insu (à l'insu de) [ alɛ̃sydə ] loc. prép.
1 ♦ Sans que la chose soit sue de (qqn). Faire une démarche à l'insu de son entourage, en le tenant dans l'ignorance. « au su et à l'insu de tout le monde » (Romains). À mon insu, à leur insu. Des pensées « auxquelles nous obéissons sans les connaître; elles sont en nous à notre insu » (Balzac).
2 ♦ Sans (en) avoir conscience. ⇒ inconsciemment. Se trahir à son insu.
⊗ CONTR. Su (au su de). Consciemment, sciemment.
insu
(En loc. Prép.)
d1./d à l'insu de: sans que la (les) personne(s) désignée(s) le sache(nt). Faire qqch à l'insu de sa famille.
⇒INSU (À L'— DE), loc. prép.
Sans qu'on le sache, sans que l'on s'en rende compte. Anton. (au vu et) au su de (qqn).
— [Constr. avec un subst. ou un pron. désignant une pers.] Le cautionnement (...) [a] été donné au su ou à l'insu du débiteur (Code civil, 1804, art. 2028, p. 364). Rembrandt (...) meurt pauvre, presque à l'insu de tous (TAINE, Philos. art, t. 2, 1865, p. 79) :
• 1. ... l'Empereur (...) demanda un rapport sur l'organisation de la marine anglaise. Ce travail, empreint, à l'insu du rédacteur, d'un esprit profondément libéral et philosophique, ne fut terminé qu'en 1807...
FRANCE, Bonnard, 1881, p. 385.
♦ [P. méton. du compl.] L'opération profonde qui s'accomplit au-dessous de ses sens [de l'observateur] et à l'insu de ses calculs (BLONDEL, Action, 1893, p. 76). Notre démêlé s'est accompli à l'insu des chroniques (AUDIBERTI, Mal court, 1947, II, p. 176).
— [Constr. avec un adj. poss. remplaçant le subst.] Ce que la nature vous a donné (...), c'est une grâce charmante et une sorte de gaieté qui se communique, à votre insu, aux personnes qui ont le bonheur de vous entendre (STENDHAL, Lamiel, Paris, Trianon, 1919 [1842], p. 86). Albertine avait combiné à mon insu, en se cachant de moi, le plan d'une sortie (PROUST, Prisonn., 1922, p. 91) :
• 2. Le philosophe qui pense qu'elle [la raison] se suffit à elle-même, et qui prétend le démontrer, ne réussit dans sa démonstration que s'il réintroduit ces forces [qui se tiennent derrière elle] sans le dire : elles sont d'ailleurs rentrées à son insu, subrepticement.
BERGSON, Deux sources, 1932, p. 87.
♦ [Avec un sens réfl.] Sans en avoir conscience. Anton. consciemment, sciemment. Je m'étais insensiblement et à mon insu rapproché de la rive d'où j'étais parti (DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 136). Javert, cet homme hautain, était à son insu plein de simplicité et de dignité (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 257) :
• 3. Encore la force psychique a-t-elle des cachettes inconnues que l'on sous-estime souvent, de même qu'il existe une foule de dépenses secrètes par lesquelles à notre insu nous nous vidons de notre vie.
MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 261.
REM. 1. Insu, -ue, adj., rare. Qui n'est pas su, connu de (quelqu'un). Avec ces « stratégies » régies par le lieu, savantes mais insues, l'ethnologie la plus traditionaliste fait retour (M. DE CERTEAU, L'Intervention du quotidien, Paris, Union gén. d'éd., 1980, p. 117). 2. À double insu, loc. adv. Synon. en double aveugle (v. double, vitalité).
Prononc. et Orth. : []. Ac. 1798-1878 : insçu et insu; Ac. 1935 : insu. Étymol. et Hist. Début XVIe s. adj. « inconnu » (FOSSETIER, Cron. marg., ms. Brux. 10511, V, III, 2 ds GDF.); 1538, mai, subst. a l'insceu de (ds R. hist. t. 1, 1876, p. 134); 1606 a mon insceu (NICOT). Dér. de su, part. passé de savoir; préf. in-1. Fréq. abs. littér. : 1 278. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 2 018, b) 1 579; XXe s. : a) 1 392, b) 2 029.
2. insu, ue [ɛ̃sy] adj. et n. m.
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♦ Didact. Qui n'est pas su. ⇒ Inconnu. — N. m. || L'insu. ⇒ Inscience.
0 (…) il s'agit d'évoluer sur l'arête tranchante de la neutralité inquiète, sans céder ni à l'exquise attraction de l'apocalypse, ni au désir de tranquillité ou à la lassitude admirative devant l'immensité de l'insu (…) de fait, sur de nombreux points, nous ne savons que fort peu, mais c'est déjà quelque chose que de savoir les limites de son savoir.
A. Sauvy, Croissance zéro ?, p. 12.
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CONTR. Su (V. Savoir).
Encyclopédie Universelle. 2012.