CAMBRIEN
Le nom «Cambrien», donné par Adam Sedgwick en 1836 à la partie inférieure du «Silurien» de Roderick Murchison, vient du latin Cambria , le pays des Cambres, une des régions du pays de Galles. Il désigne le premier système des temps fossilifères et en même temps le premier de l’ère primaire.
Sa limite inférieure est assez difficile à définir: pour les Américains, elle a longtemps été située à la base de la zone à Olenellus . Mais ce genre de Trilobite est précédé par d’autres formes de vie animale, en particulier les Archaeo-cyathes (en Australie, en Sibérie, au Maroc). En outre, depuis 1958, on connaît la faune édiacarienne, encore plus ancienne, qui, dans l’état actuel de nos connaissances, correspond au premier niveau fossilifère marin. En réalité, la glaciation éocambrienne, assez générale dans le monde, pourrait être considérée comme un phénomène suffisamment universel pour marquer le point de départ de l’ensemble des temps fossilifères, donc du Cambrien. Sous l’influence d’un réchauffement général, les glaces ont fondu et, comme cela s’est produit pour la fonte des glaces pléistocènes, le volume des eaux marines s’en est trouvé accru. Celles-ci envahirent progressivement les bordures continentales: c’est la première transgression dont on retrouve des preuves stratigraphiques. Il serait logique de placer la limite inférieure du Cambrien au début de la glaciation éocambrienne parce que, d’une part, les deux ou trois phases de cet événement ont été générales et fournissent donc un repère presque mondial, et parce que, d’autre part, la faune édiacarienne est postérieure à la dernière tillite (moraine).
La limite supérieure du Cambrien est placée, selon les pays et les auteurs, soit au-dessous soit au-dessus du Trémadoc. La plupart des spécialistes la placent au-dessous de cet étage, qui constitue en réalité une zone de passage.
Si on en exclut l’Éocambrien et le Trémadoc, le Cambrien a duré 100 millions d’années. C’est une période relativement calme au point de vue orogénique, mis à part en Sibérie moyenne les mouvements du Salaïr. Les enfoncements de bassins et de géosynclinaux sont nombreux et préparent les orogenèses d’âges calédonien et varisque. Des boucliers se soulèvent, par exemple, le Bouclier scandinave. Ainsi défini, le Cambrien présente une importance considérable relativement aux premières étapes de l’extension de la vie.
1. Chronologie absolue et subdivisions
Le Cambrien nous est connu par des roches sédentaires déposées généralement sous la mer ou dans les deltas. On y connaît aussi quelques épanchements volcaniques, moins nombreux d’ailleurs qu’à l’Éocambrien. Aussi les âges absolus dignes de confiance calculés pour le Cambrien sont-ils rares: l’Édiacarien a fourni des âges entre 680 et 630 millions d’années; tout le reste du Cambrien s’étendant entre 600 et 500 millions d’années, c’est-à-dire sur 100 millions d’années. Une date de 530 millions d’années peut être située au début du Cambrien moyen.
C’est dans l’est de l’Amérique du Nord, où il est particulièrement bien représenté et accessible, que l’on a entrepris de subdiviser le Cambrien (en particulier C. D. Walcott), d’abord en trois étages: Géorgien, Acadien, Postdamien; ces termes furent remplacés par la série du Haut-Mississippi, qui se montra également trop locale et inapplicable aux autres régions. Les travaux effectués plus récemment sur les montagnes Rocheuses, en Scandinavie, sur les pays baltes, puis sur la Sibérie, enfin en Australie, en Corée, en Chine, en Espagne, au Maroc, au Proche-Orient, permettent d’aboutir à des corrélations d’ordre mondial, essentiellement fondées sur la répartition stratigraphique de fossiles appartenant au groupe des Trilobites (cf. tableau).
Comme pour l’Édiacarien (ét. I. Éocambrien) et son équivalent vendien qui renferme la première faune du monde, la stratigraphie du Cambrien inférieur se fonde surtout sur les travaux effectués en Union soviétique. Elle débute en effet par un étage que l’on n’a pas encore trouvé partout, le Tommotien (Rozanov, 1967), très bien connu sur la plate-forme russe et en Sibérie. On y trouve des Archaeocyathes, mais apparemment pas encore de Trilobites, et une faunule de petites coquilles se référant surtout à des Mollusques, dans des récifs riches en Stromatolites. C’est là que se manifeste pour la première fois un squelette minéralisé, soit en carbonate, soit en phosphate de calcium dans divers groupes d’animaux. Le Tommotien typique a pu être subdivisé en zones et horizons grâce aux Archaeocyathes (Rozanov et al. 1969). Dans les faciès non calcaires, la faune comporte des formes encore dépourvues de minéralisation, et restant aussi énigmatiques que celles d’Édiacara (Xenusion, Gdovia ), ainsi que des tubes rapportés aux Pogonophores.
Le reste du Cambrien inférieur (ét. II et III, ex-Géorgien, dont le type est la zone à Olenellus du Vermont) est représenté dans l’ex-U.R.S.S. par des étages à Archaeocyathes et Trilobites (Atdabanien, Botomien, Lénaien). Une succession analogue a été reconnue au Maroc et en Australie.
Le Cambrien moyen (ex-Acadien, défini en Acadie, Nouvelle-Écosse), ne renferme plus d’Archaeocyathes, même en Eurasie, au Maroc ou aux États-Unis, ce qui indique un refroidissement général des mers. Les zones stratigraphiques sont fondées sur des Trilobites. Les plus anciennes (ét. IV = Burgessien) sont surtout dans l’ouest des États-Unis. Les zones moyennes (ét. V) sont bien connues en Bohême, à la Montagne-Noire, en Espagne, au Maroc: il s’agit de schistes plutôt verts ou rougeâtres, devenant gréseux, à Trilobites (Paradoxides ), Brachiopodes inarticulés et Échinodermes (Cincta ). La partie supérieure du Cambrien moyen (ét. VI), toujours à Paradoxides en Europe correspond à la transgression du Cambrien sur le Bouclier canadien.
Le Cambrien supérieur (ex-Postdamien, étage sans fossile par lequel débute le Paléozoïque dans l’État de New York) est mieux défini dans le Haut-Mississippi (province Croixienne) et en Scandinavie (province des schistes noirs anoxiques à Olénidés): dans les deux cas, les niveaux sont caractérisés par des Trilobites. En Extrême-Orient, les mers se réchauffent et des faciès calcaires apparaissent avec des Trilobites de types encore différents.
2. La vie au Cambrien
Groupes paléontologiques
Dès l’extrême base du Cambrien II, on se trouve en présence d’une flore et surtout d’une faune marines riches, appartenant à divers stades de complexité. On y retrouve l’héritage des âges antérieurs: Schizophytes (Sporomorphes, Stromatolithes), Protistes (Flagellés, Radiolaires, Foraminifères arénacés et calcaires). Les Archaeocyathes, tenant à la fois des Foraminifères et des Spongiaires, forment des masses minérales dans le Cambrien II et III. Les Cnidaires nous sont connus surtout par des Calyptoblastides, des Hydroméduses, des Siphonophores et une Actinie voisine d’Edwardsia , tandis que les Pennatulides, si bien connus à l’Éocambrien, occupent une place si restreinte qu’on n’en rencontre que très rarement. Les Cténaires sont représentés par le groupe très particulier des Haplozoaires (Cambrien IV d’Australie), caractérisés par un test calcitique rappelant celui des Échinodermes.
Enfin, les Cœlomates marins comptent de nombreuses formes plus comparables aux animaux actuels que ceux de la faune d’Édiacara, car ils sont généralement pourvus d’un test.
Il y a de nombreux Vers, en particulier des Priapulides dans les milieux oligopneustiques comme aujourd’hui, quelques Annélides polychètes, peut-être des Oligochètes.
Les Brachiopodes, qui composent le tiers des faunes cambriennes, appartiennent aux deux grands groupes actuels des Inarticulés et des Articulés. On ne rencontre guère de Bryozoaires.
Les Échinodermes sont déjà divers au Cambrien II, avec des types différents des modernes. Ce sont des Pelmatozoaires pourvus d’un pédoncule et de longs brachioles (les Éocrinoïdes), des Éleuthérozoaires à thèque souple et extensible (les Hélicoplacoïdes), des formes sédentaires sans pédoncule (les Stromatocystitoïdes) qui ont quelques traits des Astéroïdes récents. À partir du Cambrien IV abonde le groupe particulier des Carpoïdes, à thèque extra-plate et à prolongement brachial: les Cincta , à thèque subcirculaire, limités au Cambrien moyen de l’Europe moyenne et du Maroc; un premier représentant des Cornuta , Ceratocystis , est connu en Bohême.
Les Pogonophores, aujourd’hui représentés par leurs tubes, étaient probablement à peu près semblables à ce qu’ils sont actuellement. Les Graptolithes, proches des Ptérobranches, apparaissent au Cambrien V [cf. TRÉMADOC].
Un fait notable: l’absence de Vertébrés. Il n’est pas impossible toutefois qu’aient existé des Acrâniens (Emmonsaspis Pikaia ). En outre, les Conodontophorides, que nous connaissons par des denticules de composition et de structure proches des écailles de Vertébrés inférieurs, sont présents dès le Cambrien III.
Nombre de coquilles plus ou moins grandes, en forme de cône ou de cornet allongé, existent dès le début du Cambrien. C’est le cas des Hyolithelminthes, des Hyolithes et de l’énigmatique Salterella (Agmata , Yochelson, 1977).
Les Mollusques cambriens gravitent autour des Monoplacophores, aujourd’hui représentés dans les mers profondes par le seul genre Neopilina – à coquille en forme de chapeau – et caractérisés par les traces d’une métamérie presque entièrement disparue dans les groupes modernes: celle-ci affecte les muscles attachant l’animal à sa coquille, les branchies, le cœur, les néphridies. Les Gastéropodes sont seulement des Bellérophontacés, formes symétriques dont l’animal a subi une flexion rapprochant les deux extrémités du tube digestif, mais non la torsion caractéristique des groupes modernes. Les Céphalopodes n’apparaissent qu’au Cambrien VIII avec des formes de moins d’un centimètre (Ellesmeroceras de Mandchourie). Les Bivalves sont rares (Fordilla ).
Les Arthopodes sont connus surtout par des Trilobites, Antennates primitifs à membres bisériés et à carapace dorsale, la seule minéralisée. Ils fournissent les principaux fossiles caractéristiques du Cambrien et se répartissent en trois groupes: les Olénellides (Cambrien II à IV), qui constituent un groupe à part, proche peut-être des Crustacés, ont des caractères annélidiens, les Miomera (Agnostides), de petite taille, qui ont conservé des caractères larvaires (2 à 3 segments thoraciques) et les Polymera , pourvus de segments assez nombreux. Il existe également des Mérostomes et des Crustacés, ainsi qu’un groupe de formes présentant des caractères hybrides, les Trilobitoïdes. Enfin, vers le grand ensemble des Trachéates, on peut citer un Onychophore marin, Aysheia (du Cambrien IV).
Paléontologie stratigraphique
Le principal groupe utilisé par la paléontologie pour le Cambrien (sauf Tommotien) est celui des Trilobites s. l. (cf. tableau). Ils offrent, en effet, plusieurs avantages: les Olénellides, d’abord, sont dans leur ensemble un groupe à caractères primitifs, qui a disparu assez tôt; les Miomera , en second lieu, transportés par les courants, offrent des espèces ubiquistes, communes par exemple à la Scandinavie et à l’Australie; les Polymera , enfin, liés à des faciès, ont suivi ceux-ci lors de l’extension des provinces et y constituent des repères chronologiques.
Les Archaeocyathes permettent d’établir des échelles valables au sein des faciès calcaires du Cambrien inférieur; leurs larves pélagiques ont favorisé une large répartition géographique, l’échelle sibérienne étant en partie applicable au Sud marocain (F. Debrenne).
Certains Brachiopodes ont aussi été utilisés, mais peut-être à tort (Bostsfordia ).
Enfin, en Scandinavie, la première zone paléontologique est caractérisée par une petite coquille, Mobergella holsti , aux affinités incertaines.
Biotopes
Des masses récifales (biohermes) sont constituées par des Algues bleues (Stromatolithes comme au Riphéen) et par les Archaeocyathes. Ces derniers sont des indices de climat chaud, dans des mers peu profondes. Les récifs d’Archaeocyathes constituent une ambiance favorable à certains groupes: Brachiopodes articulés, Monoplacophores, Gastéropodes, Hyolithelminthes, de petits Pogonophores, de rares Trilobites.
Les biotopes à Pogonophores, de nos jours cantonnés essentiellement dans les zones bathyale, abyssale et hadale, sont représentés dans les argiles bleues de la plate-forme russe (Cambrien II), accompagnés de Foraminifères arénacés et de diverses formes à test mince, souvent phosphaté. Ce biotope fossile était alors littoral.
Les divers genres de Trilobites Olénellides caractérisent souvent des provinces biogéographiques. Dans l’ouest de l’Amérique du Nord, ils sont parfois associés à des Archaeocyathes, mais aussi à des niches bien localisées d’Échinodermes. Dans l’est du même continent, on les trouve associés à des Algues, des Éponges, des Hydrozoaires, des Brachiopodes, des Gastéropodes, des Échinodermes, des Crustacés, un Sipuncle, et peut-être un Acrânien. Les Miomera , eux, transportés par les courants, ont une répartition ubiquiste. La plupart des Polymera du Cambrien, ainsi que les Olénellides et les Mérostomes, semblent avoir vécu enfouis dans le sable ou la vase: on en rencontre les traces de repos (Rusochycus ) et les pistes (Cruziana ) associées à des terriers tubulaires (Diplocraterion ) en U, ainsi qu’à des Brachiopodes inarticulés. La biocénose du Cambrien IV des Rocheuses (gisement de la Burgess Pass), dont les fossiles ont conservé les traces de leurs parties molles, est encore un biotope à Trilobites, riche en Algues et en Éponges, et renferme des Crustacés, la presque totalité des Trilobitoïdes connus, de très nombreuses Annélides, des Sipunculides, des Hyolithes, une Actinie fouisseuse, mais aussi une faune pélagique (Méduses, Siphonophores, Némerte), à laquelle s’associent des Arthropodes (Marria et Marrella ). À partir du Cambrien VI, les biotopes à base phytale et à Trilobites se divisent. Les premiers se trouvent dans des schistes noirs alunifères (Scandinavie), déposés sur des fonds peu aérés et impropres à la vie benthonique: les Trilobites y sont les Olénidés, qui deviennent nageurs ou flottants (et à larves pélagiques), pourvus de grandes branchies favorisant les échanges respiratoires. Les seconds se rencontrent dans des calcaires: les Trilobites y sont caractérisés par de grands yeux (Asaphides, Propariés) et l’on voit s’y développer, auprès de Monoplacophores et de Brachiopodes articulés, les premiers Céphalopodes (Extrême-Orient).
Faciès
Les faciès continentaux sont des sédiments détritiques assez grossiers, n’ayant que rarement subi une évolution pédogénétique parce que les continents manquaient d’un couvert végétal. Les faciès marins sont plus fréquents: de l’attaque des minéraux clastiques a résulté une glauconie abondante à mesure que les boucliers étaient envahis. D’où la couleur verte d’une bonne partie des roches sédimentaires à la base de la série cambrienne, quel que soit leur niveau stratigraphique exact. Le reste des sédiments marins se partage entre: les grès, riches en traces de bioturbation; les schistes alunifères, où abonde la pyrite décomposée en alun (fonds putrides déposés en conditions anaérobies, mais propices à la conservation des faunes qui y sont enfouies); les carbonates (calcaires et dolomies), généralement déposés en mer chaude, toujours plus ou moins organogènes.
3. Paléogéographie
Cambrien inférieur
Après la transgression eustatique de l’Éocambrien, les mers continuent de s’étendre recouvrant peu à peu les marges continentales et une partie des reliefs arasés de l’Éocambrien (fig. 1). On voit se former des chenaux dont certains commencent de subir l’évolution géosynclinale. Ils constituent les diverses provinces à Olénellides. Dans les mers les plus chaudes du Cambrien II se déposent les calcaires à Archaeocyathes, avec des masses récifales en Australie, en Sibérie, et au Maroc. Ils ne parviendront jamais ni en Grande-Bretagne, ni en Scandinavie, et la mer balte, au nord de la plate-forme russe, semble même avoir été assez fraîche: cette zone constitue la province des schistes verts et de l’argile bleue. Au Cambrien II, une légère régression affecte la Scandinavie, tandis qu’une continuité dans la sédimentation s’instaure à travers l’Europe, du Maroc à la Saxe et jusqu’en Asie, matérialisée par la faune à Protolenus . Des mouvements orogéniques (orogenèse du Salaïr) commencent à se manifester en Asie centrale dans la région du lac Baïkal.
Cambrien moyen
Au Cambrien moyen (IV à VI), la raréfaction des Archaeocyathes indique des climats moins chauds. Les provinces et les bassins marins d’Europe et d’Amérique sont du reste beaucoup plus séparés qu’au Cambrien III. Même, de part et d’autre des terres émergées situées sur l’emplacement des Pyrénées, l’isolement des bassins se traduit par les caractères ornementaux des Trilobites. Les communications marines s’établissent surtout par les régions arctiques. Les Paradoxididés de la province téthysienne, issus des Protolénidés, s’étendent jusqu’en Scandinavie dès le Cambrien IV, et par la voie arctique à la province américaine au Cambrien VI. Un des exemples les plus remarquables de ces âges est le bassin des Rocheuses canadiennes, qui a fourni la faune du Cambrien IV de la Burgess Pass (2 400 m) dans le mont Wapta, célèbre par son état d’étonnante conservation. C’est du Cambrien V que date le bassin de Bohême nommé «barrandien», du nom de Joachim Barrande qui l’étudia après 1830 et y décrivit ce qu’il crut alors être la «faune primordiale». Ce bassin s’est trouvé sur le trajet d’un bras de mer venant du nord et reliant la Scandinavie et la Pologne à la Montagne Noire (sud de la France): les fossiles, appartenant à la zone à Paradoxides pusillus , sont communs d’une part à la Bohême et la Scandinavie, d’autre part à la Bohême et à la Montagne Noire. Très vite, le bassin barrandien est devenu une petite «Méditerranée», c’est-à-dire, un bassin presque fermé, ayant peu de rapport avec les océans, et où les organismes ont évolué sur place. La mer s’en est retirée avant la fin du Cambrien moyen, la série se terminant par des conglomérats. En Scandinavie, au Cambrien VI, commencent les conditions de la province à Olénidés (cf. infra ).
En Amérique du Nord (fig. 2), la fin du Cambrien moyen (VI) est marquée par une grande transgression sur la plate-forme continentale occupant l’actuel mid-continent (au sud des Grands Lacs, entre les Rocheuses et les Appalaches): dans la province du Haut-Mississippi, qui en fait partie, débute la série dite croixienne, autrefois classée dans le Cambrien supérieur et dont le premier étage, le Dresbachien, chevauche la limite du Cambrien moyen et du Cambrien supérieur classiques (VI-VII inf.).
Cambrien supérieur
Le Cambrien supérieur (VII et VIII) est une période de troubles orogéniques modérés: des mouvements ont pu être décelés dans le Mississippi, en Grande-Bretagne, en Scandinavie (phase de Trysil, à la limite du Bouclier et des Monts scandinaves), en Pologne, en Bohême, en Sardaigne, au Portugal et au Kazakhstan. Des épeirogenèses produisent des émersions en Amérique du Nord (Wyoming) et en Angleterre, ainsi que le retrait des mers de la presque totalité de l’Europe moyenne restreignant la Téthys à son rôle de grand golfe asiatique. Mais les mers épicontinentales demeurent sur l’Extrême-Orient et s’étendent même largement sur les côtes pacifiques. C’est ainsi que la transgression venant des Rocheuses sur le mid-continent finit par accomplir sa jonction avec le géosynclinal appalachien par l’intermédiaire de la fosse de Ouachita.
Cette phase d’épeirogenèse a pour corollaire la séparation et une meilleure délimitation des provinces. C’est le cas en particulier de la province atlantique, en fait réduite à la Scandinavie pendant le Cambrien VI et VIII et caractérisée par le faciès des schistes noirs alunifères à Olénidés.
Des nombreux systèmes composant les temps fossilifères, le Cambrien s’est révélé être le plus long: environ 100 millions d’années, si on en exclut l’Éocambrien et le Trémadoc; au moins le double, si on les y inclut. Si on avait détenu, dès le début de la géologie, quand on en a fixé les cadres, l’ensemble des connaissances chronologiques, stratigraphiques et paléontologiques d’aujourd’hui, il est probable que le Cambrien n’eût pas été tenu pour un système mais pour une ère, celle de la différenciation des Cœlomates, groupes majeurs dans l’histoire de la vie et de l’évolution.
Le cadre paléogéographique du Cambrien peut être situé dans un ensemble groupé des continents – Laurasie et Gondwanie –, la Pangée. Ce cadre, hérité du Riphéen et de l’Éocambrien, est demeuré antérieur à toutes les dérives continentales.
On a la preuve qu’il s’y est produit de grandes modifications climatiques. Mis à part l’Éocambrien, il semble cependant ne pas s’y être produit d’autres grandes glaciations, et le Cambrien II-III fut une période chaude, propice au développement des calcaires (faciès à Archaeocyathes). Mais pendant le Cambrien IV à VII, les calcaires (beaucoup plus rares), et les Archaeocyathes (disparus) indiquent un rafraîchissement général, ayant pour corollaire l’absence de récifs; il commence à s’effacer au Cambrien VIII, pendant lequel les carbonates se déposent à nouveau.
cambrien, ienne [ kɑ̃brijɛ̃, ijɛn ] n. m. et adj.
• 1838; angl. cambrian, de Cambria, nom bret. du pays de Galles
♦ Géol. Première période de l'ère primaire. ⇒ acadien, paléozoïque; précambrien. — Adj. De cette période. La faune cambrienne.
● cambrien nom masculin (anglais cambrian, de Cambria, pays de Galles) Système du paléozoïque inférieur (durée : 70 millions d'années), aux limites et aux subdivisions encore incertaines. (Le cambrien est riche en animaux disparus, comme les trilobites et les archéocyathes, mais aussi en foraminifères, spongiaires, brachiopodes inarticulés, mollusques, arthropodes et échinides.) [Il appartient au cycle calédonien.]
cambrien, enne
n. m. et adj. Première période de l'ère primaire; ensemble des terrains formés pendant cette période, qui contiennent les plus anciens fossiles connus.
|| adj. De cette période. La faune cambrienne.
⇒CAMBRIEN, subst. masc.
GÉOL. Période la plus ancienne de l'ère primaire (d'apr. PERRAUD 1963) :
• Le professeur Lemoine argue principalement contre le transformisme, de l'état de différenciation où était déjà parvenue la vie à l'âge du Cambrien.
J. ROSTAND, La Vie et ses problèmes, 1939, p. 166.
— Emploi adj. Qui appartient à cette période. Schistes cambriens (VIDAL DE LA BLACHE, Tabl. de la géogr. de la France, 1908, p. 65).
Prononc. :[], fém [-]. LITTRÉ transcrit : kan-bri-in (in = ) sans yod de passage. Étymol. et Hist. 1838 (Ac. Compl. 1842). Empr. à l'angl. cambrian dér. de Cambria (var. de Cumbria, latinisation de Cymry) nom du pays de Galles (NED; HOLDER, s.v. Combroges), v. cymrique. Le Cambrian system fut introduit en 1831 par le géologiste angl. A. Sedgwick [1785-1873], pour désigner cette couche géologique (NED; Encyclop. brit.; Gde encyclop.). Fréq. abs. littér. :7. Bbg. BEHRENS Engl. 1927, pp. 63-64. — BONN. 1920, p. 177.
cambrien, enne [kɑ̃bʀijɛ̃, ɛn] n. m. et adj.
ÉTYM. 1838; angl. cambrian, de Cambria, nom breton du pays de Galles.
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♦ Géol. Première période de l'ère primaire. ⇒ Primaire. || Le cambrien est le premier système des temps fossilifères. — Adj. || Les trois étages de la période cambrienne : inférieur (⇒ Géorgien), moyen (⇒ Acadien), supérieur (⇒ Postdamien). || Le terrain cambrien, ou, n. m., le cambrien est un terrain sédimentaire. — La faune cambrienne ou faune primordiale.
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COMP. Antécambrien, éocambrien, infracambrien, précambrien.
Encyclopédie Universelle. 2012.