hein [ 'ɛ̃; hɛ̃ ] interj.
• 1765; hen XVIe; lat. hem, onomat.
♦ Fam.
1 ♦ S'emploie seul, soit pour inviter l'interlocuteur à répéter une chose qu'on a ou qu'on feint d'avoir mal entendue, soit pour l'interrompre avec impatience. ⇒ comment, pardon, quoi (cf. Vous dites ? plaît-il ?). Hein ? qu'est-ce que tu dis ?
2 ♦ Se joint à une interrogation pour la renforcer. « T'es bien décidé, hein, Théo ? » (Genet).
3 ♦ Se joint à une phrase (interrogative ou exclamative) pour marquer la surprise, l'étonnement. Hein ? que me chantez-vous là ?
♢ Pour demander une approbation, solliciter un consentement (cf. N'est-ce pas). « Je suis vilaine, hein ? Vous m'en voulez ? » (Colette).
♢ Pour renforcer un ordre, une menace. « Fiche-moi la paix, hein ! » (Dorgelès).
hein
Interj. Fam.
d1./d (Pour signifier à un interlocuteur que l'on n'a pas, que l'on a mal compris ses propos, ou pour manifester une certaine impatience.) Hein? qu'est-ce que tu dis?
d2./d (Renforçant une interrogation.) Qu'est-ce que tu veux, hein?
d3./d (Accompagnant un énoncé exclamatif ou interrogatif et renforçant un ordre, une menace ou l'expression d'un sentiment tel que l'étonnement, la colère, la joie, le désir d'être approuvé, etc.) Et ne recommence pas, hein!
I.
⇒HEIN1, mot inv.
A. — Emploi interjectif
1. [Dans un dialogue, hein est énoncé en réaction à une parole de l'interlocuteur]
a) Empl. seul. [Pour demander à l'interlocuteur de compléter, expliciter une information ou éclaircir son attitude] — Ah! ça n'allait pas; qu'est-ce qui n'allait pas? — J'avais... j'avais peur... — Peur de quoi? — Parce qu'on marchait. — Hein? — On... marchait... — Hein? — Sur le toit... — Hein? — ... alors le maître m'a dit : « Va-t-en! » (RAMUZ, Gde peur mont., 1926, p. 79) :
• 1. PÉPONET : Ah! mon ami!... cet argent m'est bien plus nécessaire encore que ce matin, car il s'agit... DUFOURÉ : Permettez, mon cher Péponet... PÉPONET : Hein? DUFOURÉ, avec embarras : Ma femme est sauvée! (...) si je vous obligeais... contre son gré... je suis sûr qu'elle ferait une rechute!
BARRIÈRE, Faux bonsh., 1856, IV, 10, p. 173.
— En partic. [Pour demander davantage d'information quand une nouvelle surprend tellement que sa simple annonce semble insuffisante] — Bah! lui dis-je, il y a quatre ans qu'elle a cessé de t'aimer. — Je le sais et je m'explique mal. — Alors? — Je veux dire qu'elle me dit adieu. — Hein? fis-je stupéfait. (...) — Je ne puis rien te dire, continua-t-il, car je ne sais moi-même (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 2, 1859, p. 488).
b) Suivi d'une question. [Pour signifier à l'interlocuteur que, tout en ayant entendu ce qu'il a dit, on n'en a pas saisi complètement le contenu ou l'intention] Landry : Il y a de l'ouvrage sur ton bureau. Que fais-tu là hors de l'étude? Fortunio : Hein? plaît-il? Que me voulez-vous? Guillaume : Nous te disons que le patron te demande (MUSSET, Chandelier, 1840, I, 2, p. 40). — (...) mais pour ne plus vous revoir, il faudrait que vous fussiez à mille lieues l'un de l'autre. — Avant peu, je serai plus loin que ça. — Hein, que voulez-vous dire? — N'en parlez pas à Rodolphe, cela lui ferait trop de chagrin, je vais m'en aller pour toujours (MURGER, Scènes vie boh., 1851, p. 294).
— En partic. [Pour feindre qu'on n'a pas bien compris afin que l'interlocuteur corrige, répète, confirme ce qu'il vient de dire] Je demandais à Nieuwerkerke l'adresse de la princesse Julie. La princesse Mathilde, qui a toujours l'oreille en campagne, nous dit : « Hein? Qu'est-ce que vous demandez? » (GONCOURT, Journal, 1864, p. 37). — Madame! c'est la môme Prévot... — Hein? Comment avez-vous dit? Je n'ai pas bien entendu, interrompt la directrice. — C'est Marie Prévot, madame (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p. 52) :
• 2. ... le maître d'hôtel, le bras tendu vers le cartel du hall, explique qu'après une heure, la cave de l'hôtel est fermée. — Hein! tu dis? — Excellence, la cave... — Fils de chien! porc!
FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p. 130.
2. Rare, seul ou suivi d'une question. [Hein est énoncé en réaction à l'action d'une pers. pour signifier que, tout en se sentant concerné par une action, on n'en saisit pas complètement la signification] Masham, dormant toujours : Quel bonheur!... quelle brillante fortune!... c'est trop pour moi! Bolingbroke, lui frappant sur l'épaule : En ce cas, mon cher, partageons! Masham, se levant et se frottant les yeux : Hein!... qu'est-ce que c'est... monsieur de Saint-Jean qui m'éveille! (SCRIBE, Verre d'eau, 1840, I, 2, p. 652).
B. — [En fonction de particule pragmatique]
1. En tête, en fin de phrase ou en incise. [Pour réclamer de l'interlocuteur qu'il déclare son assentiment à ce que le locuteur affirme, afin de renforcer sa propre croyance ou d'impliquer l'interlocuteur]
— [Ce que le locuteur affirme est présenté dans une prop. de forme affirmative, exclam.] Puis il se tourna vers l'aîné. — Hein? on est joliment bien, ici! — Ah oui! répondit l'aîné en regardant Gavroche avec une expression d'ange sauvé (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 165). Qu'en dis-tu? Magnifique! hein?... Tu as devant les yeux le Calosome sycophante, de l'ordre des Coléoptères (REIDER, Mlle Vallantin, 1862, p. 164) :
• 3. ... tu sais, les pensions comme ça, c'est cher... Surtout que maintenant elle a dix ans... Je voudrais qu'elle apprenne le piano en même temps... Qu'est-ce que t'en dis toi du piano?... C'est bien le piano, hein, pour les filles?... Tu crois pas?...
CÉLINE, Voyage, 1932, p. 200.
— [Ce que le locuteur affirme est présenté dans une prop. de forme interr.] — Hein, Lirot, allons-nous faire bonne chasse? Et, chemin faisant, il regardait les lointains, les toitures restées rouges parmi les arbres qui n'étaient plus verts (CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 20). Il s'assit familièrement sur le coin de la table. — « Eh bien, vous lui trouvez bonne mine, j'espère? A-t-il forci, hein, depuis l'automne? » (MARTIN DU G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 697).
— [Ce sur quoi le locuteur veut que l'interlocuteur s'engage n'est pas explicité dans la prop.; il s'agit du jugement de valeur qu'il porte sur le contenu de cette prop.] Et tous ces bigots qui supportent ça! Hein?... Qu'est-ce que tu en penses, toi, graine de jésuite? (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 243). Il indiquait des constructions, poulaillers, pigeonniers, hangars, massées en contre-bas du moulin. — Hein?... c'est moi qui ai bâti tout cela! — Ces murs? — Bien sûr, ces murs! (CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 43) :
• 4. — Excusez-moi; j'entends si peu la politique. — C'est pourquoi ne cherchez pas plus loin que ce qu'on vous en dit : Deux grands partis sont en présence : la Loge et la Compagnie de Jésus; et comme nous, qui sommes du secret, ne pouvons sans nous découvrir réclamer appui de l'un ni de l'autre, nous les avons tous contre nous. — Hein! qu'est-ce que vous pensez de ça? demanda le cardinal. Fleurissoire ne pensait plus rien...
GIDE, Caves, 1914, p. 803.
2. En fin de phrase
a) Empl. avec un impér. [Pour signifier à l'interlocuteur qu'on réclame de lui non seulement d'obéir mais aussi d'acquiescer à l'ordre qu'il donne] Fous-moi la paix, hein! Je travaille. Un instant, Christine resta muette (ZOLA, Œuvre, 1886, p. 376).
b) Empl. avec une question. [Pour signifier à l'interlocuteur qu'on demande une réponse, bien que le locuteur se présente comme se doutant de cette réponse] — D'où vient, reprit-il, que vous n'êtes pas venue chez moi? — Je ne sais trop, dit-elle. — Pourquoi, hein? Je vous faisais donc bien peur? (FLAUB., Mme Bovary, t. 2, 1857, p. 157). — (...) ça va bien, m'sieur Gaspard? Qu'est-ce qu'on vous sert, hein, m'sieur Gaspard? — Un vermouth-cassis, un!... Et présenté par mam'selle Annette! (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 146).
C. — Emploi subst. masc., rare. Elle [la femme comme il faut] a mis un épigramme de Voltaire dans un hein! dans un ah! dans un et donc! (BALZAC, Œuvres div., t. 3, 1839, p. 196).
Prononc. et Orth. : [] init. asp. Att. ds Ac. dep. 1835.
II.
⇒HEIN2, onomat.
Rare. [Reproduit les sons produits par une respiration haletante] Emploi subst. masc. Une fois encore j'entendis le galop accourir, et les « hein, hein, hein », de la bête à bout de souffle, les grincements rythmés des cuirs (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 186).
Prononc. : [] init. aspirée. Étymol et Hist. A. 1. Ca 1178 ahenc interj. exprimant la satisfaction (Renart, éd. E. Martin, XIV, 550, t. 2, p. 124); 2. ca 1440 hen imprécation (Le martire saint Pere et saint Pol, 1996 ds Cycle des Mystères, éd. G. A. Runnalls, p. 151). B. 1. a) 1464 hen interj., pour inviter un interlocuteur à répéter ou à poursuivre ce qu'il disait (Maistre Pierre Pathelin, éd. R. T. Holbrook, 278 [ici, marquant l'étonnement]); 1665 hen (MOLIÈRE, Dom Juan, I, 2); 1724 hein (MARIVAUX, Double inconstance, I, 6); 1839 subst. (BALZAC, Œuvres div., t. 3, p. 196); b) 1693 heim interj., pour solliciter une réponse, une approbation (BRUEYS et PALAPRAT, Le Grondeur, I, 6 ds LITTRÉ); 1729 hein (D'ALLAINVAL,, École des bourgeois, I, 11); 2. a) 1841 hein marquant le triomphe (DUMAS père, Mariage sous Louis XV, I, 5); b) 1893 renforçant un ordre (RENARD, Lanterne sourde, p. 148). A du lat. class. hem, interj. exprimant divers sentiments : mécontentement, indignation, effroi, horreur; compassion, affliction; surprise heureuse (cf. A. Primmer ds Rom. Forsch. t. 77, 1965, pp. 153-156). B interj. formée en fr. (FEW t. 4, pp. 400-401, s.v. hem; v. aussi J. ORR, Hein! Essai d'une étymologie ds R. Ling. rom. t. 29, pp. 275-288 : l'a. fr. ainz, ains « mais, mais plutôt » survivrait de façon latente dans l'interj. hein, comme « doublure nasalisée de Eh!, aussi bien dans son rôle interrogatif que dans celui, plus conforme à sa nature oppositionnelle, de protestation »). Bbg. ESPE (H.). Die Interjektionen im Altfranzösischen. Berlin, 1908, p. 20. - GREIMAS (A.-J.). Nouv. dat. Fr. mod. 1952, t. 20, p. 303.
hein ['ɛ̃] interj.
ÉTYM. 1765; heim, 1691; hen, mil. XVe; ahen, ahene, XIIIe; onomat., du lat. hem.
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♦ Interjection familière d'interrogation.
1 (XIIIe). S'emploie seul, soit pour inviter l'interlocuteur à répéter une chose qu'on a ou qu'on feint d'avoir mal entendue, soit pour l'interrompre avec impatience. ⇒ Comment, plaît-il.
1 Ha ! Monsieur… — Hen ?…
Molière, Dom Juan, I, 2.
2 Ma cousine… répondit Eugène. — Hein ? fit la vicomtesse en lui jetant un regard dont l'impertinence glaça l'étudiant.
Balzac, le Père Goriot, Pl., t. II, p. 905.
♦ N. m. :
3 L'esprit de cette femme est le triomphe d'un art tout plastique (…) Elle (…) a mis l'épigramme de Voltaire dans un hein ! dans un ah ! dans un et donc !
Balzac, Autre étude de femme, Pl., t. III, p. 230 (1839).
2 Se joint à une interrogation pour la renforcer. || Hein ? que faire ? — Qu'en penses-tu, hein ?
4 Que diable vous voulait-il donc, ce chat-huant ? Hein, dites !
Hugo, Notre-Dame de Paris, VII, I.
3 Se joint à une phrase (interrogative ou exclamative) pour marquer la surprise, l'étonnement. || Hein ? que me chantez-vous là ? || Hein ? en voilà une histoire !
♦ (1693). Pour demander une approbation, solliciter un consentement. → N'est-ce pas ? Non ? || Vous viendrez, hein ? || Ça la fout (cit. 6) mal, hein ? || Tu me crois gâteux (cit. 4), hein ?
5 Je suis vilaine, hein ? Vous m'en voulez ? Allons ! ne faites pas des yeux tristes (…)
Colette, la Paix chez les bêtes, Poucette.
6 En Amérique, je vais faire de l'argent. Avec le nom (Silbermann) que je porte, j'y étais prédestiné, hein ?…
♦ Pour renforcer un ordre, une menace (→ Falot, cit. 4). — REM. En ce cas, la proposition est souvent elliptique du verbe. || Attention à vous, hein ? || Et pas de rouspétance, hein ?
7 Fiche-moi la paix, hein !
R. Dorgelès, les Croix de bois, II (1913).
♦ (1863, Baudelaire). Pour exprimer une joie triomphante. || Hein ? qu'est-ce que je vous avais dit ? || Ça te la coupe, hein ?
8 Faire un heureux, quelle jouissance ! et surtout un heureux qui me fera rire ! (…) Hein ! comme ce sera drôle !
Baudelaire, le Spleen de Paris, XLVI.
9 Hein ?… vous en restez assise ?
Colette, la Paix chez les bêtes, L'homme aux poissons.
➪ tableau Principales interjections.
Encyclopédie Universelle. 2012.