit de la famille qui traduisaient une modification radicale de son esprit et de sa finalité, l’institution étant désormais conçue en faveur de l’individu, tous ces éléments devaient promouvoir une nouvelle conception de la justice: celle-ci imposait au minimum la reconnaissance de l’égalité des droits de tous les enfants, quelles que soient les circonstances dans lesquelles ils ont été conçus. Ce principe d’égalité permettait seul, en outre, d’établir la responsabilité des parents envers les enfants qu’ils engendrent.
À ces raisons de fond s’ajoutaient des motifs techniques. Il fallait, en France du moins, restituer au droit de la filiation une cohérence qu’il avait petit à petit perdue: les principes du Code civil avaient été progressivement minés par les actions parcellaires du législateur et de la jurisprudence afin d’améliorer peu à peu le sort des enfants naturels (admission en 1912 de l’action en recherche de paternité naturelle, en 1955 de l’action alimentaire des enfants adultérins).
Par ailleurs, des distorsions se sont établies entre le droit civil et le droit social qui, par souci de réalisme, s’attache à la notion de fait de «personne à charge» plutôt qu’à la nature juridique de la filiation.
En outre, le développement du divorce et de la légitimation de l’enfant adultérin par suite du remariage, l’admission par les tribunaux de l’adoption de son propre enfant, et surtout l’introduction par une loi de 1966 de l’adoption plénière d’un enfant par un célibataire révélaient l’incohérence des discriminations et la nécessité de ne plus lier le sort de l’enfant à l’état de ses père et mère.
La réforme française en ce sens fut l’œuvre de la loi du 3 janvier 1972, introduite dans le Code civil (art. 311 sqq.). Dans la plupart des pays européens des réformes comparables ont vu le jour depuis 1969 (Allemagne fédérale, Royaume-Uni, Espagne, Italie, Suisse, Belgique), tandis que, dès leur instauration, les régimes socialistes d’U.R.S.S. et des démocraties populaires avaient établi dans leurs codes de la famille un principe d’égalité entre enfants légitimes et naturels, qui n’a pas disparu aujourd’hui.
Cependant, si ce que l’on entendait détruire était clair, ce qu’il fallait construire l’était moins. La politique législative positive n’est pas facile à définir précisément, et le droit naturel ou l’équité n’y suffisent pas. En effet, l’enfant naturel n’a pas, en fait, été conçu dans le cadre d’un foyer présumé stable et prêt à l’accueillir. Indépendamment de tout jugement de valeur, cet état de fait impose, sinon des discriminations, du moins des différenciations par rapport à la filiation légitime. Elles affectent essentiellement la preuve de la paternité qui, en l’absence du mariage, ne peut être induite des seules relations, peut-être passagères et occasionnelles, des parents, relations qu’il faut de toute façon prouver.
Par ailleurs, l’incertitude quant à la communauté de vie entre les parents réagit nécessairement sur la condition de l’enfant qui ne peut être en tous points calquée sur celle d’un enfant légitime. Les différences cependant opposent moins l’enfant légitime et l’enfant naturel que l’enfant vivant avec des parents unis et l’enfant de parents désunis, car la loi prévoit des possibilités d’aménagement du statut de l’enfant selon les circonstances de fait, notamment en cas de communauté de vie des parents.
Enfin, il importe de déterminer dans quelles conditions la filiation naturelle pourra être imposée par les tribunaux au parent qui se refuse à reconnaître l’enfant et quels seront les effets du jugement. Car, humainement, on ne fonde pas une paternité ni une maternité vraies et accomplies sur un procès.
C’est pourquoi, la situation juridique de l’enfant naturel ne pouvant pas être rigoureusement identique à celle de l’enfant du mariage, il était nécessaire, fût-ce à titre purement symbolique, de conserver l’institution traditionnelle de la légitimation, notamment lorsque les père et mère viennent à se marier.
1. L’établissement de la filiation naturelle
Aujourd’hui, pour tout enfant naturel, une filiation peut être établie en droit, même s’il a été conçu dans des relations adultérines ou incestueuses. Le droit français, cependant, établit, dans l’intérêt de l’enfant plus que dans celui de la société, quelques exceptions: ainsi, lorsque la parenté existant entre les père et mère constitue un empêchement à mariage insusceptible de dispense (entre ascendant et descendant, entre frère et sœur), l’enfant incestueux, ne peut être reconnu que par son père ou sa mère; quand bien même le mari de sa mère ne serait pas son véritable père, l’enfant légitime qui est élevé comme tel ne peut prouver sa filiation naturelle envers un autre individu, la possession d’état d’enfant légitime rendant nulle la reconnaissance d’enfant naturel (art. 334-9, C. civ.); enfin, l’enfant adopté par adoption plénière lorsque sa filiation d’origine n’était pas établie ne pourra plus connaître en droit ses parents biologiques.
Ces exceptions mises à part, l’existence du lien juridique de filiation rattachant l’enfant à sa mère et à son père suppose la constatation de ce lien dans un acte ou par un jugement. Alors que la filiation légitime résulte de la seule indication dans l’acte de naissance des noms de la mère et de son mari dont la paternité est, sauf exceptions, présumée, l’établissement de la filiation naturelle résulte soit d’un acte – la reconnaissance –, soit de faits constitutifs de la possession d’état, soit d’un jugement rendu à la demande de l’enfant.
L’établissement volontaire
Tous les systèmes juridiques n’ont pas la même conception de la manière dont la filiation naturelle peut être juridiquement établie en dehors de l’intervention du juge. Pour les uns, fidèles à l’adage materna semper certa est , il convient de distinguer l’établissement de la maternité, qui résulte de la seule indication de la mère dans l’acte de naissance, et l’établissement de la paternité, qui requiert une reconnaissance expresse, parfois subordonnée à l’accord de la mère (pays germaniques). D’autres se contentent du seul acte de naissance suffisant à prouver la paternité (certains pays de l’Est). D’autres enfin, tel le droit français, persistent à exiger une reconnaissance par acte authentique pour établir la paternité et la maternité. Cette exigence confère à la filiation naturelle un caractère volontaire plus accusé que pour la filiation légitime, car la reconnaissance est à la fois un aveu, donc une preuve du lien biologique, mais aussi un témoignage d’accueil de l’enfant admis comme tel par ses auteurs. Mais la règle peut être défavorable à l’enfant qui devra agir en justice s’il n’est pas reconnu. La préoccupation de prévenir l’infanticide, le souci de faciliter l’adoption des enfants abandonnés ou même de préserver la liberté de la mère justifient l’exigence de la reconnaissance maternelle que la Commission européenne des droits de l’homme a jugée contraire à l’égalité des enfants légitimes et naturels. Cependant, afin de réduire les inconvénients résultant de l’ignorance par la mère de la règle légale, des tempéraments importants sont apportés à l’exigence de la reconnaissance maternelle, notamment si l’enfant jouit de la possession d’état (art. 337, C. civ.) ou lorsqu’il s’agit
de l’enfant naturel d’une femme mariée (art. 313.2, C. civ.). Il semble bien que le législateur français soit prêt à tirer toutes les conséquences du principe d’égalité quant aux modes d’établissement de la filiation légitime et naturelle, car les différenciations qui, en 1972, paraissaient encore nécessaires, sont aujourd’hui ressenties comme des discriminations, sources d’injustices et d’iniquités. Ainsi, après plus de cent cinquante ans de discussions, le Parlement a admis, par la loi du 25 juin 1982, que la possession d’état est, au même titre que la reconnaissance, une preuve suffisante de la filiation naturelle (art. 334-8, nouveau Code civil).
La reconnaissance est un acte personnel et unilatéral. Mais c’est aussi un acte fragile car, s’agissant d’une preuve de la filiation, elle peut être contestée, même par son auteur, et par tous ceux qui y ont intérêt lorsqu’elle n’est pas conforme à la vérité biologique. Or les reconnaissances de complaisance souscrites par l’amant ou le mari de la mère à l’égard des enfants d’un autre homme sont fréquentes et la preuve de l’inexactitude est devenue certaine, l’examen des sangs permettant d’aboutir à des diagnostics irréfutables de non-paternité. C’est pourquoi il n’est pas facile de déterminer quel rôle il convient de reconnaître à la vérité biologique lorsque celle-ci aboutit à priver l’enfant d’une filiation (cf. art. 339, C. civ. et la jurisprudence sur ce texte). Un problème comparable se pose lorsque, à défaut de reconnaissance ou de possession d’état, il apparaît nécessaire de prouver en justice la filiation naturelle.
L’établissement judiciaire
Parce qu’il faut consacrer la responsabilité des adultes envers les enfants qu’ils engendrent, la filiation peut encore être établie en justice à l’issue d’une action en recherche de maternité ou de paternité naturelles. L’établissement en justice de la maternité naturelle est exceptionnelle. En revanche, les déclarations judiciaires de paternité naturelle sont plus fréquentes.
Le régime juridique de l’action est complexe car le législateur doit choisir entre deux conceptions: ou bien l’action est largement ouverte et ses conditions sont peu exigeantes, mais ses effets pourront être limités le jugement ne créant pas un lien de famille complet; ou bien la paternité établie en justice crée un véritable lien de parenté avec toutes les conséquences personnelles et patrimoniales qui en résultent, mais alors il apparaît nécessaire de se montrer plus exigeant quant à la preuve de la paternité. La première conception est celle des pays de droit germanique qui, pour déclarer la paternité en justice, se contentent de la preuve de la cohabitation du prétendu père avec la mère lors de la conception, mais qui limitent aux droits patrimoniaux de l’enfant les effets de la déclaration judiciaire de paternité. La seconde conception a longtemps été celle du droit français.
Mais, en réalité, deux actions différentes peuvent être intentées. La mère ou l’enfant après sa majorité peuvent exercer l’action d’état qui vise à imposer au prétendu père une paternité qui créera un véritable lien familial. Cette action, régie par les articles 340 sqq. du Code civil, était, jusqu’à la loi du 8 janvier 1993, enfermée dans des conditions restrictives (cas d’ouverture légaux – viol, séduction dolosive, aveu de paternité, entretien de l’enfant, concubinage ; fins de non-recevoir et moyens de défense efficaces). On s’est s’interrogé sur leur opportunité, dès lors qu’il est possible de prouver scientifiquement et sans erreur la paternité; mais celle-ci au fond ne se limite pas à un lien biologique et il est sage d’attendre du défendeur un minimum d’intention familiale attestée par la plupart des cas d’ouverture. Le législateur contemporain a préféré une conception purement biologique.
Il se peut que la mère veuille obtenir seulement des aliments. Elle exercera alors l’action à fins de subsides, dont le régime juridique s’apparente à celui d’une action en responsabilité civile, contre l’homme qui, par ses relations avec elle, a couru le risque de la procréation. C’est pourquoi il suffit de prouver ces relations, car l’action n’établit pas une paternité, mais seulement une dette d’aliments, à l’encontre d’un père possible.
2. Condition juridique de l’enfant naturel
Depuis que de nombreux pays européens ont réalisé l’égalité de tous les enfants, reconnaissant à chacun les mêmes droits et les mêmes devoirs, la condition juridique de l’enfant né hors mariage n’est plus discriminatoire. Égalité de droit et égalité de fait ne sont pourtant pas synonymes: l’enfant naturel est souvent l’enfant d’un seul parent, notamment lorsque le père se refuse à le reconnaître, et même lorsque les père et mère vivent en concubinage, la fragilité de leur union, qui peut être rompue unilatéralement et librement, rejaillit en fait sur la situation de l’enfant.
C’est pourquoi il est difficile en droit de ne tenir aucun compte de l’absence du mariage. Certes, l’égalité peut être aisément consacrée sur le plan patrimonial: c’est ainsi que l’enfant naturel aujourd’hui a les mêmes droits alimentaires et successoraux que l’enfant légitime vis-à-vis de toute la parenté. Comme l’indique l’article 334 du Code civil «il entre dans la famille de son auteur» et cela se concrétise en particulier par la vocation héréditaire. Néanmoins, en droit français l’égalité successorale n’est pas absolue, car lorsqu’il s’agit d’un enfant adultérin, venant à la succession de son auteur en concours avec le conjoint ou des enfants légitimes, ses droits sont diminués de moitié (cette inégalité résiduelle est cependant vivement contestée et elle pourrait disparaître à son tour lors d’une réforme des successions).
De même l’enfant adultérin ne peut être élevé au foyer du parent adultère qu’avec le consentement du conjoint. C’est en effet l’aménagement de l’autorité parentale à l’égard de l’enfant mineur qui nécessite des différenciations et suscite un important contentieux. Celle-ci appartient en principe à la mère quel que soit l’ordre des reconnaissances. Mais la règle peut être aménagée par décision judiciaire: l’autorité peut être transférée au père si l’intérêt de l’enfant l’exige; elle peut aussi être reconnue conjointement aux deux parents par déclaration devant le juge d’instance; ainsi l’union libre stable peut produire les mêmes effets que le mariage. Il en est de même du nom de l’enfant qui obéit à des règles complexes car si, en pratique, le nom de la mère est le plus souvent dévolu à l’enfant, plusieurs possibilités existent de transférer à l’enfant le nom de son père comme s’il s’agissait d’un enfant légitime.
3. Légitimation
Elle permet de conférer à l’enfant naturel la qualité d’enfant légitime. L’institution est ancienne, et avait une grande importance lorsque l’enfant naturel était privé de droits de famille. Malgré l’égalité de principe entre enfants légitimes et naturels, la légitimation conserve certains intérêts et, en tout cas, une valeur symbolique non négligeable. Traditionnellement, la légitimation résulte du mariage des père et mère, et dans les mœurs la tradition demeure très vivante puisque plus de la moitié des enfants illégitimes à la naissance sont légitimés par le mariage de leurs parents. En droit, la légitimation est automatique lorsque la filiation est établie avant le mariage ou au moment de sa célébration; elle résulte d’un jugement destiné à vérifier l’existence de la possession d’état lorsque l’enfant n’est reconnu qu’après le mariage des père et mère.
Plus étonnante est la légitimation sans mariage. Certes l’histoire (légitimation par rescrit du prince, lettres royales de légitimation) et les droits étrangers (droit allemand) ne l’ont pas ignorée. En droit allemand, la légitimation unilatérale par décision judiciaire est possible et utile, à condition que la mère y consente, afin de conférer au père naturel l’autorité parentale ou des droits personnels sur l’enfant naturel. En droit français, la légitimation par autorité de justice a été une des innovations de la loi du 3 janvier 1972 (art. 333 sqq., C. civ.). Admise seulement lorsque le mariage des père et mère est impossible, elle est en outre subordonnée à une décision judiciaire d’opportunité selon l’intérêt de l’enfant. Ses conditions comme ses effets (qui varient selon qu’elle est demandée par un seul parent ou par les deux) suscitent dans la pratique des difficultés d’interprétation. En tout état de cause elle révèle que le fondement de la légitimité, à savoir le mariage, est détruit sans être remplacé par un autre, et que l’art du compromis dans le droit de la famille, nécessaire et difficile, peut être excessif si la clarté des structures de la parenté et de l’identité généalogique s’évanouit.
4. Données sociologiques
Quantitativement, le nombre des naissances illégitimes, après avoir été relativement stable, est aujourd’hui en croissance constante: de 6 à 7 p. 100 de l’ensemble des naissances, dans les années soixante, il est passé à 12 p. 100 en 1982, 21 p. 100 à 1989, 30 p. 100 en 1992. L’analyse des causes du plus ou moins grand nombre de naissances illégitimes, selon les milieux sociaux, les régions, le rôle des facteurs religieux ou idéologiques, est déconcertante car elle ne permet pas de dégager des explications rationnelles d’un phénomène à la fois permanent mais variable dans le temps et dans l’espace. La Suède, où l’on a enregistré depuis quelques années une progression manifeste des enfants naturels, aurait annoncé récemment un mouvement de reflux.
Il est en tout cas remarquable de constater que le développement de la contraception et la libéralisation de l’avortement n’ont pas entraîné une réduction du nombre des naissances illégitimes; il est délicat d’affirmer le rôle causal des réformes du droit; il est probable qu’il échappe à la preuve.
Qualitativement, le phénomène est très diversifié et la situation juridique de l’enfant naturel très évolutive: à côté des «enfants accidents», existent des enfants délibérément voulus par la femme célibataire qui réduit l’homme au rôle de géniteur, ou des enfants élevés par les deux parents unis de façon stable. L’enfant adultérin n’a pas en fait la même condition que l’enfant de parents célibataires.
Enfin, plus de la moitié des enfants naturels étaient en 1973 reconnus à la naissance par l’un au moins des parents (contre 30 p. 100 seulement au milieu du XIXe siècle). Depuis 1950, on enregistre une augmentation des reconnaissances paternelles (18 p. 100 en 1951, 34 p. 100 en 1973). En 1990, 90 p. 100 des enfants naturels sont reconnus par leur père et par leur mère.
Les actions en recherche de paternité et à fins de subsides sont en revanche peu nombreuses, ce qui pourrait signifier ou bien que les pères naturels reconnaissent volontairement leurs enfants, ou bien que la mère préfère ne pas agir en justice afin de conserver la plénitude de ses droits.
La vitalité des légitimations, le fait que l’adoption concerne de nombreux enfants naturels, attestent qu’il est peu d’enfants qui selon la formule du doyen Carbonnier «ne finissent un jour ou l’autre par trouver leur légitimité». On se demande aujourd’hui, face au déclin du mariage, si la distinction des filiations légitime et naturelle a encore un sens en droit.
● Enfant naturel enfant né hors mariage.
Encyclopédie Universelle. 2012.