horde [ 'ɔrd ] n. f.
• 1559; tartare orda, horda→ ourdou
1 ♦ Didact. Tribu errante, nomade (chez les peuples de l'Asie centrale). La grande horde, la horde d'or : la tribu la plus importante, chez les Mongols. — Troupe, peuplade errante.
2 ♦ (XVIII e) Cour. Troupe ou groupe d'hommes indisciplinés. Horde de gamins. ⇒ 2. bande . « Cette horde d'excitateurs révolutionnaires » (Martin du Gard).
horde
n. f.
d1./d Peuplade, groupement d'hommes errants.
|| SOCIOL Chez Durkheim, groupement humain temporaire et instable.
d2./d Péjor. Groupe d'individus turbulents, destructeurs. Une horde de voyous.
⇒HORDE, subst. fém.
A. — 1. Tribu nomade de l'Asie centrale. Horde tartare. Hordes mongoles éparses entre l'Altaï et le Caucase (OZANAM, Philos. Dante, 1838, p. 210) :
• 1. Il est un des premiers à (...) donner un récit détaillé du genre de vie et du caractère de ces hordes mongoliques qui constituèrent le puissant empire des Tartares.
Hist. de la sc., 1957, p. 1447.
♦ La horde d'or. Nom de la plus puissante tribu mongole :
• 2. Cette salle n'offrait aucun meuble, mais çà et là des fourrures épaisses, des coussins de soieries asiatiques d'une extravagante richesse s'entassaient contre les murs et les piliers nus avec un air de profusion et de négligence : on eût dit le campement de nuit de la Horde d'or dans une blanche cathédrale byzantine.
GRACQ, Argol, 1938, p. 26.
— P. ext. Peuplade, troupe nomade vivant en société. Horde migratrice; horde d'Arabes, de Magyars, de Scythes. Une horde de Bédouins homicides, sans doute, qui, ayant aperçu au loin dans le désert ta petite caravane, sera venue la surprendre pendant son sommeil (COTTIN, Mathilde, t. 1, 1805, p. 337). J'ai visité, il y a quelques mois, une horde de bohémiens établis dans les Vosges (MÉRIMÉE, Carmen, 1847, p. 76). Normalement la terre appartient à une horde locale, composée d'un noyau permanent d'individus mâles et d'un ensemble variable de femmes venues du dehors (LOWIE, Anthropol. cult., 1936, p. 291) :
• 3. Un jour, toute la tribu part, emportant les enfants, les caisses remplies de hardes, les marmites, les ustensiles de cuisine, les fétiches, et se dirige vers le nouvel établissement. C'est quelque fois à 25 à 30 kilomètres en droite ligne, et il faut plusieurs jours à cette horde nomade embarrassée de bagages et d'enfants pour gagner sa nouvelle installation.
BRUNHES, Géogr. hum., 1942, p. 203.
— En partic. (chez Freud). La horde primitive. En 1917, j'ai adopté l'hypothèse de Ch. Darwin, d'après laquelle la forme primitive de la société humaine aurait été représentée par une horde soumise à la domination absolue d'un mâle puissant. J'ai essayé alors de montrer que les destinées de cette horde ont laissé des traces ineffaçables dans l'histoire héréditaire de l'humanité (FREUD, Psychol. collective, trad. par S. Jankélévitch, chap. 10, La Foule et la horde primitive, Paris, Payot, 1924, p. 83).
2. Groupe de personnes plus ou moins disciplinées provoquant du désordre, commettant des pillages, des actes de violence. Au milieu d'une horde de tout âge et de tout sexe, marchaient à pied les gardes-du-corps, ayant changé de chapeaux, d'épées et de baudriers avec les gardes nationaux (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 222). Toute la horde des portefaix et des fellahs se précipita vers le quai dans un tumulte un peu inquiétant pour les membres et les vêtements des passagers (VERNE, Tour monde, 1873, p. 27). Il est accaparé par une horde de ses camarades qui l'interpellent et le houspillent. Il se débat, répond à leurs sarcasmes, et tous se bousculent en riant (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 57) :
• 4. Des hordes de soldats ivres pénétrèrent dans les maisons, chassèrent à coups de crosse les femmes et les enfants, firent prisonniers les hommes, pillèrent, saccagèrent, arrosèrent de pétrole les meubles et les planchers, lâchèrent par le quartier des chats trempés d'essence et enflammés.
VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 43.
SYNT. Horde assiégeante, barbare, conquérante, ennemie, enragée, farouche, féroce, hurlante, indisciplinée, meurtrière, sauvage; discipliner des hordes; horde d'aventuriers, de brigands, de chasseurs, de mendiants, de sauvages, de vagabonds, de voleurs.
3. Groupe d'animaux vivant naturellement ensemble. Immédiatement après le coucher du soleil, le ciel s'obscurcit : c'est la horde des sauterelles qui repart vers l'est (GIDE, Retour Tchad, 1928, p. 871) :
• 5. C'était l'essaim de goëlands et de mouettes qui venait de se ruer sur une des roches basses, battant de l'aile, s'entre-culbutant, criant, appelant. Tous fourmillaient bruyamment sur le même point. Cette horde à bec et ongles pillait quelque chose.
HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 268.
SYNT. Horde de cancrelats, de charognards, de chats, de chiens sauvages, de cigales, de fourmis, de grenouilles, de guêpes, de hannetons, de loups, de poules, de renards, de tortues; vivre en horde.
B. — Au fig. Multitude de choses. J'appellerai beaucoup de songes à mon secours, pour me défendre contre cette horde de vérités qui s'engendrent dans les vieux jours, comme des dragons se cachent dans des ruines (CHATEAUBR., Mém., t. 4, 1848, p. 12). Tout cela était comme rapetissé, écrasé sous la horde des nuages. On eût dit une innombrable armée tumultueuse, se bousculant à l'assaut du moulin (VAN DER MEERSCH, Empreinte dieu, 1936, p. 18).
Prononc. et Orth. : [] init. asp. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. a) 1559 « tribu errante, chez les Tartares » (G. POSTEL, République des Turcs, 2e part., p. 27 ds GDF. Compl.); b) 1690 p. ext. « tribu errante, peuplade de nomades » (FUR.); c) 1767 « troupe d'hommes qui se livrent à des désordres » (LEMIERRE, Guillaume Tell, p. 12); d) 1769 « foule quelconque » (COYER, Bagatelles, p. 66 ds BRUNOT t. 6, p. 1360 : cette horde d'honnêtes gens [les quakers]); 2. a) 1669 « troupe d'animaux » (LA FONTAINE, Psyché, l. II ds Œuvres, éd. H. Régnier, t. 8, p. 205 : des hordes et des caravanes [de fourmis]); b) 1848 « grand nombre de choses » (CHATEAUBR., supra). Empr. au tartare orda « camp militaire », cf. coman orda « id. » (ca 1300 ds FEW t. 20, p. 106b), turc ordu « armée, camp militaire », mongol ordu, orda « camp, horde » (LOK, n° 1594, VASMER t. 2, p. 275, COR., s.v. horda). Mot connu en Europe dès le XIIIe s. : lat. médiév. orda « camp militaire » (ca 1240, Vincent de Beauvais, l. 32, chap. 21, sqq. ds DU CANGE; milieu XIIIe s., GIOVANNI DE PIANO CARPINI [voyageur en Mongolie] ds FEW, loc. cit.). L'orig. du h- initial est inconnue. Il apparaît pour la 1re fois dans l'all. horda en 1429 d'apr. KLUGE. Fréq. abs. littér. : 357. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 677, b) 381; XXe s. : a) 572, b) 391. Bbg. WALT. 1885, p. 78.
horde ['ɔʀd] n. f.
ÉTYM. 1559 dans un récit de voyage; péj. au XVIIIe; tartare orda, horda; cf. turc ordou « camp ». → Ourdou.
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1 Didact. Tribu errante, nomade (chez les peuples de l'Asie centrale). || Une horde mongole, tartare. || La grande horde, la horde d'or : la tribu la plus importante, chez les Mongols. || Luttes, guerres entre les hordes (→ Autre, cit. 115).
1 La nature a donné à ces peuples (les Tartares), comme aux Arabes Bédouins, un goût pour la liberté et pour la vie errante (…) Chaque horde ou tribu avait son chef, et plusieurs chefs se réunissaient sous un kan.
Voltaire, Essai sur les mœurs, LX.
1.1 Les Kirghis (Kirghizes) se divisent en trois hordes, la grande, la petite et la moyenne, et comptent environ quatre cent mille « tentes », soit deux millions d'âmes. De ces diverses tribus, les unes sont indépendantes, et les autres reconnaissent la souveraineté, soit de la Russie, soit des khanats de Khiva, de Khokhand et de Boukhara, c'est-à-dire des plus redoutables chefs du Turkestan. La horde moyenne, la plus riche, est en même temps la plus considérable, et ses campements occupent tout l'espace compris entre les cours d'eau du Sara-Sou, de l'Irtyche, de l'Ichim supérieur, le lac Hadisang et le lac Aksakal. La grande horde, qui occupe les contrées situées dans l'est de la moyenne, s'étend jusqu'aux gouvernements d'Omsk et de Tobolsk.
J. Verne, Michel Strogoff, p. 26.
♦ Hist. des sc. || La horde primitive (hypothèse de Darwin, reprise par Freud) : groupe humain primitif dominé par « un mâle puissant ».
1.2 (…) la vieille image de la « horde » primitive errante est certainement fausse : un certain glissement progressif du territoire du groupe est possible aussi, mais la situation normale est dans la fréquentation prolongée d'un territoire connu dans ses moindres possibilités alimentaires.
A. Leroi-Gourhan, le Geste et la Parole, t. I, p. 213.
♦ Troupe errante d'hommes; peuplade de nomades. || Une horde de Bédouins. — Par ext. Clan, tribu.
2 (…) l'allégresse de froisser l'herbe blanche de gelée, d'affronter le soleil, de muser sur une longue route, appartient aux hordes migratrices, au clan qui reprend force et joie à disperser les cendres tièdes de son feu d'hier.
Colette, Belles Saisons, p. 13.
3 Le jugement du groupe (…) est sans cesse présent dans la conscience de chacun de ses membres. Cet instinct de la horde peut être plus fort que l'instinct de conservation lui-même (…) car l'homme isolé considère que cette situation anormale ne saurait durer et se prépare à affronter, au temps du retour, le jugement de la horde.
A. Maurois, Études littéraires, Bergson, IV.
2 (Mil. XVIIIe). Cour. Troupe ou groupe d'hommes indisciplinés, nuisibles. ⇒ 2. Bande. || Une horde de brigands. || Une horde d'escrocs (cit. 2), d'usuriers. || Une horde sanguinaire. || Horde de soldats en déroute (cit. 6).
4 Cette horde d'excitateurs révolutionnaires, dont il lui avait semblé, hier soir, entendre déjà les vociférations d'émeute.
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 272.
5 De graves désordres eurent lieu. La fille de basse-cour devint enceinte. Ils prirent des gens mariés; les enfants pullulèrent, les cousins, les cousines, les oncles, les belles-sœurs. Une horde vivait à leurs dépens; — et ils résolurent de coucher dans la ferme, à tour de rôle.
Flaubert, Bouvard et Pécuchet, éd. Folio, p. 84.
3 (1669, La Fontaine; repris XXe). En parlant d'animaux. || Une horde de loups, de chiens. ⇒ 1. Harde, meute. || Une horde de tortues. ⇒ Colonie.
4 Fig. et littér. (rare). Grand nombre de choses qui apparaissent sans ordre. || « Cette horde de vérités » (Chateaubriand). — Concret (rare). || « Une horde de nuages » (Van der Meersch, in T. L. F.).
Encyclopédie Universelle. 2012.