débonder [ debɔ̃de ] v. tr. <conjug. : 1>
1 ♦ Ouvrir en retirant la bonde. Débonder une barrique, un réservoir. — Le tonneau s'est débondé. « comme diminue l'eau dans une baignoire débondée » (Aymé).
2 ♦ Fig. Vieilli Débonder son cœur, ou absolt débonder : donner libre cours à des sentiments longtemps contenus. ⇒ éclater. « Le petit débonda son cœur. Il dit qu'il était laid » (R. Rolland).
♢ Pronom. Se débonder. ⇒ s'épancher, s'ouvrir, se soulager. « subitement, il se débonda, épandant au hasard des mots, ses plaintes » (Huysmans).
● débonder verbe transitif Ôter la bonde d'un tonneau, d'un réservoir, etc.
débonder
v.
d1./d v. tr. ôter la bonde de. Débonder un tonneau.
d2./d v. Pron. Fig. S'épancher sans retenue.
⇒DÉBONDER, verbe.
A.— Emploi trans. Enlever la bonde de; déboucher. Débonder un tonneau :
• 1. Caliban, ivre, étendu à terre, se tordant dans une mare de vin sortie d'un tonneau qu'il a débondé et oublié de refermer.
RENAN, Drames philos., Caliban, 1878, I, 1, p. 380.
— Au fig. Débonder son cœur ou absol. débonder. Laisser libre cours à ses sentiments; épancher son cœur :
• 2. Il m'a fallu l'entraîner contre la berge et là, débonder tout mon chagrin, tandis qu'il me regardait sans trop comprendre.
GONCOURT, Journal, 1870, p. 558.
B.— Emploi intrans. Se répandre à grands flots. Le lac a débondé. Et que chaque source débonde par un bouillon aussi gros que l'œil d'un cheval! (CLAUDEL, Tête d'Or, 1901, p. 281).
C.— Emploi pronom.
1. [En parlant d'un contenant] Perdre sa bonde. Le tonneau s'est débondé.
— Au fig. Se débonder le cœur ou absol. se débonder (supra A au fig.). Il [Tartarin] se débonda, vida son cœur gros de rancunes contre l'ingratitude de ses compatriotes (A. DAUDET, Tartarin Alpes, 1885, p. 43).
2. [En parlant du contenu] Se répandre rapidement et en abondance; se vider :
• 3. La ville ne remuait que comme un moribond (...) Il y avait sous les murs des rumeurs sourdes comme de muscles qui se détendent, de poumons qui se vident, de ventres qui se débondent, de mâchoires qui claquent.
GIONO, Le Hussard sur le toit, 1951, p. 167.
Prononc. et Orth. :[], (je) débonde []. Ds Ac. 1694 et 1718, s.v. desbonder; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. 1. Ca 1462-65 au fig. desbonder [ses cuisances] « épancher, donner libre cours à » (G. CHASTELLAIN, Dépréciation pour Pierre de Brézé, éd. Kervyn de Lettenhove, t. VII, p. 62); 2. 1549 desbonder « ôter la bonde [d'un tonneau] » (EST.). Dér. de bonde; préf. dé-; dés. -er. Fréq. abs. littér. :39. Bbg. QUEM. 2e s. t. 1 1970.
débonder [debɔ̃de] v.
ÉTYM. V. 1462, sens fig.; de 1. dé-, bonde, et suff. verbal.
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I V. tr.
1 Techn. Ouvrir en retirant la bonde. ⇒ Débondonner. || Débonder une barrique, un réservoir, une pièce d'eau. — Par anal. et fam. || Ce purgatif l'a débondé.
2 Débonder son cœur : donner libre cours à des sentiments longtemps contenus. ⇒ Épancher, ouvrir. — Absolt et vx (→ cit. 2). || Débonder : soulager son cœur en parlant, en évoquant librement ce qui pesait sur la conscience. ⇒ Libérer.
1 Vois-tu, Charlotte, il faut, comme dit l'autre, que je débonde mon cœur.
Molière, Dom Juan, II, 1.
2 Tout à coup il (le duc d'Orléans) débonda et nous dit ce que nous eussions voulu ne point entendre (…)
3 Le petit débonda son cœur. Il dit qu'il était laid. Il dit que ses camarades avaient dit que leur révolution n'était pas pour lui.
R. Rolland, Jean-Christophe, p. 1307.
3.1 Je m'abandonnais parfois à des mouvements d'impatience. J'explosais en vulgarités qui débondent.
P. Guth, le Naïf sous les drapeaux, III, II, p. 93.
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II V. intr. Se répandre avec abondance et violence (→ ci-dessous, Se débonder, 2.). || Le lac a débondé. || L'eau a débondé par une ouverture.
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se débonder v. pron.
1 Perdre sa bonde. || Le tonneau s'est débondé, le vin se répand à flots.
4 Que se passe-t-il, alors ? C'est comme si s'ouvrait en moi le soupirail de l'abîme, comme si se débondait en moi tout l'enfer.
Gide, Journal, 25 mars 1927.
3 Fig. || Se débonder le cœur, ou simplement se débonder. → supra, Débonder, 2.
5 (…) et subitement, il se débonda, épandant au hasard des mots, ses plaintes, avouant l'inconscience de sa conversion, ses débats avec sa chair, son respect humain, son éloignement des pratiques ecclésiales (…)
Huysmans, En route, p. 72.
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débondé, ée p. p. adj.
1 Dont on a retiré la bonde. || Réservoir débondé.
6 Maintenant il le sentait (son honneur) baisser de niveau, diminuer en lui comme diminue l'eau dans une baignoire débondée.
M. Aymé, Maison basse, p. 34.
2 Fig. Qui s'épanche en abondance. || Larmes débondées, qu'on ne retient plus. — Qui laisse libre cours à ses sentiments.
7 Ces poètes débondés font aimer ceux qui se retiennent, les régulateurs. N'importe quelle idée bien, ils la mettent impudemment en cinq actes.
J. Renard, Journal, 21 janv. 1898.
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DÉR. Débondage, débondement, débondoir.
Encyclopédie Universelle. 2012.