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SCIENCE-FICTION
SCIENCE-FICTION

L’«effet science-fiction» commence au niveau de la phrase. Ainsi Michel Jeury, dans Les Enfants de Mord , fait dire à l’un de ses personnages: «Vous devez savoir que Louis Catalina n’est pas mort. Enfin, il n’est plus mort.» Un autre ajoute un peu plus loin: «J’espère qu’il restera mort un bon bout de temps !». Enfin Catalina prend la parole: «Je connais cet homme. C’est un de ceux qui ont tenté de ... un de ceux qui m’ont tué !» Quelques pages encore, et l’on passe de la première à la deuxième personne: «Il y a au moins un million de morts ici. Sans vous compter!»

Ce que le lecteur est invité à éprouver ici, ce n’est pas seulement la surprise, c’est aussi la difficulté ou même l’impossibilité de venir à bout de la surprise en recourant aux opinions communément admises. L’auteur nous jette un défi et nous attendons qu’il le relève. C’est ce qui se produit généralement: le paradoxe initial donne le branle à une construction aventureuse, qui de chimère en chimère aboutit à résorber le paradoxe. La vraisemblance jetée à bas est finalement restaurée. L’effet de non-sens devient effet de sens. Le récit de science-fiction se déploie dans le temps d’un désarroi et aussi d’un jeu entre l’auteur, le texte et le lecteur.

La science-fiction relève de l’escamotage. Elle est moins un genre littéraire qu’un changement de genre perpétuellement renouvelé: au début, elle a l’air d’en appeler à l’illusion naïve, comme le conte merveilleux; à la fin elle requiert la croyance, comme le mythe ou la légende. 2001 est un mythe racontant comment l’humanité a commencé et comment elle finira; mais le film de Kubrick est l’exception qui confirme la règle. Dans la pratique, la science-fiction parle surtout du futur, soit sur le mode du conte, soit sur le mode mythique de la prophétie (et non sur le mode légendaire de l’oracle, qui est plutôt celui de la prospective): la science-fiction explore des possibles ou annonce la fin des temps, et, si elle vise le futur proche, c’est que la fin est proche ou ressentie comme telle.

De l’utopie au «meilleur des mondes»

Ce genre si manifestement moderne s’est cherché des ancêtres; il les a trouvés tantôt entre le mythe et la légende (Gilgamesh ), tantôt entre la légende et le conte (L’Odyssée ). Le thème du voyage dans la Lune est introduit par Lucien dans l’Histoire véritable (au titre programmatique, annonçant le mot science-fiction ) et repris au XVIIe siècle par Kepler, Godwin et Cyrano. Ce ne sont pas des terres de fantaisie mais des terres d’idéal que visitent les personnages de Thomas More (L’Utopie ), de Rabelais (Thélème), de Campanella (La Cité du Soleil ) et de Bacon (La Nouvelle Atlantide ): il s’agit bien de contes puisque ces pays ne sont nulle part (c’est le sens du mot utopie ), mais il ne s’y passe rien puisque tout va bien; l’auteur ne peut que les décrire avec tendresse, non sans allusions voilées à des contrées moins idéales et malheureusement moins irréelles. Écrivains et lecteurs sont des intellectuels un peu marginaux: Lucien plane sur les franges de la seconde sophistique, les œuvres du XVIe et du XVIIe siècle sont aux limites de l’humanisme et du libertinage; les textes sont souvent écrits en latin, ce qui situe le public.

Les récits en français et en anglais sont plus nettement satiriques et humoristiques: on le voit chez Rabelais et Cyrano, on le voit mieux encore dans le Gulliver de Swift et l’Eldorado de Voltaire. L’essor de la science fait de la pluralité des mondes habités un objet de croyance (Fontenelle, 1686); du coup Voltaire, encore lui, amène sur notre globe le premier visiteur extraterrestre en la personne de Micromégas et nous fait partager sa stupeur. Le public s’élargit et la science-fiction devient une arme politique: on le voit dans les utopies du XVIIIe et du XIXe siècle.

Une autre série commence avec le Frankenstein (1817) de Mary Shelley, le Docteur Jekyll (1886) de Stevenson, L’Ève future (1888) de Villiers de l’Isle-Adam et L’Île du docteur Moreau (1896) de Wells; la science n’est plus seulement une promesse de voyages et de lendemains qui chantent, elle peut bricoler les corps et mettre l’humain en péril. Du coup la science-fiction ne fait plus ni rêver ni rire, elle prend le relais du roman gothique et le conte recèle une menace de prophétie. La peur, partie du corps humain, se communique au corps social, et les anti-utopies apocalyptiques se multiplient: Wells encore (Quand le dormeur s’éveillera , 1899), Zamiatine (Nous autres , 1921), Huxley (Le Meilleur des mondes , 1952), Orwell (1984 , publié en 1949), Jünger (Heliopolis , 1949), Burgess (Orange mécanique , 1962), et bien d’autres.

On en vient à redouter la catastrophe cosmique: la panique provoquée aux États-Unis par l’adaptation radiophonique de La Guerre des mondes (1938), puis la première «apparition» de soucoupes volantes (1946) montrent que la catharsis n’a pas entièrement fonctionné. L’auteur prophétise, qu’il le veuille ou non, et il en tire son audience: Le Meilleur des mondes est le plus grand succès de librairie du XXe siècle.

Parallèlement, les technologies nouvelles envahissent la vie quotidienne; beaucoup de gens se persuadent que le futur est pour bientôt, et les enfants ne sont pas les derniers. Avec Jules Verne, la science-fiction devient un moyen de les préparer à l’imprévu dont la vie sera faite: les aventures du voyageur, puis celles de l’inventeur, puis celles du guerrier galactique sont à la fois les légendes de l’adolescence et les contes merveilleux de la maturité – merveilleuse étrangeté qui à l’occasion se réalise contre toute attente. Le genre est très productif; il se cherche un nom: Rosny parle de roman scientifique , Wells de scientific romance , Gernsback de scientifiction (1926) et de science fiction (1929). Aux États-Unis, les institutions se mettent en place: première revue spécialisée en 1926, premier fanzine en 1929, première anthologie en 1937, première convention «mondiale» des fans en 1939, premier prix annuel en 1953, première anthologie des meilleures nouvelles de l’année en 1956. La science-fiction, littérature de magazine, accède au livre dans les années quarante, mais les auteurs et les lecteurs se sentent complices et les conventions annuelles consacrent l’existence d’une fratrie, toujours solidaire contre le mépris des autres. La science-fiction n’est pas seulement un genre; c’est une subculture.

Une galaxie littéraire

Parallèlement, elle a beaucoup élargi ses perspectives et son registre littéraire. La génération des années trente (Jack Williamson, Catherine Moore, Stanley Weinbaum, John W. Campbell) a ouvert la voie à l’«âge d’or» de la revue Astounding (Robert Heinlein, Isaac Asimov, A. E. van Vogt, James Blish, Lester del Rey, Clifford Simak), mais ce sont les disciples de Lovecraft, héritiers lointains du gothique, qui lui confèrent ses lettres de noblesse littéraires (Robert Bloch, Henry Kuttner, Theodore Sturgeon, Fritz Leiber, Ray Bradbury). Les années cinquante sont celles du grand épanouissement: la revue Galaxy retrouve l’ironie de Swift et de Voltaire (Robert Sheckley, Fredric Brown, Kurt Vonnegut, Pohl et Kornbluth, William Tenn, Alfred Bester), mais la science-fiction devient capable d’exprimer aussi l’horreur froide (Richard Matheson, Damon Knight), la poésie (Philip José Farmer, Cordwainer Smith) la déréliction (Robert Silverberg) et la psychose (Philip K. Dick, Daniel Galouye). Même la deuxième génération d’Astounding (Jack Vance, Paul Anderson, Frank Herbert, Harry Harrison) est irriguée par ce supplément d’inspiration: Herbert bat tous les records de popularité avec Dune , le Guerre et paix de notre temps.

À ce stade, la science-fiction est sur le fil du rasoir. L’optimisme scientifique l’incite à croire que tout est possible: Campbell rêve de transformer la fratrie en technocratie occulte; van Vogt, Asimov et Heinlein, plus prudents, développeront respectivement une sagesse liée à la science, une œuvre de vulgarisation et des romans pour la jeunesse. Il s’agit là d’éducation, donc d’appel à la croyance: au milieu des années quarante, la science-fiction approche la dimension du mythe. Après la bombe d’Hiroshima, les limites de l’optimisme se dessinent. Dès lors, dans le récit de science-fiction, la joie de conter l’emporte: les personnages et l’écriture suivent comme l’intendance, la machine narrative gagne les batailles. C’est ce qui fait l’inimitable saveur du style Galaxy .

Le renouveau vient d’Angleterre. Après Wells, elle a connu, dans les années trente, une génération d’auteurs visionnaires (Olaf Stapledon, C. S. Lewis), mais les jeunes écrivains ont fait carrière dans les revues américaines (E. F. Russell, John Wyndham). La revue New Worlds (1946) cristallise une école nationale qui lance Arthur Clarke, John Brunner, Brian Aldiss, J. G. Ballard, Michael Moorcock: auteurs prospères (ils publient aussi aux États-Unis) mais culturellement plus marqués que leurs confrères américains par les cauchemars antiutopiques et les recherches d’écriture. New Worlds , sous la direction de Moorcock (1963), devient une revue d’avant-garde – y compris pour les auteurs américains – et préside aux débuts de Christopher Priest et de Ian Watson. La science-fiction anglaise reste une subculture, mais très ouverte aux courants littéraires contemporains.

Dans les années soixante, l’Amérique bascule à son tour sous l’influence de l’Angleterre et de l’effervescence radicale. Les auteurs se libèrent des revues, fondent une association (1965), décernent un prix à leur tour (1966); ils mettent le meilleur d’eux-mêmes dans des anthologies de textes originaux comme Dangereuses visions de Harlan Ellison (1967) et Orbit de Damon Knight (périodique). Le modèle du conte passe au second plan; ce qui prédomine, c’est la poésie (à cause de l’écriture expérimentale) et la prophétie, voire le millénarisme (à cause de la contestation). De très grands écrivains se révèlent (R. A. Lafferty, Ursula Le Guin, Thomas Disch, Roger Zelazny, Norman Spinrad, Gene Wolfe) et la science-fiction est enfin reconnue comme littérature: une association de chercheurs se fonde en 1970. Mais le public suit moins bien; sa faveur va aux héritiers d’Astounding pratiquant la «hard science» (Larry Niven, Gregory Benford) et à l’«heroic fantasy», déjà cultivée par Catherine Moore, Leiber, Vance, Farmer, Moorcock et Zelazny, dans laquelle la magie remplace la science comme alibi de l’aventure.

Frontières, non limites

La France est un cas à part. De 1860 à 1940, elle a été la vraie patrie de la science-fiction avec Jules Verne, J. H. Rosny aîné, Maurice Renard, Jacques Spitz et Régis Messac; René Barjavel, qui a continué le mouvement. La rupture intervient en 1950 avec la révélation de la science-fiction américaine; autour de la revue Fiction se constitue une école nationale marquée par les influences d’outre-Atlantique (Francis Carsac, Alain Dorémieux, Jacques Sternberg, Philippe Curval, Gérard Klein, Stefan Wul, Michel Demuth, André Ruellan). La France n’a rien à envier à l’Angleterre; ainsi le premier roman de science-fiction expérimental est Surface de la planète de Daniel Drode (1959). Mais les textes écrits en français ne franchissent pas l’Atlantique et beaucoup d’auteurs se découragent. C’est le mouvement contestataire qui, ici comme ailleurs, provoque une «Nouvelle Vague» (Daniel Walther, Pierre Pelot, Jean-Pierre Fontana, Jean-Pierre Andrevon, Jean-Pierre Hubert, Michel Jeury, Dominique Douay) et transforme la subculture en contre-culture. Mais les auteurs nationaux ne savent pas accompagner le reflux et, une fois de plus, la nouvelle demande d’imaginaire s’adresse aux textes américains; la génération de 1978, souvent brillante (Serge Brussolo), exprime avant tout le désespoir solitaire.

Le phénomène n’est pas unique: le Livre d’Or de la science-fiction allemande et le Livre d’Or de la science-fiction italienne montrent que les auteurs nationaux, parfois très doués (Herbert Franke en Allemagne, Lino Aldani en Italie), ont été encore plus radicalement victimes de la concurrence américaine et souvent menacés d’un repli sur les fanzines . Seuls les pays de l’Est échappèrent en partie à cette emprise culturelle: Stanislas Lem en Pologne, les frères Strougatski en U.R.S.S. sont parmi les plus grands écrivains du genre. Le Livre d’Or de la science-fiction soviétique réunit pour la première fois des écrivains officiels et des dissidents. Malentendu? Certes: en U.R.S.S. comme ailleurs, la science-fiction rassurait dans la mesure où elle apparaissait comme une forme nouvelle du conte merveilleux; quand il y avait message, celui-ci pouvait toujours se ramener à l’optimisme scientifique et à la critique de l’Amérique. On y chercha aussi une critique (voilée ou frontale) du régime; mais le plus étonnant fut d’y trouver de la science-fiction moderne de qualité et de se dire qu’après tout l’Atlantique n’est pas si large...

Cinéma et bande dessinée: quand le public s’exprime

La science-fiction reste surtout une littérature. Avec Buck Rogers , toutefois, elle est passée à la bande dessinée (1929) et au feuilleton radio (1932) en attendant les feuilletons télévisés comme The Outer Limits (1963) et Star Trek (1965). Partout prévaut le modèle du récit d’aventures pour adolescents, sauf en Angleterre, où, fidèle à la tradition, la télévision produit Quatermass (1953), Out of the Unknown (1965) et Le Prisonnier (1967).

Le cinéma est une tout autre affaire. Le film demande une grosse mise de fonds et l’adhésion de la fratrie ne suffit pas pour l’amortir; coûte que coûte, il faut s’adresser au grand public. De là les difficultés que le cinéma de science-fiction a eues à se constituer en genre malgré de nombreuses tentatives. Le Voyage dans la Lune de Méliés (1902) s’adresse au public des forains, qui demande de l’illusion, du merveilleux et des facéties: nous sommes dans l’univers du conte. Métropolis de Fritz Lang (1926) s’inscrit dans le courant de l’avant-garde et reflète l’utopie architecturale et l’anti-utopie littéraire: nous sommes dans l’univers de la prophétie. King Kong de Schoedsack et Cooper (1933) unit le thème de l’ogre – classique dans le conte et le cauchemar apocalyptique; à la même époque, Wells et Mary Shelley sont accommodés à la sauce gothique. Un peu plus tard, la série pour enfants (le serial ) passe de la radio et de la bande dessinée au cinéma; elle y restera quelques années. C’est le succès des romans pour la jeunesse de Heinlein qui emporte la décision: Destination Lune d’Irving Pichel (1950) est le vrai début d’un genre dont les moyens seront longtemps aussi restreints que le public; la hantise des soucoupes inspire des films prophétiques comme l’Invasion des profanateurs de sépultures de Don Siegel (1956). Enfin les gros budgets arrivent avec Planète interdite de Fred Wilcox, où les amateurs reconnaissent vraiment leur genre favori (1956), mais aussi avec les films à effets spéciaux de George Pal et les histoires de James Bond, où l’esprit du conte merveilleux l’emporte sur le souci de crédibilité. Il faut le crise de Cuba (1961) pour lancer la politique-fiction: Docteur Folamour de Kubrick (1963) et Fail Safe de Lumet (1964) résument la peur de la troisième guerre mondiale, l’un sur le mode comique, l’autre dans un registre hyperboliquement grave. La course à l’espace apparaît comme la conquête d’un nouveau terrain d’opérations: 2001 de Kubrick (1968), chef-d’œuvre du cinéma de science-fiction, reflète ce malaise.

Le grand public n’est pas touché immédiatement par la crise radicale qui secoue les campus. La nouvelle science-fiction touche d’abord le cinéma expérimental (Ice de Robert Kramer, 1969) et le film à petit budget (THX 1138 de George Lucas, 1969) avant d’atteindre Hollywood, où elle produit un space-opera écologiste (Silent Running de Douglas Trumbull, 1971), des antiutopies (Orange mécanique de Kubrick, 1971; Soleil vert de Fleischer, 1973) et surtout des films-catastrophes dont le meilleur (Phase IV de Saul Bass, 1973) relève trop nettement de la science-fiction pour être bien perçu comme «film-catastrophe». Au total, la grande inquiétude des années soixante n’a eu au cinéma qu’un écho tardif et discret. Au contraire, le retour du balancier a été rapide et d’autant plus massif que le public des salles américaines ne cesse de rajeunir: tous les records de recettes ont été battus depuis 1977 par George Lucas (La Guerre des étoiles , L’Empire contre-attaque , Le Retour du Jedi ) et Steven Spielberg (Rencontres du troisième type , E. T. ), le premier plus proche du conte, le second plus tenté par la prophétie. Le cinéma de science-fiction donne parfois l’impression d’avoir trente ans de retard sur la littérature correspondante.

Au contraire, la bande dessinée a partiellement échappé à son public enfantin. C’est là un phénomène spécifiquement français, amorcé dans les années soixante et marqué par l’apparition de revues comme Métal hurlant (1975). Des auteurs comme Jean-Claude Forest (Barbarella , 1962) Philippe Druillet (Lone Sloane , 1968 sqq ; La Nuit , 1977), Mézières et Christin (Valérian , 1970 sqq .), Jacques Tardi (Le Démon des glaces , 1974), Moebius (Major fatal , 1979), Enki Bilal (La Foire aux immortels , 1980 sqq .), Alex et Daniel Varenne (Ardeur , 1980 sqq .), Tamburini et Liberatore (Ranxerox , 1981 sqq .), Yves Chaland et Kazak (Adolphus Claar , 1983) sont parvenus à s’exprimer avec une liberté complète. Mythe ou conte? Le problème ne se pose guère: l’image est plus séduisante que le récit sauf quand celui-ci est l’œuvre d’un scénariste spécialisé; parfois la déconstruction débouche sur l’insolite et sur la poésie, en sorte que les limites de la science-fiction sont moins nettes en bande dessinée qu’ailleurs. Ici l’imprévu est favorisé par l’absence de toute hégémonie américaine: l’underground s’est peu intéressé à la science-fiction, il n’a guère influé sur l’édition industrielle et les États-Unis sont revenus au comic book , toujours anonyme quel que soit le talent des auteurs.

L’avenir de la science-fiction s’annonce plus cohérent que ce tableau ne pourrait le faire penser. Le genre pénètre des domaines qui, en principe lui sont étrangers, comme le rythme et le son. Les partitions des films ont peu à peu constitué une tradition de «musique de science-fiction», surtout quand le son électronique s’est mis de la partie (Planète interdite , 1956). Beaucoup de rockers se sont référés à la science-fiction dans les titres et dans les paroles de leurs chansons comme dans leur tenue vestimentaire et dans la mise en scène de leurs spectacles. La synthèse de tous ces courants a été faite dans les années soixante-dix par la «musique planante» allemande, qui associe la science-fiction à un climat sonore (Dune de Klaus Schulze, 1980).

Or la dernière génération aime à la fois le rock, la bande dessinée et la science-fiction, qui forment ensemble non plus une subculture ni une contre-culture mais une culture nouvelle. La demande de ce public, évidente pour qui lit des bandes dessinées, a été satisfaite au cinéma par Mad Max 2 (1981) de George Miller, où la science-fiction opère comme un rite d’initiation des jeunes par les jeunes. L’alliance d’un certain rythme et d’un type de récit étant trouvée, il manquait un troisième terme: l’imagerie, disponible uniquement dans la bande dessinée. Or le cinéma, grâce aux images de synthèse, est capable de combler son retard: Tron (1982) de Steven Lisberger l’a prouvé grâce à la collaboration de Moebius, de l’ordinateur et de la télévision à haute définition. Le petit écran peut obtenir le même résultat à moindres frais pour peu que la demande sociale soit prise en compte. Comment la littérature échapperait-elle à ce courant?

science-fiction [ sjɑ̃sfiksjɔ̃ ] n. f.
• v. 1950; de science et fiction, d'apr. l'angl. science fiction
Anglic. Genre littéraire qui fait intervenir le scientifiquement possible dans l'imaginaire romanesque. Livre, film de science-fiction. anticipation. Le fantastique et la science-fiction. Abrév. fam. (v. 1970) S. F. [ ɛsɛf ].

science-fiction, sciences-fictions nom féminin Genre littéraire et cinématographique qui invente des mondes, des sociétés et des êtres situés dans des espaces-temps fictifs (souvent futurs), impliquant des sciences, des technologies et des situations radicalement différentes.

science-fiction
n. f. (Anglicisme) Genre romanesque qui cherche à décrire une réalité à venir, en extrapolant à partir des données scientifiques du présent.

⇒SCIENCE-FICTION, subst. fém.
A. — Genre littéraire et cinématographique décrivant des situations et des événements appartenant à un avenir plus ou moins proche et à un univers imaginé en exploitant ou en extrapolant les données contemporaines et les développements envisageables des sciences et des techniques. Film, livre, roman de science-fiction; auteur de science-fiction. [La civilisation prochaine] ressemblera aux images des brochures où les gosses trouvent le moyen de satisfaire à bon compte ce besoin de poésie (de poésie poétique s'entend) par quoi le XXe siècle cherche, avec la science-fiction, à s'évader de la science réaliste du XIXe (COCTEAU, Poés. crit. II, 1960, p. 218). La guerre presse-bouton ne relève plus de la science-fiction ou des rêves d'audacieux états-majors (GOLDSCHMIDT, Avent. atom., 1962, p. 182).
P. méton., au sing. ou au plur. Œuvre relevant de ce genre. L'excellente comédie musicale de Richard O'Brien moquait à la fois les films d'épouvante ringards, les « science-fiction » à la Guy l'Éclair (Le Point, 19 avr. 1976, p. 23, col. 3).
B. — [Avec valeur caractérisante]
De science-fiction. Qui fait penser à la science-fiction, digne d'elle. Décor, univers de science-fiction. Le plus extraordinaire navire-laboratoire jamais construit pour les besoins civils (...). Navire de science-fiction, il sort des chantiers d'Aerojet (Le Nouvel Observateur, 17 mai 1967, p. 26, col. 1).
♦ [Avec valeur d'adj.] Politique science-fiction. Le L-2000 [un avion] est doté d'une aile fixe en double delta; s'il est moins éblouissant, moins « science-fiction » que son concurrent, il est d'une conception plus éprouvée (Le Nouvel Observateur, 15 juill. 1968, p. 22, col. 2).
Être de la science-fiction. Être irréel, impossible, appartenir seulement au domaine de l'imaginaire. Que l'Inde, dans 20 ans, puisse à coups d'explosions atomiques dévier le cours du Gange, pourquoi pas? Mais, dans l'immédiat, c'est de la science-fiction (Le Point, 17 mai 1974 ds GILB. 1980).
REM. S.F., abrév., synon. Un des premiers livres de S.F. importants, le Frankenstein de Mary Shelley, est un roman d'atmosphère et d'écriture fantastiques. Cette tendance a toujours existé, même aux beaux jours de la S.F. scientiste (ibid., 21 juill. 1978, ibid.).
Prononc. et Orth.:[]. Plur. inv. supra entre guillements les « science-fiction ». Étymol. et Hist. 1950 les sciences fictions américaines (Critique, n ° 43, 4e plat de la couverture ds QUEM. DDL t. 30); 1951 (ST. SPRIEL et B. VIAN, Un Nouv. genre littér.: la science fiction, in Les Temps modernes, oct., 618-627, cit. 619 ds HÖFLER Anglic.). Empr. à l'angl. science fiction, comp. de fiction « littérature d'imagination, romans » et de science « science », att. de manière isolée en 1851 (NED Suppl.2), puis répandu aux États-Unis par l'éd. H. Gernsback (éd. du magazine Amazing Stories 1928, v. Encyclop. Brit.).

science-fiction [sjɑ̃sfiksjɔ̃] n. f.
ÉTYM. V. 1950 (1951, Boris Vian, in Höfler); de science, et fiction, d'après l'angl. des États-Unis Science fiction, 1929, Hugo Gernsback, antérieurement scientifiction.
Anglicisme.
1 Genre narratif faisant intervenir des événements ou un univers imaginaires utilisant des données de la science ou de la technologie contemporaine en les extrapolant notamment par anticipation dans le temps ( Anticipation) ou en les modifiant. || Livre, film de science-fiction. || Le fantastique et la science-fiction (→ aussi Space opera).Abrév. fam. S.-F.
0 (…) eux (les personnages modernes) doués sans doute de pouvoirs, d'armes occultes, ou ultra-perfectionnées comme dans les romans de science-fiction, en tout cas invisibles et leur donnant le pouvoir, sans faire un geste ni proférer un mot, de se foudroyer à distance (…)
Claude Simon, le Vent, p. 216.
De science-fiction, digne des anticipations de la science-fiction. aussi le suffixe -fiction. || Un univers, un décor de science-fiction.
2 Fig. Ce que l'on considère comme impossible scientifiquement. || C'est de la science-fiction, ce que tu me racontes !

Encyclopédie Universelle. 2012.