I.
A.— [Lang. des enfants ou des adultes parlant à des enfants] Poule. Dans un clair rayon de boue, Fait la roue, — Plume et queue — une Cocotte Qui barbotte (T. CORBIÈRE, Les Amours jaunes, Après la pluie, 1873, p. 32).
1. P. ext.
a) Cocotte (en papier). Pliage représentant schématiquement une poule. Il ricanait sans raison, il faisait des cocottes en papier (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 94) :
• 1. Paris a mis entre leurs mains [des gens d'esprit des romans de Balzac] toutes les idées; ils polissonnent avec elles, à la façon des sceptiques et des enfants qui, volontiers, feraient des cocotes avec une Charte ou un Évangile.
TAINE, Nouv. Essais de crit. et d'hist., 1865, p. 53.
b) Les deux cocottes. Le chiffre 22, à cause de sa ressemblance très approximative avec deux poules qui se suivent. Le numéro de ma chambre d'hôtel : 22 « les deux cocottes » m'a rappelé Dumur (LÉAUTAUD, Journal littér., 2, 1907-09, p. 288; cf. aussi A. FRANCE, Le Petit Pierre, 1918, p. 145).
2. Emplois spéc. [P. réf. à l'aspect extérieur ou à certaines habitudes de la poule]
a) COUT. Feston ourlant un ouvrage et cranté à la manière d'une crête de poule. Sa combinaison blanche, ourlée au point cocotte (H. BAZIN, La Mort du petit cheval, 1949, p. 88).
b) MÉD., lang. fam. ou arg.
— Blépharite; blennoragie. L'ai-je eue assez de fois, la cocotte (Lemercier de Neuville ds LARCH. 1872, p. 98).
— MÉD. VÉTÉR. Fièvre aphteuse des bovidés. Ses bêtes ont la cocotte (RENARD, Journal, 1901, p. 687).
c) MUS. [P. réf. au cri de la poule] Suite de notes piquées dans le registre le plus haut (d'apr. Nouv. Lar. ill. Suppl. 1907). D'adroits chanteurs l'utilisent [le coup de glotte] (...) pour les « cocottes », pour les pizzicatti (A. WICART, Les Puissances vocales, Le Chanteur, t. 2, 1931, p. 228).
B.— P. anal.
1. [En constr. d'apostrophe] Terme d'affection que l'on donne à une petite fille ou à une femme aimée lorsqu'on s'adresse à elle :
• 2. Madeleine. — (...) nous avons eu bien du mal à ne pas éclater de rire; c'était à en faire craquer tous ses boutons. C'qu'ils s'en sont donné!!! Et des « Mon amour » et des « Ma p'tite cocotte en sucre » et des « Mon ange blond! »
J. LÉVY, Gosses de Paris, 1898, p. 55.
— Rare. Appellatif familier adressé à une jument. « Hue, cocotte! » Et Cocotte trottait d'un trot bien peu normal (PONCHON, La Muse au cabaret, Collignonne, 1920, p. 182).
2. Vieilli, péj. Femme de mœurs légères richement entretenue (cf. poule). Des désirs de cocotte (E. et J DE GONCOURT, Journal, 1874, p. 989) :
• 3. Je vieillis sans raison, Coco, entre des vaisselles et des torchons, alors que, comme tant d'autres, j'aurais dû utiliser mon brevet supérieur, et devenir une cocotte richement entretenue et prendre l'air dans un huit-ressorts sur le Prado.
MIOMANDRE, Écrit sur de l'eau, 1908, p. 147.
— Sentir, puer la cocotte. Sentir le parfum de mauvaise qualité dont usent les cocottes de bas étage (cf. cocot(t)er2) :
• 4. Chaque soir en rentrant, le fonctionnaire grommelait :
— Ça sent la cocotte, ici. Et, pour « purifier l'atmosphère », il ouvrait la fenêtre, bien que ce printemps fût pluvieux et froid.
MAURIAC, Destins, 1926, p. 43.
Rem. [En constr. d'appos. avec valeur d'adj.] Rare. Ce luxe cocotte (COLETTE, Claudine à Paris, 1901, p. 188).
Prononc. et Orth. :[]. Ac. 1932 : cocotte avec 2 t (cf. la majorité des dict.). Cocote ds LITTRÉ. Les 2 var. ds Lar. 19e-Pt Lar. 1906. Ds GUÉRIN 1892 et ds Lar. Lang. fr. on admet les 2 graph. pour le sens de « poule », mais une seule graph. pour le sens de « marmite », avec 1 t ds GUÉRIN, avec 2 t ds Lar. Lang. fr. Ds QUILLET 1965, au contraire, on admet 1 ou 2 t pour le sens de « marmite », 1 seul t pour le sens de « poule ». Le terme qui désigne une pomme de pin est écrit avec 1 t ds BÉL. 1957, Canada 1930 et l'ex. cité sous cocotte3; on le rencontre écrit avec 2 t ds PLAIS. 1969. Étymol. et Hist. 1. 1789 « femme de mœurs légères » (Cahier des plaintes et doléances, p. 16 ds SAIN. Lang. par., p. 260); 2. 1808 mot enfantin « poule » (HAUTEL); 3. 1808 terme affectif ma cocotte (ibid.); 4. 1842 « pliage représentant une poule » (BALZAC, Mémoires de deux jeunes mariées, p. 326). Mot expressif formé sur l'onomatopée imitant le cri de la poule et utilisé dans différentes acceptations selon un rapport direct avec le sens « poule » (p. ex. p. anal. de forme, p. allus. au cri, à l'aspect de la peau, à la forme de la crête de la poule, à des qualités ou défauts attribués à cet animal) ou à partir d'un autre sens (p. ex. p. allus. à la femme aux mœurs légères ou avec la valeur hypocoristique du terme). Bbg. MAT. Louis-Philippe 1951, p. 70-84.
II.
Vieilli. Petite marmite généralement en fonte, servant à mijoter les mets :
• Barque circulait, avec bonheur autour de la cuisinière de fonte qui meublait de sa masse chaude et respirante un côté de cette pièce.
— J'ai ajouté en douce une cocotte pour la soupe, me souffla-t-il. Il souleva le couvercle de la marmite.
BARBUSSE, Le Feu, 1916, p. 81.
♦ Cocotte-minute. Synon. autocuiseur.
— ART CULIN. [En constr. d'appos. avec valeur de compl. circonstanciel] Poulet cocotte. Cuit en cocotte. La poularde cocotte farcie, le ris de veau financière (ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, Verdun, 1938, p. 245). Un œuf cocotte à la crème (S. GUITRY, Le Veilleur de nuit, 1911, II, p. 12).
Prononc. et Orth. Cf. cocotte1. Étymol. et Hist. 1807 (MICHEL, Dict. des expr. vicieuses ds SAIN. Lang. par., p. 372). Issu, par substitution de suff., de cocasse, coquasse qui désigne différents récipients en m. fr. (1542 ds GAY) et dans les dial. du Morvan et de l'Yonne (FEW t. 2, p. 1456b), lui-même altération de coquemar; suff. -otte.
STAT. — Cocotte1 et 2. Fréq. abs. littér. :268. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 14, b) 452; XXe s. : a) 940, b) 319.
BBG. — SAIN. Sources t. 1 1972 [1925], p. 44, 47.
III.
• Quand le soleil haut avait suffisamment réchauffé l'air montagnard, tous deux marchaient par les sentiers étroits, la main dans la main. — Tiens, Adrien, assieds-toi là. Moi, je vais ramasser des « cocotes ». J'ai apporté mon grand sac. Cela sent si bon dans le feu.
RINGUET, Le Poids du jour, Montréal, éd. Variétés, 1949, p. 410.
Rem. Attesté ds Canada 1930, Forest. 1946, BÉL. 1957.
Prononc. et Orth. Cf. cocot(t)e1. Étymol. et Hist. 1886 (HAILLANT, Flore populaire des Vosges ds ROLL. Flore t. 11, p. 198). Terme régional peut-être issu de cocotte1 selon une métaphore animale assez courante dans la désignation de végétaux ou de partie de végétaux (cf. bœuf et cochon; FEW t. 2, p. 859b); il se rattacherait donc à l'onomatopée qui est à l'orig. de coq; mais on peut y voir un dér. de coque, par croisement entre les familles de coq et de coque (cf. aussi les appellations poule, poula et coque de la pomme de pin dans certaines régions, v. ROLL. Flore t. 11, p. 196 et 198).
Encyclopédie Universelle. 2012.