évocation [ evɔkasjɔ̃ ] n. f.
• 1348; lat. jurid. evocatio
♦ Action d'évoquer, d'appeler.
1 ♦ Dr. Droit d'évocation : droit accordé aux juridictions d'appel saisies d'un recours contre un jugement de statuer sur le fond du litige. Dr. crim. Obligation, pour la cour d'appel, de statuer sur le fond, lorsqu'elle infirme un jugement correctionnel sur un incident.
2 ♦ (1680; d'apr. évoquer,I, 1o ) Action d'évoquer les esprits, les démons par la magie, l'occultisme. ⇒ incantation, sortilège. Évocation des démons, des ombres.
♢ L'ombre, l'âme évoquée (⇒ apparition). « Il semblait que ce fût une évocation qui vous parlait à travers la cloison de la tombe » (Hugo).
3 ♦ (1835) Action de rappeler une chose oubliée, et par ext. de rendre présent à l'esprit. Évocation de souvenirs communs. ⇒ rappel. Il sourit à l'évocation de ce souvenir. « L'évocation du passé soulevait en lui des sursauts de rancune » (Martin du Gard). Évocation d'une image, d'une idée. ⇒ représentation. Le pouvoir d'évocation d'un mot. ⇒ connotation.
● évocation nom féminin (latin evocatio, -onis) Appel à comparaître lancé par le magicien dans des formes rituelles à des esprits ; cette comparution même. Action de rappeler quelque chose d'oublié, de rendre présents à l'esprit des souvenirs : L'évocation des années passées. Action de mentionner quelque chose, de faire allusion à quelque chose. Droit pour une cour d'appel, saisie de certains jugements de première instance, de s'emparer de toute l'affaire et de statuer sur l'appel et le fond du procès par une seule et même décision. ● évocation (synonymes) nom féminin (latin evocatio, -onis) Action de rappeler quelque chose d'oublié, de rendre présents à l'esprit...
Synonymes :
Action de mentionner quelque chose, de faire allusion à quelque chose.
Synonymes :
- allusion
- mention
- rappel
évocation
n. f.
d1./d Action d'évoquer, de rendre présent à la mémoire ou à l'esprit. évocation d'un souvenir. évocation d'un problème social.
d2./d Action de faire apparaître par des procédés magiques. évocation de démons.
d3./d DR Action d'évoquer une cause.
⇒ÉVOCATION, subst. fém.
A.— [Gén. avec un compl. prép. introd. par de désignant une pers. ou une chose absente]
1. Vx. Action de faire apparaître (quelque chose) par la magie. L'évocation des âmes, l'évocation des esprits (Ac. 1835, 1878). C'étaient des bruits sans nom inconnus à l'oreille, Comme la voix d'un mort qu'en sa tombe réveille Une évocation (GAUTIER, Albertus, 1833, p. 125). Marcel et Octave demeurèrent d'abord muets (...) devant cette sorte d'évocation d'un génie malfaisant (VERNE, 500 millions, 1879, p. 241).
— P. méton. Ce qui apparaît :
• 1. Il semblait que ce fût une évocation qui vous parlait à travers la cloison de la tombe. Si l'on était dans de certaines conditions voulues, bien rares, l'étroite lame d'un des volets s'ouvrait en face de vous, et l'évocation devenait une apparition.
HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 574.
— P. ext. Action d'interpeller (quelqu'un) dans un discours, une prière. Vainement elle prenait demeure dans les plaies saignantes de Jésus-Christ, se réfugiait dans sa passion; vainement elle redoublait d'appels, d'évocations et de supplications (GONCOURT, Mme Gervaisais, 1869, p. 268).
2. [Avec un compl. prép. introd. par de désignant une réalité se rapportant au passé] Action de rappeler (quelque chose) à la mémoire par ses propos; p. méton. les propos eux-mêmes. L'évocation des jours anciens. L'évocation d'un temps, d'une époque disparue (Ac. 1932). (Quasi-) synon. rappel. Ce mot, « crime » dépassait la mesure de ce que pouvait accepter Marius, déjà très ému par la brusque évocation de Waterloo (HUGO, Misér., t. 1 1862, p. 801). Les meneurs politiques ont la manie de l'évocation des souvenirs (VIGNY, Mém. inéd., 1863, p. 87).
3. [Le déterminé désigne une réalité ne se rapportant pas au passé] Fait de rendre (quelque chose) présent à l'esprit (de quelqu'un) par ses propos. L'évocation d'une idée, d'une image. Synon. mention. On aimait mieux entendre parler d'une épouse dont l'évocation avait un fumet d'intimité (AYMÉ, Uranus, 1948, p. 151).
B.— DR. Fait de porter une cause d'une juridiction à une juridiction supérieure. La Cour de Cassation est chargée de statuer sur les demandes en évocation (Ac.) :
• 2. ... le conseil intervient sans cesse par voie d'« évocation », enlève d'entre les mains des juges ordinaires l'affaire où l'administration est intéressée, et l'attire à lui.
TOCQUEVILLE, Ancien Rég. et Révol., 1856, p. 123.
— Spécialement
1. DR. CRIMINEL
a) Obligation imposée à la Cour d'appel de statuer sur le fond, lorsqu'elle annule (pour vice de forme, etc.) un jugement correctionnel même si, lorsque l'annulation est prononcée, l'affaire n'est pas en état de recevoir une solution définitive (d'apr. CAP. 1936).
b) Faculté accordée à la Chambre des mises en accusation d'étendre d'office l'information à des faits et personnes qui n'étaient pas englobés dans les poursuites (d'apr. CAP. 1936).
2. Vx. ANC. DR. Droit d'évocation. Droit dévolu au roi, qui lui permettait d'appeler devant lui tout litige. Pour qui sont tous ces privilèges en matière judiciaire, les attributions, les évocations, les lettres de surséance, etc. (SIEYÈS, Tiers état, 1789, p. 57). Autrefois le pouvoir royal avait la ressource des évocations... Notre manie d'égalité tuera ce temps-ci... (BALZAC, Splend. et mis., 1846, p. 461).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Début XIVe s. [date du ms.] de le souveraine evocastion [superne voca(s)tionis] (Traduction d'une charte de Baudoin ds Livre Roisin, éd. Brun-Lavainne, p. 220); 1348 sur tierce evocacion (ds VARIN, Arch. admin. de Reims, II, 1182 ds DG); 2. 1680 « action d'évoquer les esprits » (RICH.); 3. 1828 « remise en mémoire, allusion » (SAINTE-BEUVE, Tabl. poés. fr., p. 139). Empr. au lat. class. evocatio « action d'appeler, de convoquer, de citer » spéc. « évocation des ombres, des enfers »; le sens 3 d'apr. évoquer. Fréq. abs. littér. :407. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 84, b) 341; XXe s. : a) 855, b) 961.
évocation [evɔkɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1348; lat. jurid. evocatio, du supin de evocare. → Évoquer.
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♦ Action d'évoquer, d'appeler.
1 Dr. Le fait de porter une cause d'un tribunal à un autre. — Hist. du dr. || Droit d'évocation : droit en vertu duquel le roi pouvait appeler devant lui tout litige. — Procéd. || Droit d'évocation appartenant au tribunal du deuxième degré (→ cit. infra; cf. aussi Code de procédure civile, art. 473). — Dr. crim. a Obligation, pour la cour d'appel, de statuer sur le fond, lorsqu'elle annule un jugement correctionnel (pour vice de forme, etc.), même si l'affaire n'est pas en état au moment de l'annulation.
b « Faculté accordée à la Chambre des mises en accusation saisie d'une affaire, d'étendre d'office l'information à des faits ou des personnes qui, jusque-là, n'étaient pas englobés dans les poursuites » (Capitant, Voc. juridique).
1 Le droit d'évocation est le droit qui appartient au tribunal du deuxième degré, saisi d'un appel d'un jugement interlocutoire ou d'un jugement définitif sur un incident, de s'emparer de toute l'affaire, à condition d'infirmer le jugement attaqué et de statuer sur le tout, c'est-à-dire sur l'appel et sur le fond du procès par un seul et même jugement ou arrêt.
Paul Cuche, Précis de procédure civile et commerciale, no 370.
2 (1680; d'après évoquer, 1.). Action d'évoquer (les esprits, les démons…) par la magie, l'occultisme. ⇒ Incantation, sortilège. || L'évocation des démons (→ Apparition, cit. 11), des ombres par un sorcier. || Évocation des morts par le spiritisme. || Formule d'évocation.
2 On ne peut même pas vous ôter la louange d'avoir fait la descente d'Énée aux enfers plus belle que n'est l'évocation des âmes qui est dans l'Odyssée.
Fénelon, Dialogue des morts anciens, Horace, Virgile.
3 Entrez dans ce pentacle (…) me dit-il, et n'en sortez qu'à bonnes enseignes (…) Alors il me donne une formule d'évocation courte, pressante, mêlée de quelques mots que je n'oublierai jamais. « Récitez, dit-il, cette conjuration avec fermeté, et appelez ensuite à trois fois clairement Béelzébuth (…) » Un peu rassuré par mes réflexions (…) je prononce l'évocation d'une voix claire et soutenue (…) À peine avais-je fini, une fenêtre s'ouvre à deux battants (…) un torrent de lumière plus éblouissante que celle du jour fond par cette ouverture (…)
J. Cazotte, le Diable amoureux (1772), in R. Amadou et R. Kanters, Anthologie littéraire de l'occultisme, p. 147.
4 Le sang de cet enfant que Gilles (de Rais) avait conservé pour écrire ses formules d'évocation et ses grimoires (…)
Huysmans, Là-bas, p. 163.
♦ Par métonymie. L'ombre, l'âme évoquée (⇒ Apparition).
5 C'était une voix aimée, quelquefois une voix adorée. On ne voyait personne. On entendait à peine le bruit d'un souffle. Il semblait que ce fût une évocation qui vous parlait à travers la cloison de la tombe.
Hugo, les Misérables, II, VI, I.
3 (1835). Cour. Action de rappeler une chose oubliée, et, par ext., de rendre présent à l'esprit. ⇒ Prosopopée (rhét.). || Évocation d'un souvenir, de souvenirs communs. ⇒ Rappel; et aussi mémoration (psychol.), remémoration. || Évocation d'une image, d'une idée. ⇒ Représentation. || Évocation spontanée d'un état par un autre. ⇒ Association (cit. 18). || Évocation d'un personnage historique, d'un événement remarquable. ⇒ Allusion. || Évocation troublante, terrifiante (→ Chirurgie, cit. 2).
6 (…) l'évocation des souvenirs de Guillaume le Conquérant (…)
A. de Vigny (1835), Servitude et Grandeur militaires, III, VI, p. 217. (→ Débarquement, cit. 1.).
7 L'ouvrage de Rivarol est rentré pour jamais dans les limbes d'où il n'était sorti qu'à de rapides moments d'évocation et d'improvisation brillante (…)
Sainte-Beuve, Chateaubriand, t. II, p. 140.
8 (…) les figures autrefois familières qui, revues à l'improviste, troublent avec une évocation tumultueuse d'impressions encore ensommeillées (…)
Villiers de L'Isle-Adam, Contes cruels, p. 95.
9 L'évocation du passé soulevait en lui des sursauts de rancune. Rien, dans l'existence qu'il avait vécue, ne trouvait grâce.
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 216.
10 Il supportait, à la rigueur l'évocation de Gise, le rappel de son nom; mais à Jenny il refusait farouchement la plus fugitive allusion.
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 56.
11 Ce n'est jamais par des reconstitutions intellectuelles que nous arriverons à donner l'impression vraie du temps et à ranimer ce passé. Il y faut l'évocation par la mémoire involontaire.
A. Maurois, Études littéraires, Proust, II.
Encyclopédie Universelle. 2012.